fi abfurdes, font caufées par quelque humeur domi-
nante, dont le vice eft d’une nature fouvent inconnue
, qui ne peut être corrigé que par lés chofes mêmes
qui font l’objet de l’appétit dépravé. C ’eft fur
ce fondement qu’Hippocrate recommande aux Médecins
d’avoir égard aux fantaifies des malades pour
des chofes abfurdes , quoiqu’elles paroiffent contraires
au cara&ere de la maladie.
Au relie, le pica & le malaria des filles & autres ,
étant prefque toujours un fymptome de quelque maladie
principale , comme des obftruCtions, des fup-
prelîions de réglés , des pâles-couleurs, ils doivent
être traités conformément à la caufe de la maladie
dont ils dépendent. Voyez Obstruction,
Suppression , Pales-Couleurs. “
On a vu des perfonnes avoir des envies de chofes
qui ne font point relatives à la nourriture. Salmuth,
obferv. fait mention d’une dfpece de pica, dans lequel
ceux qui en étoient affeCtés fouhaitoient & fe pro-
curoient ardemment de voir des chofes blanches,
& étoient trilles , mélancoliques , fans appétit,
lorfqu’ils ne pouvoient pas fe l’atisfaire. Ceux qui
ont été piqués de la tarentule ont aufli des fureurs
pour certaines couleurs : ils ont quelquefois la paf-
îion de fe rouler dans la boue, de courir, de battre
, &c. les danfes, lès divertiffemens diiïipent, dans
ces ca s , ces fortes de fantaifies. Certaines filles ont
la paillon d’aimer les mauvaifes odeurs , comme
celle des cuirs tannés, moifis, de la fumée de la
chaux, de lapoufliere des cendres. M. de Sauvages
parle, dans fes claffes de miladies, d’un homme d’ef-
prit q u i, étant affeCté de mélancolie , s’occupoit
principalement à compter le nombre des efcaliers,
des carreaux de vitre , des briques & autres chofes
femblables : il ne ceffoit de répéter cette opération,
& il s’y portoit avec palîion ; c’étoit-là fon envie.
Ce mot fe dit aufli des taches ou autres chofes
contre nature qui paroiffent fur le corps des enfans
nouveaux-nés, que l’on, attribue au pouvoir de l’imagination
des femmes enceintes, d’imprimer fur le
corps des enfans renfermés dans leur fein , les figures
des objets qui les ont frappées particulièrement,
enfuite des fantaifies qu’elles ont eues pour certaines
chofes, fans pouvoir fe faiisfaire; ce qui a fait
donner proprement le nom d'envie à ces defe&uofi-
tés. C’eft mal-à-propos qu’elles font nommées ainfi,
lorfqu’elles font réputées une fuite de la crainte, de
la frayeur, ou de tout autre fentiment de l’ame, qui
n’eft point agréable : ces marques font appellées des
Latins d’une maniéré plus générique, natvi, & des
Grecs tnriXot, cviXo/xcLna,. V F<ETUS , GROSSESSE, Imagination. (d)
* Envie , (Myth.) Les poètes grecs & romains
en ont fait une divinité infernale : ils ont dit qu’elle
avoit les yeux louches , le corps décharné, le front
p â le, l’air inquiet, la tête coiffée de ferpens, Oc.
ENVIEUX, JALOUX, fynon. Voici les nuances
par lefquelles ces mots different. i° . On eft ja lo u x
de ce qu’on poffede , & envieux de ce que poffedent
les autres : c’eft: ainfi qu’un amant eft ja lo u x de fa
maîtreffe, un prince ja lou x de fon autorité. 2°.
Quand ces deux mots font relatifs à ce que poffedent
les autres, envieux dit plus que ja lou x : le premier
marque une difpofition habituelle & de caractère
; l’autre peut défigner un fentiment paffager :
le premier défigne aufli un fentiment aêluel plus fort
que le fécond. On peut être quelquefois ja lo u x fans
être naturellement envieux ; la ja lou jie, furtout au
premier mouvement, eft un fentiment dont on a
quelquefois peine à fe défendre : Venvie eft un fen-
timent bas, qui ronge & tourmente celui qui en eft
pénétré. (O)
ÉNUMÉRATION. (Art poétique.) Cette figure de
Rhétorique eft admirable en Poéfie, parce qu’elle
raffemble, dans un langage harmonieux, les traits
les plus frappans d’un objet qu’on veut dépeindre ,
afin de perfuader, d’émouvoir & d’entraîner l’ef-
prit, fans lui donnèr lç tems de fe reconnoître. Je
n’en citerai qu’un feul exemple, tiré de la tragédie
d’Athalie.
Jehu , qi? avoit ckoiji fa fagejfe profonde ;
Jehu, Jùr qui je vois que votre efp.oir fe fonde 9
D'un oubli trop ingrat a payé fes bienfaits.
Jehu laijfe et 'Achah l'affreuj'e fille en paix ;
. Suit des rois d'Ifrail les prophanes exemples ;
Du vil dieu de l'Egypte a confcrvé les temples
Jehu , fur les hauts lieux, ofant enfin offrir
Un téméraire encens que Dieu ne peut J'ouffrir
N'a , pour fetvir fa caufe & venger fes injures *
Ni le coeur affe{ droit, ni les mains affez pures.
Article de M. le Chevalier DE J AU COU RT.
ÉN UM ÉRAT IO N , DÉN OM BREM EN T, ( Hi(l. anc.}
l’aCtion de compter ou de marquer le nombre des
chofes. Voyez N UM ÉR A T ION .
Au tems de la naiffance de Notre-Seigneur, Célaç-
Augufte avoit ordonné qu’on fît le dénombrement du
monde, ou plutôt du peuple de fpn empire ; quoique
d’habiles auteurs eroyent que ce cenfus ou dénombrement
, dont parle S. Luc, ne s’étendit pas fur tout
l’empire, mais qu’il fut particulier à la Judée. Voyez
Perizonius, de cenfu judaïco , &C Berger , de viis mi-
litaribus.
On étoit à Rome dans I’ufage de faire le dénombrement
de toutes les. familles * Ce fut Servius Tullius
qui fit le premier , lequel ne fe trouva comprendre
que 80 mille hommes : Pompée & Craffus en firent
un fécond, qui fut de 400 mille hommes ; celui
de Céfar ne fut que de 100 mille hommes ; ainfi la
guerre civile avoit fait périr 300 mille citoyens romains.
Sous Augufte, en l’an 725 , les citoyens romains ,
dans toute l’étendue de l ’empire , fe trouvèrent
monter à quatre millions foixante-trois mille. L’an
746 on fit encore le dénombrement, des citoyens ro mains
, qui fe trouva monter à quatre millions deux
cens trente-trois mille. L’an 766 , qui fut le dernier
de la vie d’Augufte, ce prince fit avec Tibere un
autre dénombrement des citoyens romains, dont le
nombre fe trouva monter à quatre millions cent
trente-fept mille perfonnes. Claude fit un nouveau
dénombrement l’an 48 de Jefus-Chrift; & fuivant le
rapport de Tacite , les citoyens romains répandus
dans tout l’empire, fe trouvoient monter alors à fix
millions foixante-quatre mille, quoique d’autres re-
préfentent ce nombre comme beaucoup plus grand»’
Une médaille de Claude très-rare marque plus pré-
cifément le dénombrement fait par Claude, qu’elle appelle
ojlenjîo, &c qu’elle fait monter à fept million*
de perfonnes en état de porter les armes, fans parler
des armées qui étoient fur p ié , & qui mon*;
toient à cinquante légions, cinquante-fept cohortes
& foixante loldats. Après cette énumération, nous
n’en trouvons plus jufqu’à celle de Vefpafien , qui
a été la derniere. Veyezl'article D ÉN OM B R EM EN T ,
Chambers. (G)
* ENVOI, f. m. (Gramm.) aCtion par laquelle ott
fait tranfporter une chofe d’un lieu à un autre. On
dit faire un envoi de marchandifes par terre ou par
eau, faire un envoi de lettres de change par un cour;
rier ou par un exprès. (G)
ENVOIE, (Marine.) terme de commandement
que l’on fait au timonnier de pouffer la barre du
gouvernail, pour mettre le vaifleau vent devant.
m _ , I
* EN VOILER, (s’) v . paff. (Art. mechan.) il fe dit
de tout corps qui venant à fe tourmenter, le fléchit,
8c dont les parties qui étoient auparavant dans un
friêhie plan, fe trouvent dans des pîails différëfts.
S'envoiler eft fynonyme à fe déjetter ; les planches
s'envoilent par l’a&ion de l’humidité, les lames Ji déjettent
à la trempe, -
E N V O Y É , àdj. pris fubft. (Hijl. iiïod.) fe dit
d’une perfonne députée ou envoyée exprès pour
négocier quelque affaire avec un prince étranger ou
quelque république. Voyez Ministre.
• Les miniftres qui vont de la cour de France -ou dè
celle d’Angleterre, à Genes, vers les princes d’Allemagne,
& autres petits princes & états, n’ont
point la qualité drambaffadeurs, mais de fimples envoyés.
Joignez à cela que ceux que quelques grands
princes envoyent à d’atitres de même rang, par
éxemplé l’Angleterre à l’empereur, n’ont fouvent
que le titre d'envoyé, lorfque le fujet de leurcom-
miflion n’eft pas fort important. Voyc{ Ambassadeur.
Les envoyés font ou ordinaires où extraordinaires,
Voye^ Ordinaire & Extraordinaire.
Les uns & les autres joiiiffent de toutes les prérogatives
du droit dés gens aitfii-bien que les ambaffa-
deurs, mais on ne leur rend pas les mêmes honneurs.
La qualité <Y envoyé .extraordinaire,{uiviLht l’obier
vation de "Wiquefort, eft très-moderne, & même
beaucoup moins ancienne que celle de réjîdcnt. Les
ininiftrés qui en ont éîc revêtus, ont voulu d’abord
fe faire confidérer prefque comme des ambaffadeurs,
mais on les a mis depuis fur un autre pié.
La cour de France en particulier déclara en 1654*
qu’on ne feroit plus à cés miniftres l’honneur de leur
donner les carroffes du roi & de la reine pour les
fconduire à l’audience, & qu’on ne leur accorderoit
plus divers autres honneurs.
Juftiniani, le premier envoyé extraordinaire de là
république de Venife à la cour de France, depuis que
les honneurs y ont été réglés, prétendit fe couvrir
en parlant au roi, & cela lui fut refufé. Le roi déclara
même à cette occafion qu’il n’entendoit point
que Y envoyé extraordinaire qui eft de fa part à Vienne
lût regardé autrement qu’un réfident ordinaire. Depuis
ce tems, on a traité de la même maniéré ces
deux, efpeces de miniftres. Voyez Wiquefort, Chamb.
& le dictionn. de Trévoux. (G}
ENVOYER, v. a£t. (Gramm.) faire l’envoi d’une
chofe. La compagnie des Indes envoyé tous les ans
un certain nombre de vaiffeaux à Pondichéry.
* ENYALIUS, (Mythol.') furnom qu’on donnoit
à Mars, fils de Bellonne, qu’on appelloit aufli Enyo.
E O
ËOLE, (Mythol.') e’eft le roi, ou pour mieux diré
le dieu des vents ; ca r, fuivant la remarque du P.
Sanadon, les vents paroiffent dans la Mythologie
comme des efpeces de petits génies , volages, inquiets
& mutins, qui femblent prendre plaifir à bou-
ieverfer l’univers. Ce font eux qui ont donné entrée
à la mer au milieu des terres, qui ont détaché quantité
d’îles du continent, & qui ont caufé une infinité
d’autres ravages dans la nature»
Pour prévenir de pareilles entreprifes dans la fuite
, la fable les refferra dans dè certains pays, particulièrement
dans les îles éoliennes, aujourd’hui les
îles de Lipati, entre l’Italie & la Sicile ; & en confé-
quence la même fable leur donna un roi nommé
Eole. ■
Ce nouveau monarque, ôit plutôt ce nouveau
dieu, a joiié un grand rôle dans la Poéfie, pour élever
les tempêtes, ou pour les calmeri Ulyffe s’adreffe
à lui dans Homere, pôür en obtenir Une hetireufe
navigation : mais dans Virgile, la reine même des
‘dieux ne dédaigne pas d’implorer fon fecours, pour
ftraverièr l’établiffement de la colonie troÿenne en
Tome V,,
Italie, & Pon pêüt dire qtlé lé toi dés Véiits â là
gloire de commencerle nceiid de cette grande action
dans l’Enéide.
C ’eft lui qui, dans un antre vafte & profond, tient’
tous les vents enchaînés* il les gouverne-par fa püifi
fance ; & fe tènant afîis fur là montagne la plus haute
, il appaife à fa volonté leur furie, s’oppofe à
leurs efforts, les arrête dans leurs priions * Ou les
met en liberté : s’il ceffoit un moment dé veiller’fut
eux, le ciel, la terre, la mer, tous les ëlémens fe-,
roient confondus,
. . . . . . . . . . . . . . . Celfâ fedet (Eo/us a'rcè
Sceptra ïenens , mollitque ànimos ', & temperat iraSi
Ni faciat, maria , ac terras ^ ccelùmqüe pYofunduvt
Quippe fçrant rapidi fecûm > verrantque per aurasï
Æneïd, lib, I. v.Sz. Gfequ. 1
Junoii, polir l’engagér à fervir fa fcolere,lüi offre,
en mariage une des quatorze nymphes de fa fuite 9
& la plus belle de toutes, en un motDéjopéè :
S une fnihi bis feptem prajlahti corpore nymphte .•
Quarum, quoe forma pulcherrima , Déjôpeiam
Co 'nnubio jiingam flabïli', pYopriamqué dicabo :
Omnès'ut teçum mtrïtis pro talibus ari'nos
E xilât, & pülchrâ faciat te proie parefitémf “
A ces mots, Eole enfonce fa lance dans le flanc
de la montagne, & l’entr’ouvre : tous les vents à
l’inftant fortent impétueufement de leurs cavernes,
&: fe répandent fur la terre & fur la mer :
Hoec ubi dicta , iavum. converfâ cufpidt montent
Impulit in latus. A t venti, velut agmine facto ■
Qud data porta, ruunt , & terras turbine perfiant„
Alors s ’élève une tempête affrenfé, dont il faut
lire la peinture admirable dans le poème même, car
elle n’a point de rapport direét à cet article. Voyez
encore fur Eole, Diodore de Sicile, lib. V. Strabon ,
lib. I. Ovide, Métamorph. lib. X I . Pline, lib. I ll.c .jx^
Bochard, l’abbé Banier, les dictionn. de Mythologie >
&c. Article deM. le Chevalier DE J A UCQURT-.
E O L IE ou ËOLIDE, f. f. (Géogr.) contrée dé
l’Afie mineure, qui s’appella Myfie, avant que le*
Eoliens vinffent l’habiter & lui donner leur nom.’
Elle eft fituée fur la mer Egée, au midi de laTroade*
& au feptentrion de l’Ionie, entre ces deux pays.
EOLIEN ou EOLIQUE, adj. (terme de Gramm.y
nom d’un des cinqdialeâes de la langue greqùe. Voy. Grec & Dialecte.
Il fut d’abord en ufage dans là Béotië, d’où il
paffa en Eolie. C ’eft dans ce dialeéte que Sapho &
Alcée ont écrit»
Le dialeéle éolien rejette fur-tout l’àccerit rude
ou âpre. Du refte il s’accorde en tant de chofes avec
le dorique, qu’on ne fait ordinairement de ces deux
qu’un feul dialeéle. C ’eft,pourquoi la plupart des
grammairiens ne comptent que quatre différons dialectes
grecs , quoiqu’il y en ait réellement cinq, eft
en failant deux de Yéolien & du dorique» Voyet D orique & D ialecte. (G)
Eolien, en Mufiquè, eft le nom que les anciens
doniloient à un de leurs modes ou tôns, duquel la
corde fondamentale étoit immédiatement au-deffus
de celle du mode phrygien» Voyez Modes.
Le mode éoliert étoit grave, au rapport de LafuS.’
« Je chante, dit-il, Cérès & fâ fille Mélibée époufe
>> dé Pluton, fur le mode éolien, rempli de gravité. »
(■ V) , . „ ■ ■ '
* EOLIENS, f. m. pi» (Géogr. Hijl. anc.) peuples
deGrece, ainfi appëllés d’Eole fils d’Helleri, Ils paf-
ferent dans l’Afie mineure, & s’établirent dans la
Myfie, dont ils changèrent le nom en celui d'Eolie.
Voyez Eolie.
* EOLIENNES, adj. pris fubft. (Géogr. anc. Mythol.)
çe font aujourd’hui Jç$ îles de Lipati. Les vol*«
A A a a a ij