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 240-  NOUVEAUX  VOY  
 libre  a  tout  le monde,  le  chemin  pour  
 y  aller  doit  l'être  auffij je  penfai  à  un  
 autre  expedient.  Je  fis  épier  quand  il  
 feioit  paflë  un  bon  nombre  de  chaffeurs, 
   &  je mis  enembufcade  une  trentaine  
 de  nos  Negres  le  long  du  bois  
 dans  un  paliflge efcarpé,  qu'on  appelle  
 le  détroit,  & j e  me  poftai  au  commencement  
 des  cannes  à  l'heure  que  les  
 chaiTeurs  devoient  revenir  de  la  montagne. 
   J'avois  donné  ordre  aux  Negres  
 embufquez  de  ne  fe  point  découvrir  
 que  quand  ils  entendroient  le  fignal  
 q u e j e  leur  en  donnerois  par  un  coup  
 de  fifflet,  &  de  fortir alors  &  de  prendre  
 les  chafieurs  qu'ils  trouveroient  
 devant  eux,  en  prenant  fur  tout  bien  
 garde  qu'il  n'en  échapât  aucun.  Les  
 premiers  qui  fortirent  du  bois  ne  s'épouvanterent  
 pas  me  voyant  tout  feul.  
 J'en  appellai  deux  qui  vinrent  à  moi  ,  
 defquels  aïant  apris  le  nombre  des  
 chaiîîéurs,  & qu'ils  fe fuivoient tous à la  
 file,  jefifflai, &  auffi-tot mes  gens  embufquez  
 parurent & en  prirent  dix-huit.  
 J e  les  interrogeai  en  particulier  les  uns  
 après  les  autres}  ils  le  convainquirent  
 tous  les uns les autres  d'avoir  dérobé  des  
 cannes  plufieurs  fois,  &  d'être  entrez  
 dans  le milieu  des  pieces,  afin  que  leur  
 larcin  fut  plus  caché,  pour  réparation  
 de  quoi je  leur  fis  diflribuer  à  chacun  
 cinquante  à  foixante  coups  de  foixet,  
 avec  confifcation  des  diables  pour  les  
 frais  de  la jullice.  Cette  execution  fit  
 grand  bruit  dans  le  quartier.  Les  maîtres  
 des  Negres  fe  plaignirent  que  je  
 voulois  empêcher  la  chaiTe  des  diables  
 en  empêchant  ainfi  le  paflage  pour  aller  
 à  la montagne.  Ils  demandoient  la  
 reilitution  des  diables confifquez,  puifque  
 j'avois  faitfoiieter  leurs  Negres,  8c  
 que  je  ne  m'oppofaiTe  plus  à  l'avantage  
 que  l'on retiroit  de  cette  chaiTe.  Le  
 Gouverneur  à qui ils  avoient  porté  leur  
 AGES  AUX  JSLE  S  
 plainte,  Se. qui  étoit  du  , nombre  des  ¡rmí  
 mterelTez,  parce  que  deux  de  fes  Ne-  '  
 gres  avoient  été  de  celui  des  fuftigez,  
 m'en  parla  d'une  maniere  à  me  faire  
 croire  qu'il  trouvoit  fort juftes  les  demandes  
 des  plaignans.  Je  le  priai  de  
 fe  fouyenir  des  plaintes  que  je  lui  
 avois  faites  plufieurs  fois  des  defordrej  
 de  ces  chafléurs :  &  comme  je  vis  qu'il  
 infiiloit  beaucoup  fur  la  liberté  de  la  
 chaiîè  qu'il  fembloit  que  je  voulois  
 ôter,  je  luirépondisquecen'étoitpoint  
 du  tout  mon  deiTein}  que  le  paiTage  
 feroit  toûjours  ouvert  ,  &  les  foiiets  
 toûjours  préparez  pour  ceux  qui  endommageroient  
 les  cannes j  &  qu'à  l'égard  
 de  la  reilitution  des  diables,  je  
 croyois n'y point être obligé,  parce qu'il  
 y  avoit  deux  chofes  dans  le  peché,  la  
 coulpe&la  peine,  aufquelles j'avois  remedié  
 par la confifcation &  par  les coups  
 de  foiiet.  L'affaire fe pafla ainfi  en  raillerie, 
   &  les Negres  cherchèrent  un autre  
 chemin  pour  aller  à la chaiTe aux diables: 
   ainfi  ils  conferverent  nos  cannes,  
 &  m'épargnerent  la  peine  de  les  faire  
 foiieter.  Je  reviens  à mon  fujet.  
 Lorfque  les  cannes  font bien  entrete-  ^mi  
 nues, elles durent fans avoir befoin d'être '^f""'  
 replantées,  felon que le terrein eft bon &  
 profond.  Celles qui  font  dans  des  terres  canmi,  
 maigres,  ufées &  de  peu de profondeur,  
 veulent  être  replantées  après  la  fécondé  
 coupe j  car  d'attendre  a  latroifiéme,  
 on  n'y  trouveroit  pas  fon  compte  ,  
 ce  ne  feroit  que  de  petits  rejettons  grillez  
 ,  pleins  de  noeuds,  &  prefque  fans  
 fuc.  
 Les  terres  neuves,  graiTes  &  fortes  
 fourniflent  abondamment  de  la  nourriture  
 aux  fouches,  &  les  entretiennent  
 pendant  quinze  &  vingt  ans  &  plus,  
 fans qu'on  s'apperçoive  d'aucune  diminution, 
   ni  dans  l'abondance,  ni  dans  
 la  boyté,.ni  dans  la  grandeur,  ni  dans  
 la  
 V P R A N C O I S E S  DE  L'AMERICLUE.  241  
 la grofleur  des rejettons :  au  contraire,  on  dit  qu'elles  font  en  fleche,  ou  qu'elplus  
 les fouches  vieilliflent,  plus  elles  les ont  fléché,  quand  elles  ontaftuelles'etendent,& 
 conduifentplûtôt leurs re-  ment  leur j e t ,  ou  quand  cejetefl:  tomjettons  
 à  une  parfaite  maturité,  pourvû  bé de  lui-niême  après  avoir  fleuri,  
 qu'on  ait  foin  de  rechaufler  les  fouches,•  Cette  fleur  n'eft autre  chofe qu'un  paquand  
 à force d'être  coupées,  &d'avoir  nache  de  petits  filets,  dont les  extrêmiproduit, 
   elles fe trouvent beaucoup hors  tez  font  garnies  d'un  petit  duvet  gris  Se  
 nés.  
 de  terre,  ou  lorfque  quelque  arvalaiTe  blanchâtre,  quis'épanoiiiiTent,  Se font  
 deau,  ou  auelane  aurrp  arrirl^nr  o  comme un houpe  renverfée.  Depuisque  
 la  fleur  a commencé  à fortir de la  Canne  
 dégradées.  
 appelle  rechaufler,  mettre  de  la  jufqu'à ce qu'elle tombe,  il  fe paiTe  dix- 
 'rlhMf-  rapportée  au  tour  des  fouches  qui  huit à vingt  jours ; 1/=»  frr\Mtr/»nr  A  Ji  ^  -i  t^    td  a*n s ^le  s dernie•r s  def- i  [<r.  fe  trouvent  découvertes,  aprèsenavoir  
 coupé les endroits  que  l'on voit  fe gâter.  
 Se  fe  pourrir,  de  crainte  que  la  pourriture  
 ne fe communique au refte de la fouche. 
   
 J'ai dit  ci-devant qu'on  étoit obligé de  
 quels  le bout  de  la  Canne qui  a  produit  
 la  fleche,  fe feche, Se la  fleche  ne  recevant  
 plus de nourriture,  fe détache Se tombe  à  
 terre,  SelaCanne  ceiTe  de  croître  Se  de,  
 groflir. Jamais une même Canne ne  fleurit  
 deux fois.  Si on ne  la coupe pas  un  mois  
 ^planter  les  chemins,  où le  paffage des  ou  deux  après  qu'elle  a  fléché,  elle s'a- 
 Cabrouets  a  fait  mourir  les  Cannes,  Se  baifle  peu  à  peu,  Se enfin fe  couche par  
 J ai  taitvoirladifficultéqu'il  yaà  repeu-  terre,  otijettant des  filets  qui  prennent  
 pler  ces  endroits.  Le  remede  que j'ai  racine, elle pouflè une grande quantité  de  
 apporté à cela,  a été de faire arracher des  
 touffes.  Se  des  fouches  toutes  entieres  
 aux  bords des pièces.  Se de  les  faire  enterrer  
 dans  les  lieux  où  il  en  manquoit  
 dans ces fortes de chemins j  il eft certain,  
 que  ces  fouches  reprennent  plusvîte,Se  
 rejettons.  Avant  que la  Cannepoufle fa  
 fleche.  Se environ  un mois après qu'elle a  
 fleché,  elle  a très-peu de fuc, fon milieu  
 eft creux, parce que toute la fubftance qui  
 gonfloit fes  fibres,  étant montée en  haut  
 pour produire  la  fleche  Se la  fleur,  les  fi- 
 ^garniffent les endroits qui étoientgâtez,  bres  fe  font  raprochées  les  unes  des  auce  
 que  1 on  mettoit du plan où l'on avoit  très.  Se ont  laiffévuide la  place qu'elles  
 occupoient  lorfqu'ellesétoient  pleines de  
 fuc.  Les  Cannes  en  cet  état  ne  valent  
 rien,  Sc  on ne  doit pas fonger  à les couper^ 
   ni pour fùire du Sucre,  ni pour  faire  
 arraché  les  fouches,  bien  feur  qu'il  reprendroit  
 aifément,  parce  qu'il  nepouvoit  
 pas  être  étouffé par  les Cannes  qui  
 ne  rentouroi^nt  pas  de  tous  côtez.  ,  p^ui  ntucuu  outre,  m  pour  ra.re  
 Kn^ud  louteslesCannes qui fe trouvent âgées  du Plant,  ni même  pour faire de  l'Eau- 
 S r  7  parce qu'étant  alors prefque  fefe^ 
 nf.  des  pilles  arrive,  ne  manquent  jamais  ches,  elles n'om  ni le fuc neceffaire pour  
 K  de poufler a leur fommetunjet d'environ  produire du  Sucre,  ni  pour  pouffer  des  
 n-ois pieds de long.  LesRofeaux  fontla  rejettons,  nipourcommuniquer  à l'Eau  
 meme choCc j  mais  comme  leur matiere  la douceur  Se la force qui  la faffe fermenei  
 plus dure que  celle des Cannes,  leurs  ter  pour  produire  l'Efprit  qui  compofe  
 J^fsfontaulfi  plus  durs,  Se  plus  forts.  l'Eau-de-W  
 Ç  eft  de  ces  jets-ci,  dont  les  Sauvages  Lorfque les Cannes font meures,  Se en Cimiont  
 leurs  Fléchés.  On  appelle auffi  fle-  état  d'être  coupées,  on  difpofe les Neehes  
 les jets  que  pouffent les Cannes,  Sc  gres  Se les  Negreffes le long  de  la  pièce  
 ï  ^  que  Cannes,  
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