Phillppe-Ie-Bcl ditdansunc ordonnance dè 1306,.
<pi’iL»voit déjà défendu généralement àùousfës fu-
jet's'toütes manières de -guerre, 8 c tous gages de bataille;
que'plufieurs malfaiteurs en avoient abufé,
pour commettre fecretement des homicides , trahi
fons, 8c autres maléfices griefs, & excès qui de-
meuroient impunis faute de témoins : mais pour leur
ôter toute caufe de mal faire , il modifie ainfi fa dé-
ffenfe ; favoir que quand il apérera évidemment d’un
crime méritant peine de mort, tel qu’un; homicide,
-trahifon , ou autres griefs, violences, ou maléfices ,
-excepté néanmoins le larcin, 8c qu’il n’y aura pas
-de témoins ou autre preuve fuffifante : en ce cas celui
qui par indices Ou fortes préfomptions fera foup-
*çbnné d’avoir commis le crime, pourra être appelle
-en duel.
En conféquence de cette ordonnance, il fut fait
•un formulaire très-détaillé pour les duels, qui explique
lès cds-dans lefquels on pouvoir adjuger le gage
de bataille & les conditions préalables; de quelle
maniere le défendeur pouvoit fe préfenter devant le
juge , fans être ajourné ; les trois cris différons que
faifoit Ië roi ou héraut d’armes, pour appeller les
■ combattans & annoncer le duel; les cinq défenfes
qu?il faifoit aux afliftans par rapport à un certain ordre
qui devoit être obfervé dans cette occalion ;
les requêtes & prOteftations que les deux champions
devoiènt faire à l’entrée du champ, & l’on voit que
chacun d’eux pouvoit être affilié de fon avocat; de
quelle maniéré l’échaffaud & les lices du champ, &
les pavillons des combattans, dévoient être dreffés;
la teneur des trois différens fermens que faifoient
ceux qui alloient combattre, une main pofée fur la
croix , & l’autre fur le canon de la mefle ; enfin les
deux cas où il étoit permis de oultrer le gage de bataille,
favoir lorfque l ’une des parties confefloitfa
coulpe & étoit rendu, ou bien quand l’un mettoit
l ’autre hors des lices v if ou mort. Comme ce dérail
nous meneroit troploin, nous renvoyons auglojfaire
de Ducahge, & au recueil des ordonnances de la troi-
Jîeme race, où cette pieceeft- rapportée tout au long.
Ce qu’il y a encore de fingulier,c’eft que l’on traita
juridiquement la queftion de favoir, fi le duel devoit
avoir lieu : ces fortes de caufes fe plaidoient au
parlement par le miniftere des avocats. (C’eft ce que
l ’on voit par l’ancien ftyle du parlement, inféré dans
les oeuvres de Dùmolin. Cet ouvrage fut compofé par
Guillaume Dubreuil avocat, vers l’an 1330, peu de
tems après que le parlement eut été rendu fédërttaire
à Paris. Il contient un chapitre exprès de daello , où
il efl parlé de la fon&ion des avocats dans les caufes
dé duel : quelques-uns ont cru que cela devoit s’entendre
des avoués ou champions qüi fe baftoient en
duel poür autrui, 8c qu’on appelloit advoatos ou ad-
vocatos. Mais M. Huffon, en fon traité de advocato ,
liv. I. ch. xlj. a très-bien démontré que l’on ne devoit
pas confondre ce qui eft dit des uns & des autres
; & pour être convaincu que les avocats étoient
Cn cette occalion différens des avoués, il fuffit de lire
la queftion 89 de Jean Galli, qui dit avoir plaidé de
ces caufes de duel, & diflingue clairement ce qui
étoit dé là fonûion des avocats 8c de celle des
avoués.
Le roi Jean fit aufîi quelques réglemens au fujet
des duels. On en trouve plufieurs dartsles privilèges
qu’il accorda aux habitans dé Jonville fur Saône en
*35-4» & “ âfts ceux qu’il accorda aux habitans de
Poht-Orfon, en 1366.
Lés pfehneres lettres, c’eft-à-dire celles des habitans
de Jonville, portent en fubflance r que quand
un habitant de Jonville fe fera engagé à un duel, il
pourra s’én départir, même le faire ceffëf, quoique
déjà commencé, moyennant une amende dé foixan-
te fous, s’il efl déjà armé, de cent fous, s’il efl armé
en-dedans des lices , & de dix livres-, fi-le combat
efl commencé, & que les premiers coups nommés
les coups le roi (oient donnés ; que dans tous ces.cas
il payera les dépenfes. faites par rapportait, combat
par le feigneur, par fon confeil, & par fon adversaire
; 8c que eeluiqui fera vaincu dans un duel, (era.
fournis à la peine que le feigneur voudra lui impofer.
Les privilèges des habitans de Pontorfon portent
que s’il arrive une difpute & batterie un jour de marché
entre des bourgeois de ce lieu, & que l’on.donne
un gage de bataille, celui qui aura porté fa plainte
en juftice payera douze deniers manfois ;. que fi la
querelle s’ accommode devant le juge, on ne payera
rien pour la demande qui a été faite du gage de bataille
; que fi la querelle fe renouvellant, on demande
une fécondé fois un gage de bataille, il fera payé
douze deniers, quand même la querelle s’accommo-
deroit enfuite fans combat : que fi dans la difpute il
y a eu- du fang_répandu,& que cela donne lieu à une
conteflation devant le juge, on payera douze den.
pour la première plainte ; que fi on loûtient qu’il n’y
a pas eu de fang répandu, c’efl le cas du duel, que le
vaincu pay era cent neuf fous d’amende ; que fi après
le duel la difpute fe renouvelle, le coupable payera
foixante livres d’amende, ou qu’il aura le poing coupé
; que les mêmes peines auront lieu lorfqu’on renouvellera
d’anciennes inimitiés. Il étoit permis au
créancier d’appeller en duel fon débiteur qui préten-
doit ne lui rien devoir ; l’engagement de fe battre
devoit être répété le troifieme jour devant deux témoins.
Quand on faifoit un fe rm en to n mettoit
une obole fur le livre fur lequel on le faifoit ; 8c
quand ce ferment pouvoit être fuivi d’un duel, on
mettoit quatre deniers fur ce livre.
On trouve encore plufieurs autres lettres ou privilèges
femblables,. accordés aux habitans de différentes
villes 8c autres lieux, qui règlent à-peu-prè9
de même les cas du duel, 8c les amendes 8c autres
peines qui pouvoient avoir lieu.
Sous Charles VI on fe battoit pour fi peu de chofe,’
qu’il fit défenfe fur peine de la vie d’en venir aux armes
fans caufe raifonnable, comme le dit Monftre-
let ; & Juvénal des Urfins aflùre aufîi qu’il publia
une ordonnance en 1409 / portant queperfonne en
France ne fut reçù à faire gages de bataille, linon
qu’il y eut gage jugé par le roi ou par fa cour de parlement
: il y avoit même déjà long-tems que le parlement
connoiffoit des caufes de duel, témoins ceux
dont on a parlé ci-devant, & entr’autres celui qu’il
ordonna en 1386 entre Carouge & Legris ; ce dernier
étoit aeeufé parla femme de Carouge d’avoir
attenté à fon honneur. Legris fut tué dans le combat,
& partant jugé coupable ; néanmoins dans la fuite il
fut reconnu innocent par le témoignage de l’auteur
même du crime, qui le déclara en mourant. Legris,
avant de fe battre, avoit fait prier Dieu pour lui
dans tous les monafleres de Paris. Voye^ C h a m p
i o n , E p r e u v e s .
L’églife fouffroit aufîi que l’on dît des méfiés pour
ceux qui alloient fe battre ; 8c l’on trouve dans les
anciens miflels le propre de ces fortes de meffes ,
fous le titre mijfa pro duello. On donnoit même la
communion à ceux qui alloient fe battre , ainfi que
cela fut pratiqué en 1404 à l’égard des jfept François
qui fe battirent contre fept Anglois ; & le vainqueur
encore,tout couvert du fang de fon adverfaire, ve-
noit à l’églifè faire fon aélion de grâces, offrir les armes
de fon ennemi, ou faire quelqu’autre offrande.
Le dernier duel qui fut autorifé publiquement, fut
le combat qui fe fit en 1547 entre Guy Chabot fils
du fieur de Jarnac, & François de Vivonne fieur de
la Chataigneraye : ce fut à Saint-Germain-en-Laye,
en préferice du roi 8c de toute la cour. Les parties
fe battirent à pié avec l’épée ; Vivonne y fut blefle ,
8c mourut de fes bleflùres : le roi Henri II. fit dès ce
moment voeu de ne plus permettre les duels.
Mais quoiqu’on eût celle de permettre en juftice
le duel, comme une preuve juridique pour décider
les queftions douteufes, les duels que les parties faifoient
fans permiflion , & ordinairement pour des
querelles d’honneur, furent pendant long-tems très-
communs.
Le maréchal de Briflaç en Piémont voyant îa fureur
des duels, imagina de les permettre, mais d’une
façon fi périlleufe, qu’il en ôta l’envie à ceux qui
.auroient pû l’avoir, ayant ordonné que l’on fe bat-
iroit fur u n ,pont entre quatre piques, 8c que. le
vaincu feroit jetté dans la rivière ; fans que le vainqueur
pût lui donner la vie.
,, L ’édit de 1569 ordonna que nul ne pourrait pour-
fuivre au fceau l’expédition d’aucune grâce où il y
auroit foupçon de duel ou rencontre préméditée,
qu’il ne fût actuellement prifonnier à la fuite du roi,
ou bien dans la principale prifon du parlement dans
Je reffort duquel le combat auroit été fait ; 8c qu'aères
qu’il auroit-été vérifié, qu’il n’étoit en aucune
forte contrevenu à l’éd it, 8c que le roi auroit pris
fur ce l’avis des maréchaux, de France, Sa Majeflé
fe réfervoit d’accorder des lettres de remifïion en
connoiffance de caufe. •
L’ordonnance de Blois , art. i$4 , renouvella les
défenfes faites précédemment contre les duels, &c
d’expédier pour ces cas aucunes, lettres de grâce ;
ajoûtant que s’il en étoit accordé quelqu’une par importunité,
les juges n’y auroient aucun égard, encore
qu’elles fuffent fignées du ro i, & cOntre-fignées par
un fecrétaire d’état.
Le parlement de Paris défendit aufli féverement
les duels, comme on voit par un arrêt de la tour-
.nelle du 26 Juin 1599, portant défenfes à tous fu-
jets du ro i, de quelque qualité & condition qu’ils
fuffent, de prendre de leur autorité privée par duels,
la réparation des injures & outrages qu’iîs préten-
droient avoir reçûs ; leur enjoint de fe pourvoir par-
devant les juges ordinaires , fur peine de crime de
lefe-majefté, confifcation de corps 8c de biens, tant
contre lés vivans que contre les morts ; enfemble
contre tous gentilshommes 8c autres qui auroient
favorifé ces combats 8c affilié aux affemblées faites
à l’occafion des querelles, comme tranfgreffeurs des
commandemens de Dieu , rebelles au ro i, infracteurs
des ordonnances, violateurs de la juftice,
perturbateurs du repos & tranquillité publique ; 8c
il fut enjoint à tous gouverneurs, baillis 8c autres
officiers d’y tenir la main.
Les défenfes contre les duels furent renouvellées
par Henri IV . en 1609, par Louis X I I I . en 16 11,
3613, 16 14 , 16 1 7 ; par un édit du mois d’Août
1 6 2 3 ,8c une déclaration du 26 Juin 1624, une autre
de 1626, & un réglement du mois de Mai 1634.
Mais toutes ces lois multipliées furent fans aucun
fruit jufqu’autems de Louis X IV . lequel défendit
les duels encore plus rigoureufement que fes prédé-
ceffeurs, 8c tint la main, à l’exécution des réglemens,
comme on voit par fes édits du mois de Juin 1643 ,
& de 1651 ; par l’ordonnance de 1670, tit. xvj.
art. 4. 8c par plufieurs déclarations des mois d’Août
1679-, Décembre'1704, & 28 Décembre 1711.
La déclaration du mois d’Août 1679 peut être
regardée comme le fiége de la matière, étant le réglement
le plus ample, 8c les autres réglemens pof-
térieurs ne fervant que d’explication à celui-ci. Le
roi exhorte d’abord tous fes fujets à vivre en paix,
de garder le refpeâ convenable à chacun, félon fa
qualité ; de faire tout ce qui dépendra d’eux poür prévenir
tous différends, débats & querelles, fur- tout ’
celles qui peuvent être fuivies de voies de fait; de fe
dpnner les uns aux autres tous les édairciffemens nè-
Tome V%
ceffaires fur les plaintes quipourroientfurvenir entre
eux, déclarant que ce procédé fera réputé un effet
de 1 obéiffance dûe au roi.
Les maréchaux de France l( les gouverneurs dés
province.s!i.»u.6nleur,âbfence les commandais &
les ucutenans des. maréchaux de France, Font charges
déterminer tous les différends qui pourraient
arriver entre les füjets. dti rq i, fuivant le pouvoir
quileuren efoit.déjà,donné. ;par les anciennes or*
donuances.
Ceuxiqui affilieront ou fe rencontreront, quoi*
qu inopmement, aux lieux où fe commettront des
offenfes à l ’honneur, foit par dès rapports Ou dif*
cours injurieux, foit par des manquemens de pro-
meffe ou parole donnée, foit par démentis, coup de
main ou autres outrages, font obligés d’en avertir
les maréchaux de France ou autres perlonnes dénommées
ci-devant, à peine d’être réputés complices
defdites offenfes, & d’être pourfuivis.-comme y
ayant tacitement contribué , pour ne s’être pas mis
en devoir d’en empêcher les fuites.
Les maréchaux de France 8c leurs' lieutenans, les
gouverneurs ou commandans des provinces, .ayant
avis de quelque différend entre gentilshommes & autres
faifant proféflion des armes , doivent a.ufli-tôt
leur défendre toutes voies de fait, & les faire afli-
gner devant eux, 8c s’ils craignent quelqii’infra&ion
à ces ordres, leur envoyer des archers ou gardes de
la connétablie, pour fe tenir près des parties, 8c à
leurs frais , jufqu’à ce qu’elles fe foient rendues devant
celui qui les aura fait appeller.
Les officiers dont on vient de parler ayant le pouvoir
de rendre des jugemens fouverains furie point
d’honneur & réparation d’offenfes, doivent accorder
à l’offenfé une réparation dont il ait lieu d’être
content.
Si l’offenfe bleffe aufli le refpefl dû aux lois 8c ordonnances
, le coupable pourra en outré être conr
damné à tenir prifon ou au banniffement, & en une
amende;
Les différends entre gentilshommes, pour la chaf-
f e , les droits honorifiques des églifes, 8c droits.fép-
daux 8c feigneuriaux, feront réglés dè même avec
des arbitres convenus par les parties , le tout fans
frais, fauf l’appel au parlement.
Au cas qu’un gentilhomme refùfe ou différé fans
caufe légitime d’obéir aux ordres des juges du point
d’honneur, il y fera contraint, foit par garnifon où
par emprifonnement, 8c s’il ne peut être pris, par
faifie 8c annotation de fes biens.
Ceux qui ayant eu des gardes des maréchaux de
France ou autres juges du point d’honneur, s’en feront
dégagés, doivent être punis avec rigueur.
• Celui qui fe croyant offenfé , fera un appel, à qui
que ce foit, demeurera déchûde toute fatisfaélion ,
tiendra prifon pendant deux ans, 8c fera condamné
en une amende qui ne pourra être moindre de la
moitié d’une annee de fes revenus, & fera fufpendu
de toutes fes charges , & privé du revenu d’icelles
durant trois ans : ces peines peuvent même être augmentées
, félon les circonftances.
Si celui qui eft appellé, au-lieu de refufer l’appel
& d’en donner avis aux officiers prépofés pour cet
effet, va fur le lieu de l’aflignation, ou fait effort
pour y aller, il fera puni des mêmes peines que l’ap-
pellant.
Ceux qui auront appellé pour un autre, ou qui
auront accepté l’appel fans en donner avis, feront
punis de même.
Si l’appel eft fait par un inférieur à ceux qui ont
droit de le commander, il tiendra prifon pendant quatre
ans, & fera privé pendant ce tems de l’exercice
de fes chargés, & de fes gages & appointemens. Si
c ’eft un inferieur qui appelle un fupérieur ou feU
X ij