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plus recens de femblables enregifiremens , celte formalité
étant devenue dès-lors très-commune.
La forme des vérifications & enregifiremens fut
donc ainfi fubftituée au droit dont le parlement
»Voit toujours joui, de concourir avec le fouverain
à la formation de la loi. Le parlement conferva pour
les vérifications la même liberté de fuffrages qu’il
«voit, lorfque les ordonnances étoient délibérées
en parlement ; & fi le régent dans fon ordonnance
du 27 Janvier 1359, n’a pas expliqué que cette liberté
étoit confervée au parlement, c’eft que la chofe
étoit allez fenfible d’elle-même, étant moins un droit
nouveau qu’une fuite du premier droit de cette compagnie.
C’eût été d’ailleurs une entreprife impraticable
à ce prince, fur-tout dans un tems de regence,
d’abroger entièrement des ufages auffi anciens ^que
précieux pour la nation 8c pour les interets meme
du ro i} on ne peut prefumer une telle idee dans un
prince encore entouré de vaflaux qui difputoient de
puiffance avec leur fouverain : ce fut aflez pour le
régent d’affranchir le roi de l’efpece d’efclavage oü
étoient fes prédécefleurs de ne pouvoir former le
projet d’aucune loi fans le concours du parlement ;
al fe contenta de recouvrer la vraie prérogative du
Yceptre, & dont nos premiers rois ufoient en dirigeant
feuls ou avec leur confeil particulier, les lois
qu’ils propofoient enfuite aux champs de Mars 8c de
Mai.
Le roi Jean , & Charles fon fils en qualité de régent
du royaume, envoyèrent donc leurs lois toutes
dreflées au parlement, qui les vérifia 8c cnregflra
avec toute liberté de fuffrages. On fit des remontrances
félon l’exigence des cas, pour jufiifier les
motifs de fon refus, ainfi que cela s’eft toujours pratiqué
depuis : en quoi nos rois ont de leur part fuivi
cette belle parole que Cafliodore rapporte jdeThierri
roi d’Italie .pro aquitatefervandd etiam nobispatimur
eontradici.
V enregiflrement des nouvelles ordonnances n’eft
pas comme l’on voit un fimple cérémonial ; 8c en
inférant la loi dans les regiftres, l’objet n’eft pas feulement
d’en donner connoiflance aux magiftrats &
eux peuples, mais de lui donner le caraâere de lo i,
qu’elle n’auroit point fans la vérification 8c enregistrement
, lefquels fe font en vertu de l’autorité que le
toi lui-même a confiée à fon parlement.
Pour être convaincu de cette vérité, il fuffit de
rapporter deux témoignages non-fufpe&s à ce fujet}
l ’un de Louis XI. lequel difoit que c’eft la coûtume
de publier au parlement tous accords, qu’autrement
ils feroient de nulle valeur ; l’autre de Charles IX.
lequel en 1561 faifoit dire au pape par fon ambaf-
fadeur, qu’aucun édit, ordonnance, ou autres a êtes
«t’ont force de loi publique dans le royaume, qu’il
n’en ait été délibéré au parlement.
Nos rois en parlant de l’examen que les cours font
des nouveaux réglemens qui leur font préfentés,
l’ont eux-mêmes fouvent qualifié de vérification ou
fnregijlrement comme termes fynonymes.
C ’eft ainfi que Charles régent du royaume, & qui
fut depuis le roi Charles V . s’explique dans une ordonnance
du dernier Novembre 13585 il défend aux
gens des comptes qu’ils ne paffent, vérifient, ou en-
regiflreht en la chambre aucunes lettres contraires à
cette ordonnance.
L’ordonnance de Rouflillon, article g S , porte que
les vérifications des cours de parlement fur les édits,
ordonnances, 5c lettres patentes, feront faites en
François.
Celle qui fut faite au mois d’Oêtobre pour la Bretagne
, porte que la cour procédera en toute diligence
à la vérification des édits & lettres patentes.
L’édit d’Henri IV. du mois de Janvier 1597,^«. 2.
veut que li-tôt que les édits & ordonnances qnt été !
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renvoyés aux cours fouveraines , il foit promptement
procédé à la vérification, &c.
Il eft vrai que pour l ’ordinaire, dans l’adreffe qui
eft faite des lettres aux cours, le roi leur mande feulement
qu’ils ayent à les faire lire, publier, 8c enregiflrer
: mais cela eft très - naturel ; parce que quand
il envoyé une lo i , il préfume qu’elle eft bonne, 6c
que la vérification ne fera aucune difficulté ; d’ail-,
leurs la le&ure même qu’il ordonne être faite du réglement
, eft pour mettre les membres de la compagnie
en état de délibérer fur la vérification.
Les ordonnances, édits, déclarations, & autres
lettres patentes contenant réglement général, ne
font point enregiflrées au confeil du ro i, attendu que-
ce n’eft pas une cour de juftice ; elles ne font adref-
fées par le roi qu’aux cours fouveraines & aux con-
feils fupérieurs qui font les mêmes fondions.
Lorfqu’on les adrefle à différentes cours, elles font,
d’abord vérifiées 6c enregiflrées au parlement de Pa-:
ris ; c’eft une des prérogatives de ce parlement : c ’eft
pourquoi Charles IX. ayant été déclaré majeur à 13
ans Ôt jour au parlement de Roiien en 1563, le parlement
de Paris n’enregifira cette déclaration qu’a-
près d’itératives remontrances, fondées fur le droit
qu’il a de vérifier les édits avant tous les autres par-
lemens 6c autres cours.
Les ordonnances 6c les édits font enregifirés toutes
les chambres affemblées ; 6c fi c’eft dans une compagnie
femeftre, on aflemble pour cet effet les deux fe-
meftres. Le» déclarations données en interprétation
de quelque édit, font ordinairement enregiflrées par
la grand-chambre feule, apparemment pour en faire
plus prompte expédition, 6c lorfque les déclarations
font moins de nouvelles lois, qu’une fuite néceflaire
6c une fimple explication de lois déjà enregiflrées.
Il y a quelquefois de nouveaux réglemens qui ne
font adreffés qu’à certaines cours, qu’ils concernent
feules : mais quand il s’agit de réglemens généraux,
ils doivent être enregifirés dans tous les parlemens 6e
confeils fouverains.
On les fait aufli enregiflrer dans les autres cours
fouveraines, lorfqu’il s’agit de matières qui peuvent
être de leur compétence. C ’eft ainfi que dans une
ordonnance de Charles V. du 24 Juillet 1364, il eft
dit que ces lettres feront publiées par-tout où il appartiendra
, 6c enregifirés en la chambre des comptes
6c en celle du thréfor à Paris.
Quand on refufoit d’enregiflrer des lettres à la
chambre des comptes, on les mettoit dans une armoire
qui étoit derrière la porte de la grand-chambre
(c’etoit apparemment le grand bureau), avec
les autres chartes refufées 6c non-expédiées, 6c l ’on
en faifoit mention en marge des lettres. II y en a un
exemple dans des lettres de Charles V . du mois de
Mars 1372. La chambre ayant refufé en 1595 d'en-
regfirer un édit portant création de receveurs provinciaux
des parties cafuelles, ordonna qu’il feroit
informé contre ceux qui adminiftrent mémoires 6c
inventions d’édits préjudiciables à la grandeur 6c
autorité du roi ; elle fit le 21 Juin des remontrances
à ce fujet, 6c l’édit fut retiré.-
Les généraux des aides dès les premiers tems de
leur établiffement, .enregfiroient aufli les lettres qui
leur étoient adreffées ; tellement que Charles V. par-
une ordonnance du 13 Novembre 13 7 2 ,défend au
receveur général de payer fur aucunes lettres ou
mandemens, s’ils ne font vérifiés en la chambre ou
ailleurs, où les généraux feront affemblés ; 6c il eft
dit que dorénavant les notaires mettront ès vérifications
le lieu où elle aura été faite ; qu’en tontes lettres
8c mandemens refufés en la chambre (des généraux),
il fera écrit au dos figné dès notaires, que
les lettres ont été refufées, 6c cela quand même les
généraux au lieu de les refqfer abfolument, pren-
E N R «Iront un long délai pour faire réponfe ; 6c il ordonne
,-non pas que les lettres mêmes , mais que la teneur
(c’eft-à-dire la fubftance) des lettres fera enre^
giftrée en la chambre ; ce qui lignifie en cet endroit
que l’on fera mention de ces lettres fur le regiftre , &
que l’ori y expliquera au long les caufes du refus.'
La cour des aides qui tire Ion origine de ces généraux
des aides, eft pareillement en poffeffion de vérifier
6c enregiflrer toutes les ordonnances, édits, déclarations,
& autres lettres qui lui font adreffées7, &
d’en envoyer des copies aux lièges de fon reffort ,
pour y être lues, publiées, 8c regiflrées.
L ’ordonnance de Moulins & l’édit du mois de Janvier
1597, enjoignent aux cours de procéder incef-
famment à la vérification dés ordonnances, toutes
autres affaires ceffantes. L’ordonnance de 1667 ajoû-
te même la vifite 8c jugement des procès criminels,
ou affaires particulières des compagnies.
Mais comme il peut échapper à nos rois de ligner
des ordonnances dont ils n’auroient pas d’abord reconnu
le défaut, ils ont plufieurs fois défendu eux-
mêmes aux cours d'enregiflrer aucunes lettres qui feroient
feellées contre la difpofition des ordonnances.
11 y a entre autres des lettres de Charles VI. du
3 5 Mai 1403 , pour la révocation des dons faits fur
le domaine, qui font défenfes aux gens des comptes
& thréforiers à Paris , préfens & à venir, fup-
pofé qu’il fût fcellé quelques lettres contraires à
«elles-ci, d'enpaffierni vérifier aucunes , quelques man-
rdemens qu'ils eujjcnt, du roi , foit de bouche, ou autre-
intnt, fans en avertir le roi ou la reine, les oncles 6c
frères du ro i, les autres princes du fang, 6c gens du
confeil.
Charles IX. par fon édit du mois d’Oûobre i 562,
pour la Bretagne, dit que y? la cour trouvait quelque
difficulté en la vérification des édits, elle enverra promptement
fes remontrances par écritou députera gens pour
les faire.
La même chofe eft encore portée dans plufieurs
autres déclarations poftérieures. ;
Le parlement & les autres cours ont dans tous les
tems donné au roi des preuves de leur attachement,
en s’oppofant à la vérification des ordonnances ,
édits, & déclarations, qui étoient contraires aux
véritables intérêts de S. M. ou au bien public ; 6c
pour donner une idée de la fermeté du parlement
dans ces occafions, il fuffit de renvoyer à ce que
le premier préfident de la Vaequerie répondit à Lotus
XI. comme on le peut voir dans Pafquier , en fes recherches
, liv. VI. chap. xxxjv.
Lorfque les nouveaux réglemens adreffés aux cours
font feulement fufceptibles de quelque explication,
les cours les enregiflrent avec des modifications. On
en trouve des exemples dès le tems du roi Jean, notamment
à la fin de deux de fes ordonnances du mois
d’Avril 1361 , Où il eft dit qu’elles ont été vues, corrigées
, & lues en parlement. La poffeffion des cours à
cet égard eft confiante, 6c leur droit a été reconnu
en différentes occafions, notamment par un réglement
du confeil du 16 Juin 1644.
Les particuliers ne peuvent pas former ôppofi-
tion à l’enregiflrement des ordonnances, édits, & déclarations
, ni des lettres patentes portant réglement
général, mais feulement aux lettres qui ne concernent
que l’intérêt de quelques corps ou particuliers.
Le procureur-général du roi peut auffi s’oppofer
d’office à l'enregtflrement des lettres patentes obtenues
par des particuliers, ou par des corps 6c communautés,
lorfque l’intérêt du roi ou celui du public
s’y trouve compromis. On trouve dès 1390 une
oppofition de cette efpece formée à Y enregiflrement
de lettres patentes, du mois de Juin de ladite année,
à la requête du procureur-général du ro i, lequel fit
propofer fes raifbns à la cour par l’avocat du roi ; il
E N R _ m
rut plaidé fur fort oppofition , & l’affaire fût appoim
tee. Lé chapitre de Paris qui âvoit obtenu ces lettres,
fe retira jj&rdéverS le ro i, 6c en obtint d’au-
tres. ? par lefquelles le roi enjoignit au parlement
d'enteglflrër les premières. Le procureur - général du
roi s’oppofa encore à Yenrcgiflreintnt de cès nouvel^
les lettres ; 6c lui & le chapitré ayant fait utr accord
fous le bon plaifir du parlement, 6c étant convenus
de certaines modifications, le parlement enregiftrâ
les lettres à la’ charge des modifications; '
Quoique lès particuliers ne puiffent pas former
oppofition à Venregiflrement des Ordonnances, édits,
déclarations, cette voie eft néanmoins permife aux
compagnies qui ont une formé publique, lorfque la
loi- que l’on propofe paroît bleffer leurs droits Ou privilèges.
Gela s’eft vû phifièurs fois au parlement.
Pour ce qui eft de la formé en laquelle fe fait dans
lés cours Venregiflrement y c’eft-à-dire Frnfcription des
nouveaux réglemens fur les rëgiftres, c’eft une dernière
opération qui eft toujours' précédée dé la lecture
6c vérification dés-réglemens ; elle étoit auffi
autrefois- précédée de leur publication, qui fe faifoit
à l’audience.
Il paroît que dès lë tenis de la fécondé race, lès
comtes auxquels on envoyoit les nouveaux régler
mens pour les faire publier dans leur fiége, en gar-
doient l’expédition dans leur dépôt, pour y avoir
recours au befoin ; mais il y aVoit dès - l'oVs un dépôt
en chef dont tous les autres n’étoient qu’uné
émanation : cé dépôt étoit dans le palais du roi.
En èffet Charles le Chaüve ordonria en 803 que
les capitulaires de fon père feroient derechef' publiés
; que ceux qui n’en auroient pas de fcopie en-
voyeroient, félon l’ufage, leur commiffaire 6cun
greffier, avec du parchemin, au palais, dû rOi t pour
en prendre copie fur les originaux qui feroient, dit^
il , pour cet effet tirés de armario noflro; c’eft-à-dire
du tréfor .des Chartres de la couronne : Ce qui fait
connoître que l’on y riiettoit alors l’original des ordonnances.
C’eft ce dépôt que S. Louis fit placer à
côté de la fainte ch ap e lleo ù il eft préfentement,
6c dans lequel fe trouve le regiftre de Philippé-Au-
gufte, qui remonte plus haut que les regiftres du
parlement, 6c contient plufieurs anciennes ordon-,
nances de ce tems.
L’ancien manuferit dé la vie de S. Louis, que l’on
conferve à la bibliothèque du R o i, fait mention que
ce prince ayant fait plufieurs ordonnances,, les fit
enregiflrer 8cpublier au châtelet. C ’eft la première fois
que l’on trouve ce terme, enregiflrer, pour exprimer
l’infcription qui fe faifoit des reglemens entre les
aêles du tribunal ; ce qui vient de ce que jtifqu’âlbrs
ort ffufoit point en France dé regiftres pour écrire
les aftes des tribunaux ; on les écrivoit fur des peaux,
que l’on rouloit enfuite : 8c au lieu de dire les minutes
& regiftres du tribunal, on difoit les rouleaux,
rotula ; & lorfque l’on inferivoit quelque chofe fur
ces rouleaux, cela s’appelioit inrotulare , cômme il
eft dit dans deux ordonnances, l’irne de Philippe-Au-
gufte , de l’an 1218. art. 6. l’autre de Louis VIII.
du mois de Novembre 1223. On trouve cependant
au troifîeme regiftre dès olim, fol. x f i 6c 152, en-
fuite de deux arrêts, ces ternies , ità regiflratum in
rotulo iflius parlamenti. Ainfi la mention que l’on faifoit
d’nn arrêt fur les rouleaux, s’appelioit auffi enregiflrement.
Etienne Boileau, prévôt de Paris fbns S. Louis ,
fut le premier qui fit écrire en cahiers ou regiftres,
les aêtes de fa jurifdiftioh.
Jean de Moritluc , greffier du parlement, fit dé
même un regiftre des arrêts de cette cour, qui commence
en 1256 : cet ufagé fut commué par fés fuc-
ceffeurs. ‘ :
Le plus ancien regiftre de la chambré des comp