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124 NOUVEAUX VOY
1Î94. groflîlîent> de forte qu'une Echalotte
en produira douze ou quinze & quelquefois
vingt dans une feule touiFc} on
les levé quand la tige ett tout à fait
fanée. C'eft la marque qu'elles ont atteint
toute leur grolVeur & leur maturité.
On cultive de la même maniéré l'ail
& les oignons qui font venus de Madere
avec le même fuccès. Comme il y
avoit peu de tems qu'on avoit commencé
de cultiver les oignons de Madere
quand je fuis parti, je ne fçai iî
on. aura tenté de faire la mêmechofe
Çour ceux de France. Si on reuffit on
ôtera un profit coniîderable aux matelots
qui ne manquent jamais d'en apporter
une bonne quantité, étant feurs
de les vendre deux ou trois écusk cent
£c quelquefois davantage.
Le Cerfeiiil, la Pimprenelle & le
Perfil y viennent très-vite & très-bien.
Il faut feulement avoir foin, de les couper
fouvent de crainte qu'ils ne montent
en graine.
Le Pourpier vient naturellement dans
le pays j-on en trouve par tout daasles
bois, fans jamais y avoir été femé. J'ai
obiêrvé plufieurs fois que la premiere
herbe qui eft venue dans des terres
qu'on venoit de défricher, & qui conftamme.
nt ne l'avoient jamais été, étoit
le pourpier i. il y en a du commun & du
doré.
Les Raves les Panais, les Carottes,
les Cercifis & les Bette-raves y viennent
en.perfeélion , fur tout quand on
ième de la graine creolle, c'eft-i-dire,
née dans le pays. J'ai eu dans, mon jarÎTtrhts
fotagt-
din des Cai^ottes dont la ^ Trame
venue de. la nouvelle Angleterre, qui
ont pefé jiifqu'à quatre livres & demie
la piece j quand on les laiiTe dans la
marmite autant que la, viande, elles fe
fondait entieiement font, un potagç
A G E S . A U X ISLES
épais, jaune comme de la purée Se jîî,j
d'un très-bon goût, principalement
quand on y joint quelques racines de
perfil. On peut faire un autre mets des
mêmes Carottes : il faut pour cela les
retirer du pot quand elles font cuittes
fuffifamment, les laiiTer égouter & les
couper en rouelles ou en tranches, êc
après cela les faire frire comme des bignets,
ou les accommoder fur le rechaud
avec une fauce blanche ou avec
la moutarde.
r Les Poreaux fe cultivent de la même
maniéré que j'ai marqué qu'on cultivoit
les ciboules. A l'égard des Melons
de France ôc d'Efpagne, des Citrouilles
ou Giraumons, des Concombres,
.delàLaitue, de la Chicorée & des Pois
verds, j'avois foin de. n'en pas. manquer.
. On fçait la difficulté qu'il y a en Mik
France de trouver de bons Melons, & ¿'f'«
le péril où l'on s'expofe pour peu qu'on
en faiTe d'excès. Rien de femblablej,"
n'arrive aux Iflesj on les feme en quelque
tems que ce foit, toute forte de
terre y eft propre. Un petit troa fais
avec un bâton ou un coup de houë fuffit
pour ouvrit la terre, & recevoir
quatre ou cinq grains de femence qu'on
y laifle tomber. On arrofe fi le tems
eft fee, 6c voila toute la culture; & cependant
il eft auffi rare entre cent meonsd'en
trouver un mauvais, que d'en
trouver un bon entre cinquante en
France. Ils ont une odeur charmante,
un goût délicat & fin ,^une chair ferme,
une couleur qui réjoliit; & ce que j'ef- mif
time infiniment, c'eft qu'on en peut?"'/"
manger tant qu'on veut de jour Se de
nuit, feuls ou avec d'autres viandes,
en beuvant de l'eau ou du vin, fans
que jufqu'à prefent on ait oui dire que
quelqu'un en ait été incommodé. On
appelle Melons de France ceux dont k
chair.
Chmx
fommiz
:
Leur
tlilture.
F R A N C O I S E S D
chair eft rouge, 6c Melons d'Efpagne
ceux dont la chair eft blanchâtre tn'ant
fur le verd. Ce font ces derniers qu'on
appelle en Italie, Melons d'hyver, parce
qu'on les confervedans du fon pendant
prefque tout l'hyver. Cette précaution
eft inutileauxliles, on en a toute l'année
pourvû qu'on ait foin d'en femer
tous les mois aulïï-bien que les pois
verds.
Les Choux pommez viennent en perfeftion.
Il fuffit d'en avoir un feul pour
peupler en peu de tems tout un jardin,
parce que quand il eft coupé, fa tige
poufle beaucoup de rejettons. On es
arrache l'un après l'autre en déchirant
un peu l'écorce de la tige, on les met
en terre, 6c en quatre mois ils produifent
un très-beau choux 6c bienpommé.
La tige de ceux-cy en produit d'autres
fans qu'il foit jamais befoin d'en femer.
J'en avois bordé tout le tour de mon
jardin. Je ne fçai fi je me trompe, mais
du moins en cela je ne fuis pas feul, je
les ai trouvé meilleurs 6c plus tendres
qu'en France.
Quoique mon jardin fut petit ,• je ménageois
tellement mon terrein 6c la
culture de mes plantes, que j'avois
toûjours en abondance tout ce qu'on
peut fouhaitter en matiere de jardinage
; j'en donnois à tous venans, quoique
j'en confommaife beaucoup, aimant
E L'AM E R i a U E . . 125
coins de terre qu'on lèurlaiile, ils portent
naturellement les fruits £c les
herbages plus que la viande &.le poif^-
fon.
Bien qu'on ne puiiTe pas fouhaitter
une facilité pour faire des jardins plus
grande que celle que l'on trouve aux
lilesj il y a cependant très-peu d'habitans
qui s'en mettent en peine. Ils s'attachent
uniquement au travail de leur
habitation, 6c comptent fur les herba^
ges que les Negres cultivent fur les li^
zieres des bois ou dans quelques petits
ce qu'ils cultivent à leurs maîtres
6i à ceux qui en veulent acheter.
J'ai parlé jufqu'à prefent des herbes
potageres qui font venues d'Europe, en
voici trois efpcces qui jfont originaires
de r Amérique 6c de l'Afrique.
La premiere eft le Guingambo, elle
croît d'ordinaire de la hauteur de cinq
à fix pieds, fes feiitlles qui font grandes-,-
ridées, rudes8c découpées, reilemblenc
aflez à celle de la guimauve.
Sa fleur eft d'un blanc tirant un peu fur
le jaune 6c fans odeur particulière j c'eft
une efpece de cloche compfée de cinq
feuilles rondes à l'extrémité, de couleur
rougeâtrequi renferme unpiftil enferme
de cloud, avec de petites barbes ou
étamines de couleur jaune.
- Ce piftil fe change en un fruit de la
grofieur d'un oeuf moyen qui eft compofé
de plufieurs côtes. Il renferme
quantité de graines grifâtres de la groffeur
des petits pois de France. On fait
cuire ce fruit avecla viande j il eft aflez
bon quand il eft jeune, parce que pour
lors il eft tendre, mol, fe cuit aifément,
6c donne du goût au boiiillon, mais à
mefure qu'il meurit il devient dur, 6c
fi fort qu'il n'eft plus fupportable. A
quelque âge qu'on le prenne, il n'y a
gueres que des Negres,.des engagez 6c
de pauvres gens qui en ufent, aui'quels
il faut joindre nos filles 6c femmes creolles
qui mettent dans un ragoût qui leur
eft particulier 6c qu'on appelle Callarou,
toutes fortes d'hei bes, 6c fur tout les plus
mauvaifes 6c les plus dégoûtantes. Je
parlerai dans un autre endroit de ce ragoût
creolle.
Il y a deux efpeces de Guingambo
diftingi^ées feulement par leur • fruit.
La premiere eft celle que je viens de
décrire, (^ant à la feconde, elle porte
des fruits plus petits, plus ronds 6c
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