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 î i  NOUVEAUX  VOYAGES  AUX'ISLES  
 fe  décharger  de  ce foin  fur moi  depuis  
 que j'avoisrecouvré mafanté,  l'heure du  
 Bréviaire,  de la leçon de Géométrie, & la  
 lefture nous entretenoient jufqu'à laPriérc  
 commune.  On  fe promenoit  pendant  
 le  fouper  de l'Equipage,  nous  foupions  
 enfuice,  puis  on joiioit  aux  échecs,  ou  
 bien nous allions fur le gaillard voir danfer  
 les Matelots.  C'étoitainfî  que  nous  pallions  
 le temps jufqu'à la  Priéi-e  qu'on fait  
 avant  de  changer  le  quart,  après  quoi  
 quand  nôtre  Capitaine  n'étoit  point  de  
 quart nous allions nous repoferj car quand  
 i  le  faifoit nous  lui  tenions  compagnie  
 pendant une couple d'heures qui n'étoient  
 pas mal  employées,  6c  toûjours  accompagnées  
 de  chocolat  ou  d'autres  chofes  
 femblables.  
 LeVendredijourde  Noël,IeP.Hollei  
 dit  la MeiTe de Minuit,  Monfieur  de  la  
 Heronniere,  tous  ceux  de  la  chambre,  
 beaucoup de Matelots & Paiî'agers y communièrent, 
   après  quoi  il y eut un  grand  
 fort  décida  que  ce feroit lui.  Il  eut  pour  1695,  
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 dejeuner. Je dis la MeiTe du point du jour,  
 monCompagnon la dit après moi, &  l'Aumônier  
 fut  refervé  pour  la  grande  que  
 nous  chantâmes  avec  prefque  autant  de  
 folennité que dans une Cathédrale. Je  prêchai  
 après Vêpres.  Nous nous étions partagés  
 entre nous trois paiTagers lesFêtesSc  
 les Dimanches  afin de prêcher tour à  tour  
 pour foulager l'Aumônier, &  exercer nôtre  
 miniilere.  
 Nos Pilotes trouvèrent parleur  hauteur  
 que  nous  étions  fous le tropique  du Cancer. 
   La  folennité  du jourfit remettre  au  
 lendemain la cérémonie du Baptême.  
 ^.ifièmi  On  la fit le Samedi  après midi.  Nôtre  
 jiMsk  premier  Pilote  grotefquement  habillé  
 avec  u ne grande épée de bois à la main,  &  
 une  carre marine  devant  lui,  environné  
 de  douze  ou  quinze  de  fes Officiers ajufics  
 comme  lui,  nous  envoya  fommer  de  
 comparoltredevant  fon Tribunal.  Après  
 bien  des cérémonies,  entre le P.  Holley  
 &  moi,  à  qui  pafleroit  le  premier,  le  
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 param Monfieur de la Heronniere.  A près  
 qu'il fut  de  retour  on  me vint  chercher.  
 Le  Capitaine  voulut  encore  être  mon  
 parain.  Je trouvai le Pilote  avec  fon  cortege  
 affis fur une efpece de thrône  couvert  
 de  peaux  de moutons j  il  avoit  fes Officiers  
 a fes côtez,  8c particulièrement  fon  
 Secretaire qui enregiftroit  lespréfens  que  
 l'on  faifoit  après  avoir  été  baptizé.  Il  y  
 avoit  devant  lui  une  grande  cuve  pleine  
 d'eau  de mer  avec  une  pince  de  fer  appuyée  
 fur les bords :  ce fut fur cette  pince  
 qu'on me  fit  afleoirj  &  après  m'avoir  
 fait mettre la main fur la carte marine  que  
 le Pilote tenoit,  on  me  fit  promettre  de  
 faire  executer  cette  cérémonie  de  tout  
 mon  pouvoir  à ceux  qui  paiTeroient  le  
 n-opique une autre fois avec moi.  Quand  
 j'eus  fait  la  promeiTe,  le  Pilote  fe  leva  
 gravement ,  &  demanda  à  mon  parain  
 quel  nom  il  vouloir  me  donner.  Je  fus  
 nommé  le  Prefcheur.  C'eft  un  rocher  
 qui  reprefente un Prédicateur  en  chaire,  
 qui en a donné  le nom  à  un  quartier  confidérable  
 de la Martinique.  Alors  le Pilote  
 s'approcha  de moi,  il  prit  de  l'eau  
 dans une  taiTe  d'argent,  &  m'en mit  au  
 front  avec  le  bout  du  doigt,  après  quoi  
 s'étantremisfurfon thrône,  il me demanda  
 ce que je donnerois  à la compagnie.  Je  
 donnai  trois  écus  pour  mon  compagnon  
 &  pour  moi,  avec  un  barillet  d'environ  
 fix pots d'eau-dc-viedont je m'étois  pourvu  
 à la Rochelle pour cette occafion.  On  
 me  ramena en cérémonie  fur  le gaillard..  
 Mon  compagnon  fut conduit enfuite,  le  
 Lieutenant  lui  fcrvoit  de  parain,  on  le  
 traita comme on m'avoit traité,  &  on  le  
 ramena  avec  la même  civilité.  
 L'Ecrivain  qui devoit  paifer après  nous,  
 faifoit tous fes cfFoits pour s'en  exempter,  
 comme  il  s'éroit  exempté  de  jetter  à  la  
 mer  les  clefs  de  fa  cavej  mais  il  fallut  
 marcher.  LefieurKercoue  CapitaineFlibuftier  
 qui pafibit avec nous,  lut fon  parain. 
   
 }  
 F R A N C O I S E S  D  
 i<5cj3,  rain.  Il  vit  bienq u'il  alloit être lavé  deu'à  
 la tête}  il  voulut  
 puis  les pieds  jufc  
 compofer quand  i  fut  fur  la ^pince,  .    on  
 ^  
 lui répondit qu'on  s'en  remettoità  fage  
 nérofité.  Il  fut  nommé  le  Morne  aux  
 Boeufs:  s'ell une montagne  de  la Martinique  
 avec  laquelle  il  fimpatifoit  afiez  
 3ar  fa  groiTeur  Sc  par  fa  phyfionomie  
 Deiliale.  Le Pilote  defeenditde fon  Tri - 
 bunal ,  ôc  au  lieu  de  lui  jetter  l'eau  de  
 fa taiTe  fur la  tête,  illaluijctta  dans  les  
 yeux,  ce qui ayant obligé le pauvreEcri«  
 vain  à  lâcher  la main  dont  il  tenoit  la  
 pince  pour  la  porter  à  fon  vifage,  la  
 pince  Rit  recirée dans  le  moment,  Sclui  
 pouifé  dans la  cuve  avec  tant  de jufteiTe  
 qu''on  ne  lui  voyoit  que  la  tête  &  les  
 pieds,  tout  le corps  étant  fous l'eau,  il  
 enreçutdans  cet  état  un  deluge,  parceque  
 la  grande  hune,  les  haubans,  les  
 bords  du Vaiiîeau  &  la  chalouppe  contre  
 laquelle  la  cuve  étoit  appuyée,  
 étoient  remplis  de  Matelots  avec  des  
 féaux  pleins  d'eau  dont  ils  le  laverent  
 pendant  plus  d'un  quart  d'heure.  II  
 crioit  cependant,  &  juroit  comme  un  
 defefperéj  plus  il  juroit,  8c  pluslePilote  
 ordonnoit  de  le  baptifer ;  au  bout  
 de  tout  cela  il  fallut  promettre  quatre  
 flacons  d'eau-de-vie,  fans quoi  je  penfe  
 qu'on  l'auroit  baptizé jufqu'à  la  Martinique  
 j parce  que comme  il  n'étoit  aimé  
 E  L 'AMERi aUE .  15  
 excepté  nous  autres  qui  nous  retirâmes  liîpS'  
 de  bonne  heure  dans  la  chambre,  de  
 crainte d'attraper  nôtre part de  l'.eau  que  
 l'on jettoit  de tous.côtez.  
 de  perfonne,  on  ne fe mettoit  point  en  
 peine de demander  grace  pourlur.  
 Le  Chirurgien  Major  qui  vint  après  
 lui, fut nommé la Montagne Pelée,  nom  
 qui  convenoit  très-bien  à  fa tête  Se  à  la  
 mauvaife  perruque  dont elle étoit ornée.  
 11 fut à  peu  près lavé  comme  l'Ecrivain,  
 Le  fécond  Chirurgien  le  fut  un  peu  
 moins;  peut-être  parce qaie  les Mate  ots  
 vouloient  prendre  haleine  pour  laver  
 comme  il falloit  le  Commis  du  fond  de  
 calle  &  le  maître  Valet.  Le  refte de  la  
 journée  fe pafla à-ce divertiiTement,  où  
 à  la  fin  tout  le  monde  fe trouva  lavé,  
 C'eft  une  pratique  très-ancienne  fur  
 la  mer  qui  autorife  cette  cérémonie  
 dont  on  ne  fçait  point  au  vrat  l'origine.  
 Pour  moi je croi qu'elle a  été  établie  par  
 les  Pilotes,  moins  pour  faire  fouvenir  
 ceux  qu'on  baptife,  du  paiTage  de  la  
 Ligne ou du Tropique,  que pour fe procurer  
 quelque  gratification.  A  prefent - 
 que  l'ufage  en  ell  établi  il  faut  s'y  foumettre  
 fans  refinance,  &  fans en  chei>  
 cher  les raifons,  c'eft le plus fûr.  Quand  
 un  Navire  pafle  pour  la  premiere  fois  
 la  Ligne  ou le Tropique,  c'eft au  Capitaine  
 à  payer  fon  baptême,  autrement  
 l'équipage adroit de fcier l'éperon.  
 Le  Dimanche  27.  nous  eûmes  fur  le  
 foir uncoup  de  vent  fort violent  qui  dura  
 jufqu'à  minuit.  Il  difperfa toute  nôtre  
 flotte.  
 Le Lundi  nos  bâtimensfe réunirent  à  
 lareferve de trois Vaiifeaux  qui  ne paru- ^^¡'"J-".'  
 rent  point,  c'étoit deux marchands  &  la pare  la  
 Fluttedu  Roy  la Tranquille.  Nous crii-  flotte.  
 mes  qu'ils  avoient  fait  fervir leurs  voiles, 
   éc  qu'ils  avoient  pris  le  devant.  
 Cela  fe trouva  vrai  à  l'égard  des  deux  
 marchands,  mais  nous  reconnûmes  le  
 lendemain  que  nous  nous  étions  trompés  
 au  fujet  de  la  Tranquille,  car  nous  
 Î'apperçûmes  au  point  du  jour  fort  
 loin  fous  le  vent,  ayant  un  pavillon  
 rouge  au  grand  maft.  Comme  c'étoit  le  
 fignal  pour  demander <îlu fecours,  on  fit  
 auffi-tôt  fignal  à  toute  la  flotte  d'arriver  
 fur  elle.  Nous  la  joignîmes  fur  les  
 neuf  heures J  nous  fçûmes  que  pendant  
 le  coup  de  vent  du  27.  ils avoient  reçu  
 un  coup  de  mer  fi  furieux  qu'il  avoit  ^^  
 emporté  fon  gouvernail.  On  y  envoya fr«»- 
 nos  Charpentiers  qui  virent  avec  éton-  ,  
 1  •  ''  terd  to?t  
 nement  que  la  mer  avoit  emporte ^^^^^^^  
 non  feulement  le gouvernail,B  3    mais  ceonr-e  „^ii.