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j8 D O R ^’ouvrages que la première, les ouvrages de bois &
de lluc étant prefque les feuls que l’on dore ara colle
, encore faut-il qu’ils foient à couvert, cette dorure
ne pouvant rélifter, ni à la pluie, ni aux impref-
ftons de l’air qui la gâtent de l’ecaillent aifément.
La colle dont on fe fert pour dorer, doit etre
faite de rognures de parchemin ou de gants, qu’on
fait bouillir dans l’eau jufqu’à ce qu’elle s’épaifliffe
en confiftence de gelée. V !y c'{ C olle. .
Si c’eft du bois qu’on veut dorer, on y met d a-
bord une couche de cette colle toute bouillante, ce
qui s’appelle encoller le bois. Après cette première façon
, & lorfque la colle eft feche, On lui donne le
blanc, c’eft-à-dire qu’on l’imprime à plufteurs tepri-
fes-d’une couleur blanche détrempee dans cette colle
, qu’on rend plus foible ou plus forte avec de l’eau,
fuivant que l ’ouvrage le demande.
Ce blanc eû de plufteurs fortes : quelques doreurs
le font de plâtre bien battu, bien broyé & bien ta-
mifé; d’autres yemployent le blanc d’Efpagne ou
celui de Rouen. Il y en a qui fe fervent d’une efpece
•de terre blanche qu’on tire des carrières de Seve,
près Paris, qui n’eft pas mauvaife quand elle eft af-
finée.
On fe fert d’une broffe de poil de fanglier pour
coucher le blanc. La maniéré de le mettre & le nombre
des couches font différens, fuivant l’efpece des
ouvrages. A ceux de fculpture il ne faut que fept ou
huit couches ; aux ouvrages unis, il en faut jufqu’à
douze. A ceux-ci elles fe mettent en adouciffant,
c ’eft-à-dire en traînant la broffe par-deffus ; aux autres,
on les donne en tapant, c’eft-à-dire en frappant
plufteurs coups du bout de la broffe, pour faire
entrer la couleur dans tous les creux de la fculpture.
L’ouvrage étant parfaitement fe c , on l’adoucit ;
ce qui fe fait en le mouillant avec de l’eau nette, &
& en le frottant avec quelques morceaux de groffe
toile, s’il eft uni ; & s’il eft de fculpture, en fe fer-
vant de légers bâtons de fapin, auxquels font attachés
quelques lambeaux de cette même toile, pour
pouvoir plus aifément fuivre tous les contours, &
pénétrer dans tous les enfoncemens du relief.
Le blanc étant bien adouci, on y met le jaune ;
mais fi c’eft un ouvrage de relief, avant de le jaunir,
on le repare, on le recherche, on le coupe, & on le
bretelle ; toutes façons qui fe donnent avec de petits
outils de fer, comme les fermoirs, les gouges, & les
cifeaux, qui font des inftrumens de fculpteurs, ou
d’autres qui font propres aux doreurs ; tels que font
le fer quarré qui eft plat, & le fer à retirer qui eft
crochu.
Le jaune qu’on employé eft fimplement de l’ocre
commun bien broyé & bien tamifé, qu’on détrempe
avec la même colle qui a fervi au blanc, mais plus
foible de la moitié. Cette couleur fe couche toute
chaude ; elle fupplée dans les ouvrages de fculpture
à l’or qu’on ne peut quelquefois porter jufque dans
les creux & fur les revers des feuillages & des orne-
mens.
L’affiette fe couche fur le jaune, en obfervant
de n’en point mettre dans les creux des ouvrages de
relief. On appelle afliette , la couleur ou compofition
fur laquelle doit fe pofer & s’affeoir l’or des doreurs.
Elle eft ordinairement compofée de bol d’Arménie,
de fanguine, de mine de plomb, & d’un peu de fuif :
qûelquesruns y mettent du favon & de l’huile d’oliv
e ; & d’autres du pain brîilé, du biftre,de l’antimoine
, de l’étain de glace, du beurre, & du fucre
candi. Toutes ces drogues ayant été broyées enfem-
b le , on les détrempe dans de la. colle de parchemin
toute chaude, & raifonnablement forte ; & l’on en
applique fur le jaune jufqu’à trois couches, les derrières
ne fe donnant que lorfque les premières font
parfaitement feehes, La broffe pour coucher l’aifiet-
D O R te doit être douce ; mais quand elle eft couchée, on
fe fert d’une autre broffe plus rude pour frottei*tout
l’ouvrage à fe c , ce qui enleve les petits grains qui
pourroient être reftés, & facilite beaucoup le bru-
niffement de l’or.
Lorfqu’on veut dorer, on a trois fortes de pinceaux
; des pinceaux à mouiller, des pinceaux à ra-
merider, & des pinceaux à matter;. il faut aulîi un
couftinet de bois couvert de peau de veau ou de mouton
, & rembourré de crin ou de bourre, pour étendre
les feuilles d’or battu au fortir du livre ; un couteau
pour les couper, & une palette ou un bilboquet
pour les placer fur l’afliette. Le bilboquet eft un in-
ftrument de bois plat par-deffous, où eft attaché un
morceau d’étoffe, & rond par-deffus pour le prendre
&c manier plus aifément.
On fe fert d’abord des pinceaux à mouiller pour
donner de l’humidité à l’affiette, en l’humedant
d’eau, afin qu’elle puiffe afpirer & retenir l’or ; on
met enfuite les feuilles d’or fur le couffinet qu’on
prend avec la palette, fi elles font entières, ou avec
le bilboquet ou le couteau même dont on s’eft fervi
pour les couper, & on les pofe & étend doucement
fur les endroits de l’affiette que l’on vient de mouiller.
Lorfque l’or vient à fe caffer en l’appliquant, on
le ramende en bouchant les caffures avec des petits
morceaux d’o r , qu’on prend au bout des pinceaux
à ramender ; & avec les mêmes pinceaux ou de fem-
blables, mais un peu plus gros, on l’unit par-tout,1
& on l’enfonce dans tous les creux de la fculpture
où on le peut porter avec la palette ou avec le bil*
boquet.
L’or en cet état, après qu’on l’a laiffé parfaite-,
ment fe fécher, fe brunit ou fe matte.
Brunir l ’or. C ’eft le polir & le liffer fortement
avec le bruniffoir, qui eft ordinairement une dent
de loup ou de chien, ou bien un de ces cailloux qu’on
appelle pierre de fanguine , emmanché de bois, ce qui
lui donne un brillant & un éclat extraordinaire.
Voye^ Brunir.
Matter l ’or. C ’eft paffer legerement de la colle ou
détrempe, dans laquelle on délaye quelquefois un
peu de vermillon fur les endroits qui n’ont pas été
brunis ; on appelle auffi cela repaffer ou donner couleur
à l’or. Cette façon le conferve & l’empêche de
s’écorcher, c’eft-à-dire de s’enlever quand on le ma-.
Enfin pour derniere façon, on couche le vermillon
dans tous les creux des ornemens de fculpture,
& l’on ramende les petits défauts & gerfures avec
de l’or en coquille, ce qui s’appelle boucher d'or
moulu.
La compofition à laquelle on donne le nom de
vermeil, eft faite de gomme gutte, de vermillon, ÔC
d’un peu de l>run rouge, broyés enfemble, avec le
vernis deVenife & l’huile de terebenthine. Quelques
doreurs fe contentent de laque fine ou de fang
de dragon en détrempe, ou même à l’eau pure.
Quelquefois au lieu de brunir l’or, on brunit l’affiette
, & l’on fe contente de le repaffer à la colle ,
comme on fait pour matter. On fe fert ordinairement
de cette maniéré de dorer pour lé vifage, les mains,
& les autres parties nues des figures de relief. Cet
or n’eft pas fi brillant que l’or bruni ; mais il l’eft
beaucoup plus que celui qui n’eft que fimplement
matté.
Quand on dore des ouvrages où l’on conferve des
fonds blancs, on a coutume de les recampir, c’eft-
à-dire de coucher du blanc de cérufe détrempé avec
une legerè colle de poiffon dans tous les endroits
des fonds, fur lefquels le jaune ou l’affiette ont pû
couler.
Maniéré de dorer au feu, On dore au feu de trois
D O R maniérés : favoir en or moulu, en or fimplement en
feuille, & en or haché.
La dorure d’or moulu fe fait avec de l’or amàlgar
mé avec le mercure dans une certaine proportion,
qui eft ordinairement d’une once de vif-argent fur
un gros d’or.
Pour cette opération on fait d’abord rougir le creii-
fe.t ; puis l’or & le vif-argent y ayant été mis, on les.
remue doucement avec le crochet jufqu’à ce qu’on
s’apperçoive que l’or foit fondu & incorporé au vif-
argent. Après quoi on les jette ainfi unis enfemble
dans de l’eau, pour les appurer & laver ;d’où ils paf-
fent fucceffivement dans d’autres eaux, où cet amalgame
qui eft prefque auffi liquide, que s’il n’y avoir
que du vif-argent, fe peut conferver très-long-tems
en état d’être employé à la dorure. On fepare de cette
;< maffe le mercure qui n’eft point uni avec elle, en
le preffant avec les doigts à-travers un morceau de
chamois ou de linge.
Pour préparer le métal à recevoir cet or ainfi
amalgamé, il faut dérocher, c’eft-à-dire décraffer le
métal qu’on veut dorer ; ce qui fe fait avec de l’eaü-
forte ou de l ’eau fécondé, dont on frotte l’ouvrage
avec la grate-boëffe : après quoi le métal ayant été;
lavé dans l’eau commune, on l’écure enfin legerement
avec du fablon.
Le métal bien déroché, on le couvre de cet or
mêlé avec du vif-argent que l’on prend avec la gra-
te-boëfle fine ou bien avec l’avivoir, l’étendant le
plus également qu’il eft poffible, en trempant de
tems en tems la grate-boëffe dans l’eau claire, ce qui
fe fait à trois ou quatre reprifes : ce qu’on appelle,
parachever.
En cet état le métal fe met au feu, c*eft-à-dire fur,
la grille à dorer ou dans le panier, au-deffous def-
quels eft une poêle pleine de feu qu’on laiffe ardent
jufqu’à un certain degré, que l’expérience feule peut
apprendre. A mefure que le vif-argent s’évapore,
& que l’on peut diftinguer les endroits où il manque
de l’o r , on repare l’ouvrage, en y ajoûtant de
nouvel amalgame où il en faut. Enfin il fe grate-
boëffe avec la groffe broffe de laiton ; & alors il eft
en état d’être mis en couleur, qui eft la derniere façon
qu’on lui donne, & dont les ouvriers qui s’en
mêlent confervent le fecret avec un grand myftere :
ce qui pourtant ne doit être guere différent de ce
qu’on dira dans Varticle du Monnoyage , de la maniéré
de donner de la couleur aux efpeces d’or.
Une autre méthode, c’eft de faire tremper l’ouvrage
dans une décoéfion de tartre, de foufre, de
fel, & autant d’eau qu’il en faut pour le couvrir entièrement,
& de l’y laiffer jufqu’à ce qu’il ait acquis
la couleur qu’on defire, après quoi on le lave dans j
l’eau froide.
Pour rendre cette dorure plus durable, les doreurs
frottent l’ouvrage avec du mercure & de l’eau-forte,
& le dorent une fécondé fois de la même maniéré.
Ils réitèrent cette opération jufqu’à trois ou quatre
fois, pour que l’or qui couvre le métal foit de l’é-
paiffeur de î’ongle.
Dorure au feu avec de L'or en feuille. Pour préparer
le fer ou le cuivre à recevoir cette dorure, il faut les
bien grater avec le grateau, & les polir avec le po-
liffoir de fer, puis les mettre au feu pour les bleuir,
c ’eft-à-dire pour les échayffer, jufqu’à ce qu’ils prennent
une efpece de couleur bleue. Lorfque le métal
eft bleui, ou y applique la première couche d’or que
l’on ravale legerement avec un poliffoir, & que l’on
met enfuite fur un feu doux.
On ne donne ordinairement que trois couches
ou quatre au plus, chaque couche étant d’une feule
feuille d’or dans les ouvrages communs, & de deux
dans les beaux ouvrages; & à chaque couche qu’on
donne, on les remet au feu. Après la derniere cou-
Tome V,
D O R 5 cjr
che, l’or eft en état d’être bruni clair. Voye? les P t\
du doreur qui repréfentent tous les outils & opérai
tions dônt il ëft parlé dans cet article. Voyer auffiFé-
libien, diclionn. d’Architeci. Peint. Sculpt. Voyez en-
jinlediclionn. du Gomm. & Chamb. Tous ces auteurs
le lont fiuvisv
D orurM k Jim im in i « * • , 6 urnes àuWagtï
iont I on fait tapioe„ies * M M H H H H H
tro.sI.vres d huile de lin ; vernis, de poix greqüe <
! “ 'cha3M « je B f l demi-once de poudrï dé fa.
W È È Ê Ë Ë Ê È W tout ceci ™ fn e polie W Ë
nee , jufqu à ce qu y trempant une plilme : vous la
ret.„ez comme brûlée; alors vous ôterez votre mi*-
H de diffus le feu , & vous prendrez une livré
d aloes hépatique, bon & bien pulvérifé & la ieti
ferez, peu à peu dedans, obfervant.de remuer avec
un bâton , car autrement le mélange monteroit : &
maigre le mouvement .1 montoit, vous l ’ôtériez dit
Jeu, Sc le Ia.ffer.ez repofer; puis le remettriez, lé
biffant derechef bouillir, remuant toujours avec lé
bâton. Lorfque tout fera bien incorporé l vous l’ÔJ
terez du feu, le Iaifferez répofer, puis le pafferez
par un linge dans un autre, vaiffeau, dans lequel"
vous le garderez. Quand vous voudrez l’efflployef
pour dorer parchemin ou cuir, vous donnerez d’a^
bord une afliette de blanc d’oeuf ou de gomme ; voué
appliquerez enfuite une feuille d’étain ou d’argent •
vous coucherez par-deffus votre vernis tout chaud:
& vous aurez auffi - tôt une couleur très-belle ; qué
vous Iaifferez fecher au foleil : après quoi, vous îm-
pnmerez ou peindrez les couleurs qu’il vous plairai
Maniéré de dorer la tranche des livres. Pour dorer la
tranche des livres, prenez la groffeur d’une noix dâ.
nol d Arménie, la groffeur d’un pois de fucre cahdi
broyez bien le tout à fec & enfemble ; ajoûtez-y un
^ Uf,^r-k/anC-t^0eU^ ^ en battu, puis broyez dere-<
chef. Cela fait, prenez le livre que vous voudrez
dorer fur la tranche ; qu’il foit relié ^ collé, rogné /
& poli ; ferrez-le fortement dans la pre/îe à rogner ;
le plus droit & égal que faire fe pourra ; ayez un
pinceau, donnez une couche de blanc d’oeuf battu i
que cette couche foit legere,.laiffez-la fécher, don-J
nez une couche de la compofition fufdite ; quand elle
fera bien feche, poliffez & raclez-la bien ; & lorfqutf
vous voudrez mettre l’or deffus, mouillez la tranche
d un peu d’eau claire avec le pinceau ; puis fur lé
champ y appliquez les feuilles d’or ou d’àraeht i
quand elles feront feehes, vous les polirez avec là
dent de loup. Cela fait, vous pourrez travailler deP
fus, tel ouvrage, marbrure, &c. qu’il vous plaira/
Article de M. Pa p il l o n .
D orure fur cuir, fur argent ; étain, & Verre. Pre-'
nez un pot neuf bien plombé, de la grandeur qu’il
vous plaira ; ayez un fourneau; mettez dans le poC
trois livres d’huile de lin au moins, & laiffez cette1’
huile fur le feu jufqu’à ce qu’elle foit cuite, ce qüé
vous connoitrez en trempant une plume' dedans ; fi
la plume fe pele', l’huile eft cuite: alors ajoûtez-y de
racine de pin huit onces, de fandarach huit onces ^
d aloès hépatique quatre onces, le tout bien broyé £
mettez tout cela à la fois * en remuant bien avec une
lpatule, augmentant le feu fans ceffer de remuer J
jufqu’à ce que tout fe fonde & devienne liquidé!'
laiffez cuire lentement; éprouvez dè tems èn tems
fur papier pu fur. l’ongle la confiftanee ; 'fi le mêlafi-'
ge vous paraît trop clair, ajoûtez-y une once
demie d aloes eicotrin ; quand il vous femblera cuit,
retirez-Ie.de deffus le feu : ayez deux, fachets appa-z
leilles, en forme de collutoire,igouiez dedans ces
fachets le melange avant qu’il foit refroidi ; ce qui:
n’aura point été fondu, refterà dans le premier ; le-
refte paffera dans, le fécond, & fera le vernis à do-’
rer. Vous le garantirez de la pouffiere ; plus il fera
vieux, meilleur il deviendra. Quand vous voudrez
H ij