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loô- NOUVEAUX VOYAGES AUX ÍSLES
i(î94. Lézard à la même qualité que celle des
Viperes. Si on en ufe fréquemment, elle
purge, elledéfedieSc fubtilife lefang.
Moniîeur Michel me donna un jour
le plaiiirde la chaiîe du Lézard. Nous
y fûmes accompagnez d'un Negre qui
portoitune longue perche, au bout de
laquelle il y avoit une petite corde accommodée
en noeud coulant, qu'on appelle
aux Illes un Caboya, Après avoir
beaucoup cherché, le Negr e en découvrit
enfin un qui étoit étendu tout de
fon long fur une branche feche qui fe
chauffoit au foleil. Auiïï-tôt le Negre
fe mit à iîiHer, à quoi le Lézard prenoit
tant de plaiiîr, qu'il avançoit la
téte comme pour découvrir d'oii venoit
le fon. Peu à peu le Negr e s'approcha
de lui toujours en fifflant, 6c commença
à lui chatouiller les côrez, 8c enfuite
la gorge avec le bout delà gaule. 11
fembloit que le Lézard y prenoit plailÎTi
car il s'ctendoit en fe tournant
• doucement, comme un Chat qui eft
devant le feu en hyver ; il fçeu-t enfin
fi bien le chatoiiiller & l'endormir ,
pour ainfi dire avec fon fiiHement, qu'il
lui fit avancer la tête hors de la branche,
fuffifamment pour lui paiTer le caboya
dans le cou, & auffi-tôt il lui don-
na une vigoureufc fecouil'e, qui le fit ift, i^.,
tomber à terre. Dans l'inftant qu'il y fut ^
6c avant qu'il pût fe reconnoitre, le Negre
le faifit de la main droite à l'endroit
où la queue joint le corps, & lui
mit le pied gauche fur le milieu du
corps. C'étoit un plaifir de voir comme
le Lézard ouvroit la gueule, remuoit
des yeux étincelans, & gonfloit
le deiTous de fa gorge comme un Cof
d'Inde} mais pendant ce tems-là le Negre
lui mit le pied droit où il avoit k
main, & lui prît les deux pieds de derrière
qu'il lui renverfa fur le dos, &
les y lia enfemble avec des aiguillettgsdemahotdont
ils'étoit pourvû : il fit la.
mêmechofe aux pieds de devant , après
quoiil fiepaflér le bout de la queue entre
les pieds liez & le dos du Lézard, & l'y
attacha en deux endroits. Il fit enfuite a^-
vec des liannes refendues une efpece de
petit licol qu'il lui mit fur le mufeau attaché
en quatre endroits, de maniere
qu'il ne pouvoir ouvrir la gueule ni remuer
C H A P I T R E XI I I .
UAuUur va demeurer dans fa maifon Curiale.
Nfin le Samedi troifiéme Avril
M, Michel qui m'avoit
toûjours tenu chez lui , Se
traitté avec toute la génér
rofité poffible, confentit que je fulTe
m'établir dans ma maifon Curiale., Il
y avoit fait porter à dîner, il m'y vint
accompagner & dîner avec moi. L'après
midi il m'envoya deux de ces grof-,
fcs bouteilles, qu'on appelle des Da-^
mes Jeannnes, quicontenoient chacune
douze à treize pots, remplies de vin
de Madere 6c une de vin de Canarie
avec un baril de farine de Manioc pour
mon Negre, & du pain pour trois ou;
quatre jours, en attendant que j'en euiTe
ftit faire. Son époufe me fitprefenten
même tems de deux nappes avec une douzaine
de fervicttes & un iort bel hamacq-
L e lendemain jour des Rameaux je
&
la queue ni les pattes.
Nous en prîmes deux de cette maniere,
qui me donnèrent beaucoup de
plaifir. Gilles peut garder fept ou huit
jours en vie> e feul rifque qu'il y a,,
c'eft qu'ils maigriflént un peu.
L ' A M E R I Q . U E . i@7
L e Vendredi je prêchai la Paiîion,
& fis le relie de l'Office du matin. Après
celui du foir on m'amena les adultes
F R A N C O I S E S DE
fis les fonftions ordinaires de ce jour.
Te confeflai quelques perfonnes qui
voulurent faireleursPâques,& je priai . . , ,, , . ,
toutes les perfonnes libres de tacherde que j^avois juge capable de recevoir le
Stisfaire à leur devoir Pafchal pendant Bapteme. J'achevai de les y difpofer.
la Semaine Sainte, afin que je puife - . .Le Saraedi-Samt après la benedic-
lion des Fonds je baptilai trente - huit
adultes, hommes ou femmes, après
employer la fuivante à les faire faire
aux Negres. Je retins à dîner M. Michel
& fix ou fept autres que je traittai
quoi j'exhortai leurs maîtres qui leur
fervoient pour la plûpart de Pareins.,
de continuer à les former dans le Çhripart
à leurs dépens, car ils m'avoient tous
envoyé du poiiTonj & mes Paroifficns. , , o , .
ont toûiours eu tant de bonté pour moi, ftiamfme par leurs paroles & par leurs
flu'ils n'ont jamais manqué de me faire exemples, & d'avoir fom fur toutes
rlinfes de
de ce qu'ils prenoient à la challe
«u à la pêche, ou de ce qu'ils tuoient
chez eux.
Le Lundi je fus dire la MeiTe chez
M. Michel pour faire faire les Pâques
à fon époufe, qui étoit fur le point
d'accoucher, & à un de fesvoifins nommé
le fieur Parmentier que l'on apporta
dans un hamacq.
Le Mardi, le Mercredi & le Jeudi ,
je confeffai prefque tous mes Paroiffiens,
ceux mêmes qui avoient comclîofes
me les envoyer au Chatéchifrne
pour les rendre capables des autres
Sacremens. On fçait que les cérémonies
de ce jour font longues, ôc fur tout
celle du Baptême des adultes} 6c com-
,me c'étoit a^premiere fois que je l'a-
.vois faite, il étoit tard quaaid je fortis
de l'Eglife, fort las & fort épuifé.
Le Dimanche onzième Avril jour
de Pâques j'achevai de confeiTer & de
communier les perfonnes libres de ma
ParoiiTe. On m'avertit que la coûiunift
munié le Dimanche &c les jours précé- de toutes les ParoiiTes étoit que le Curé
• - donnât la paix à baifer à fes Paroifliens
aux Fêtes principales ôc les premiers Dimanches
de chaque mois, 6c qu'il reçût
comme une offrande ce qu'il lui
ilens, vinrent fe réconcilier le Jeudi
afin de communier en plus grand nombre.
Je leur fis une exhortation avant
la Communion, après laquelle nous
portâmes le Saint Sacrement dans une
prefentoient : je le fçavois bien, mais
des Chapelles qu'on avoit parée très- j'avois négligé d proprement ôc avec beaucoup de lu- e le mettre en pratimières.
J e priai les principaux de venir dîner
avec moi : pour avoir plus de place dans
que, de peur qu'on ne crût qu'il y avoit
quelques raifons d'intérêt qui m'y
engageoient} je me rendis à l'ufage établi.
Après la Prédication & l'offertoire
ma petite maifon j'en avois fait ôter mon je fis l'offrande, 6c j'eus lieu d'être iuilit.
LePere Breton s'y trouva 6c le fieur de la libéralité dermes Paroifliens.
DauvillemonMarguillier fechargea du Je fis enfuite les miennesà mon Sacriffoin
du repas qui fe paiîii avec toute la
mqdeftie que doivent avoir des gens
qui vetioient de faire leurs Pâques.
Nous chantâmes enfuite les Tenebres,
8c on fe partagea les heures de la nuit
pour veiller devant le Saint Sacrement.
tain 8c à mes Clercs. Je retins à diner les
Officiers du quartier avec quelques-uns
des principaux. Après dîner nous chantâmes
les Vêpres. J'aurois bien voulu
les pouvoir chanter tous, les Dimanches
j mais (iprès avoir bien examiné la
O 2, chofe.
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