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114 NOUVEAUX VOYAGES AUX ISLES
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auroit pas eu de prudence à s'approcher
davantage} d'ailleurs il en fortoic de
tems en tems des tourbillons d'une fumée
noire, épaiiTe, fulphurée, mêlée
d'étincelles de feu, qui ne laiflbit pas
de nous incommoder quand le vent les
portoit du côté ou nous étions.
Petite II y a une autre bouche beaucoup
hoiuhe plus petite que la premiere , qui paroît
^^^^^ comme une voûte rainée. Il en forthrien.
toit groile fumée & beaucoup
d'étincelles. Tous les environs de ces
deux bouches étoient pleins de fentes
& de crevafTes qui rendoient beaucoup
de fumée. Ce qui marque que toute
cette montagne ell creufe 5c comme
une grande cave pleine de feu & de
fouffre qui fe confume peu à p eu, £c qui
à la fin fait afFaifer la voûte, &ycaufe
des crevaiTes 6c de nouvelles ouvertures.
Nous demeurâmes plus de deux heures
fur le Piton pour nous répoier, &
joiiir de fa belle vûë en dînant, nous y
plantâmes une perche de douze pieds
& plus de longueur que j'avois fait
apporter exprès avec une vieille toile
pour fervir de pavillon. Nous defcendîmcs
par le même endroit que nous
étions montez j on peut croire qu'il
n'y a point de chemins battus dans
tous ces quartiers-là r il iè paiîê bien
des années avant qu'on s'y aille promener,
Se aireurement la peine & les rifques
font trop grands. Nous ne laiffames
pas de nous approcher le plus
que nous pûmes de la grande bouche,
dont l'abord m'avoit paru moins dangereux
que celui de la petite. J'y fît
jctter par les plus forts de mes compagnons
les plus grofl'es pierres qu'ils
pûrent, mais contre tout ce qu'on m'avoit
dit, nous ne vîmes point augmenter
la fumée ni les étincelles. La ter-'
, re laifonnoit fous nos pifds -, Sc quand
on -k frappoit ávec un bátoñ, pref- ij ,
que comme fi nous avions été fur le
pont d'un vaifleau} Dès que nous rcmuyons
quelques grofles pierres, la
fumée fortoit auffi-tôt. Toutes ces
pierres font légères, 8c ffentent beaucouple
fouiFre. J'en fis apporter quelques
unes avec des morceaux de foliP.
fre, dont il auroic été facile de nouï
charger fi nous avions voulu. Quoique
nous fuiïïons alors dans la plu»
grande chaleur du jour , il faiioit un
air extrêmement frais fur le Piton. Je
croi qu'on auroit bien de 1» peine à
refifter au froid qu'il y doit faire pendant
la nuit,- Il y a des Negres qui
vont chercher du fouffre pour le vendre,
il faut le purifier avant de s'en fervir'
Ils prennent un autre chemin que celui
par lequel nous étions venus, nous le
cherchâmes & le fuivîmes quand nous
eûmes trouvé leur trace , & nous
trouvâmes qu'il étoit plus aifé que
le nôtre , quoiqu'il nous parût plus
long.
Nous defeendîmes donc par le côté
oppofé à celui par lequel nous étiens
montez. Environ à deux cení
pas plus bas que la bouche , nous
trouvâmes trois petites mares d'eau
très - chaude , éloignées de quatre à
cinq pas Tune de l'autre. La plus
grande pouvoir avoir une toife ou en-
Viron de diametre j éHe eft remplie/"!®
d'une eau fort brune, qui fent le fer,
ou plûtôt l'eau dans laquelle les ferruriers
& forgerons éteignant leur
fer.. La fécondé efl: blanchâtre & a le
goût d'alun. La troifiéme eil bleue,
& a le goût de vitriol. On dit qu'on
y a trouvé des morceaux confiderables
de ce minerai j je le veux croire,
mais nous n'en trouvâmes poirlt ; il
eft vrai que nous n'avions pas d'inftrumens
pour chercher, au fond. Faute
F R ^ ^ N Q O I S E S DE L'AMERIQ_UE. tif
tede ligne &;de perche je ne pus mefu- res calcinées, de cendres & de foufjer
la profondeur de ces mares elles
excedoient la longueur de nos bâtons.
Nous vîmes enfuite yne quantité de petites
fources d'eau, qui en s'uniiTant forment
plufieurs rivieres ou torretis. Une
f r e , §c le milieu 6c le bas que l'on
voit couverts d'une agreable verdure,
arrçfqSid'un^ infinité de ruilTeaux, &
cultivez avec tout le foin 8c toute
J'induftriç poffiblç. Nous arrivâmes
drces'rTvieres s'appelle la Riviere Blan- enfin à'!l'habitation des Religieyx de
che, parce qu'elle eft fouvent de cette la Charité. Le terrein eft petit, mais
couleur, à caufe descendres6c dufoufr excellçnt} ils travailloient à faire un
fre qui la couvrent. Elle fe jette dans la moulin à eau. Les Carmes ont le leur
riviere de S. Louis, 6c n'aide pas à la au deifous de celle-ey, leur terrein eft
rendre poiflbnneufe, parce que le fouf- plus grand, mais il manque abfolument
fre £c les cendres qu'elle y porte, font de bois a brûler. J'y trouvai un Reliroourir
le poiiTon. gieux qui fut fort furpris du voyage que
A mefure qu'on s'éloigne de ces ter- je venois de faire : il me prêta un cheres
brûlées en defcendant la monta- val pour me porter au Baillif. J'en avois
gne, on trouve le païs plus beau. On bien befoin, étant extrêmement fatigué,
voit de l'herbe 6c des arbres grands 6c ayant déchiré tous mes fouliers. Bien
& verds, il femble qu'on tombe dans en prit à mes compagnons d'être pieds
un autre monde , tant on trouve de nuds} car affurement ils n'en auroient
difference entre le fommet affreux de pas eu meilleur marché que moi. Je
cette montagne, tout couvert de pier- àis cependant très-content de ce voyage.
C H A P I T R E XX .
Des Mouches à miel, ér de leur cire. \Des Guefpes y rêmede a leur f i
queure. Des Mouches luifantes. Des großes Mouches cornues. Des Tàiom,
Des Agoutis y & des Cochons marons.
A neceffité oii je me trouvois
fouvent de faire abbattre
des arbres qui fe rencon-^
troient dans la trace du canal
auquel je faifoistravaiHer,m'a
donné occafion de veir plufieurs chofes
que je ne fçavois que fur le rap-
Aillis port d'autrui. J'avois entendu parler
du miel 6c de la cire de la Guadelou-
'm(t!' pS} fans en rien fçsvoir de particulier}
car il n'y a point d'abeilles à la Martinique
, 6c d'ailleurs je n'étois pas encore
aflez agueri avec les ferpens pour
examiner les bois comme je faifois à
la Guadeloupe où il n'y a point de
ces fortes d'animaux dangereux. Voici
ce que j'ai remarqué des abeilles, de
leur miel 6c de leur cire. Elles font
de moitié plus petites que celles d'Europe
j elles font plus noires 6c pluy
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