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N O U V È Â U X VÔYAGÊS AUX ÏSLES
d'animaux nuifibles} de« Negres poulies
dérober avec d'autant plus de faciliqui
es
faletu-
T<¡ers de
r/ioniague
, effece
de
Mangle.
t é , que l'épailTeur des branches & des
feuilles les cachent facilement} en fécond
lieu j des rats qui font fort friands
des oeufs, 6c qui dans l'occafion mangent
auffi les poulets i & enfin des Terpens
qai font une guerre continuelle
aux volailles 8c aux rats ; car c'ell une
regie générale, que où il y a des rats &
des volailles, on y trouve toûjours des
ferpens. Or comme le voiiînage de ces
trois fortes d'animaux n'ell pas agréable,
&ne tendpasà augmenter le nombre
des poules & des poulets, il vaut
mieux fe paffer d'avoir une mahotiere
proche de fa maifon. '
J'ai veu dans les montagnes de k
Guadeloupe deux fortes d'arbres
•ont un très-grand -rapport aux mang
noirs.
Le premier s'appelle, Paletuvier de
montagne. Il ne croît point aux bords
de la mer,-mais feulement dans les montagnes
qui en font éloignées, - Se fur les
bords des rivieres ou torrens-qu'on trouve
dans les coiipes dfe Ces montagnes.
Sa feuille eft prefque entièrement femblable
aux mangle du bord de la mer.
Son écorce eft noirâtre, de l'épaiffeur
d'unécu; elle s'écaille facilement,
de forte que l'arbre paroît tout crevaiTé.
5ous cette premiere écorce il y a une
peau d'un rouge brun , bien moins épaille
que la premiere, quieftliiTée, qui
ne fe crevaife point, lorfque k premiere
eft ôtée, quoiqu'elle ne foit pas foit
adherente à l'arbre. Ces deux écorces
font fort ameres, le bois en eft brun
quand on l'entame, on le trouve plus
gris à mefure qu'on approche du coeur.
1-1 eft roide, aflez pefant, dur, naturellement
fee, & fans beaucoup de feve.
Il ne vient jamais fort gros > le plus
gros que j'ai veuj. n'arrivoit pas a un
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Bii'i iIit. jH ; Ir™
pied de diametre. Il n'eft pas bien rond. iSj,- jp^i
Quant à fa hauteur, j'en ai trouvé de
vingt-cinq à trente pieds de tiges. Ses
branches ne s'étendent pas beaucoup}
elles font aiTez garnies de feuilles. Ce
qui le fait reifembler au mangle du bord
de k mer, & qui lui en fait donner le
nom, eft que fon tronc eft porté tout
en l'air. La principale racine du plus
gros n'avoit pas trois pouces de diametre
à l'endroit où el e fe oignoit au
tronc, fic/à peine en avoit-eile un à fleur
de terre; mais elle étoit aidée de quinze
ou vingt autres, qui partoient de la
circonférence du bas du tronc, £c qui
foutenoient l'arbre en faifant des arcades
, de forte que d'une racine à celle
qui lui étoit oppofée, il y avoit fept à
huit pieds ; & ainfi l'arbre étoit porté en
l'air, & élevé de terre d'environ trois
pieds. Ces racines font couvertes d'une
peau noirâtre par deflùs, & rouge en
dedans; le coeur de k racine eft rouge,
elle eft liante, pleine d'un fuc amer Se
aflez tendre.
Nous nous fervons de ce bois pour
faire des iâblieres, des faitages & des
traverfes aux cafes de pailles où on conlerve
les bagaces, & à'celles des Negres,
parce qu'il eft droit •& roide, &
qu'il y a peu à travailler pour l'équarir.
- Depuis que je fuis revenu en Europc^^
k s converfations que j'ai euès avec des
voyageurs & des marchands de Cadix
qui avoient été aux Indes Occidenta- Pmjii
leí , m'ont fait penfer que cet arbre''''j't
pouvoit bien être celui qui produit le ¡"^^
•Quinquina, J'ai lû des Relations qui
•m'ont confirmé dans cette penfée, par- ,
ce que tous conviennent que le Qiiinqui-
11a n'eft autre chofe que 'écorcedecertains
mangles qui fe trouvent dans les
montagnes du Pérou ilir îles bords des
-ruiflèaux ou des kcs d'eau douce qui y
• fonti
F R A N C O r S E S P E L'A M E R I a U E: 4?
¡em,
font. Comme k defcription qu'on n/en
a faite convient prefque enlout à l'afbre
queje viens de décrire, j'ai lieu de croi-.
re que fon écorce premiere ou féconde
eft le veritable Quinquina. La feule difference
qu'il y a entre les mangles diu
Pérou & ceux de la Guadeloupe, eft que
les premiers font des arbres nains, &
les féconds de grands arbres. Cette difference
eft peut-être avantageufeà ceux
de la Guadeloupe, & leur écorce pourra
avoir d'autant plus de force & de vertu,
que l'arbre qu'elle couvroit aura de
grandeur, & tiré plus de fubftance du
fond où il eft planté. J'ai écrit a quelques
uns de mes amis à k Guadeloupe
pour avoii" de ces écorces, dont je ne
manquerai pas de faire, l'expérience dé?
que j'en aurai., Sicile reuflit, ce ne fera
pas un petit avantage pour cette Ifle,
du moins pendant quelque tems, car les
meilleures chofes deviennent méprik'
bles & hors d'ufage, dès qu'on lésa fa^
cilement 6c à bon marché.
Le fécond arbre n'a point d'autre nom
que celui de fa couleur, & comme il
eft jaune, on l'appelle Bois jaune: mais
auffi comme il n'eft pas le feul de cette
couleur ôc de ce nom, il me femble
qu'on doit l'appeller Mangle ou Paletuvier
jaune. Sa feuille eft fi femblable à
celle du précèdent, que ce n'eft pas k
peine de k décrire de nouveau, elle eft
feulement beaucoup plus grande, & l'arbre
eft aufli bien plus grand 6c plus gros.
J'en ai vû de plus de deux pieds de dia^
metre , 8c de trente pieds de tige droits
comme une flèche. L'écorce qui eft é-p
paiife de fept à huit lignes, eft d'un jaune
fort pâle ; le bois 6c fur tout le coeur,
cft d'un jaune fort vif. Il a les fibres
longues 6c déliées, le grain fin 6c preifé;
il eft roide, 6c très-bon à quelque
forte d'ouvrage qu'on l'employe, 6c en
quelque lieu qu'on Iç mette. Ce qui le i^py;
• rend femblable àù Paletuvier de mir 6c
de montagne, c'eft que fon tronc eft
porté en l'air fur plufîeurs racines qui le
ibutiennent;. 6c l'appuyent comme des
ârci^des, êf; le ticnnéqt fort élevé hors
de ;terre. .J'en ai vu qui étpiént éleveÉ
de plus de huit pieds. La racine principale
tombe à plomb du centre du tronc ;
elle eft très-petite par rapport à l'arbre '
qu'elle foutient. Si on incife les racines
ou le tronc, il en fort une gomme jaune
6c amere, dont les Negres fe fervent RemeJt
après l'avoir fait chauffer 6c diflbudre
dans de l'eau-de-vie, pour oindre ktête
des petits enfans qui ont k gale ou
la teigne. Elle les guérit promptement
& les nétoye parfaitement bien.
Ce qui m'a donné occafion de connoître
k bonté de ce bois 6c ià durée, eft
que faifant faire un chemin dans une
coftiere, où une avakiTe d'eau aroit emporté
plus de cent pas de terre en kr- ^^^^
geur, avec tous les arbres qui s'y é- ruent
toient trouvez, il y avoit envirpri qua»
torze ans. Je trouvai en foiiilkntk terr
e , tous les arbres pourris, parce qu'ils tjIZ^'u
étoient entièrement eniêvelis fous ter- bornéds
re, 6c que pour peu qu'il plût, elleen "
demeuroit toute imbibée; 6c je ne trouvai
que ce feul arbre qui eut refifté pendant
tant d'années à l'humidité, où plutôt
à la pourriture. Ses racines, fon
tronc, fon écorce 6c fes branches, bien
que toutes enfevelies dans k teri'e 6c
dans k boue, étoient en bon état. Je
le fis couper en billes, 6c enfuite débiter
partie en cartekge, 6c partie en
planches ; ce bois étant poli étoit d'une
couleur jaune très-vive.
La gomme de cet arbre ne perd prefque
rien de fa couleur en fechant. Elle
devient très-dure, & eft toûjours fort
amere. •
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