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 ^l6  NOUVEAUX  VOYAGES  AUX  ISLES  
 i£ç6.  comme  on verra  dans  la fuite de ce Traité  
 }  &  c'eil  ce  qu'on  foûtient  que  les  
 Efpagnols  n'ont  jamais  fait,  puifque  
 tout  le  monde  convient  qu'ils  n'ont  jamais  
 fejourné dans  ces  liles qu'autant  de  
 tems  qu'il  en  faut  pour  faire l'eau  & 1-e  
 bois  dont  leurs  bâtimens  avoient  befoin. 
   
 Déplus,  pour  quelle  railon  les Efpagnols  
 auroient-ils  planté  des cannes dans  
 des  lieux  où  ils  n'ont  jamais  eu  dellein  
 de  s'établir,  Se encore  moins  d'y  établir  
 des fucreries.  De  dire que  ce  font les Indiens  
 qui les ont  cultivées après le départ  
 des  Efpagnols,  c'eil:  connoître  bien  mal  
 le génie  des Caraïbes  qui  font  bien  éloignez  
 de  fe donner  la moindre  peine pour  
 cultiver  une  plante  qu'ils  ne  connoiffoient  
 point i  eux  qui  ont  peine  à  fe  refoudre  
 à  donner  quelques  momens  à  la  
 culture  de  celles  dont  ils  ne  fçauroient  
 fe  paiTer.  
 Voici  un  témoignage  plus  exprès,  6c  
 qui  prouve  invinciblement, que  les  cannes  
 à fucre font naturelles  à  l'Amerique;  
 c'eil:  celui  de  François  Ximenes  dans  
 fort  Traité  de  la Nature  &  des  Vertus  
 des  Plantes  de  l'Amerique  ,  imprimé  à  
 Mexique  :  il  aiTure  que  les  cannes  à  
 fucre  viennent  d'elles-mêmes  &  fans  
 culture  aux  environs  de  la  riviere  de  la  
 Plata  ou  d'argent, 8c qu'elles y  croiiTent  
 il confiderablcment, qu'elles  rcllemblent  
 par  leur  groiîeur  &  leur  hauteur  à  des  
 arbres  dont  la  chaleur  du  foleil  fait fortir  
 le  fucre par  des  crevaiTes  qui  fe  font  
 en  certains  tems  de  l'année  à  l'écorce  
 de  la  canne,  comme  nous  voyons  Ibrtir  
 la  gomme  de  difFerens  arbres  qui  s'en  
 déchargent  dans  des  faifons  où  la  chaleur  
 du  foleil  eft  plus  violette  que  dans  
 d'autres.  
 Jean  de  Lery  Miniftre Calviniftc  qui  
 alla en  i  joindre  le  Commandeur  de  
 Villegagnon  au  Fort  de  Coligny  qu'il  
 avoit bâti fur une Ifle de  la riviere  dcjanvier  
 ou Janeiro  au  Brefil,  par les  vingttrois  
 degrez 6c demi  de latitude  meridionale  
 >  aflure qu'ils  trou voient  par  tout  
 aux  environs  de  cette  riviere une  grande  
 abondance  de  cannes  à fucre.  Or  il  eft  
 conftant qu'elles n'y avoient pas été  plantées  
 par les Portugais, puifqu'ils n'étoient  
 pas encore établis de  ce  côté-là, & qu'ils  
 n'y  vinrent  qu'après  le  départ  des François  
 :  il  faut  donc  conclure  qu'elles  y  
 étoient  venues naturellement & iims culture. 
   
 Le  Pere Hennepin  Recolet  &  autres  
 Voyageurs  qui  nous  ont  donné  des  Relations  
 du Miffifipi, rapportent qu'ils  ont  
 trouvé  des  cannes  à  fucre  très-belles  Sc  
 en  abondance  dans  les  terres  baiTes qui  
 font  aux  environs  des  embouchures  de  
 cette  riviere.  , .  
 Jean  de Laët,livre premier page  trente 
 trois  de  fon  Hiftoire de  l'/imerique,  
 dit  que  les cannes  à fucre viennent  naturellement  
 à r i l l e  Saint Vincent,  qui eft  
 une  des Antiiles  habitées  par  les  Caraïbes, 
   par les treize  degrez  de  latitude  dt!  
 Nord.  
 Les  premiers François qui fe font  établis  
 à  Saint  Chriftophle  ,  à  la  Martinique  
 &  à  la Guadeloupe,  y  ont  trouvé  
 des  cannes  de  fucre  en  diiïèrens  endroits, 
   6c c'«ft  de  ces  cannes  naturellement  
 crues  6c  nées  dans  le  pais  qu'on  
 en  a  provigné  6c  multiplié  l'efpece  que  
 l'on  cultive  aujourd'hui 6c  dont  on  fait  
 le fucre.  Jedeffie qu'on  puiiîe  me  prouver  
 qu'elles  ont été  apportées  de  dehors.  
 C'eft  le  fecret  d'en  tirer  le  fucre  dont  
 nous  fommes redevables aux Portugais ôc  
 aux Efpagnols,  6c eux  aux  habitans  des  
 Indes  Orientales  j  ils  l'avoient  appris  
 dans  ces  païs-là  ;  ils avoient  vû  comme  
 les  indiens  tiroient  le  fuc  des  cannes,  
 comme  ils le purifioient,  le cuifpienr  &  
 le  reduifoient  en  fucre.  Ils  l'ont  porté  
 chez  
 PRA  N  G O I SES  D  
 iiSp^  I  chez  eux  6c l'ont  mis  en  pratique,  premièrement  
 aux  liles  de  Madere  6c  de  
 Canaries,  6c enfuite dans  les endroits  de  
 l'Amerique  où  ils  étoient  établis  avec  
 aflez  de  fureté,  pour  pouvoir  penfer  à  
 cette  manufaéture qu'on  a  perfeétionnée  
 en  un  tel  point,  qu'il  y  a  long-tems  que  
 les fueres fabriquez  en Amérique  furpaffent  
 infiniment  en  beauté  6c  en  bonté  
 ceux  des  Indes  Orientales.  
 Qu'e  diroit-on  d'une  perfonne  quiaffureroit  
 que  les  vignes  qu'il  y  a  le  long  
 du Aiiflîfipi,  de  la  riviere  longue  6c  de  
 celle  des  Illinois  ne  font  point  naturelles  
 aux  païs,  6c qu'elles y  ont été apportées  
 de  quelqu'une  des  trois  autres  parties  
 du  monde.  Il feroitaifé de  lui  montrer  
 le  ridicule  de  fon  opinion,  en  lui  
 demandant  de  quelle  partie  du  monde  
 elle  prétend  qu'elles  ont  été  tranfportées  
 ;  à moins  de  remonter  au  tems  des  
 Carthaginois, que l'on prétend avoir  connu  
 l'Amérique 6c d'v  avoir  eu  commerce, 
   il  eft  impoífible  de  s'imaginer  que  
 les Afriquains y ayent  tranfporté la  vigne  
 6c  l'y  ayent  cultivée}  mais  comme  ce  
 commerce 6c cette  connoiilance des Carthaginois  
 eft  un  problême  fort  obfcur,  
 fort  difficile  à  refoudre  6c  fort  fujet  à  
 caution i  on  fera obligé  de fe  retrancher  
 aux  deux  autres parties du monde,  l'Eu-,  
 rope6crAfie.  Je  conviens  pour  le  bien  
 de  la  paix  6c  fans  entrer  dans  la  vérité  
 du  fait,que fuppoféqu'elles foient  jointes  
 à l'Amerique  par  le Nord,  on a  pû  y  
 aller  par  cet  endroit}  mais  qu'elle  apparence  
 que  ce  chemin  ait été  aiTez  pratiqué  
 pour  y  porter  ces  plantes  délicates  
 6c dont  le  froid  eft l'ennemi  capital  j  
 mais  feroit-il  poflible  que  ceux  qui  les  
 y  auroient  portées  5c  cultivées,  n'en  
 euflent pas enfeigné l'ufage  aux  habitans  
 du  païs  ,  ou  qu'y  demeurant  eux-mémes, 
   ils euflent  oublié  à  s'en  fervir,  6c  
 n'euiTent  pas  tranfmis à  leur pofterité  la  
 liyiS.  
 E  L'AMERIQUE.  izj  
 connoiiTance  d'une  chofe  iî  ncceiTaire  
 aux  hommes  ?  D'ailleurs  qui  auroit  pû  
 fermer  ce  chemin  6c le  rendre  impraticable  
 comme  il  l'eft  aujourd'hui?  la  terre  
 a t-elle  changé  de  fituation  ?  les  glaces  
 fe font  elles  multipliées  plus  quelles  
 n'étoient  autrefois  ?  Il  eft  plus  aifé  de  
 jropofer  des  diiïicultez  fur cela  que  de  
 es  refoudre ;  "d'où  il  faut  conclure  que  
 les  vignes  font  naturelles  dans  tous  ces  
 vaftes pays,  6c que  fi  elles  ont  dégénéré  
 6c  font  devenues  fauvages,  c'éft  le  
 défaut  de  culture  qui  en  eft  caufe,  6c  
 qu'il  arriveroitla  même  chofe  aux  meilleures  
 vignes de Champagne  & de  Bourgogne  
 ,  fi  on  ceflbit  pendant  quelques  
 années  de  les  tailler  &  de  les  cultiver,  
 Difons  donc  qu'il  n'y  a  pas  plus  d'inconvenient  
 à  reconnoitre  que  les  cannes  
 à fucre font naturelles à l'Amerique,  que  
 les vignes  à  la  Louifiane,  6c que  tout  ce  
 qu'on doit aux  habitans des Indes Orientales, 
   c'eft  le  fecret  d'en  tirer  le fuc  6c  
 d'en  faire  du  fucre.  
 Les  Efpagnols  6c  les  Portugais  ont  
 fait  du  fucre  à  la  nouvelle  Efpagne  6c  
 _  -.  ,  f  "  crenst  au Breul,  long-tems  avant que  les  autres  jp^^.  
 Européens  fe fufl'ent établis aux Antiiles.  gnoks.  
 On  peut  fans fe tromper  beaucoup  mettre  
 l'époque  des  fucreries Efpagnoles 6c  
 Portugaiies  vers  la  fin  de  ifSo.  car  avant  
 ce  tems  ils  n'avoient  fongé  qu'à  
 conquérir  le  pays  ,  à  découvrir  les  mines  
 d'or  6c d'argent,  à  faire  pêcher  les  
 perles 6c à travailler  au  tabac j  la  culture  
 des  cannes  à  fucre  fuivit  Celle du  tabac  
 i  6c  comme  cette  derniere  plante  
 mange beaucoup  leterrein,  il  fallut défricher  
 de  nouvelles  terres  pour  la  plant 
 e r ,  6c on employa  à  la  culture  des  cannes  
 à  fucre  ,  ce' lies  qui  devenoient  de  
 jour  en jour  trop maigres pour  produire  
 du  tabac.  
 Les  François 6c  lesAnglois  nefe  font  
 établis  entre  les  deux  tropiques  qu'en  
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