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 M 2  NOUVEAUX  VOY  
 pour  peu  qu'il  ait  plû,  fans  compter  la  
 riviere de  Sainte  Marie  qui  change  très- 
 .fouventde  lit,  &  qui  par  confcquent  
 eft  fort  dangereijfe,  ou  quand  eJlea  été  
 débordée,  ou  quand  la mer  cil  plus  grof- 
 Pun  ¿ife  qu'à  l'ordinaire.  Le  port  de  a Trini t é  
 i l é â l a ^  un  grand  enfoncement  qui  foi me  
 Caief.  longue  pointe,  appellée  la  pointe  
 terre  ¿«.de la Caravel  e ,  qui a plus  de deux  lieues  
 /^|/«r- deIong,  Cette  longue  pointe  le.couvre  
 'i'"-  du  côt é du  Sudeft ,  l'autre  eft  fermé  par  
 ,un morneaiTezhaut,  &  d'environ  jj-q.  à  
 .400.  pas  de  longueur,  qui  ne  tient  à  
 "  la terre  ferme  de  l'Iile  que  par  uniftme  
 ou  langue  de  terre  de  3f.  340.  toifes  
 de  largeur.  Le  côté  de  l'Eft  oppofé  
 au  fond  du  . gol f e  ^  fermé  par  une  
 chaîne  ,de  rochers  ou  récifs  qui  paroif- 
 .fcnt  à  fleur  d'eau  quand  la merjeft^baiTe,  
 fur  lefquels  on  pourroit  faire  quelque  
 redoute  ou  batterie  fermée.  Je  dis  
 quand  U  mer  eft  baflej  car  n'.en  déplaife  
 à  certains  Philofophes  qui  prétendent  
 qu'il  n'y  a  point  de  flux  ni  de  
 reflux  entre  les  deux  tropiques,  ou  du  
 pioins  qu'il  y  eft  prefqu'imperceptible,  
 ils  fe  trompent  très-fort.  Le  flux  ordinaire! 
   la  Martinique  &  à  la  Guadeloupe  
 va  à  quinze  ou  dix-huit  pouces  de  
 hauteur, &  dans les lîzigices,  c'eft-à-dire,  
 dans  les  nouvelles  &  pleines  lunes,  il  
 pafle  de  beaucoup  deux  pied.  L'entrée  
 du  poi t  eft à  l'Oueft  de  ces  récifs  entre  
 e,ux &  la pointe du  morne.  .Cette  px)inte  
 eft  plus  bafle  que  le  refte,  &  naturellement  
 arrondie  &  platte  comme  pour  y  
 placer une  batterie  très-propre  pour  deffendre  
 l'eniree  du  port,  puifque  les  
 yaifleaux  qui  veulent  y  entrer,  font  obligez  
 d'en  paffer  à  la  portée  du  piftolet. 
   On  a  mis  dans  la  fuite quelques  canons  
 furcettepointe.  
 C'cftfurcette  éminencequ'étoit  bâtie  
 la  maifon Curiale  du  Pere  Martelly  dans  
 A G E S A U X I S L E S  |  
 pour  la  vûë,  mais ,trop  éloignée  de  l'E-  ,5'  
 glife &  du B our g ,  Se  environnée  des  ba-  1  
 raques  d'une  Compagnie  de  Soldats  qui  '  
 étoient  inceflamment  dans  ia  cuifine  &  [  
 autour  de  iii  maifon,  où  ils  déroboient  |  
 tout  ce  qui  pouvoit  tomber  fous leurs  l  
 mains,  avec  d'autant  moins  de  retenue  
 que  les  Officiers  les  foûtenoient,  afin  1  
 d'obliger  le  Curé  d'aller  chercher  une  i  
 maifon  dans  le  Bourg,  &  de  leur  abandonner  
 Pml  
 la  fienne,  comme.on  a été  enfin  
 contraint de  faire.  
 ^ .Le Bourg de la T r ini té  n'étoitcompefé  
 dans  cexems-là  que d'environ  foixan- ^""¡i  
 ^  à  quatre-.vingt  maiibns,  partie  de  ¡ f j  
 bois,  &  partie de  roieaux,  couvertes  de  c»!  
 saille,  bâties  toutes  fur  une ligne  cour-  "m  
 K ,  quifuivoit  la  figure  du  golfe  ou  du  
 port.  L'Eglife  qui  n'étoit  que  de  bois  
 d'une  grandeur  médiocre,  etoit  ,dans  le  
 milieu  de  l'enfoncement.  Ce  Bourg  s'eft  
 beaucoup  augmenté,  parce  que la  quantité  
 confiderable  de  cacao,  de  fucre,  de  
 coton  &c.  que  l'on  fabrique  dans  ces  
 quartiers-là,  &  fur  tout  au gros  morne,  
 y  .ont  attiré bon  nombre  de  Marchands,  
 ^  quantité  de  vaifleaux^  particulièrement  
 de  .ceux  de  Nantes,  qui  y  font  
 fleurir  le  commerce,  &  qui  trouvent  un  
 débit  aflyré .& prompt de  toutes les  marchandifes  
 qu'ils  y  apportent  d'Europe,  
 parce  que  tous  les  quartiers des  environs  
 qui  font  extrêmement  peuplez,  aimeat  
 mieuxachcpter  leur  neceflaire  à  cet  endroit 
 là  voifin  de  chez  eux,  que  de  le  
 fiire  venir  de  la  bafle  terre.  D'ailleurs  Jvm  
 les  vaifleauxy  .ont  cet  avantage  d'y  être  
 ^n  r.ir.  ..  j  " 'vaif  
 îlai/of  
 Curiale  
 di  la  
 Trmaé,  uiie  iïcuation  charmante  pour  l'air  &  
 en  feureté  pendant  la  faifon  des  ourar  
 gans,  parce  que  le  port  eft  uès-kux,qâm  
 bien  clos,  le  fond  d'une  tenue  admira-.^?«»"  
 ble,  &  qup  partant  de  ce  port  pour  retourner  
 en  Europe,  ils  fe  trouvent  au^"^'  
 vent  de  toutes  les  Ifles,  &  s'épargnent  
 plus de trois cens  lieiies  de chemin  qu'ils  
 feroient  obligé  de  faire  pour  aller  chercher  
 F R A N C O i S Ë S  D  
 cher  le  débouquement^ ordinaire  de  S.  
 Domingue  ou  de  Portvic.  
 •  LaParoiiîe  de  la  Trinité  comprenoit  
 pour  lors  tout  le  refte  de  la  Cabefterre,  
 ôc nôtre jurifdiélion fpirituelle  s'étendoit  
 depuis  la  riviere  fallée  qui  la  fepare  de  
 ce  ledeSte  Marie,  jufqu'à  la  pointe des  
 Salines,  ce  qui faitplus  de quinze  lieiies  
 de  païs.  Il  eft  vrai  que  le  païs  au  de  là  
 du Cul-de-fac François,  étoitencore  peu  
 habité,  mais  un Curé  a  autant  de  peine  
 pour allervoir un malade  à  quinze  lieiies  
 de  fa  maifon  que  pour  en  voir  dix.  La  
 difficulté  de  fervir  comme  il  falloit  des  
 endroits fi é loignez ,  a obligé  le  Gouverneur  
 General  6c  l'Intendant  d'établir  
 deux autres Paroifles,  l'une  au  culde  fac  
 Robert,  Se l'autre au cul de fac  François,  
 comme  je  le  dirai  ci-après.  On  parloit  
 même  quand  je  fuis parti  des  Ifles  d'en  
 ctablir  une  au  gros  morne,  parce  que  
 ces  quartiers-là  ie  peuplent  tous  les  
 jours.  
 Je  fis  connoiiTance  avec  le  Procureur  
 du  Roi  de  l'Ifle  de  Marie-galante,  qui  
 s'étoit  retiré  dans  ce  Bourg  après  que  
 les  Anglois  fe  furent  emparez  de  cette  
 Ifle;il exerçoit  l'Office  dcNotaireRoyal ,  
 très-honnête homme,  d'une grande  droiture, 
   d'une  vie  exemplaire,  il  étoit  de  
 Langon  au deftlis  de Bordeaux,  5c  s'appelloitVivens. 
   
 Après  que  ÎÎOUS  eûmes  dîné  chez  le  
 Pere  Martelli,  Se  vifité  le  Bourg  Scies  
 environs  du  Port,  nous retournâmes  au  
 fond  S.Jacques  oii  nous arrivâmes  aflez  
 tard.  
 L e  lendemain matin je fus avec  le  Pere  
 Breton  travailler  à  l'accommodement  
 des Damoifelles  Raffin 8c  laPommeraye,  
 &  nous  les  prêchâmes  fi  bien  toutes  
 &eux,  Se particulièrement  la  Damoifelle  
 Raffin  qui  avoit  plus  tort  que  l'autre  ,  
 que  nous la fîmes  confentir  à  venir  chez  
 ia  Damoifelle  Pommeraye  lui  faire  ex- 
 Tom.  I.  
 E  L ' AME R I Q U E .  n?  
 cufe,  Se  lui  demander  fon  amitié.  Dès  
 que  nous  l'eûmes  réduite  à  ce  point-là,  
 j e  laiffai  le  Pere  Breton  avec  elle,  6c  j e  
 retournai  chez  la Damoifelle  la  Pommeraye  
 ,  à qui  je  dis que  la Damoifelle  Raffin  
 étoit  bien  fâchée  de  tout  ce  qui  s'etoit  
 pafle  entr'elles,  qu'elle  étoit  refoluë  
 de lui  en  venir  faire  fes excufes auflîtôt  
 que  je  l'envoyerois  avertir  qu'elle  
 pouvoit  venir,  Scqu'elle  feroit  bienreçûe  
 J  elle  me  remercia  beaucoup  de  la  
 peine  que  je  m'étois  donnée.  Se me  dit  
 que  quoiqu'elle  fut  l'oiFcnfée,  Se  plus  
 vieille  que  la  Damoifelle  Raffin  ,  qui  
 par tous ces endroits  devoit  faire  les  premières  
 démarches,  elle  vouloit  lui  donner  
 des marques de  fa  fatisfadion  Se  de  la  
 bonne  intelligence  qu'elle  vouloit  renouer  
 en  allant  la  trouver  chez elle i  Se  
 aufli-tôt  appellant  fon  fils  Sc  une  de  fes  
 filles  pour  l'accompagner,  elle  me  pria  
 d'y  venir  aufli  fans  envoyer  mon  Negre  
 pour  l'avertir.  J'y  confentis  avec  joyej  
 mais  quand  nous  eûmes  fait  quelques  
 pas,  je  fis  figne  à  mon  Negre  d'y  aller.  
 Cet  avis  fit  auffi-tôt  partir  la  Damoifelle  
 Raffin  avec  un  de  fes  enfaiis  Sc  le  Pere  
 Breton.  Nous  nous  rencontrâmes  bientôt. 
   Ces  deux  femmes  firent  plus  que  
 nous  nefouhaitions  d'elles.  Aprèss'être  
 embraflees,  la Damoifelle Raflin  fejetta  
 aux  pieds  de  l'autre  pour  lui  demander  
 pardon,  la  Damoifelle  la  Pommeraye  fe  
 mit  aufli àgenoux,  en  cettepoftureelles  
 fe demandèrent  pardon.  Se  feproTiirent  
 une  amitié  éternelle.  Le  fieur  Gabriel  
 Raffin  nous  ayant joint  dans  ces  entrefaites, 
   pria Mademoifelle la  Pommeraye  
 dediner  chez  lui,  nous  fûmes  de  la  partie, 
   Scie  lendemain  nous  fûmes  priez  
 chez  Mademoifelle  de  la Pommeraye  avec  
 le  fieur  Raffin Se toute fii f imi l l e ,  Se  
 Dieu  a tellement  beni  cet  accommod(  - 
 ment  qu'elles  ont  toûjours  bien  vécu  
 enfemble.  
 P  Ce t t e  
 1694.  
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