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 36  NOUVEAUX  VOY  
 I€94.  vâmcs  aÎTez  hcureufemcnt  à  nôtre  ri- 
 Rhicre  pnllames  l'un après l'auliu  
 find  trc  fur  le  cheval,  &  à  trois  cens  pas  
 s.  Ja- de  là  nous  trouvâmes  nôtre  Couvent.  
 L e  Supérieur  general de nos Miffions  
 n'y  étoit p s ,  il étoit  allé au cul defac de  
 la Trinité 5 d'oii il ne devoit revenir  que  
 le lendemain.  Nos  Peres  furent  furpris  
 .  de  nous  voir  arriver  à  cette  heure i  car  
 il  étoit  près  de  neuf  heures  du  foir,  &  
 nous  étions  moiiillez  &  crottez  depuis  
 les  pieds  jufqu'àlatête.  On  nous  blâma  
 de n'être  pas  reftez  chez le  Pere  Imbert  
 malgré  fon  Negre,  comme  ceux  qui  
 .  nous  avoient precedez,  à qui il avoit fait  
 fiiire le même compliment,  où de  n'être  
 pas  entrez  chez  quelque  habitant  qui  
 nous  auroit  bienreçû,  ôc  nous  auroit  
 épargné  la  fatigue  que  nous  avions  effuyée. 
   
 On  nous  prêta  des habits &  du  linge  
 pourchanger,  après quoi nousnous  mîmes  
 à  table.  Le  Pere  R^mond  Dacier  
 '  Syndic  de la Maifon  en faifoit  les  honneurs  
 }  c'étoit un homme de  cinquanteiix  
 ans&  plus,  de  la Province  de  Touloufe, 
  qui exerçoit cet office depuis quelques  
 mois, parce qu'il s'étoit trouvé feul  
 entre  tous  nos Religieux  qui  fçût  aflez  
 d'arithmetique  pour  tenir  le compte  du  
 poids  du  fucre qu'on  faifoit  chez  nous.  
 L e Reverend Pere Romanety  étoitauffi,  
 il avoit  eu  bien  de la  peine  à  fortir  d'avec  
 Monfieur de Sainte-Marie,  Capitaine  
 de l'Opiniâtre,& à retirer fon coffredc  
 fon yailîèau,  parce  que cet  Officier  prétendoit  
 qu'il lui trouvât un autre  Aumônier  
 ,  bien  que  le  Pere  ne  s'y  fut  point  
 engagé  comme  onl'a  vû  ci-devant.  Le  
 Supérieur general lui avoit donné le foin  
 de  la ParoiUe Sainte Marie,  qui eft à une  
 petite  demie  lieiie  du  fond  S. Jacques.  
 Il  y  avoit encore  un autre Religieux  du  
 Couvent  de Montauban,  nommé  Louis  
 Roiié,  il  étoit  malade,  8c c'étoit  pour  
 A G E S  AUX  ISLES  
 cela  qu'il  avoit  quitté  la Paroiiîê  de  la  
 , Trinité  qui  étoit  trop  pénible pour  un  
 homme de fa groiTeur.  
 Depuis  l'arrivée  de nôtre  troupe,  le  
 Pere Supérieur general ne  s'étoit pas mis  
 en peine de ménager  les anciens Miffionnaires  
 j cela les avoit fâchez,  &  entre autres  
 ce bon Religieux,  qui lui  avoit  demandé  
 fon  congé  pour  retourner  en  
 France, comme il fit un mois après, dans  
 le  vaillèau  du  Roi ,  appellé  le  Triton,  
 armé  en  flute,  commandé  par  le  iîeur  
 Chabert.  
 Le  Pere  Daftez mon  compagnon  de  
 voyage  attendoit  une  occaiîon  pour  
 paifer à S. Domingue  où il étoit deftiné,  
 &  le  Pere du  Mai  deifervoit  la  Paroiiîe  
 du  Marigot.  Je  fçavois  par  la  relation  
 de  nos  Peres,  qui  étoient  revenus  au  
 Mouillage,  que  ce  Couvent  étoit  fore  
 pauvre,  mais Je ne  me  fufle jamais  imaginé  
 qu'il le fût au point  que je  le  trou- 
 .  vai.  A  peiney  avoit-ildu  linge  pour  la  
 table,  les  ferviettes  étoient  toutes  déchirées  
 ,  &  la  nappe  fur  laquelle  nous  
 mangeâmes  étoit  li  mauvaife  qu'on  fut  
 obligé  de mettre  deux  ferviettes  deiTus  
 pour en boucher les trous.  Nousnelaiffâmes  
 pas de fouper de grand appétit,  &  
 de bien dormir enfuite,  parce  que la  fatigue  
 que  nous avions eue fuppleoit  aux  
 méchants lits où  nous  couchâmes  après  
 avoir  laiiré  nos  matelats  en  chemin.  
 Nous  fçumes  qu'ils  étoient  demeurés à  
 la  fucrerie  du  fîeur  le  Comte,  &  nos  
 Peres  s'étonnerent  comment  il  n'avoit  
 pas envoyé  nous  prier  de  paflèr la  nuit  
 chez  lui,  car  il  étoit  très-genereux  Sc  
 fort de nos amis.  
 L e  lendemain  matin  Monfieur  le- 
 Comte  nous  renvoya  le  cheval  boiteux  
 &  nos  matelats,  &  écrivit  au  Pere  du  
 May fon Curé qu'il  n'avoit été averti  de  
 nôtre  paifage  que  deux  heures  après,  
 qu'il  en  étoit  très-mortifié,  qu'il  avoit  
 été  
 169^  
 F R A N C  O I S E S  D  
 Ï694.  été  fur  le  point  de chafler fon Commandeur  
 pour ne lui en avoir  pas donne  avis  
 plûtôt,  &  qu'il  leprioitdenous  faire  
 ibs  excufes.  Je  chargeai  le Pere du  Mai  
 de lui  faire mes complimens, &  de 1 allu- 
 uc -  r  .  ,  
 rer  que  „..o  nous  irions  irinns  au  nn  premier  nremier  jour  ïour  le  
 le  
 remercier  de  fon  honnêteté.  
 Je  trouvai Guillaume  MaiToniermon  
 compagnon  de  voyage  de Paris à la  Rochelle  
 ,  fort mécontent  du^ofte que  notre  
 agent  lui  avoit procure  i  il avoit  ap- 
 E  L'AMERICLUE.  37  
 pris  que  la  condition  des  engagez  dans  
 es mes étoit un efclavage fort rude &  fort  
 pénible,  qui ne  différé de celui des N e - 
 gres que parce qu'il  ne dure que trois ans;  
 Se  quoiqu'il  fut  aiTez  doucement  chez  
 nous,  cette  idéel'avoit  tellement  frappé, 
   qu'il  étoit méconnoiifable  :  il  avoit  
 foin  de  faire  l'eau-de-vie  avec  les  firops  
 &  les écumes du fucre.  Je le confolai  du  
 mieux que je pus,  6c lui promis de l'aider  
 auffi-tôtquejeferois en état de le  faire.  
 C H A P I T R E  V.  
 Defcripion  de  Vhabitaiion  des  Freres  Prêcheurs  À  la  Cabejlerre  
 de  la  Martinique.  
 ^Oici  ce  quec'eft  que  l'habitation  
 Jacques}  
 que nôtre Miffion poflede  
 à  la Martinique.  Ce  terrein  
 s'appelle  le  fond  Saint  
 il  eft  fitué  à  la  Cabafterre  à  
 huit  lieues  du  Fort  Saint  Pierre,^  &  à  
 deux  lieuësduBourg  de  la Trinité,  entre  
 deux grands mornes,  qui laiffent  entre  
 eux un plat pais d'environ  deux  cens  
 cinquante  pas  de  large,  à  côté  duquel  
 coule  une petite riviere  qui porte le même  
 nom  que  le  terrein.  
 M.  le  General  du  Parquet  nous  le  
 donna  en  165*4.  à  titre  de fondation  de  
 trois  grandes  Meffes  ,  &  de  quelques  
 Mefles baiTes par  chaque  année.  Il  eft  
 large  de  fix  cens  pas,  &  il avoit  lors de  
 la  donation,  deux  mille  pas  de hauteur  
 ou  dechaife.  Depuis  ce tems-là nos Peres  
 avoient  obtenu  deux  conceffions de  
 deux mille  pas chacune,  ce qui lui  donnoit  
 fix  mille  pas  de  hauteur,  c'eft-âdire, 
   en  allant  du  bord  de  la  mer  vers  
 les  montagnes  qui  font  au  centre  de  
 l'Ifle.  
 L e  pas d'arpentage à la Martinique eft  
 de  trois  pieds  &  demi  de  la  mefure  de  
 Paris. A la Guadeloupe &  aux autres liles  
 il  n'eft  que  de  trois  pieds.  
 Nôtre maifon ou  couvent  eft fitue fur Hahiuun  
 petit terrein  uni à côté  de  la  riviere,  
 élevé d'environ  deux  toifes 6c demie audeffus  
 de la Savanne,  &  élo igné du bord  s.  jac^  
 de  la  mer  de  deux cens cinquante à trois  1»"- 
 cens pas.  Il  confiftoit  en trois bâtiraens  
 de  bois  qui  enfermoient une  cour de  dix  
 à  onze  toifes  en  quarré,  toute  ouverte  
 du  côté  de la  mer,  au  bout  de laquelle  
 étoit  un jardin  de  dix  a  vingt  toifes  en  
 quarré.  
 LaChapelle domeftique étoit à la  gauche  
 ,  longue de trente-fix pieds,  fur  dixhuit  
 de large:  elle  étoit  de  maçonnerie  
 jufqu'à  la  hauteur  de huit  pieds,  le  refte  
 étoit  de  bois  auffi-bien que  toute  la  
 couverture  qui  étoit  d'eifentes  ou  de  
 bardeau  au  lieu  de  tuiles,  dont  l'ufage  
 eft  prefque  inconnu  dans  le  pays.  
 Une petite chambre en dedans de la cour,  
 attaché  à la Chapelle de fix pieds de large  
 fur dix  de  long,  fervoit  de  Sacriftic.  
 Le  corps de logis oppofc  avoit tren- 
 E  5  t«-