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28Z NOUV EAUX VOYAGES AUX ISLES
I6y4 élévation foûtienne le fil d'archal, dont
on lie toutes les cappes enfemble. Cette
élévation fe nomme la tête ou le crochet
de la cappe.
On aflemble les cappes l'une auprès de
l'autre autour de la tête de la forme, d'où
eil venu le nom de cappcr les formes,
comme qui diroit leur faire un cap ou une
tête ; on les lie fortement avec un fil d'archal
autour dubourlet qui forme la tête
de la forme, & on a pour cela une tenaille
ronde, avec laquelle on tortille les
deux bouts du fil pour les arrêter. On divife
enfuite toutes les queues des cappes
fur la convexité de la forme, Scparticulierement
fur les copeaux qu'on a placez
fur les fraftures, 6c on ferre les cappes ôc
les copeaux avec des cercles, qu'on met
en auffi grand nombre qu'il eft neceiTaire
jour les retenir .Quand la fra£ture eft vers
e fond de la forme, on fe contente d'une
demie cappe, c'eft-à-dire, que le crochet
de la cappe fe met à la moitié de la hauteur
de la forme, & pour lors on ne l'arrête
pas avec un fil d'archal, mais avec
un fimple cercle de liannej mais quand
il n'y aqu'unefimple fente ou felûre, on
fe contente d'y appliquer un copeau avcQ
des cercles. On fe fert de bois blanc pour
faire des copeaux, comme eft celui dont
on fait les douves des barriques, on les
- polit avec le couteau courbé, ou à deux
mains, & on le réduit à l'épaiiTeur d'une
piece de quinze fols.
Seconde La feconde chofe qu'il faut obferver à
"chf^va- l'égard des formes neuves,eft de les faire
îjontoa- tremper pendant deux ou trois jours dans
ehantlet YQ^ canotsremplis d'eau, ou l'on met le
jus des Cannes, les gros fîrops&les écumes,
pour les y faire fermenter, &pour
en faire enfuite de l'Eau-de-Vie. Cette
préparation eft fi neceflaire, que fi on la
négligé , le Sucre qui fe met dans les formes,
s'y attache ¿fortement, qu'il eft
impoÛîBle de l'en retirer (^ue par morceaux
, parce qu'il s'imbibe dans les pores
de la forme, qu'il trouve vuides; ce qui
n'arrive pas quand elle a trempé, parce
qu'ils fe trouvent pleins, & imbibez de
cette liqueur. Après cela on les lave bien
>our leur ôter l'odeur aigre & forte qu'eles
ont contraftée, & on les met tremper
dans l'eau douce pendant douze ou
quinze heures, avant que d'y mettre du
Sucre : ce qu'on obferve toutes les fois
qu'on y en met, quelques tems qu'elles
ayentfervi. On fait la même chofe aux
p6ts, & on a foin de les laver, & deiesrenverfer
la bouche en bas, après les avoir
lavez, chaque fois qu'on vuide le firop
qui étoit dedans. Les Rafineurs ne doivent
jamais manquer de mettre un cercle
autour du rebord de la bouche du potj
ce qui le conferve 8c l'empêche de s'éclater,
quand il eft chargé d'une forme pleine
de Sucre.
Les formes ordinaires de Bordeaux Capaàti
peuvent tenir trente à trente-cinq livres
de Sucre, qui étant blanchi 6c feché à
l'étuve fe réduit à vingt ou vingt-deux
livres. Les bâtardes en contiennent le
double} mais comme on ne s'en fert que
)our les Sucres de firop qui font bien plus
egers que le Sucre de Canne, on ne peut
pas déterminer au jufte ce qu'elles en contiennent,
quand ils font blanchis, parce
que cela dépend de l'habileté duRafineur
qui l'a travaillé, qui peut leur donner du
grain, du coi^s, 6c du poids à proportion
de fon fçavoir, comme nous le dirons ciaprès.
Les formes des Iflcs conriennent cinquante
à foixante livres de Sucre, qui
étant blanchi diminuëà proportion de fa
qualité.
On fe fert de lampes à deux lumignons Lmftf
dans toutes les Sucreries, 6c on y ufe in- ^
différemment de l'huile de poiilbn, ou de l^'rJ
Palma Chrifti. J'ai deja remarqué que ri«,
quoique cette dcrniere coûte davantage,
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F R A N C O I S E S DE L'AMERIQUE. ZSJ
neaux, font très-i6gC). il yavoitcependant plus de profita s'en peu de chofe : ils ne confervir,
tant parce qu'elle eft exemte des
boues 8c des ordures qui fe trouvent dans
l'huile depoiiTon, que parce qu'elle dure
davantage, 8c fait une lumiere plus vive
& plus claire, ce qu'on ne peut trop rechercher
dans une Sucrerie, où les fumées
des chaudières font épaiiTes, êcoù
l'on a grand beibin de lumiere pour cette
raifon, fur tout quand on travaille en Sucre
blanc. On met une lampe entre deux
chaudieres, outre celle du Rafineur qu'il
porte où il en eft befoin. Iln'eftpas neceflaire
d'avoir tant de lumiere dans les
Sucreries, oùl'onne travaille qu'en Sucre
brut.
L e Sucre brut fe porte du rafraichiiToir
dans des auges ou canots de bois, que l'oii
m'et à côté de l'efpace que j'ai dit qu'on
laiflè devant les chaudieres. Ces auges ou
canots fe font d'une feule piece de tel bois
que l'on veut, parce que n'étant pas expofez
àia pluye, il n'y a pas de danger
qu'ils fepourriiTent. C'eft dans ces canots
que le Sucre acheve de fe refroidir aflez
pour être mis dansles barriques. Et comme
on a befoin de couteaux pour le mouvoir
quand il eft dans les formes, on a
auiH befoin d'un inftrument plus fort
pour celui qui eft dans les canots > on fe
fert d'une pagalle un peu plus petite que
celle dont on fe fert pour nager en mer
dans les canots, pour le remuer d'un bout
à l'autre du canot avant que de le mettre
en barrique, afin que le grain, 6c le firop
ibient bien mêlez enfemble, que le grain
qui eft formé, fegroiïïiTe, ou qu'il aide
à celui qui ne l'eft pas encore.
On fe fert auffi de louchets de fer de
trois pieds de long, dont la pelle à quatre
pouces de large fur fix pouces de long,
pour grater 6c faire tomber le Sucre qui
s'attache en croûte aux bords du canot,
ce qui eft ordinairement le plus gros grain.
Les uftcnciles, dontonièfertauxfourc
»nm
de boit
qui ferment
de
rafrai-
MJfoirt
pour U
Suer*
kut.
Louchets
defer
leur ufafiftent
qu'en quelques perches, dont on
fe fert pour poufTer le bois dans le fond des
fourneaux, 8c pour l'y ranger commeil
doit être pour bien brûler, 6c pour jetter
beaucoup de fiâme; 6c d'un morceau
de fer, long de deux pieds ou environ,
dont un des bouts fait en douille, entre
dans une perche, 6c l'autre qui eft recourbé
8c plat de la largeur de deux pouces
, fert à retirer les charbons, ou à faire
tomber les cendres, qui demeurent fur
les grilles.
Les fourneaux font toujours couverts
d'un abavent en appentis, appuyé d'un
côté contre le mur de la Sucrerie j fur des
crampons de fer, qui l'en tiennent éloigné
d'un pied 8cdavantage, pour donner
paiTage à la fumée. L'autre côté eft porté
fur des poteaux de bois, ou fur des piliers
de maçonnerie ; fur lefquels on appuyé
lafabliere. Onfefertd'aiTeutesou detuilles
pour ces couvertures, 8c jamais d'ardoifes,
que la chaleur feroit éclater.
Voilà tout ce qu'on peut dire des Sucreries
8c de leurs uftenciles.
DES DIFFERENTES
efpeces de Sucre.
On peut compter dix fortes de Sucres
difterens. Il ne faut pas s'imaginer que j e
mette cette difterence, comme font les
Epiciers, les Droguiftes, ôc autres gens
qui en vendent, dans le poids, ou dans la
grandeur des formes, ou des pains, qu'on
va acheter chez eux. Ceux qui en parlent
ainfi, 8c qui fe donnent la peine d'en écrire,
font voir qu'ils font mal informez j Se
je dois charitablement les avertir qu'il eft .
mieux qu'ils le vendent en Marchands
Chrétiens, que d'en écrire la nature 8c
lesqualitez, comme afait unDroguifte
nommé Monfieûr Pomet, qui a compofé
un gros Volume in folio de la nature de
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