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3fi NOUVEAUX VOY
de faire ces étoffes, 6c que les Turcs 8c
les Perfans n'ont plus le debit de leurs
Tapis depuis que nous nous fommesavifez
d'en faire d'auffi beaux que les leurs,
& peut-être plus beaux..
Enfin il fa loit laiiTer aux Ouvriers de
Nuremberg & autres Villes d'Allemagne
le foinde fournir les quatre parties du
Monde de Clinquaillerie, fans nous mêler
de perfectionner leurs ouvrages, &
empêcher parles Manufactures que nous
avons chez nous le débit avantageux
qu'ils taifoient des leurs. . .
Je pourrois pouiTer ce détail bien plus
loin, ôc mettre dans un plus grand jour
le ridicule du raifonnement de ces mauvais
Commerçans: mais je croi que ce
que j 'enaiditfuffira a tout efprit raifonuable.
,
Mais fi nous n'allons point chez les
Etrangers, ils ne viendront point chez
nous. Autre mauvais raifonnement. Nous
avons des chofes qui leur manquent,
qui leur ont toujours manqué, ôc qui
leur manqueront jufqu'à la fin du Monde,
Se dont par confequent ils feront
toûjours obligez de fe fournir chez nous.
C e font nos Bleds,nos Vins, nos Eauxd
e - V i e , nos Sels , 6cc. Qu'ils cherchent
tant qu'ils voudront, ils ne trouveront
ces trois chofes abfolument neceiTaires
chez eux , & furabondantes chez
nous, que dans ce Royaume. Il faut qu'ils
les y viennent chercher: c'eft pour eux
une neceffité abfoluë. N'a-t-on pas vû
que pendant les guerres les plus allumées
qu'il y a eu entre nos voifins&nous, ils
ont été obligez de fe fervir du miniftere
des Nations neutres, pour fe pourvoir
de ces denrées, quand ils n'ont pû obtenir
de Pafle-ports pour les enlever euxmêmes.
Nous pouvons abfolument nous
palTer de prefque tout ce qui vient de
dehors; mais les Etrangers ne peuvent
fe paiTer des chofes qui viennent chez
AGES AUX ISLES
nous. Faifonsbien du V in, du B lé, &
du Sel, Ôcc. Voilà le fond d'un Commerce
immenfe & avantageux à toute
la Nation? & ce Commerce nous
fournira un débouchement de toutes nos
autres Manufactures tant [du Royaume,
que desliles, avec cet avantage que nous
ne feroni point obligez de laiffer forcir
l'argent de chez nous, & que les Etrangers
feront contraints de nous, apporter
le leur.
L e déperifTement de nôtre Marine
n'eft point du tout à craindre. Quand
lesProvençaux celleroient d'envoïer leurs
Bâtimens pour enlever les Bleds , les
Huiles, les Laines, & les Drogues des
côtes de l'Afie & de l'Afrique, ils ouvriroient
un Commerce avec l'Amerique
qui feroit bien plus confiderable 8c
plus avantageux j & ces Peuples qui fe
verroient privez de l'argent comptant
qu'on leur apporte de France, fe mettroient
enfin à la raifon, & traiteroient
les François comme ils traitent les autres
Nations, ôc prendroient de nos Marchandifes
en échange des leurs 5 car
c'eft ainfi que les Anglois & les Hollandois
commercent avec eux. Ainfi bien
loin que la Marine du Levant fouffrît
quelque diminution, elle s'augmenteroit
confiderablement par le nombre des
Bâtimens qu'elle envoiroit en Amérique,
& par le Commerce qu'elle auroit dans
la fuite au Levant, oii l'on porteroit à
droiture les Sucres 8c les;, autres Marchandifes
qu'on en tireroit j 6c qui feroient
propres aux Afiatiques. Je ne dis
rien de celle du Ponant, on voit aflez
qu'elle augmentera toûjours à proportion
du Commerce qu'elle fera en Amérique.
Je; croi avoir remarqué en quelque endroit
que l 'onavoitvû dans une feule année
près de cent Bâtimens étrangers,
chargez de Tabac dans nos Ports. Si l'on
remettoit fur pied dans nos liles la cul,
ture
t6ç6.
F R A N C O I S E S DE L'AMERIQ^UE.
i^i^ô. ture de CÊtte plante, n'augmenteroit-on contens d'une mediocre fortune, Scjoiiii"-
pas d'autânt de Bâtimens le Commerce fant à l'aife, 6c fans le partager avec
quel'ony fait, 6cnos Illes devenanttous perfonne, de ce que le Païs produit prefles
jours plus peuplées, ne feroit-ce pas que naturellement, 6c de ce qu'ils retiune
neceffité abfoluë d'y envoïer un plus rent du travail de leurs efclaves, ils croujrand
nombre de VaiiTeaux. Ainfi bien piflent dans une lâche 6c molle oifiveté.
oin que nôtre Mwine fouffrît quelque Le jeu 8c la bonne chere font prefque les
chofe, les gens qui font un peu au fait feuls exercices qui partagent leur temps
de ces fortes de chofes, comprendront ou les feules chofes qui troublent, ou qui
aifément que nôtre Commerce augmen- interrompent un peu la tranquillité de
tera à proportion de la quantité 6c de la leur paifible repos. Point d'émuktion
diverfité des chofes que nous ferons en pour perfeftionner ce qu'ils ont trouvé
état d'envoyer, ou de vendre aux Etran- établi avant eux, ou pour chercher
gers, & par confequent de faire fleurir quelque chofe'de nouveau qui puifle
notre Manne plus qu'elle n'a jamais fait, augmenter leurs revenus, 8c faire hon-
A quoi j e dois ajouter que l'abondance neur à leur Nation, 8c lui être de quelde
nos Marchandifes nous mettant en que utilité.
état de les donner à meilleur marché que - La fécondé eft la négIrVence de ceux
les autres, nôtre Commerce s'établira qui font chargez des affaires publiques
fur les ruines du leur, 6c nos Ports de- Il eft à naître qu'il s'en foit trouvé quelyiendront
les entrepôts du Commerce de qu'un aflez intelligent, ou affez bien inprefque
tout le Monde. tentionné pour porter les Habitans à ou-
Me craignons pas de manquer de vrir quelque Commerce nouveau, ou i
moyens d'entretenir ce Commerce, la étabhr quelque nouvelle Manufadure?
• fécondité des terres du Royaume 8c de ou du moins qui lestait encoura<^é &
celles de l'Amérique qui en dépendent, protégé dans les deffeins qu'ils oifteus,
cft admirable: il n'y a qu'a les bien cul- ÔC qui ait fait valoir auprès du Prince
tiver pour en retirer tout ce qu'on vou- o-j • -
dra; 6c l'induftriede nos François, leur
habileté dans les Arts, 6c leur pénétration
dans tout ce qui peut faire fleurir le
Commerce, n'ont befoin que d'être excitées
6c reveillées de l'aiToupiflèment où
ils femblent être depuis quelque temps,
pour produire des effets fi extraordinaires,
qu'on n'afe pas feulement feles imaginer.
V4«.* M. J l l l ^ ^
6c defesMiniftres, les projets qu'on leur
a- prefente'z. Il faut croire que la multitude
6c la diverficé des foins attachez à
leurs Charges les diftrayent, 8c les empêchent
de faire attention fur bien de»
chofes qu'ils regardent ordinairement
comme petites 6c de peu de confequence,
parce qu'ils n'y voyent pas un profit
prefent, ce qui ne vient que parce
qu'ils n'en pénètrent p T-v 1 ^ . , ij v.i un;iss Il 'iimmppoorrttaannccee,.
Deux chofes peuvent empecher ou re- 6c peut-être laneceflité, 6 c e n c L moins
tarder 1 execution des projets que je viens la facilité qu'il y a à les faire réùffir Cede
faire pour nos Ifles de l'Amérique, pendant ces chofes petites dans leurs comica
premiere eft la nonchalance ordinai- mencemens peuvent devenir très grandes
rea tous nos Infulaires, vice qui fecom- dans la fuite, 6c faire le fond d'un Communique
aifement aux Européens qui merce confiderable,qui ne manqueroit pas
^ennent s établir parmi eux, La douceur d'augmenter les revenus du R o i en même
ûc la fécondité du climat les y portent i temps que ceux des particulier?
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