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 ¡flW'«!  i ^'jri  
 ir'  
 D¡fe.  
 rentes  
 manieres  
 de  
 4 4  NOUVEAUX  VOY  
 fieurs  chofes  que  je  m'étois  propofé  
 d'obferver,  fi  je  retournois  aux  liles,  
 celle-ci  n'auroit pas été oubliée.  
 Le  fujet  du  voyage  de  ces  Meilleurs  
 dans nôtre  quartier,  où  ils  n'ont  pas accoutumé  
 fkher.  
 J'hhe  k  
 i'épsr- 
 •vitr.  
 de  venir  trafiquer,  étoit  autant  
 que  nous  le  pûmes .conjecturer  (car  
 ils  ne jugerent  pas  à  propos  de  nous  en  
 inftruire  )  pour  chercher  un  de  leurs  
 compatriotes,  qui  s'étoit  fauve  de  la  
 Dominique  après  en  avoir  tué  un  autre.  
 Les  parens  du  mort  lui  vouloient  rendre  
 la pareille,  &  n'y  auroient  pas  manqué  
 s'ils  l'euiTent  trouvé ;  Se  peut  être  
 qu'on  les  aurqit  laifle  faire,  feignant  
 de ne les pas  voir,  pour  n'être  pas  obligé  
 de rompre  avec  eux  pour  fi  peu  de  
 chofe.  Ils  avoient  fçû,  je  ne  içai  comment, 
   que  ce  Caraïbe  avoit  quitté  le  
 Fort  faint  Pierre  où  fcs  compatriotes  
 vont  très-fouvent,  &  qu'il  s'étoit  retiré  
 en  nôtre  quartier  pour  être  plus  en  
 feureté.  Dès  qu'il  fut  averti  qu'il  y  avoit  
 des  Caraïbes  au  bord  de  la  mer,  
 il  ne  fallut  pas  le  prier  de  fe cacher.  Je  
 l'employois  quelquefois  à  pêcher  pour  
 moi  dans  la  riviere,  ou  au  bord  de  la  
 mer  avec  l'épervier  
 On  appelle  épervieraux  Ifles  un  filet  
 rond  en  forme  de  cone,  dont  les  mailles  
 font  aflez, petites.  Lebas  eft retrouffé  
 en  maniéré  de  poches,  il  ell; garni  de  
 balles  de  plomb  tout  autour  pour  le  
 faire  couler  bas  promptement.  Il  y a  
 une corde  de  fept  à  huit  pieds à fa  point 
 e ,  dont  le  bout  s'attache  au  poignet  
 gauche  du  pêcheur  j  elle  fert  à  retirer  
 le  filet  quand  onl'a  jetté  dans  l'eau.  La  
 maniéré  de  le  jetter,  eft  de  prendre  le  
 bord  du  filet  avec  les  dents,  &  de  le  
 tenir  étendu  en  partie  avec  la  main  
 gauche,  pendant  qu'on  en  tient  pliiTé  
 dans  la  droite  autant  qu'on  en  peut  tenir. 
   Lorfqu'on voit  quelque poiflbn,  ou  
 que  fansepi voir on  juge  qu'il  y  en peut  
 A G E S  AUX  ISLES  
 avoir  dans  quelque  endroit,  on  jette  le  1(5  
 filet  lur  ce  lieu  là,  ou  fur  le  poiflbn  en  *  
 fàifant  un  quart  de  converfion  dans  le  
 moment  qu'on  lâche  ce  que  les  deux  
 mains  &  les  dents  tenoient,  ce  qui  fait  
 étendre  le  filet  en  rond,  &  le  fait  aller  
 jufqu'au  fond  de  l'eau  dans  cette  même  
 fituation.  Le  poiflbn  qui  eft  étonné  du  
 bruit,  fe  fauve &  entre dans  les  poches  
 où  il  demeuré  enfermé j  fa  propre  pefanteur  
 aidant  à  les  fermer  quand  on  
 retire  le  filet  par  le  moyen  de  la  corde.  
 On  pêche  quelquefois  de  cette  maniere  '  
 au  bord  de  la mer ,  mais  il  faut  que  ce  
 foit  dans un grand  calme}  car  il eft bien  
 rare  que  le  poiflbn  vienne  dans  les  lames, 
   à moins  qu'il  ne  foit  pourfuivi  par  
 d'autres  poiflbns  plus gros &  plus  voraces, 
   comme  font les  Rc\quiens,  les  Becunes  
 6c  autres  femblables  qui  payent  
 afl'ez  Ibuvent  la  peine  de  leur  témérité,  
 en  demeurant  échoiiezà  la  côte.  
 Il  y  a  une  autre  maniere  de  pêcher phk  
 dans  nos  rivieres,  ou  plutôt  dans  nos n«  
 torrens}  c'eft  la  nuit  aux  flambeaux.  
 Les  Caraïbes  y  font  fort  adroits.  Nos  
 Ncgres  l'ont  appris  d'eux,  &  il  s'en  
 trouve  d'aufli  habiles  que  leurs  maîtres}  
 le  mien  quoique  jeune auroit  donné  des  
 leçons  île  cet  ar t ,  auflî bien  que  de celui  
 de  pêcher  à  la  main,  mais jç  ne  lui  
 permettois  gueres  de  fortir  la  nuit,  de  
 crainte  qu'il  ne  fut  mordu  de  quelque  
 ferpent,  qui  font  plus  en  mouvement  
 en  ce  tems-là  que  pendant  le  jour,  Sc  
 qui  fe voyent  beaucoup  moins.  Je  craignois  
 d'ailleurs  que  fous  pretexte  d'aller  
 à  la  pêche,  il  n'âllat  trouver  d'autres  
 Negres,  avec  lefquels  il  auroit  pu  
 s'adonner  au jeu,  àlaboiflbn,  &peut»  
 être  à  quelque  autre  libertinage.  
 Ceux  qui  vont  pêcher  la nuit dans  les  
 rivieres  y  marchent  fort  doucement;  
 ils  tiennent  leur  flambeau  de  la  main  
 gauche,  de  maniere  qu'il les éclaire  fans  
 les  
 F R A N C O I S E S  DE  L'AMERIQUE.  
 les éblouir.  Ils  ont  à  la main  droite  un  leur  orgueil  fur  ce  point  n'eft  pas  con-  lOj^.  
 petit  filet  étendu  autour  d'un  cercle  avec  
 un  manche  de  trois  à  quatre  pieds  
 ¿e  long.  Dès  que  le  poiflbn  voit  la  lumiere  
 il  s'en  approche,  il  s'élance,  il  
 cÈvable;  &  de  là  eft  venu  le  proverbe,  
 que  regarder  de  travers  un  Caraïbe  ,  
 c'eft  le  battre,  8c que de le battre,  c'eft  
 le  tuer,  ou  s'expofer  à  en  être  tué.  Ils  
 Illic;!^  ^  vv-ii»-,^L ^  ,AW  ,  VILI O VA^Uiyi  A ^-li  ^^tlt  LUU. Xl^  
 joui: fur l'eau î  ôc le  pêcheur  prend  fon  ne  font  que  ce  qu'ils  veulent  ,  quand  
 tems pour  couler  fon  filet  fous  lui  &  ils  veulent,  &  comme  ils  veulent,  del'enlever, 
 ftà'li  
 Umm  
   fans crainte  qu'il puiflefauter  forte  qu'il  arrive  fouvent  que  quand  on  
 dehors,  parce  que  le  filet  qui  eft  fait  a befoin  d'eux,  c'eft pour  lors  qu'ils  ne  
 en maniéré  de  poche  d'environ  un  pied  veulent  rien  faire ,  ou  que  quand  on'  
 fie  demi  de profondeur,  obéît & ne per-  veut  qu'ils  aillent  à  lachafle,  ils  veumetpasau  
 poiflbn de s'élancer.  Outre  le  lent  aller  à  la  pêche,  &  il  en  faut  pafflambeau  
 Scie  filet,  le pêcheur porte en-  fer par-là.  Le  plus  court  eft de  ne  s'en  
 -core un havrefac ou  un  coyanbouc paffé  point  fervir,  ou  de  ne  compter  jamais  
 eu bandoulière  où  il  met  le poiflbn qu'il  fur  eux,  ni  leur  laifl'er  rien  entre  les  
 prend.  mains,  car  ils  font  commedesenfans  à  
 La  pêche  à  la  main  fe  fait  de  jour,  qui  tout  fait  envie,  6c ils la paflbnt fans  
 On  entre  dans  l'eau,  on y marche dou-  beaiucoup de  façon,  en  prenant,  mancement; 
   on  regarde attentivement,6c  géant  ou buvant c ---j  ^  e qu'on  leur  laifl'e fans  
 quand on  découvre  quelque  poiflbn  qui  
 fe retire  dans  des  racines  ou fous des roches, 
   on  le  fuit,  on  met  la main où  on  
 l'a vûfe retirer,  6c  on le prend  d'autant  
 difcretion.  
 Une  autre raifon pour  laquelle on  doit  
 éviter autant qu'il  eftpoflible de  fe fervir  
 ,  j  des Caraïbes,  fiUurl  tLoVuJUt l. duie-   ceux  qLJuUiJ  floUnliLt   
 plus facilement,  qu'il  fe croît  en  feure-  libres,  carpour  ceux  qui  font  efclaves,  
 té  quand  il  eft  dans  fon  trou  où  il  fe  on  les ménage  d'une  autre manierejc'efl:  
 tient  en  repos.  Il  eft  rare  que  les  Ca-  l'antipatie qu'il  y  a  entre  eux 6c les  Neraïbes  
 ou  les  Negres  manquent  leur  gres.  Leur  orgueil leur fait  croire qu'ils  
 coup,  quand  ils ont  unefoisvûunpoif-  lont  beaucoup  au  deflus des N egr e s,  6c  
 fon  fe  retirer  dans  quelque  endroit,  les  Negres  qui  en  ont  du  moins  autant  
 Lorfqu'ils n'en  apperçoivent  point,  ils  qu'eux,  les  regardent  avec  encore  plus  
 foiiillent  tout  le  long  du  bord  de  la  ri-  de mépris,  fur tout  quand  ilsnefontpas  
 viere,  dans  les  racines,  6c autour  des  Chrétiens,  6c  nelesappellentjamaisaul'oches. 
   _  _  trement  que Sauvages,  ce que les Caraïïis  
 Ci-  Je  me  ferois  fervi  plus  fouvent  de  ce  bes  ne  peuvent  entendre qu'avec  un  ex- 
 Caraïbe réfugié,  6c  j'aurois  même  ef-  trême  dépit,  qui les porte fouvent  à des  
 fayé de le garder  chez  moi  à  des  condi-  extrémitcz  qu'on  ne  peut  éviter  avec  
 nw^tions  raifonnables,  fij'avois  crûen  pou-  trop  de  foin.  
 ¡ni.  voir  tirer  du  fervice  ;  mais  c'eft  une  II  arrive  quelquefois  que  nos  barchofe  
 iiHn.  
 prefque  impoflîble.  Ces  fortes de  ques  qui  vont  traiter  à  Plfle  de  laMargcns  
 font  indokns  6c fantafques à  l'ex-  guerite,  6c  aux  bouches  de  la  riviere  
 ces.  Il  faut des ménagemens infinisavec  d'Orenoque,  prennent  en  troc  de  leurs  
 eux ;  ils ne peuvent  fouffrir d'être  com-  marchandifes desindiens elclaves qu  elles  
 mandez,  6c quelque  faute qu'ils taflent,  nous  apportent.  Quoiqu'ils  foient  bien  
 Il taut  bien  fe  garder  de  les  reprendre,  meilleurs,  6c  qu'on  en  puiflb tirer  plus  
 ou ieulement  de  les  regarder de travers,  de  fervice que  de  ceux  de  nos  Ifles  voi - 
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