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 N O U V E A U X  VÔY  
 achètent à les prendre  pour  ce qu'ils font  
 après lesavoir bien  goûtez,  fanss'arrêter  
 aux  titres  pompeux  que  les Marchands  
 leur  donnent :  car  ces Marchands  font  
 Gafcons,  & joiiiiîent  auifi-bien  que  les  
 Italiens  du  privilege d'amplifier  autant  
 qu'ils veulent  tout  ce qu'ils difent.  Surquoi  
 il faut remarquer que quand ces vins  
 communs,  c'eft-à-dire, ces  vins  de Palus  
 fontbien choifis,  & qu'ils ont paiTéla  
 raer,  ils  fe dépurent, & font infiniment  
 meilleurs aux Mes que dans le pais qui les  
 a  produits.  j  
 On ne peut  croire la confommation d'e  
 vin qui  fe fait dans les Mes.  Je n'ofe  ra{^  
 porter  ce  que  les Fermiers  du  Domaine  
 du Roi m'en  ont dit,  de crainte qu'on  ne  
 me foupçonne d'exagération.  Il efl: trèscertain, 
   &  tous  ceux  qui  connoiflentle  
 païs,  en conviennent,  que quelque quantité  
 que  les Flottes  en apportent,  s'il  fe  
 paiTe deux  ou  trois mois  fans qu'il  vienne  
 des Vaifleaux, on eft prefque par  tout  
 réduit  à  l'eau.  
 Les  vins de Bordeaux,  deCahors,  5c  
 autres de  ces  côtez-là,  ne  font  pas  les  
 ièuls que l'on  porte  aux  liles.  On  yen  
 porte de Provence,  de Languedoc ,  d'Italie, 
   d'Efpagne,  de  Madère,  de  Canarie, 
   de Portugal.  J*y ay  bû  des  vins  
 du Rhin,  du Necre, de Mofelle, &  des  
 vins  de Bourgogne  &  de  Champagne,  
 qu'on avoit fait venir en bouteilles.  C'eil  
 le moyen  le  plus fûr  de  conferver  ces  
 deux  derniers.  
 A  l'égard des Eaux-de-vie,  &  de toutes  
 foi tes de liqueurs,  tant de France  que  
 des païs  étrangers, la  confommation  qui  
 s'en fait palle l'imagination: tout le monde  
 en  veut  boire,  le prix  eft la  dernierc  
 chofede quoi  on  s'informe.  Il  fuffit que  
 toutes ces boiiTons foient bonnes pour  en  
 avoir  un  débit  prompt  &  avantageux.  
 Les  bonnes  Eaux-de-vie viennent  de  
 Nantes,  de Cognac,  d'Andaye,  d'Or- 
 A G E S  AUX  ISLES  
 leans,  & de la Rochelle.  Il vient quantité  
 de Uqueurs & de vins,  de hqueurs  de  
 Provence  &  de Languedoc,  de  la  cire  
 en  cierges  & en bougies,  des fruits fecs»  
 de  l'huiled'olives,  du favon, des câpres,  
 des olives j des piftaches du  Levant, des^  
 fromages de Roquefort,  de Parmefan  &  
 d^Auvergne,  Se une infinité d'autres denrées  
 pour la bouche,  tant  pourleneceffairequepourle  
 plaifir, & quelque quantité  
 qu'on  en apporte,  tout  eft  enlevé,  
 Scies  Magaûns.les  mieux  fournis  font  
 vuidez  dans, un  moment.  
 Qjant  aux choies qui  font neceiTaires  
 3our l'entretien  des Habitans,.  ou  pour  
 eur plailîr, ou la fourniture de leurs Habitations, 
   on  trouve  toûjours  à les vendre  
 promptement,  &  avec profit.  Oh  
 compte  parmileschofes neceifaireà  une  
 Habitation,,  les chaudieres  de cuivre 6c  
 autre matiere,, & les autres équipages des  
 Moulins,, des Sucreries,  des Rafineries,  
 des Vinaigreries,  ouDiftilatoires,  &des  
 outils pour  tous  les métiers quifont  établis  
 aux  liles.  
 Ce  qui  eft neceiTaire  pour  Tentretien  
 des Habitans  ne peut jamais  être  apporté  
 en trop grande quantité,  trop  bien choifi, 
   trop  à  la mode,  ou  trop  riche,  &  
 trop  cher.  Les  toiles  les plus  fines,  les  
 plus bellesmouiTelines,  & les mieux  travaillées, 
   les perruques  les plus à la mode,  
 les chapeaux  de caftor, les bas de foye ôc  
 delaine,  les  foûliers,  les  botines ,  les  
 draps de toute efpece, les étoffes de foye,  
 d'or  6c  d'argent  ,. les  galons  d'or,  les  
 cannes,  les  tabatieres &  autres  iêmblables  
 bijoux>  les dentelles  les plus  fines.  
 les coëfFures  de femme  de  quelque  prix  
 qu'elles  puiiTent  être,,  la vaiflêl e  d'argent, 
   les montres,  les pierreries,  en unmot,, 
   tout ce qui peut  fervjr  à  l'habillement  
 des hommes,  à  l'ameublement  8c  
 ornement  des  maifons,  ôc fur  tout  aux  
 parures des femmes j  tout eft bien, vendit  
 die- 
 F R A N C O I S E S  D  E  L'A  M  E  R  ï a . U  E.  357  
 II vint chez  nous,chèrement  8c promptement :  car le fexe    Se m'apporta  queleft  
 le même par  tout  le monde,  c'eft  àdire, 
   vain, fuperbe, ambitieux ; les Marchands  
 n'ont point à apprehender de n'être  
 pas bien payez de oe qu'elles prennent  
 chez  eux  pour  leur  ufage  particulier.  
 Quand  les maris font un peu  difficiles fur  
 '  ce'point,  elles ont  toutes  naturellement  
 des  talens merveilleux  pour  les mettre à  
 la  raifon,  &  quand  cela  manque,  elles  
 fçavent en perfeftion faire du Sucre,  de  
 rindigo,  ou  du  Cacao  de  Lune,  avec  
 quoi  elles contentent les Marchands,  qui  
 accoutumez  à ces manoeuvres,  leur prêtent  
 la main,  8c leur  gardent  religieufement  
 le fecret,  
 1  On appelle Sucre ou  Indigo de Lune,  
 celui  qu'on  fait  enlever  la nuit  par  des  
 Efclaves  affidez,  8c que  l'on  vend,  ou  
 Jour avoir  de  l'argent  pour  le jeu,  ou  
 Jour  payer  les chofes qu'on  a achetées  à  
 'infçû des maris,  ou des pères, aufqliels  
 il eft inoiiy qu'on  ait jamais  dit le  veritable  
 prix des chofes qu'on  a achetées.  Je  
 connois des femmes 8c des filles de ce païslà, 
   qui  pourroient  faire leçon  publique  
 de la  fabrique du  Sucre  de  Lune.  
 A  propos  d'étoffes d'or,  je me  fouviens  
 qu'étant  au Fort  Saint Pierre  de la  
 Martinique  vers  la  fin  de  1704.  il y  arriva  
 un Marchand  de Lion,  qui  croïant  
 faire un gainconfiderable,  avoit  porté à  
 Cartagene en teiTe ferme beaucoup de ces  
 étoffes d'or  8c d'argent,  qui fe fabriquent  
 à Lion 8c à Marfeille :  il efperoit en  tirer  
 du moins quatre ou  cinq  cent  pour  cent  
 de profit.  Il avoit  été trompé : Meilleurs  
 les  Efpagnols  ne  s'étoicnt  pas  trouvez  
 d'humeur à lui donner  foixante,  quatrevingt, 
   8c cent  ecus de l'aune de fes étoffes  
 ,  de  forte qu'après  avoir  rodé  aiTez  
 long-tems la côte de Cartagene  8c deCaraquefans  
 rien  vendre,  il  étoit  paiTéenfin  
 à  la  Martinique  avec  fa Cargaifon  
 toute  entiere.  
 ques pieces de  ces belles  étoffes,  croyant  
 que je  les acheterois,  pour  faire des ornemens  
 d'Eglife.  Je  les  vis,  elles  me  
 plurent  beaucoup,  mais je  lui dis,  que  
 nous  n'étions  pas  dans  l'habitude  d'acheter  
 des  ornemensd'Eglife,  8c qu'il  y  
 avoit bien  des années que  nous  nous  repofions  
 de  ce  loin  fur  nos  Flibuftiers,  
 qui fechargeoient  d'entretenir  nos  Eglifes  
 fans qu'il  leur en coiitât  rien,  n'y  à  
 nous  auffi.  En  effet, ils  ont toûjours  eu  
 une  attention  extrême  dans  les  pillages  
 des Villes,  où  dans les prifes  des  Vaiffeaux, 
   de mettre à part  ce qu'ils croyent  
 convenir  aux Eglifes,  8c d'en  faire prefent  
 à  celles  des  lieux  où  ils  font leurs*  
 avmemens.  Ils apportèrent  autrefois à la  
 Tortue tous  les ornemens  8c les vafesfa-- 
 crez  de  l'Eglife  de  Marecaye,  8c  jufqu'aux  
 cloches  8c  au  coq de  cuivre,  qui  
 étoit  à  la pointe du  clocher.  Ilsonttoûours  
 continué  d'en  ufer  de  même,  ôc  
 eur  pieté  répondant  à  leur  bravoure,  
 nous  avons  toûjours  eu  de  quoi  entrete- •  
 nir nos  Eglifes fans rien  acheter,-  quand  
 elles fe font  trouvées  dans  des lieux  fréquentez  
 par  les Flibuftiers.  
 Cette  declaration  chagrina  fort  le  
 Marchand  Lionnois,  il ne  lui  convenoit  
 point  du  tout  de  reporter  fa Marchandife  
 en  Francè,  où  il  n'auroit  peut-être  
 pas  été  en état delà payer.  Son  embarras  
 me  fit  pitié,  je  penfai un  peu à ce que je  
 pourrois  faire  pour  lui,  8c je  lui  dis  de  
 me  laifler deux  de fcs pieces d'étoffes, Sc  
 que fi quelqu'un venoit  lui en  demander,  
 de  n'en  montrer  que  deux  ou  trois,  
 camme  s'il  n'en  avoit  pas  davantage.  
 Je  m'en  allai  fur  le foir en une  maiibn  
 de nôtre voifinage,  où  je  fçavois  bien  
 que je  trouverois  bonne  compagnie  de  
 Dames  ,  8c je  fis  porter  avec  moi  ces  
 deux  pieces.  Je  feignis  qu'on  m'àvoit  
 prw  de  chercher  quelque  belle  étoffe,  
 Z  z  3  poup  
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