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La veuve
Koche.
H NOUVEAUX VOY
dans la Paroiiîe , promettoient d'y
iravailler. Mais comme je fouhaittois
•de faire au plûrôt mon jardin, tous
mes Paroiffiens fe taxèrent à me fournir
Son
hißoire.
chacun une quantité de palifliides
de bois lézard pour en faire la clâture,
qu'ils me promirent de me faire
apporter inceiTa-mment. Après que je
les eus remercié, je montai à cheval
avec lePere Dallez, 6c Adonfieur Michel
pour aller dîner chez une veuve
appellée Madame Roche, dont l'habitation
faifoit la féparation de ma ParoiiTe
d'avec celle de la bafle-poince.
Cette veuve âgée pour lors de foixante&
quinze ans, étoit une des premières
femmes qui fut veuve aux llles.
Elle étoit de Dieppe dont elle avoit
•confervé le patois, l'accent & les maniérés,
comme fi elle n'en fut jamais
ibrti. Son mari avoit été tué dans un
combat qui fe donna fur la montagne
::)ellée, entre les troupes du Roi & les
, labitans de la Cabeiferre, qui ne vou-
Joicnt point reconnoître l'autorité de
la Compagnie de i (5(Î4. qui .avoit achepté
la propriété des lûes. Il y avoit
; plus de trois mois que cette efpece de
bataille s'étoit donnée, fans qu'on fe
-fut mis en peine d'envoyer enterrer les
morts. Madame Roche voulut faire
•enterrei- le corps de fon mari à TEglife
du Macouba qui étoit fa Paroi (Te j elle
alla donc le chercher avec deux de fes
•Negres, croyant ne plus trouver que les
os, mais,étant bien fûre de ne s'y pas
tromper, parce qu'un de fes Negres
•<]u'e!Îe conduifoit avec elle, étoit avec
fon mari quand il fut blelTé, & l'a-
X'oit porté derrière un rocher à côté du
chemin oii il l'avoit laiiTé après qu'il
fut expiré. Elle fut étrangejnent fur-
A G É S AUX IS-LËS
prife de trouver le corps de fon mari
tout entier, auffi-bien que ceux des autres
habitans qui avoient été tuez au
même endroit. Il fiilloit que k froid
exceffif qui regue fur cette montagne
qui eil très-haute les eut confervez j
cela rendoit impoflible le tranfport du
corps, parce que les chemins étoient
trop efcarpez &trop étroits pour permettre
le paflage à deux hommes chargez
du même fardeau. Cet incident
auroit embarañe tout autre que Madame
Roche j mais comme elle étoit femme
d'esecution, elle fît couper le corps
de fon mari en morceaux, & fes deux
Negres ôc elle en ayant pris chacun
leur part, ils l'apportèrent au Macouba,
ou il fut enterré, & où elle ne manquoit
jamais de flure dire un Service tous
Jes ans. Je n'aurois pû me refoudre à
croire cette hiiloire, quoique tous les
vieux habitans me la certifiaiTent, û
cette bonne veuve ne me l'avoit comptée
avec une naïveté qui feule étoit
fuffiiante pour me convaincre de fa
vérité.
^ Le Pere Breton qui fe trouva à ce
dîner me mena avec mon Compagnon
fouper & coucher chez le fieur
Verrier; j'acceptai ce parti, parce que
je m'approchois toujours du Fort Saint
Pierre. J'avois avec moi outre mon
Negre, un autre Negre que Monfieur
Michel m'avoit prêté pour apporter
mon linge & quelques-autres chofes
dont j'avois befoin, en attendant que
la mer permit -d'y envoyer fon canot
jour apporter mon cofi're, mon lit ôc
es provifions de bouche que j'allois
demançier au Supérieur de nôtre Mifr
fion.
CHA-
169.«
F R A N C O I S E S DE L'AMERIQ^UE.
C H A P I T R E VI I I .
169J,
'•'^^ÎS
^t^age de VAuietirau Fort Royal Vefcription de la Fille & delaFortmjfe.
E Lundi premier jour de Mars s'il euil manqué d'armes dans faForteje
partis avant le jour de la reiTe, lui qui en avoit pour armer dix
fois plus de monde qu'il n'y en avoit dans
l'Ifle.
maifon du iieur Verrier, oij
j'avois couché, 6c j'arrivai
au Fort S. Pierre fur les neuf heures du
matin. J'y trouvai nôtre Supérieur Ge-
Je ne manquai pas de feliciter Monfieur
delà Heronniere del'heureufe iiTuë
neral qui me marqua beaucoup de fatisfac- de fon affaire, dontj'avois d'autantplus
tion de la bonne volonté que mes Paroif- lieu de me réjouir, que les obligations
fîens me témoignoient. J'allai voirMef- queje lui avoism'obligeoient de prendre
fieurs de Guitaut, de Cabaret 6c duMetz, part dans tout ce qui luiarrivoit.
êcMonfieur delàHeronniere,quivenoit Je chargeai le Negre de Monfieur f'wV»'-«
de terminer une très-groffe affaire qu'il. Michel de ce que je voulois envoyer en
avoitavec Monfieur le Comte de Blenac mon quartier, & je priai lePereCabalTon pourÎl-
Gouverneur General des Mfô, au fujet Supérieur de nôtre Miffion, de me prode
fix caiffesdefufilsqui nefetrouvoient curer les provifions de bouche dont j'a- ^oi-ts.
point dans le vaiiTeau, quoiqu'elles fuf- vois befoin. ^on""^
fent fur le mémoire du chargement.Com- Je fus enfuite retenir une place dans Royal.
me ce Seigneur étoit fort vif il mena- le canot d'un nommé Louis Galere, Neçoit
de faire le proc£s Monfieur de gre fibre qui faifoit le voyage du Fort S.
Pierre au Fort Royal, 6cqui revenoitle
même jour, moyennant un écu pour chacune
perfonne, ou fixécus pour tout le
canot : cette voiture efl commode, car
quoiqu'il n'y ait que feptlieuès par terre
k Heronniere qui avoit figné le receu
de ces fix caifles, mais qui foûtenoit
les avoir renvoyées à l'Arcenal de Rochefort,
parce qu'on n'avoit pû les lo-
^er dans le vaiiTeau, 6c que l'Ecrivain
Inhne dcvoit en avoir tiré le certificat. L'E- du FortS. Pierre au Fort Royal, le che-
^o,. min eft très-difficile 6c trés-incommode,
tout ce pays n'étant compofé que de montagnes
qu'il faut inceffamment monter
6c defcendre.
Il y avoit déjà deux ou trois ans que ce
Louis Galere avoit commencé à faire ces
voyages, 6c il s'en eil trouvé fi bien, encore
que d'autres l'ayent imité , qu'il
avoit quand je fuis parti plus de vingt.
Efclaves, trois ou quatre canots de voya- .
ge, 6c une feine pour la pêche j ce qui
méchan- crivain par une infigne malice nioit le
Ticti vaiiîeau ,
-v^m'de les Officiers mariniers 6c tous les MatelaLeire.
lots l'affirmaiTent. Mais heurcufement
ce méchant homme fut attaqué de la
maladie de Siam qui l'emporta en tréspeu
de jours, £c on trouva dans fes
papiers le receu de ces fix caiiTes d'armes
figné par le Garde magazin de
Rochefort. Il n'y avoit que deux ou
trois heures que Monfieur de la Heronniere
étoit revenu du FortRoyal, où il n'eft pas une pente fortune,
avoit porté ce receu à Monfieur de Ble- Le canot eft couvert d'une groiTe
nac, lequel parunebizareriequi lui étoit toile gaudronnée qui couvre l'endroit
aiTez ordinaire, lui faifoit un nouveau où fe mettent les pailagcrs. Il y a un
crime du renvoi de ces caifles, comme Negre qui gouverne, 6c quatre ou cinq
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