Époque, f. f. .(^Tffoire.) On appelle ainfi certains
évenemens remarquables dont le tems eft exactement
ou à-peu-près connu dans la chronologie
ancienne & moderne, & qui fervent comme de points
fixes pour y rapporter les autres évenemens. Ce
mot vient d’un mot grec qui fignifie s'arrêter, parce
que les époques dans l’hiftoire font comme des lieux
de repos, & pour ainfi dire, des ftations où l’on
s’arrête pour confidérer de-là plus à fon aife ce qui
fuit & ce qui précédé, & pour lier entr’eux les évenemens.
Voyez ce que dit fur ce fujet M. BolTuet
dans fon difcours fur THifloire univerfelle.
Les principales époques de l’Hiftoire facrée , par
exemple , font la création du monde , le deluge ,
la vocation d’Abraham, la fortie d’Egypte , Saul
ou les.Juifs gouvernés par des rois, la captivité
de Babylone, le retour de la captivité, la naiffance
de J. C. Les temps de ces différentes qpoques font dif»
férens, félon la chronologie que l’on juge à propos
de fuivre. Voyez Age , Chronologie, &c.
Les principales époques de l’Hiftoire eccléfiafti-
que', font Conftantin ou la paix de l’églife, la
naiffance du Mahométifme, le fchifme des Grecs,
les croifades, le grand fchifme d’Occident, le Lu-
théranifme, &c.
Celles de l’hiftoire de France font Clovis, Pépin,
Hugues Capet, tige des trois races de nos rois : &
dans chacune de ces trois époques principales on peut
en placer d’autres ; par exemple , depuis Hugues
Capet , on peut placer différentes époques à S. Louis,
à Charles le Sage, à François I , à Henri IV , à
Louis XIV. Il en eft de même de l’hiftoire des autres
peuples. VoyezHistoire. Voyez Varticle Ère. La réglé qu’on doit fe propofer pour les époques
, c’eft qu’elles ne foient ni trop, ni trop peu
nombreufes. On en fent aifément la raifon. Dans
le premier cas, le Ieâeur ou l’hiftorien s'arrêterait
inutilement à chaque pas ; dans le fécond il s’épui-
feroit de fatigues, ayant trop de terrain à emhfafler
à la fois. (O)
L’époque eft donc proprement un terme ou point
fixe de tems, depuis lequel on compte les années.
Voyez An.
Les nations ont différentes époques, & cela n’eft
pas furprenant : car comme il n’y a point de raifons
tirées de l ’Aftronomie qui rendent l’une préférable à
ï’autre , la fixation des époques eft purement arbitraire.
La principale époque des Chrétiens eft celle
de la naiffance ou incarnation de J. C. celle des
Mahométans eft l’hégire; celle des Juifs, la création
du monde ; celle des anciens Grecs, les Olympiades
; celle des Romains, la fondation de Rome ; celle
des anciens Perfes & Affyriens, eft ¥époque ou Yere
de Nabonaffar. Voyez Incarnation , Hégire ,
Olympiade , &c.
La connoiflanee & l’ufage des époques eft d’un
grand avantage dans la Chronologie. Voyez Chronologie.
: C ’eft principalement dans l’hiftoire ancienne que
les époques font néceffaires. L’incertitude de.la chronologie
oblige de fe fixer à quelques points principaux
pour fe former un fyftème fuivi. La. maniéré
différente de compter l’année chez les différens peuples
, contribue à la difficulté de bien Yix&riçsepoques.
Pour réduire les. années d’une époque à celle d’une
autre , ç’eft-à-dire pour trouver quelle eft l’année
de l’une qui correfpond à une année donnée de l’aut
re , on a inventé une période d’années qui comment
e avant toutes les époques connues , & qui en eft,
pour ainfi dire,le rende?;-vous .commun ; cette pério--
de eft appellée période julienne. C ’eft à cette période
.que l’on réduit toutes les époques, en déterminant
l’année de cette période, à laqueilé chaque époque
commence. Ainfi, il ne refte plus qu’à.ajoûter
l’annee propofée d’une époque à l’année de la période
qui correfpond au commencement de cette èpo-
que, & à retrancher de cette même année propofée
l’année de la même période qui répond à l’autre épo-
que ; le refte eft l’année de cette autre époque. Voyez Période Julienne.
U époque de Jefus-Chrijl ou de notre Seigneur, eft
Y époque vulgaire de toute l’Europe ; elle commence
à la nativité du Sauveur le 25 Décembre, ou plutôt
, félon la maniéré ordinaire de compter, à
fa circoncifion le premier Janvier : mais en Angleterre
, elle commence à l’incarnation ou à l’annon-
ciation de la Vierge le 15 de Mars, neuf mois avant
la nativité. Voyez Nativité , Circoncision ,
Annonciation, &c.
L’année de la période julienne répondante à celle
de la naiffance & de la circoncifion de J. C. eft ordinairement
comptée pour la 4713 de cette période.
Ainfi la première annee de notre ere répond à la
4714 année de la période julienne-.
Donc i° . fi à une année donnée de J. C. on ajoute
4713 , la fomme fera l’année de la période julienne
qui répond à l’année propofée ; par exemple ,
fi à la préfente année 175 5 on ajoute 4713 , la fomme
6468 fera l’année où nous femmes de la période julienne.
20. Au contraire, fi on ôte 4713 d’une année
donnée de la période julienne, le refte eft l’année
courante de J. C. Par exemple-, fi de l’année 6468
de la période julienne on ôte 4755 , le refte fera
l’année courante 1755.
L’époque de la naiffance de notre Seigneur fert non
feulement au calcul des années écoulées depuis le
commencement de Y époque, mais encore aux calculs
de celles qui l’ont précédé.
Pour trouver l’année de la période julienne, répondante
à une année donnée avant J. C . il faut
fouftraire de 4714 l’année propofée, le refte fera
l’année correfpondante que l’on cherche. Ainfi on
trouvera que l’année 752 avant J. C . eft l’année
3956 de la période julienne. Au contraire , fi on
louftrait de 4714 une année propofée de la période
julienne de 4 7 14 , le refte eft l’année correfpondante
avant J. C.
L’auteur de Y époque vulgaire, ou de la méthode
de compter les années depuis la naiffance de J. C .
eft Denis le Petit, Abbé de Rome, Scythe de nation
, qui floriffoit fous l’empire de Juftinien vers
l’an 507 ; ce Denis en a voit eu la première idée par
•un moine égyptien, nommé Panodore. Jufqu’alors
les Chrétiens comptoient les années ou depuis la
fondation de Rome , ou par l’ordre des empereurs
& des confuls , ou fuivant les autres méthodes des
peuples parmi lefquels ils vivoient.
Cette diverfité occafionna une grande difpute entre
les églifes d’Orient & celles d’Occident. Denis
pour la faire ceffer, propofa le premier une nouvelle
forme d’année , & une nouvelle ere générale ,
qui furent l’une & l’autre généralement reçues en
peu d’années.
Denis commença fon ere à l’incarnation, ou à la
fête appellée communément annonciation de la.
Vierge. Cette méthode eft encore en ufage dans les
pays de la domination de la grande Bretagne, mais
elle n’eft plus en ufage que là ; dans les autres pays
de l’Europe, on commence l’année au premier Janvier
, excepté en cour de Rome. où Y époque de l’incarnation
eft encore employée ücfns la date des bul»>
les. Voye£ Incarnation.
Il faut ajoûter que dans cette époque de Denis il
y a une méprife : on croit communément qu’il a mis
la naiffance de J. C. un an trop tard, ou que J. C.
étoit né l’hyver d’avant celui que Denis marque
pour la conception. Mais la vérité eft que cette faute
doit être imputée à Bedc qui a mal entendu Denis,
&; dont nous fuivons l’interprétation ; c’eft ce que
le P. Petau a fort bien prouvé par les lettres mêmes
de Denis. Car Denis commence fon cycle à l’année
4712 de la période julienne , mais il ne commence
fon époque qu’à l’année 4713, où l’ere vulgaire fup-
pofe que J. C. a été incarné.
Ainfi la première année de J. C . félon Y époque
vulgaire, eft la fécondé félon le calcul de Denis.
Par conféquent la préfente année 1755 devroit être
en rigueur 1756 ; quelques chronologiftes prétendent
même qu’il y a erreur, non-feulement d’un an,
mais de deux.
C ’eft à cette ere vulgaire que les Chronologiftes
réduifent toutes les autres époques comme à un point
fixe & déterminé : cependant il n’y a aucune de ces
époques qui ne foit le fujet de quelque difpute, tant
il y a d’incertitude dans la doftrine des tems. Nous
allons rapporter les principales de ces époques , réduites
à la période julienne.
Vépoque de la création, orbis conditi, appellée
aufli époque juive, eft, félon le calcul des Juifs, l’année
953 de la période julienne, qui répond à l’année
3761 avant J. C. & commence au 7 d’Oûobre.
Donc fi on ôte 952 ans d’une année donnée de la
période julienne,le refte fera l’année de Y époque juive
qui y répond. Par exemple, la préfente annéè étant
la 6459 de la période julienne, fe trouvera être la^
5 507 de Y époque juive, ou de la création du monde."
Cette époque eft encore en ufage parmi les Juifs.
L ’époque de la création, en ufage parmi les hifto-
riens grecs, eft l’année 787 avant la période julienne,
répondant à l’année 5500 avant J. C.
Ajoutant donc 787 à* une année donnée de la
période Julienne, la fomme eft l’année de cette époque
: par exemple, 6459 étant l’année où nous fom-
raes de la période julienne , la préfente année de
cette époque, ou de l’âge du monde, fuivant le calcul
des Grecs, fera 7246.
L’auteur de cette époque eft Jules Africain qui l’a
tirée des Hiftoriens. Mais quand on voulut s’en fer-
vir dans l’ufage c iv il, il fallut y ajouter huit ans ,
afin que chaque année divifée par quinze pût marquer
l’indiâion dont les empereurs d’Orient fe fer-
;voient pour dater leurs Chartres & leurs diplômes.
\2époque de la création en ufage parmi les Grecs
modernes & parmi les Rufliens, eft l’année 73 5 avant
la période julienne, ou l’année 5509 avant J. C.
commençant au premier de Septembre ; cependant
les Rufliens ont admis dans la fuite le calendrier julien
, qui commence l’année au premier de Janvier.
Ajoutant donc 795 à une année donnée de la période
julienne, la fomme fera l’année de cette époque;
ainfi l’année julienne étant aujourd’hui 6468,
la préfente année de la création , félon ce calcul,
fera 7263 ; & de la préfente année 7:263 ôtant 5508,
le refte fera l’année courante 175 5.
Cette ere étoit employée par les empereurs d’Orient
dans leurs diplômes , & c’eft pour cela aufli
qu’on l’appelloit Yere civile dès Grecs. Elle eft en effet
la même que Y époque de la période conftantinopoli-
taine ; c’eft pourquoi quelques-uns l’appellent Yépoque
de la période de Conftanùnople. Voyez PÉRIODE.
L’époque alexandrienne de la création, eft l’année
780 avant la période julienne, qui répond à l’année
5494 avant J. C. & qui commence au 29 d’Août.
Ajoutant donc 5493 à la préfente annee de J. C.
1755, la fomme 7248 donnera la préfente année de
cette époque, ou les années écoulées depuis la création
, en fuivant cette méthode de calculer.
Cette époque fut imaginée par Panodore, moine
• égyptien, pour faciliter le calcul de la Pâque ; c’eft
pourquoi quelques auteurs l’appellent Y époque ecclé-
Jîafique greque.
Vépoque eufébienne de la création, eft l’année 486
Tome V%
de la période julienne, qui répond à l’année 4228
avant J. C. & commence en automne.
Otant donc 486 dé la préfente année julienne
6468, ou ajoutant 4228 à.la préfente année de J. C-.
le nombre 5983 qui en réfulte, fera la préfente année
, fuivant Y époque eufébienne
Cette époque eft celle qui eft fuivie dans la chro-*
nique d’Eufebe & dans le martyrologe romain.
IJépoque des olympiades eft l’année 3938 de la période
julienne, répondant à l’année 776 avant J. C.
& à l’année 2985 de la création ; elle commence à
la pleine - lune qui fuit le folftiee d’été , & chaque
olympiade renferme quatre ans.
Cette époque eft fort célébré dans l’hiftoire ancienne
; elle étoit en ufage principalement chez les Grecs,
& tiroit fon origine des jeux olympiques, que l’on
célébrait au commencement de chaque cinquième annécr Voyez Olympiade.
Epoque de la fondation de Rome, ou Urbts tondit oe >
V. C. eft l’année 3961 de la période julienne, félon
Varron ; ou l’année 3962 , félon les faites capitolins:
elle répond à l’année 753 ou .7 5 2 avant J. C . &
commence au 21 d’A vril.Donc files années de cette
époque font moindres que 754, il faudra les fouftraire
de 754 ou 753, pour avoir les années correfpon-
dantes avant J. C. Si elles font plus grandes que 754,
il faudra les ajoûter pour avoir l’année de la fondation
de Rome, & en fouftraire 754 pour avoir l’ân-
née de J. C. ainfi, félon le calcul de Varron, la préfente
année 1755 eft la 2518e. de la fondation de
Rome.
U époque de Nabonaffar eft l’année 3967 de la période
julienne, qui répond à l’année 747 avant J. C»
& commence au 26 de Février.
Cette ere eft ainfi appellée du nom de fon inftitu-
teur Nabonaffar roi de Babylone, & c’eft celle dont
Ptolomée s’eft fervi dans les obfervations aftronomi-
ques, aufli-bien que Cenforin & plufieurs autres.
L’époque dioclétienne, ou Y époque des martyrs, eft
l’année 4997 de la période julienne , répondant à
l’année 293 de J. C. On l’appelle ere des martyrs, à
caufe du grand nombre de Chrétiens qui fouffrirent
le martyre fous le régné de cet empereur.
Les Abyflins , qui s’en fervent encore dans toutes
leurs computations, l’appellent les années de grâce :
cependant leurs années ne forment pas une fuite continue
depuis cette époque ; mais quand la période
Dyonifienne de 5 34 eft expirée, ils recommencent à
compter de nouveau par 1 , 2 , &c.
L ’époque de l'hégire , ou époque mahometane , eft
l’année 5335 de la période julienne, qui répond à
l ’an 622 de J. C. Elle commence au 16 de Juillet, qui
eft le jour où Mahomet s’enfuit de la Meque à Médine.
Cette époque eft celle dont fe fervent les Turcs
&les Arabes, & en général tous les MufulmanS fec-
tateurs de la loi de Mahomet. Son premier inftitu-
teur fut Omar, troifieme empereur des Turcs* Les
aftronomes Alfraganus, Albategnius, Alphonfe , Sc
Ulugh-Beigh, mettent la fuite de Mahomet au 15 de
Juillet; mais tous les peuples qui font ufage de cette
époque, la fixent au 16 de ce même mois. Voyez HÉGIRE*
L’époque des Séleucides, dont les Macédoniens fe
fervoient, eft l’année 4402 de la période julienne,
répondant à l’année 312 avant Jefus- Chrift. Voyez Séleucides.
L’époque perjienne , ou yezdegerdique, eft l’année
5345 de la période julienne, répondant à l’année
632 de J. C . & commençant au 16 de Juin*
Cette époque eft fixée à la mort d’Yezdegerde dernier
roi de Perfe, tué dans une bataille contre les
Sarrafins.
Epoque julienne, ou époque des années juliennes,
N N n n n ij