. Cependant-, malgré ce changement dans les opinions
des particuliers, la pratique du culte public
ne changea point de face, ni du tems de Cicéron,
ni du tems de Juvénal. On vit fubfifter les mêmes
fêtes, lesmêmes procédions & les mêmes facrifices
en l’honneur déPluton, de Proferpine, & des autres
divinités infernales, auxquelles perfonne ne croyoit
plus. Tant il eft vrai que les particuliers peuvent
en matière de religion fe trouver defabufés, & le
même culte public fubfifter. Polybe fait à ce fujet
une réflexion par laquelle je finirai cet article.
« Le plus grand avantage, dit ce judicieux hifto-
» rien, qu’ait eu le gouvernement de Rome fur tous
» les autres états, eft une chofe généralement dé-
» criée, l’idolâtrie & la fuperftition. Si une fociété,
»> ajoûte-t-il, étoit formée feulement de gens fages,
» un tel plann’auroit pas'été néceffaire; mais puif-
» que la multitude eft toujours agitée de defirs illi-
» cites & de pallions violentes, il n’y avoit pas
» d’autre moyen plus lur de les réprimer que ce fë-
» cret de fixions & de terreurs. C ’étoit donc pru-
» demmènt & fagement que les Romains inculque-
■ » rent dans les elprits le culte de leurs dieux", & la
>> crainte des punitions duTartare». Liv. VI. p. 4,97.
Voyei Superstition. Article de M. le Chevalier d e
J A V COURT. Enfer de Boyle, (Chimie.') vaiffeau circulatoire
d’un verre fort, compofé de plufieurs pièces, qui
toutes enfemble font une efpece de matras, ayant
le col long & étroit & le globe très-applati, imaginé
par le célébré Anglois dont il porte le nom, pour
faire ce qu’on appelle le mercure fixé perfe. Voy. nos
'Planches. Voye^ Mercure, ( b )
* ENFERMER, v. aâ. Nous difons qu’un corps eft
enfermé dans un autre, lorfque celui-ci forme en tous
jfens un obftacle entre le premier & notre toucher
ou nos yeux.
ENFERRURE, f. f. c’eft une des opérations de
Pexploitation de Yardoife dans fa minière. Voye^ Varticle
Ardoise.
ENFICELER un Chapeau, terme de Chapelier,
ç’eft ferrer le bas de la forme avec une ficelle ou
cordon à l’endroit que les Chapeliers appellent le
lien. Voye{ CHAPEAU.
ENFILADE, f. f. ( Gramm.) fuite ou continuation
de plufieurs choies difpofées dans une même
ligne , ou fur un même f il, comme une enfilade de
chambres, de portes, de bâtimens, &c. Enfilade, en terme de Guerre, fe dit des tranchées
ou autres lignes qui font droites, qui peuvent être
nettoyées & balayées par le canon de l’ennemi en
longueur ou dans leur propre direction, & qui par-
là font incapables de défenfe.
Il faut avoir foin que les tranchées ne foient point
enfilées, au contraire la ligne de contre-approche
doit être enfilée , afin qu’on en puiffe chaffer l’ennemi.
Les derniers boyaux des tranchées, c’eft-à-dire
ceux qui fe font au pié du glacis & fur le glacis, font
fujets à être enfilés, à caufe de leur proximité du
chemin couvert. Voye[ Tranché es. (Q ) Enfilade, en Architecture, c’eft l’alignement de
plufieurs portes de fuite dans un appartement. Voy. Appartement. (P ) Enfilade , (Jardinage.) fe dit de plufieurs faites
de verdure qui fe communiquent, & qui font un
point de vûe. (K ) Enfilé, ad. en termes de Blafon, fe dit des couronnes,
annelets, & autres chofes rondes & ouvertes
qui font paffées dans des fafces, bandes, lances,
&c. On dit aufli enfilant.
Du Faure en Dauphiné, d’azur à trois couronnes
d’or, enfilées dans-une bande d’azur.
ENFILEMENT du Cable. Voyc^ Enfiler.
ENFILER, v. ait. (Gramm.) Il a deux acceptions
a fiez différentes ; il fe dit de l’aiguille, & il fe dit de
plufieurs objets où il y a ouverture. Enfiler, une aiguille
, c’eft paffer un fil dans fon oeil ; enfiler des objets,
c’eft paffer ou un fil ou une verge dans l’ouverture
qui y eft pratiquée. Ainfi on enfile des anneaux ;
les Chandeliers enfilent des meches. Enfiler, (Marine.) On dit que le cabeftan enfile
les cables en virant, lorfque le cable tourne en rond
autour du cabeftan. ( Z ) Enfiler , en terme d'Epinglier, fe dit de l’a&ion
de paffer la tête de l’épingle à l’endroit où elle doit
être fertie ou rivée. Voye^ Epingle.
* Enfiler, (Trictrac.) Lorfqu’un des deux joiieurs
A , ayant fait ion plein, le garde allez long-tems
pour que le joueur B ou foit forcé d’empiler toutes
les dames fur la derniere café, ou ne puiffe jouer
fans battre à faux, ou ne puiffe ni paffer fes dames,
ni les lever, ou ne puiffe les lever fans les découvrir,
enforte que perdant prefqu’à chaque coup qu’il
joue un nombre de points plus ou moins grand ; &
fon adverfaire A en gagnant à chaque coup qu’il
joue un nombre plus ou moins grand, foit en battant
les dames découvertes, foit en gardant fon
plein, celui-ci marque un grand nombre de trous
tout de fuite ; ce nombre de trous s’appelle une enfilade
; on dit que le, joiieur B eft enfilé, & cela lui
arrive affez fouvent pour avoir tenu mal-à-propos.
ENFILEUR, f . m .en terme d'Epinglier, fe dit de
l’ouvrier qui eft occupé à paffer lés têtes dans les
branches, & à les préparer à être preffées entre les
deux têtoirs.
* ENFLAMMER, v. aft. (Gramm.) c’eft appliquer
le feu à un corps combuftible d’une maniéré fenfi-
ble pour les yeux au-delà de la furface du corps ;
le corps feroit feulement échauffé, fi le feu n’y étoit
fenfibîe que pour le toucher ; il feroit feulement ardent
ou embrafé, fi le feu n’y étoit pas fenfibîe pour
les yeux au-delà de fa furface. •
ENFLECHURES, FIGURES, FIGULES, f. f. pi.
(Marine.) ces deux derniers ne font guere d’ufage.
Les enflèchures font des cordes qui traverfent les
haubans en forme d’échelons, elles fervent à monter
aux hunes & au haut des mâts. Voye%_ Marine,
P L I . m. 4o. ( Z )
■ ENFLER ,* v. aft. c’eft en général augmenter le
volume d’un corps. Il fe prend au phyfique & au
moral, au fimple & au figuré. Enfler des Parties, Enfler un Mémoire,'
(Commerce.) c’eft y mettre les marchandifes qu’on a
livrées, à un plus haut prix qu’elles ne valent, ou
qu’on n’en eft convenu.
On dit aufli enfler la dépenfe d’un compte, pour
fignifier qu’on y employé des articles qui n’y peuvent
ou n’y doivent point entrer. Diclionn. de Commerce
, de Trévoux , de Chambers. (G ) Enfler , (Orfévr.) opération de la retrainte ; c’eft
l’a&ion d’aggrandir au marteau fur la bigorne les parties
inférieures des pièces d’argenterie, qui doivent
former le ventre des pièces, comme aux pots à l’eau,
caffetieres, chocolatières, &c.
ENFLURE, f. f. (Medecine.) Ce terme eft employé
pour exprimer en général toute élévation contre
nature qui fe forme fur la furface du corps, par
quelque caufe & quelque matière que ce foit ; ainfi
on peut dire de toutes les tumeurs, qu’elles font des
enflures. Les parties externes affeftées de phlegmon,
d’éréfypele, de skirrhe, font toujours plus ou moins
enflées ; quelquefois même l’affe&ion des parties internes
caufe une enflure qui fe montre à l’extérieur,
comme l’inflammation, & autre tumeur du ventricule
; les météorifmes qui pouffent en-dehors les té-
gumens, & les font paroître enflés : on dit aufli de la
groffeffe qu’elle fait enfler le ventre , qu’elle caufe
une enflure de neuf mois. Le trop d’embonpoint peut
E N F
&uffi être regardé/comme une enflure produite pârla
trop grande abondance de graille quifoûleve les té-
gumens, & forme comme une anafarque adipeufe.
’■ Voye^T umeur, - ■
L’ufage a cependant reftraint là lignification du mot
enflure; on s’en feft particulièrement pour défigner
un amas dé fluidés aériens ou aqueux, qui élevent
'la peau au-defftis dé fon niveau ordinaire dans l’état
'de fanté, folt qu'e cet amas s’étende à toute la fur*>
face du corps, foit qu’elle n’ait lieu que dans quelqu’une
de fes parties. Si c’eft l’air renfermé fous la
peau, qui eft la matière de Y enflure, on l’appelle em-
phyfeme, qui peut être univerfel ou particulier: fi
■ cette efpece d’enflure. n’eft pas fort étendue, on lui
•donne lé nom de tumeur emphyfémateufe : fi la matière
aérienne eft renfermée dans le ventre, & en diftend
confidérablement les parois , on nomme cette forte
d’enflure tympahite, parce que lorfqu’on la frappe,elle
railonne comme un tambour (voye{ Emphysème
'tympanite) : fi c’eft la férofité ou toute autre humeur
aquéùfë, qui gonfle le tiffu cellulaire, on appelle
l'enflure qui en eft formée, leucophlegrnatie, anafarque
: fi elle eft étendue fur toute là furface du
corps, on l’appelle bouffijfure : fi elle n’affefte que le
vifage, oedème : fi elle n’occupe qu’une petite partie :
on donne le nom d’enflure Amplement aux tumeurs
aqueufes ou féreufes, qui affe&ent les extrémités du
corps, & particulièrement les inférieures.
Si Yenflure eft produite par un amas d’eau épanchée
renfermée dans la capacité du bas-ventre, ou
dans toute autre cavité particulière, on la nomme
en général hydropifie, qui eft aufli diftinguée par dif-
férens noms, félon que les liquides épanchés occupent
telle ou telle partie. Ainfi l'enflure aqueufe de
la cavité de l’abdomen eft appellée afeites, celle du
ferotum eft appellée hydroide, &c. Voye% An AS arque,
Leucophlegmatie, CEdeme , Hydropi-
sie , Ascite , Hydroïde , &c. (d) ENFLURE,.(Manège, Maréchall.) terme communément
& indéfiniment appliqué à toutes les maladies,
qui fe. montrent extérieurement par l’augmentation
du volume naturel d’une partie quelconque,
ou d’une portion de cette partie ; mais quoique ce
mot femble embraffer toutes les efpeces de tumeurs,
•nous dirons, pour le réduire à fa véritable fignifica-
tion, qu’il defigne un gonflement non circonfcrit,
accompagné de plus ou de moins de dureté, quelquefois
mou, fans inflammation & fans douleur, ou
iuivi de l’une & de l’autre.
Toutes les parties extérieures du corps font fujet-
tes à Yenflure, il faut néanmoins convenir qu’il en eft
qui y paroiffent plus expofées : les unes, à caufe de
la contexture plus lâche de leur tiffu qui permet plus
facilement le féjour des humeurs, ainfi que nous le
voyons dans les paupières, au fourreau, au ferotum
, &c. les autres, attendu leur éloignement du
centre du mouvement circulaire ; car les liqueurs
ne pouvant y participer entièrement de fa force,
leur retour eft beaucoup plus pénible: telles font à
cet égard les quatre extrémités, dont la pofition perpendiculaire
eft encore un furcroît d’obftacle à la
liberté de ce même retour, puifque là les humeurs
font obligées de remonter contre leur propre poids.
Venflure peut provenir de caufe interne ou de
caufe externe. On doit l’envifager quelquefois comme
une maladie particulière, quelquefois aufli comme
un fymptome de maladie. Elle eft formée par
l’air dans les emphyfemes, par des humeurs, c’eft-
à-dire par le fang ieul dans les contufions, par de la
férofité dans les cèdemes, &c.
U enflure effentielle étant une maladie particulière,
ne demande qu’à être terminée par la réfolution, de
quelque efpece qu’elle foit ; quant à celle qui eft un
fymptome de maladie, on y remédie en traitant la
Tome V,
E N F < > i\
maladie quelle annonce différemmênt, félon fon
génie & fon caraftere.
On ne peut par conféqueiît preferirë un traité“
ment qu’eu égard à Y enflure effentielle. S’il y a douleur
& inflammation, la faignée, un régime modéré
& hume&ant, des topiques, anodyns ou legerement
réfolutifs, un breuvage purgatif enfin adminiftré
dans le tems de la réfolution de l’humeur , fuffiront
& rempliront parfaitement notre objet. Si nous n’ap-
percevons ni l’un ni l’autre de ces accidens, noua
mettrons d’abord en ufage des réfolutifs qui auront
beaucoup plus d’a&ivité, tels que les fpiritueux ; &
nous réitérerons les purgatifs, à moins qu’il ne s’a-
giffe d’une enflure emphyfémateufe, car en cë cas ces
derniers remedes ne font pas d’une aufli grande né-
çeflité. (fi) ' Enflure , (Rkètoriq.) vice du difeours & de fes
penfées ; fauffe image du grand, du pathétique, que
le bon fens réprouve : Tout doit tendre au bon fin s .. &
L’on peut diftinguer deux fortes à?enflure : l’une
confifte dans des penfées qui n’ont rien d’élevé en
elles-mêmes, & qu’un efprit faux s’efforce de rendre
grandes, ou par le tour qu?il leur donne, ou par les
mots dont il les mafque ; c’eft le nain qui fe hauffe
fur la pointe des piés , ou qui fe guindé fur des
échaffes pour paroître d’une plus haute taille.
L’autre forte d’enflure eft le fublime outré, ou ce
que nous appelions affez communément le gigan-
tefque. Les chofes qui vont au-delà du ton de la nature
, que l’expreflion rend avec obfcurité, ou qu’elle
peint avec plus de fracas que de force, font
une pure enflure.
L’enflure eft dans les mots ou dans la penfée, &
le plus fouvent dans l’une & dans l’autre : c’eft ce que
quélques exemples font fentir.
Medée dans la tragédie qui porté fon nom chez
Seneque, s’excitant elle-même à fe venger de Jafon,
& des complices de fon infidélité, s’écrie : Quoi>
l'auteur de, notre race, le foleil.voit ce. qui fe paffe , il le
voit, &fe laiffe voir! I l parcourt fa route-ordinaire dans
le ciel, qu'aucun nuage n'obfcurcit, ne retourne pas en
arriéré , & ne reporte pas le jour aux lieux qui l'ont vu
naître. O , mon pere, laiffe , laiffe - moi vfler dans les
airs ! Confie les renes de ton char a mes mains ! Permets
qu'avec tes guides enflammées, je conduife tes courjiérs
qui portent le feu de toutes parts ! On fent par ces puérilités
, que Médée débite avec bien plus d’emphafe
dans l’original que dans cette tradu&ion, ce que c’eft
que Yenflure du ftyle.
Dans laPharfale (liv. VIII. v. 7 93 .) Corduscouvre
d’une pierre la foffe dans laquelle il vient de brûler
à demi lé corps de Pompée. Là-deffus Lucain s’écrie
: I l te plaît donc , ô Fortune, d'appeller le tombeau
de Pompée 9 cet indigne endroit où. fon beau-pere même
aime mieux qu'il foit enfermé , que s'il manquoit de f è -
pulture ! O , main téméraire y pourquoi bornes-tu Pompée
dans un fépulcre ? Pourquoi renfermes-tu fes mânes
errans ? Il gît dans l'univers y b le remplit jufqu'où
la terre manque à là vûe de l'Océan qui l'entoure. Ren-
verfe ces pierres accufatrices des dieux. Si le mont (Eta
tout entier eft le fépulcre d'Hercule ; f i Bacchus a pour,
lui celui de Nife , pourquoi le grand Pompée n'a-t-il qu'une
feule pierre ? I l peut remplir toutes les campagnes de
LaguSy pourvu qu'aucun gafon n'offrefon nom aux yeux
des voyageurs. Peuples , éloignons-nous , & que par ref-
pecl pour fes cendres nos piés ne foulent aucun endroit
des fables arrofés par le Nil.
Voilà ce que c’eft que Y enflure du ftyle & des
penfées : voilà de plus des jeux de mots qui y font
réunis, & dans quelques endroits desNon-finfcs, fi je
puis me fervir d’un terme anglois qui nous manque*
En effet le corps d’un homme eft néceffairement borné
dans un tombeau de fix à fept piés d’étendue, &
celui de Pompée ne pouvoit remplir toutes les campa