14» NOUVEAUX VOYAGES AUX ISLES
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i^iMh fées répondoient à celle de la cour & à
l'allée du milieu de mon jardin. La porte
qui entroit de la falle dans ma chambre
écoit à main gauche, elle avoit la
même grandeur que la iklle, mais j'y
ayois fait un retranchement de cinq
pieds, de large fur toute la longueur
qui me fervoit à ferrer mes provifîons,
J'avois ménagé dans ce même efpace
l'efcalier pour monter au gallctas qui
étoit afîez commode pour y placer plulieurs
hamacs i c'étoit la «hambre de
mon Penfionnaire, j où je me retirois
auffi quand je donnois la mienneà quelque
étranger. Je fis faire un perron de
pierre de taille avec trois marches devant
la porte de la falle, le refte du
terrein alloit en pente douce pour donner
lieu aux eaux de s'écouler.
de Le Dimanche ij-. Juillet le Pere Mar-
Annt chez moi. Le lende-
Pat'roL inainjour de fainte Anne, Patrone de
de VE- mon Eglife, les Peres Breton, Imbert,
glife du Chavagnac & Romanet, s'y rendirent.
Maca;4- p^.— jg p^j-g Breton, commele plus
ancien, d'officier. Le Pere Martelli fit
lePanegyrique de la Sainte : Et quoique
nous fuffions tous occupez à confeiler,
nous eûmes alTcz de peine à contenter
tout le monde tant il en étoit venu des
Paroilleavoifines, & même du Fort S.
Pierre. MonfieurDauville comme Marguillier
de la ParoiiTe, invita les princi-
.pauxàdiner, de forte que nous nous
trouvâmes près de trente perfonnes chez
lui. Le Mardi je fis le Service folemnel
pour les défunts delà Paroifle. Monfieur
Michel, comme Capitaine du quartier
donna à manger à toute la compagnie j
car c'étoit comme une regie dans la
ParoiiTe, du moins en ce tems-là, que
le Marguilliertraitoitlejour dekFête,
& le Capitaine le lendemain.
Le Mercredi après dîner je fus conduire
nosPeresjufquesàlaBaiie-pointei
ils me dirent que dans l'AiTemblee qui ,, ,1
s'étoit tenue au fond S. Jacques le 23.
ou je n'avois pû affilier à caufe de mon
bâtiment, on avoit voulu m'élire Syndic
, mais que le Supérieur General s'y
étoit opposé, & avoit dit qu'ilm'avoit
deftiné pour être Supérieur de la Gua-
• deloupe à fon retour de Saint Domingue.
Le Jeudi j . Aouft, je fus obligé d'aller
à la Bafle terre dire adieu à nôtre
Supérieur qui partoit pour S.Domingue.
Il s'embarqua le Samedi dans une Barque
de S. Thomas qui devoit toucher à la
Guadeloupe. Je fus le conduire à bord.
Je partis l'après-dîner dans le Canot de
Monfieur Michel. Le gros tems & la mer
orageufe furent caufe que nous arrivâmes
fi tard chez lui queje fus obligé d'y
coucher.
Le Dimanche 8 ,je me rendis de grand
matin à ma Paroiflè. Je fis marche avec
un Menuifier de la grande Ance, nommé
DubuifFon, pour paliffader l'augmentation
de ma maifon, c'eft-à-dire, pour la
clore de planches embouvetées , blanchies
d'un côte à la varloppe, & cloiiées
fur les pieces de charpente qui compofoient
le corps du bâtiment; il devoit
faire auffi les portes, fenêtres & contrevents
avec quelques tables & armoires.
C'étoit un creollealTez bon ouvrier ,mais
fi glorieux & fi fantafque qu'il n'y avoit
pas moyen de le contenter. Il demeura
chez moi un mois. Se ce mois me parut
une année.
On ne le ièrvoit point encore de vitres
dans nos Ifles, on fe contentoit de fermer
les fenêtres avec des contre vents
&des baluflres, ou quelquefois avec des
chaffis de toile claire. Les Angiois de
la Barbade, Antigüe & autres iiles de
leur dépendance, ont leurs maifons vitrées,
& cela fait un meilleur effet.
C H AF
R A N C O I S E S DE L^AMERIQ^UE.
C A P I T R . E XX.
14P
Maladies des Negres é' des Creoles. Etablijfement d'une ParoijJe au eut de faC
Robert. Defcription de la Bec une, des Galeres ¿r de l'arbre de Manchelier. .
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L y avoit quelques mois que
MonfieurMichel m'avoit fait
prefent d'un petit Negre-mine,
c'efl-à-dire, originaire du
Royaume delà Mine, fui la
côte méridionale d'AflFrique, âgé de
douze à treize ans. Il eft'vrai qu'il étoit
malade quand il me le donna , mais
le foin que j'en avois fait prendre, l'avoit
rétabli en parfaite fanté. L'autre
Negre qui me fervoit s'apperçût un jour
que ce petit garçon mangeoit de la terre;
il m'en avertit, je fis tout ce que je
pus pour l'en empêcher , mais ce fut
en vain ; il continua d'en manger , devint
hidropique fans qu'on pût y remedier,
parce qu'on ne pouvoit pas
en ôter la caufe , qui étoit une mélancolie
noire qui le portoit à cet excès.
Les Negres de la côte de la Mine y
font fort fujets} ils fe ^efefperent, fe
pendent, fe coupent la gorge fans façon
pour des fujets fort médiocres , le
plus fouvent pour faire delà peine à leurs
maîtres, étant prévenus qu'après leur
mort ils retournent dans leur pais ; Se ils
font tellement frappez de cette folle ima.-
gination qu'il eft impoflible de la leur
ôter de la tête.
Je ne fçus le chagrin du mien que
quand il ne fut plus tems d'y remedier.
Il avoit un frere qui appartenoit à un
de mes voifins ; comme on ne fçavoit,
pas qu'ils fuiTent freres , parce qu'ils
n'en difoient rien, on ne pouvoit pas
deviner que leur chagrin venoit de n'être
pas enfemble chez le même maître,
ce qui auroit été fort facile ; de forte
qu'ils prirent la réfolution de fe faire
mourir afin de retourner dans leur pays
& chez leurs parens. C'étoit pour l'éxecution
de ce beau projet que cesdeux
freres fe mirent à manger de la terre.
Le mien mourut le premier, fon frere
le fuivit peu de jours après. Quand je
le reprenois de ce qu'il fe faifoit ainfî
mourir, il fe mettoit à pleurer; il difoit
qu'il m'aimoit, mais qu'il vouloit
retourner chez fon pere. Je l'avois inftruit
ôc baptifé, mais je ne pûs jamais
lui ôter cette fantaifie.
Un Angiois habitant de l'Ifîe faint
Chriflophle, appellé le Major Grips , d'unAnfut
plus heureux que moi pour conferver
fes Negres, dons la plûpartétoient jiophlT
Mines. Comme cet homme leur étoit Ji^rce
fort rude , ainfi que le font généralement
tous les Angiois, le nom'bre de
fes Efclaves diminuoit tous les jours }
ils fe pendoient les uns après les autres.
Il fut enfin averti par un de fes engagez^
que tous fes Negres avoient réfolu
de s'enfuir le jour fuivant dans le bois^
Se de s'y pendre tous de compagnie
pour retourner tous enfemble en leur
pa'is. Il vit bien que les paroles Sc les
châtimens ne feroient que difîerer de
querques jours l'éxecution de leur réfolution,
& qu'il falloir un remede qui
eut du rapport à la maladie de leur imagination.
Il inftruifit fes domefliques
blancs de ce qu'ils avaient à faire, 6c
leur ordonna de ch.irger fur des chai ettes
des chaudieres à fuere Se eau devie,
avec les autres attirails d'une fucrerie
Sc de le fuivre. Il s'en alla-dans
le bois, il y trouva-fes Negres qui difpofoient
leurs cordes pour fe pendre
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