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40 NOUVEAUX VO Y
1^95. le, & autant pour les trois enfans qu'elle
avoit, un delquels on fuppofoit appar-
. tenir à Dauphiné, & les deux autres à
d'autres perfonnes. Je les fis tous de-
_c]ai:er libres par le contrat, après quoi
je publiai un banc, & je les difpenfai
des deux autres. Le Pere Gabriel de Vire
fit la même chofe au Fort Royal pour
Dauphiné, & m'en envoya le Certificat,
après quoi je les mariai.
L e Confeil îbuverain, ou pour parler
plus jufte, le Confeil fuperieur eft
compoie du Gouverneu;- General, de
rintendajit, du Gouverneur particulier
de rille, de douze Confeillers, d'un
Confeil Procureur General, & des Lieutenans
^^ y iceance & voix
la Mar- délibérative. Il s'aiî'emble de deux en
tinique. deux mois, & juge en dernier reiTort toutes
les caufes qui y font portées direélement,
& les appels des Sentences du
Juge Royal & de fes Lieutenans. Le
Gouverneur General y préfide , mais
ç'ell: l'Intendant, §C eii fon abfence le
plus ancien Confeillerj qui recueille les
avis , & qui prononce : quand leGouvei'-
neur General n'y eft pas, l'Intendant
A G E S AUX ISLES
préfide 5c prononce. Les Confeillers ir«
n'achetent point leurs charges, elles fe '
donnent au mérite, fou vent aux recommandations.
C'eftle Secretaire d'Etat
ayant le département de la marine
qui leur expedie leurs brevets, parce que
les Colonies font de fon département.
Ils n'ont point de gages, mais feulement
l'exemption du droit de Capitation
pour douze de leurs Negres, avec
quelques émolumens pour leurs vacations,
cela eft peu confiderablej de forte
que ces charges font plus recherchées
par rapport à l'honneur qu'au profit.
On prétend qu'elles annoblilfent
ceux qui meurent dans l'exercice, ou
qui obtiennent des brevets de Confeil-
1er honoraire, après avoir fervi vingt
ans. De douze ou quinze Confeillers
qui rempIiiToient ces c largcs en 170J-. il
n'y en avoit que deux qui euiTent étudié
en Droi t ; c'étoient les fieurs le Merle
& Monel, les autres étoient des notables
habitans ou commerçans, che?
lefquels il faut croire que la droiture 6c
le bon fens tenoientlieu de fcience.
C H A P I T R E V I .
Pes Mulâtres. Maniere de les mmoître. Btfioire du * * * & de pielqms
habitans blancs qui ont é^oufé des JSlegreJfes.
Origine
des Mulâtrei.
^N entend par Mulâtres, les
enfans qui naiiîènt d'une mere
noire & d'un pere blanc,
ou d'un pere noir Scd'unemere
blanche. Qiioique ce dernier
cas foit rare, on en a pourtant des
exemples. Qiiant au premier, il n'eft
.que trop fréquent; & ce libertinage des
blancs avec les NegrelVe eft la fource
d'une infinité de cnnaes. La couleur des
enfans qui nailTent de ce mélange, participe
du blanc & du noir, & produit
une efpece de biftrc. Les cheveux des
Mulâtres font bien moins crefpus que
ceux des Nègres ; ils font châtains 6c même
aflez clairs , ce qu'on ne trouve
point aux Negres. J'ai cependant veu
unNegreàCadix qui avoit les cheveux
roux. Les Mulâtres font pour l'ordinaire
bien faits, de bonne taille, vigoureux,
forts, adroits, induflrieux,
courageux & hardis au de-là de l'itnagina
F R A N C O I S E S D E
M- gination } ils ont beaucoup de vivacité,
' mais ils font adonnez à leurs plaifirs,
funis
mrt
L ' A M E R . I Q ^ U E .
indifference ces amendes, 6c ces Mulâ- 169^
très avec leurs meres. Il y avoit entre
volages, fiers, cachez, méchans, & autres un certain Frère *** qui avoit
capables des plus grands crimes. LesEf- un talent merveilleux pour faire ce;s dépagnols
qui en font bien mieux fournis' couvertes, & pour en tirer partie. Il Ugkux
que tous les autres Européens qui habi- eft vrai qu'il étoit aidé fort fouvent par de U^ ^
.. A^ lesmaîtrefles des Negreflcs, qui nepouvant
fouffrir que leurs maris entretinffent
leurs efclaves, lui en donnoient av
i s , lui aidoient à les faire prendre ^
aimant mieux les voir confifquées que
de laiiTer pafler l'occafion de fe venger.
Monfieur * * riche habitant du Fort
Royal de la Martinique en peut dire
des nouvelles, 8c il n'eft pas le feul. Je
l'ai cité plutôt qu'un autre, parcequ'ctant
un parfaitement honnête homme,
fon témoignage fera d'un plus grand
poids. Avec tout cela il ne laiffoit pas
d'arriveribuvent de fâcheux contretems
auFrere caries maîtres qui fe voyoient
dans le cas de la confifcation de
tent l'Ameriquej, n'ont point de- meilleurs
foldats, & de plus médians hommes.
Le nombre en feroit bien plus grand
dans nos liles , fans les peines qu'encourent
ceux qui les font : car les Negrefles
font d'elles-mêmes très-lafcives,
£c les hommes blancs ne l'étant gueres
moins, & trouvant beaucoup de facilité
à contenter leurs paffions avec ces
lis ftrei créatures, on ne verroit autre chofe que
iisMu-des Mulâtres, d'où il s'enfuivroit de
km. tj-ès-grands defordres, fi le Roi n'y avoit
remedié , en condamnant à une
amende de deux mille livres de fucre,
ceux qui font convaincus d'en être
débauché fon efclave, 6c qui en ait eu
un enfant, outre l'amende , la Negreflè
& l'enfant font confifquez au profit de
l'Hôpital, fans pouvoir jamais être rachetez
peresj mais fi c'eft un maître qui ait leurs enfans 8c de leurs NegreiTes , ai-
fous quelque prétexté que ce
foit. On ne peut aflez loiier le zèle du
Roi dans la difpofition de cette Ordonnance;
mais on permettra aux MiiHonnaires
de dire qu'en cherchant à remedier
au fcandale que ce crime caufoit,
on a ouvert la porte à un crime bien
plusénorme, qui confifte dans des avortemens
fréquensque les Negreflesfe procurent
quand elles fe fentent grofl'es, 6c
cela fort fouvent, du confentement ou
xir le confeil de ceux qui en ont abufé.
Les Religieux de la Charité qui ont
le foin des Hôpi taux, font fort allertes
fur ce point, parce que l'intérêt des
pauvres 6c le leur ont trop de liaifon
moient mieux leur promettre la liberté,,
que de les voir efclaves perpétuelles de
l'Hôpital. Ils avoientiôin d'inftruire la
Negrefle de ce qu'elle devoit répondre
quand elle feroit devant le J u g e , Sc qu'elle
feroit interrogée fur le pere de l'enfant.
Le défir de la liberté leur faifoit retenir
leur leçon à merveille, & le défaut de
témoins qu'on ne va pas chercher dans
ces fortes d'occafions, joint à l'effronterie
avec laquelle elles foutenoient leur
caufe 6c celle de leur maître , faifoit
quelquefois condamner Frere*** aux
dépens.
. J'ai eu quelquefois le plaifir d'entendre
ces démêlez; 6c une fois entre autres,
la Negrefled'un habitant d'une de
nosParoiflés foutint au Frere *** que
c'étoit lui-même qui étoit le pere de
l'enfant Mulâtre dont elle étoit acouchée.
Par malheur pour ce Religieux il
pour leur permettre de regarder avec avoit paile neuf à dix mois auparavant
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