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 i^iMh  fées répondoient  à celle  de  la  cour  &  à  
 l'allée du milieu de mon  jardin.  La  porte  
 qui  entroit  de la  falle dans ma  chambre  
 écoit  à  main  gauche,  elle  avoit  la  
 même  grandeur  que  la  iklle,  mais  j'y  
 ayois  fait  un  retranchement  de  cinq  
 pieds,  de  large  fur  toute  la  longueur  
 qui  me  fervoit  à  ferrer  mes  provifîons,  
 J'avois  ménagé  dans  ce  même  efpace  
 l'efcalier  pour  monter  au  gallctas  qui  
 étoit  afîez commode  pour  y placer  plulieurs  
 hamacs i  c'étoit  la  «hambre  de  
 mon  Penfionnaire,  j  où  je  me  retirois  
 auffi quand je  donnois  la  mienneà  quelque  
 étranger.  Je  fis  faire un perron  de  
 pierre  de  taille  avec  trois  marches  devant  
 la  porte  de  la  falle,  le  refte  du  
 terrein  alloit  en  pente  douce  pour  donner  
 lieu  aux  eaux  de s'écouler.  
 de  Le Dimanche ij-. Juillet le Pere Mar- 
 Annt  chez  moi.  Le  lende- 
 Pat'roL  inainjour  de  fainte  Anne,  Patrone  de  
 de  VE- mon  Eglife,  les  Peres  Breton,  Imbert,  
 glife  du  Chavagnac  &  Romanet,  s'y  rendirent.  
 Maca;4-  p^.—  jg  p^j-g Breton,  commele  plus  
 ancien,  d'officier.  Le  Pere Martelli  fit  
 lePanegyrique de la Sainte :  Et  quoique  
 nous  fuffions tous  occupez  à  confeiler,  
 nous  eûmes  alTcz  de  peine  à  contenter  
 tout  le monde  tant  il  en  étoit venu  des  
 Paroilleavoifines,  &  même  du  Fort  S.  
 Pierre.  MonfieurDauville comme Marguillier  
 de la ParoiiTe,  invita  les  princi- 
 .pauxàdiner,  de  forte  que  nous  nous  
 trouvâmes  près de trente  perfonnes chez  
 lui.  Le Mardi  je fis le Service  folemnel  
 pour les défunts delà Paroifle. Monfieur  
 Michel, comme  Capitaine  du  quartier  
 donna à manger  à  toute  la  compagnie j  
 car  c'étoit  comme  une  regie  dans  la  
 ParoiiTe,  du  moins  en  ce  tems-là,  que  
 le  Marguilliertraitoitlejour  dekFête,  
 & le Capitaine le lendemain.  
 Le  Mercredi  après  dîner je  fus  conduire  
 nosPeresjufquesàlaBaiie-pointei  
 ils me dirent  que  dans  l'AiTemblee  qui  ,, ,1  
 s'étoit  tenue  au  fond  S.  Jacques  le  23.  
 ou je  n'avois  pû  affilier à caufe de  mon  
 bâtiment,  on  avoit  voulu  m'élire  Syndic  
 ,  mais  que le  Supérieur  General  s'y  
 étoit  opposé,  &  avoit  dit  qu'ilm'avoit  
 deftiné  pour  être  Supérieur  de  la  Gua- 
 • deloupe  à fon  retour  de  Saint  Domingue. 
   
 Le  Jeudi  j .  Aouft,  je fus  obligé d'aller  
 à la  Bafle  terre  dire  adieu  à  nôtre  
 Supérieur qui partoit pour  S.Domingue.  
 Il s'embarqua le Samedi dans une  Barque  
 de  S. Thomas  qui  devoit  toucher  à  la  
 Guadeloupe.  Je  fus le conduire à bord.  
 Je partis  l'après-dîner  dans  le Canot  de  
 Monfieur Michel. Le gros tems & la mer  
 orageufe  furent  caufe  que  nous  arrivâmes  
 fi  tard  chez  lui queje fus  obligé d'y  
 coucher.  
 Le Dimanche  8 ,je me rendis de grand  
 matin à ma Paroiflè.  Je  fis marche  avec  
 un Menuifier de la grande Ance, nommé  
 DubuifFon,  pour paliffader l'augmentation  
 de ma maifon,  c'eft-à-dire,  pour la  
 clore  de  planches  embouvetées  ,  blanchies  
 d'un côte à la varloppe,  &  cloiiées  
 fur les  pieces de  charpente  qui  compofoient  
 le  corps  du  bâtiment;  il  devoit  
 faire auffi les portes,  fenêtres &  contrevents  
 avec  quelques  tables  &  armoires.  
 C'étoit un creollealTez bon ouvrier ,mais  
 fi glorieux & fi fantafque qu'il  n'y  avoit  
 pas moyen  de le  contenter.  Il  demeura  
 chez  moi  un mois.  Se ce  mois me parut  
 une année.  
 On  ne le ièrvoit point encore de  vitres  
 dans  nos  Ifles, on  fe  contentoit  de  fermer  
 les  fenêtres  avec  des contre  vents  
 &des  baluflres,  ou quelquefois  avec des  
 chaffis de  toile  claire.  Les  Angiois  de  
 la Barbade,  Antigüe  &  autres  iiles  de  
 leur  dépendance,  ont  leurs maifons  vitrées, 
   &  cela fait un meilleur  effet.  
 C H  AF 
 R A N C O I S E S  DE  L^AMERIQ^UE.  
 C  A  P  I  T  R  . E  XX.  
 14P  
 Maladies  des Negres  é'  des Creoles.  Etablijfement  d'une  ParoijJe  au eut  de faC  
 Robert.  Defcription  de la Bec une,  des  Galeres  ¿r de l'arbre  de Manchelier.  .  
 'ixiisA  
 [,prurit  
 lis  
 ütpet  
 f tur fi  
 jmrt  
 'mourir,  
 e? U  
 , raifm  
 qu'ils  
 imycnt  
 tn avilir.  
 L  y  avoit  quelques  mois  que  
 MonfieurMichel m'avoit fait  
 prefent d'un petit  Negre-mine, 
  c'efl-à-dire, originaire du  
 Royaume  delà  Mine,  fui la  
 côte  méridionale  d'AflFrique,  âgé  de  
 douze  à  treize  ans.  Il  eft'vrai  qu'il  étoit  
 malade  quand  il me  le donna  ,  mais  
 le foin  que j'en  avois  fait prendre,  l'avoit  
 rétabli  en parfaite fanté.  L'autre  
 Negre  qui me fervoit s'apperçût un jour  
 que ce petit garçon  mangeoit  de  la  terre; 
   il m'en  avertit,  je fis tout ce que je  
 pus  pour  l'en  empêcher  ,  mais  ce  fut  
 en  vain ;  il continua  d'en  manger ,  devint  
 hidropique  fans  qu'on  pût  y  remedier, 
   parce  qu'on  ne  pouvoit  pas  
 en  ôter  la  caufe ,  qui  étoit  une  mélancolie  
 noire  qui  le  portoit  à  cet  excès.  
 Les  Negres  de  la côte  de  la  Mine  y  
 font fort  fujets}  ils  fe ^efefperent,  fe  
 pendent,  fe  coupent  la  gorge  fans  façon  
 pour  des fujets fort médiocres  ,  le  
 plus fouvent pour faire delà peine à leurs  
 maîtres,  étant  prévenus  qu'après  leur  
 mort  ils  retournent dans leur pais ;  Se ils  
 font tellement frappez de cette folle ima.- 
 gination  qu'il  eft  impoflible  de  la  leur  
 ôter de la  tête.  
 Je  ne  fçus le  chagrin  du  mien  que  
 quand  il  ne  fut plus  tems  d'y  remedier.  
 Il  avoit  un  frere  qui  appartenoit  à  un  
 de mes voifins ;  comme  on  ne  fçavoit,  
 pas  qu'ils  fuiTent  freres ,  parce  qu'ils  
 n'en  difoient  rien,  on  ne  pouvoit  pas  
 deviner  que  leur  chagrin  venoit  de  n'être  
 pas  enfemble  chez  le  même maître,  
 ce  qui  auroit  été  fort  facile ;  de  forte  
 qu'ils  prirent  la  réfolution  de  fe  faire  
 mourir  afin de  retourner  dans  leur  pays  
 &  chez  leurs  parens.  C'étoit  pour  l'éxecution  
 de  ce beau  projet  que  cesdeux  
 freres  fe  mirent  à  manger  de  la  terre.  
 Le  mien  mourut  le  premier,  fon frere  
 le fuivit  peu  de jours  après.  Quand  je  
 le  reprenois  de  ce  qu'il  fe faifoit  ainfî  
 mourir,  il  fe  mettoit  à  pleurer;  il  difoit  
 qu'il  m'aimoit,  mais  qu'il  vouloit  
 retourner  chez  fon  pere.  Je  l'avois  inftruit  
 ôc baptifé,  mais je  ne  pûs  jamais  
 lui  ôter  cette fantaifie.  
 Un  Angiois  habitant  de  l'Ifîe  faint  
 Chriflophle,  appellé  le  Major  Grips  , d'unAnfut  
 plus  heureux  que moi  pour  conferver  
 fes Negres,  dons  la  plûpartétoient jiophlT  
 Mines.  Comme  cet  homme  leur  étoit Ji^rce  
 fort  rude  ,  ainfi  que  le  font  généralement  
 tous  les  Angiois,  le  nom'bre  de  
 fes Efclaves diminuoit  tous  les  jours  }  
 ils  fe pendoient  les uns  après  les  autres.  
 Il  fut  enfin averti  par  un  de  fes  engagez^ 
 que  tous  fes Negres  avoient  réfolu  
 de s'enfuir le jour  fuivant  dans  le  bois^  
 Se  de  s'y  pendre  tous  de  compagnie  
 pour  retourner  tous  enfemble  en  leur  
 pa'is.  Il  vit  bien  que  les paroles  Sc  les  
 châtimens  ne  feroient  que  difîerer  de  
 querques jours  l'éxecution  de leur  réfolution, 
   &  qu'il  falloir  un  remede  qui  
 eut  du rapport  à la maladie  de  leur  imagination. 
   Il  inftruifit  fes  domefliques  
 blancs  de  ce qu'ils  avaient  à  faire,  6c  
 leur  ordonna  de ch.irger  fur des  chai ettes  
 des  chaudieres  à  fuere  Se  eau  devie, 
   avec  les  autres  attirails  d'une  fucrerie  
 Sc de  le  fuivre.  Il s'en  alla-dans  
 le bois,  il  y  trouva-fes  Negres  qui  difpofoient  
 leurs  cordes  pour  fe  pendre  
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