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 iP4  NOUVEAUX  VÔY  
 tre,  6c dont les extrémitez  font recourbéesen  
 dehors.  Ce bouton fe change enfin  
 en  un  fruit  de  la  groiTeur  d'un  pois  
 ovale,  plus gros à un  bout  qu'à  l'autre,  
 & applati  par les deux côtez.  Ce fruit eft  
 verd  au  commencement,  il jaunit  dans  
 la  fuite,  6c  devient  rouge  quand  il  eft  
 meur.  Il  eft  couvert  d'une  petite  peau  
 mince 6c  cotonnée.  Sa chair  eft rouge j  
 molle 6c pleine d'une liqueur aigre, auffibien  
 que  fon bois,  fesfeuilles 6cfes  racines. 
   Cette  liaiine  exhale une odeur force  
 qui  furprend  d'abord  l'odorat,  6c  qui  
 augmente  quand  on  froiiTe  ou  »qu'on  
 pile  la  racine,  le  bois,  les  feuilles 6c  le  
 fruit.  
 Le  bois eft gris-blanc,  tirant  un  peu  
 fur le jaune,  marqueté  de  petits  points  
 blancs  6c  argentez,  fpongieux,  plein  
 de  fuc,  aflez  pefant  quand  il  eft  verd  ,  
 Se très-leger  lorfqu'il eftfec,  ce  qui  arrive  
 affez  facilement.  
 ' On pile la racine Se le bois de cette ] i anne, 
   &  on en fait  une  tifanne  avec  deux  
 tiers d'eau-de-vie que l'on  fait  prendre  à  
 celui  qui  a  éré mordu  d'un  ferpent,  6c  
 on  applique  le marc  fur la  bleiTure.  Le  
 marc  attire le  venin  dehors,  6c-la tifanne  
 a la vertu d'empêcher qu'il  ne  gagne  
 & qu*il ne corrompe  les parties  nobles.  
 On  prétend  que  la  tiianne  faite  avec  
 la racine  feule 6c de Peau commune,  eft  
 admirable  pour  la  gravelle  ,  6c  même  
 pour  la  pierre.  
 Voici encore un autre  remede  pour  la  
 h'itlTfe  des  ferpens.  .  C'eft  une  lianne  
 '  qu'on  appelle Laitcufe,  6c qu'il  ne  faut  
 pas  confondre  avec le bois  laiteux  dont  
 j'ai  parlé  ci-devant.  
 Cette  plante  eft iî foible  qu'elle  ramperoit  
 toujours  à terre,  G elle  netrouvoit  
 pas  des  arbres  pour  s'élever  6c  fe  
 foutenir.  Dès  qu'elle  en  rencontre  elle  
 s'y  attache  6c monte  jufqu'à  leur  fommet  
 'jelle  s'étend beaucoup, 6c lorfqu'el- 
 A G E S  AUX  ISLES  
 le trouvé une  bonne  terre  elle  profite à  
 merveille.  Son  écorce  eft grife,  tailladée, 
   liife ôc même  un  peu  luftrée.  On  
 pourroit  dire qu'elle eft revêtue  de deux  
 écorces.  La premiere  qui  eft la fuperficie  
 de ces découpures ou hachures, eft feche  
 6c grofliere,  6c celle qui  eft au deffous  
 eft  fine  6c douce j  le  bois  eft  poreux, 
   rempli  d'un  fiic  épais,  vifqueux  
 6c blanc comme du  lait,  en  quelque  endroit  
 qu'on  le  rompe,  il  répand  ce lait  
 en abondance.  Ses feuilles qui font aifez  
 épaiiTcs,  d'un  verd  guai,  deux  fois £c  
 demi  plus  longues  que  larges  6c  pointues, 
   en  font  toutes  remplies.  Il fiiffit  
 Jour l'en  faire  fortir, de les détacher  de  
 a  plante,  de  les  rompre  ou  feulement  
 de  les  égratigner.  
 On  voit  dans  la faifon de  petits  bouquets  
 de  fleurs  qui  fortent  d'entre-les  
 feuilles.  Ces  fleurs  font compofées de  
 cinq  feuilles,  dont  ledefllisôcledeiTous  
 eft  rouge  avec  des  points  de  plufieurs  
 couleurs,  qui répandent  une odeur  aromatique  
 fort douce 6c fort agréable.  Ces  
 fleurs  produifent  à  la  fin  un  petit  fruit  
 ovale,  dont  l'écorce  ou  enveloppe  eft  
 rouge  6c feche,  qui  s'ouvre  de  lui-même  
 quand  il  eft meur,  6c qui  renferme  
 plufieurs petites  graines  oblongues aflez  
 dures,  d'un  gris  luftré, 6c revêtues d'un  
 petit  duvet  blanc  argenté.  
 Ceux  qui ont  été mordus d'un ferpent  
 fuccent  le  lait  de  cette  plante,  bois  6c  
 feuilles  tout  eft  bon,  6c après  avoir  un  
 peu  ratiiTé la  premiere  écorce,  ils  mâchent  
 la  fécondé  avec  le  bois  pour  appliquer  
 le marc en  maniéré  de  cataplafme  
 fur  la  morfure  qu'il  faut-avoir  loin  
 de  fcarifier legerement. : Ce  marc  attire  
 lè  venin  que  l'on  voit  comme  u»e  matière  
 vérdâ tre  6c virulente  fur  le  cataplafme  
 quand  on  le levé pour  en  mettre  
 un autre,  cequ'il faut faire de  fixen  fix*  
 heures j  obfervant  que  ce  foit lé blèffé  
 qui  
 F R A N C O I S E S  D,E  L'AMERIQ^UE.  ip j  
 qui mâche  J'écorce  ôc Iç bpis  dont  il eft  qu'on  peut apporter aux movfures de ces  
 compofé.  On  fait encore  avec  le  même  fortes  de  ferpens,  dont  le  venin  eft  fi  
 K^Jc l«frf>rf>mpnf nil^.  nnp  fircnn> rlnnf  pujlTanE 6C fi, vif,bois  legerement  pilé,une  tifanne  dont    qu'il  tuëen  moinS  dc  
 on  lui  donne  à  boire  à  difcrétion.  
 J'ai  remarqué  que  tous  les  remedes  
 qu'on  applique  fur  les morfures des  ferpens, 
   peuvent être  employez  pour guérir  
 les ulcérés  de  quelque  nature  qu'ils  
 foient.  On  prétend  que  le  fuc de  cette  
 lianne eft  fouverain  pour  ces  fortes  de  
 maux.  
 Les deux dernieres liannes  que je viens  
 de décrire ont leurs partifans.  Quelquesuns  
 préfèrent  la feconde à  la  premiere,  
 6cne manquent  pas de  raifons pour  foutenir  
 leur  opinion,  que  les autres  combattent  
 puiflamment.  Comme  je  n'ai  
 point  acheté  aux Ecoles  dc  Medecinele  
 droitdejugerbienoumalde  toutes  chofes, 
   je  me garderai bien  de rien  décider  
 fur cette  difpute ;  6c en  attendant  qu'ils  
 s'accordent,  je  vais  décrire  un  arbre  
 dont  le  fruit  guérit  parfaitement  les  _  
 aàdi  morfures  des  ferpens  les  plus  dange-  L'écorce eft grife,  aflez unie.  Le  bois,  
 firfîsr. j-eux;  8c dont  lavertun'eftconteftéede  du moins ce que j'en  ai  pû  voir  en  couperfonne. 
  J'en puis parler comme témoin  pant  une  branche  médiocre,  m'a  paru  
 oculaire,  m'en  étant  fervi  pour  guérir  delà même couleur,  aflêz tendre  8c méunNegre  
 de nôtre habitation de la Mar-  diocrcment  humide j  il  eft  fort  brantinique, 
   qui  avoit  été  mordu  à  la jam-  chu,  6c  fort  chargé  de  feuilles.  Elles  
 be par  un ferpent très-gros.  L'arbre  qui  font  comme  des  ovales  allongez  avec  
 porte  ces fruits vient  de l'Ifthme  de Da-  une  petite  pointe  6c  plufieurs  hachures  
 rien.  On  trouve  dans cet  endroit-là des  ou  dents  à l'extrémité.  Ces feuilles font  
 ferpens extrêmement  venimeux,  qu'on  aflez  épaiiTes,  charnues,  fouples,  d'un  
 appelle  ferpens  à  fonnecte,  parce qu'ils  verd  gai j  elles  rendent  un  peu  de  lient  
 au  bas de la queue  une  peau  roulée,  queur  onétueufe  quand  on  les  froiiTe  ,  
 feche comme un parchemin,  qui  fait du  d'une odeur aromatique,  mais  pénetranbruit  
 pour  peu  qu'ils  fe remuent,  ce qui  te.  Cet  arbre  dans les faifons poufle  de  
 fert  à les  faire découvrir.  Nonobftant  petits  fcions  qui  fe  chargent  de  fleurs  
 cet  avertiflement,  plufieurs Flibuftiers  rougeâtres,  compofées  de  cinq  petites  
 qui traverfoient  cet Ifthme pour  gagner  feuilles veloutées  avec  quelques  étamila  
 mer du Sud où ils alloient faire la cour-  nés autour  d'un  petit  bouton  verd,  qui  
 fe,  furent  mordus  par  ces  ferpens,  &  fe change  en  une  amande  à  peu près  de  
 feroient  péris infailliblement,  fi  les In-  la groflèur  de  nos  plus  belles  amandes  
 diens  qui  les  accompagnoient  ne  leur  de Provence.  Cette écorce renferme une  
 cuiTent fait connoître  le  remede  unique  noix  ovale  pointue  6c  mince  par  les  
 C e  i  deux  
 i6ç6.  
 trois  ou  quatre  heures  ceux qui  en  font  
 infeétez.  
 Je  ne  fçai  pas  comment  les  Indiens  
 appellent  cet arbre,  ni  fî  le - Pere  Plumier  
 ou  quelque  autre  Botanifte  l'a  
 baptifé  ôc  enrôlé  dans  quelque  regiment  
 d'arbres,  fupofez de même  efpece.  
 Pour  nous  autres  qui  ne  cherchons  pas  
 tant  de  façons,  fans nous embarafler du  
 nom  de  l'arbre,  nous  nous  contentons  
 d'appeller fon fruit  noix de ferpent.  On  
 feroit peut-être  bien  mieux  de  les  ap- 
 Jeller amandes de  ferpent.  On verra par  
 a  fuite de mon  difcours fi j'ai  raifon  ou  
 non.  
 Je  n'ai  vû  à  la Martinique  que  deux  
 ou trois arbres  de  cette  efpece,  dont  les  
 graines  avoient  été  apportées  par  nos  
 Flibuftiers.  Ils étoient  à  peu  près  de  la  
 grandeur  de  nos  abricotiers  de  France*  
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