
7°o E N R marque le préambule de cette loi : Clodoveus una
cum Francis pertraSavit ut ad dtulçs aliquid amplius
addcret; c’eft aufli de-là qu’on lui donna le nom de
pacte de la loifalique. On voit en effet que n’eft qu’un
compofé d’arrêtés faits fucceflivement dans les diffé-
rens parlemens : elle porte entr’autres chofes, que
les Francs feroient juges les uns des autres avec le
prince, & qu’ils décerneroient enfemble les lois à
l’avenir, félon les occafions qui fe préfenteroient,
foit qu’il fallût garder en entier ou réformer les anciennes
coutumes venues d’Allemagne.
Aufli Childebert en ufa-t-il de cette forte, lorf-
qu’il fit de nouvelles additions à cette loi : Childeber-
tus traclavit y eft-il dit, cum Francis fuis.
Ce même prince, dans un decret qui contient encore
d’autres additions, déclare qu’elles font le ré-
fultat d’un parlement compofé des grands & des
.perfonnes de toutes conditions, ce qui ne doit néanmoins
être entendu que de personnes franches & libres
: Cum nos omnes, calai dis Mardi ( congregati )
de quibufcumque condïtionibus, una cum nojlris opti-
madbus pertraclavimus. Ces additions furent même
faites en différens parlemens ; l’une eft datée du
champ de Mars d’Atigrty, l’autre du champ de Mars
fuivant, une autre du champ de Mars tenu à Mae-
ilricht, &c.
Les autres lois anciennes furent faites de la même
maniéré: celle des Allemands, par exemple, porte
en titre dans les anciennes éditions, qu’elle a été établie
par fes princes ou juges, & meme par tout le
peuple : Qiia temporïbus Clotarii regis , una cum prin-
cipibus fuis , id funt 3 4 epifcopis , & 3 4 dutibus , &
■ yZ comitibus , vel coetero populo conf itula ef.
On lit aufli dans la loi des Bavarois, qui fut dref-
•fée par Thierry, & revûe fucceflivement par Chil-
xlebert, Clotaire & Dagobert, qu’elle fut réfolue
par le roi & fes princes, & par tout le peuple : Hoc
decretum ejl apud regem & principes ejus , & apud cunc-
tum populum chrijlianum , qui intra regnum Mervengo-
Tum conjiant.
Toutes les autres lois de ce tems font mention du
confentement général de la nation, à peu-près dans
les mêmes termes : Placuit atque convenu inter Fr an-
cos & eorum proceres ; ita convenu & placuit leudis
nojlris. Ce terme leudes comprenoit alors non feule-
lement les grands, mais en général tous les Francs,
comme il eft dit dans Yappendix de Grégoire de
Tours , pJf, univerfis leudis , tamfublimibus quam pau-
peribus. Pour ce qui eft de l’ancienne formule, ita
placuit & convertit nobis, il eft vifible que c’eft de là
qu’eft venue cette claufe de ftyle dans les lettres patentes,
car tel ejl notreplaifir, &c.
Les aflemblées générales de la nation étant devenues
trop nombreufes, on n’y admit plus indiftinc-
tement toutes les perfonnes franches : on aflembloit
les Francs dans chaque province ou canton pour
avoir leur fuffrage, & le voeu de chaque aflemblée
particulière étoit enfuite rapporté par des députés
à l’aflemblée générale, qui n’étoit plus compofée
que des grands du royaume & des autres perfonnes
qui avoient caraûere pour y aflifter, tels que les
premiers fénateurs ou confeillers.
C’eft ainfi que Charlemagne, l’un de nos plus
grands & de nos plus puiflans monarques , en ufa,
lorfqu’il voulut faire une addition à la loi falique ;
il ordonna que l’on demanderoit l’avis du peuple,
& que s’il confentoit à l’addition nouvellement faite
, chaque particulier y mît fon feing ou fon fceau :
Ut populus interrogetur de capitulis quce in lege novi-
ter addita funty & pojlquam omnes confenferinty fufcrip-
tiones vel manu firmationts fuas in ipfis capitulis fa-
ciant. Cette ordonnance fut inférée dans la loi falique,
& autorifée de nouveau par Charles le Chauve,
lequel la fit inférer dans l’épitome qu’il donna de
cette loi.
E N R
Plufieurs des capitulaires de Charles ic Chauve
portent pareillement qu’ils ont été faits ex confenfu
populi & conflitudont regis , notamment ceux des années.
844 & 864.
C ’eft donc de ces aflemblées générales de la nation
que fe font formés les anciens parlemens tenus
fous la fécondé race ; lefquels, d’ambulatoires qu’ils
étoient d’abord, furent rendus fédentaires à Paris
fous la troifieme race, du tems de Philippe le Bel.
Lorfque les parlemens généraux furent réduits
aux feuls grands du royaume, & autres perfonnes
qui ayoient caraftere pour y aflifter, tous les Francs
etoient cenfés y délibérer par l’organe de ceux qui
les y repréfentoient.
Les nouvelles ordonnances étoient alors délibérées
en parlement, le roi y féant, ou autre perfonne
qualifiée de par lui, c’eit - à - dire qu’elles étoient
dreflees dans le parlement même, au lieu que dans
la fuite on en a rédigé le projet dans le confeil du
roi.
La délibération en parlement tenoit lieu de la vérification
& enregijlrement, dont l’ufage a été introduit
depuis. Cette délibération étoit d’autant plus
néceflaire pour donner force aux nouvelles lois, que
fuivant la police qui s’obfervoit alors pour les fiefs,
les barons ou grands vaflaux de la couronne qui
étoient tous membres du parlement, étoient chacun
maîtres dans leurs domaines, qui compofoient au
moins les deux tiers du royaume ; ils s’étoient même
arrogé le droit d’y faire des réglemens ; & le roi n’y
pouvoit rien ordonner que de leur confentement,
c’eft pourquoi il en fait mention dans plufieurs ordonnances
qui dévoient avoir lieu dans les terres
de ces barons.
* Tels font deux établiflemens ou ordonnances faites
par Philippe-Augufte ; l’une du premier Mai 1109,
touchant les fiefs du royaume, oii il eft dit que le
ro i, le duc de Bourgogne, les comtes de Nevers,
de Boulogne & de Saint - Paul, le feigneur de Dom-
pierre, & plufieurs autres grands du royaume, convinrent
unanimement de çet établiflement: convene-
runt ty affenfu publicoformaverunty ut a primo die Mail
in poferum ita fit de feodalibus tenimentis ; l’autre ordonnance
, qui eft fans date, eft un accord entre le
ro i, les clercs, & les barons.
On trouve aufli un établiflement de Louis VIII.
en 1213 , où il dit : Hoveritis quod per voluntatem &
ajfenfum archiepifcoporum , epifcoporum, comitum, ba-
ronum & militum regni Francia . . .fecimus Jlabilimen-
tum per judxos.
Joinville, en fon hiftoire de S. Louis, fait mention
des parlemens que tenoit ce prince pour faire fes
nouveaux ètablijfemens. Il fuffit d’en donner quelques
exemples , tels que fon ordonnance du mois de Mai
1246 , où il dit : Hac autem omnia. . . . de commune
confiito & ajfenfu diclorum baronum & militum , volu-
mus & pracipimus, & c . . . & ce qu’il fit touchant le
cours des efterlins, à la fiiTde laquelle il eft dit,
facla fuit hac ordinado in parlamento omnium Sanc-
torum , anno Domini millefimo ducentejimo fexagefimo
quinto.
Le régné de Philippe III. dit le Hardi, nous offre
une foule d’ordonnances faites par ce prince en parlement
, notamment celles qu’il fit aux parlemens de
l’Afcenfion en 1272, de l’octave de la Touflaints de
la même année, de la Pentecôte de l’année fuivante,
de l’Affomption ep 1274, de la Touflaints ou de
Mggl en 127 5, de l’Epiphanie en 1277, & de la Touf-
fiÿnts en 1283. Les ordonnances ainfi délibérées en
parlement, étoient regardées en quelque forte com-
melon ouvrage, de même que fes arrêts ; c’eft pourquoi
on les infcçivoit au nombre des arrêts de la
cour, comme il eft dit à la fin des ordonnances de
1283 : Haie ordinado regijlrata e f inter judiday cor»-
E N R
filia & arrefa expedita in parlàménto omnium Sanclo-
rum y anno Domini 1283. La même chofe fe trouve
à la fin d’une ordonnance de 1287, & aufli de deux :
autres de 13 27 & de 13 3 1 , & de plufieurs autres.
Philippe le Bel fit aufli plufieurs ordonnances en ,
parlement dans les années 1287, 1188,1290, 12.91,
1296. La première de ces ordonnances, qui eft celle
de 1287, commence par ces mots, c'ejl Vordonnance
faite par la cour de notre feigneur le Roi & de fon commandement
; & à la fin il eft dit qu’elle fut faite au
parlement, & qu’elle feroit publiée en chaque bail-
lie en la première aflife, &c.
A la-fin de celle de 1288, il eft dit que fi quelqu’un
y trouve de la difficulté, on confultera la cour
du roi & les maîtres (du parlement).
Il s’en trouve aufli plufieurs du même prince, faites
en parlement depuis qu’il eut rendu cette cour
fédentaire à Paris en 1302 ; entr’autres celle du 3
Oftob. 1303 , faite avec une partie feulement des barons
; parce que, dit Philippe le Bel, il ne pouvoit pas
avoir à ce confeil & à cette délibération les autres
prélats & barons fi-tôt que la néceflité le requerroit ;
&Ies barons dans leur toufeription s’énoncent ainfi :
nous y parce que ladite ordonnance nous femble conve- ;
nable 6* profitable a la befogne, & J i peu greveufe . . .
que nul ne la doit refufer, nous y confinions. L’ordon- ,
nance de ce prince du 28 Février 1308, deux autres
du jeudi avant les Rameaux de la même année, &
une autre du premier Mai 1313, font faites en plein
parlement.
Il s’en trouve de femblables de Philippe VI. dit
de Valois, des 24 Juillet 1333 , 10 Juillet 1336, 17
Mai 1345 , & après la S. Martin d’hyver en 1347.
Il y a encore bien d’autres ordonnances du tems
de ces mêmes princes, lefquelles furent aufli délibérées
en parlement, quoique cela n’y foit pas dit
précifément ; mais il eft aifé de le reconnoître à ‘
l’époque de ces ordonnances, qui font prefque toutes
datées des tems voifins des grandes fêtes auxquels
on tenoit alors le parlement.
On trouve encore, du tems de Charles VI. un
exemple de lettres du 5 Mars 1388, qui furent données
en parlement.
Quelques-uns croyent que l’on en ufa ainfi juf-
qu’au régné du roi Jean, par rapport à la maniéré de
former les nouvelles lois dans l’aflemblée du parlement
, & que ce fut ce prince qui changea cet ufage
par une de fes ordonnances, portant que les lois ne
feroient plus délibérées au parlement, lorfque l’on
en formoit le projet. Le chancelier O livier, dans un
difeours qu’il prononça au parlement en 1559, cite
cette ordonnance fans la dater ; il y a apparence
qu’il avoit en vûe l’ordonnance faite le 27 Janvier
1359, pendant la captivité du roi, par Charles régent
du royaume, & qui fiit depuis le roi Charles V.
il dit (art. 2^.) que dorénavant il ne fera plus aucune
ordonnance, ni n’oftroiera aucun privilège, que ce
ne foit par délibération de ceux de fon confeil.
Mais l’ufage de former les nouvelles ordonnances
dans le confeil du roi eft beaucoup plus ancien
que celle de 13 59 ; il s’étoit introduit peu-à-peu dès
le tems de Philippe III. & de fes fuccefleurs. La plupart
des nouvelles ordonnancés commencèrent à
être délibérées dans le confeil du roi, qui étoit aufli
appellé le grand conjeil du roi, & on les envoyoit
enfuite au parlement pour les vérifier & enregijtrer,
comme il fe pratique encore préfentement.
Il faut néanmoins prendre garde que dans les premiers
tems où les ordonnances commencèrent à être
délibérées dans le confeil, plufieurs des ordonnances
qui font dites faites ainfi y par Le roi ou fon Confeil,
ou par le confeil le roi préfent, ne laiflbient pas d’être
délibérées en parlement, attendu que le roi tenoit
fouvent fon confeil en parlement, C ç ft ainfi que l’or-
E N R 7 ot
donnance de Philippe III. dit le Hardi, touchant les
amortiffemens qui feroient accordés par les pairs,
commence par ces mots : ordinatumfuit per confilium
de regis y rege prefente ; ce qui n’empêche pas qu’elle
n’ait été faite au parlement de l’Epiphanie en 1277.
On a déjà vû que dès l’année 1283, il eft fait mention
d’enregijlrement au bas de quelques ordonnances.
Il eft vrai que la plûpart de celles où cette mention
fe trouve avoient été délibérées en parlement ;
de forte que cet enregijlrement exprimé par le mot re-
gifirata, le rapportoit moins à une vérification telle
qu’on l’entend aujourd’hui par le terme tfenngifiré-
menty qu’à une fimple transcription de la piece fur
les regiftres ; la délibération faite en parlement tenoit
lieu de vérification.
La plus ancienne ordonnance que j’aye trouvée du
nombre de celles qui n’avoient pas été délibérées en
parlement, & où il foit fait mention d’un enregiflre-
ment qui emporte en même tems la vérification de la
piece ; c’eft l’ordonnance de Philippe-de-Vâlois, du
mois d’Oftobre 1334, touchant la régale. Ce prince
mande à fes amés & féaux les gens qui tiendront le
prochain parlement, & aux gens des comptes, que
à perpétuelle mémoire ils faflent ces préfentes enre-
gijlrer es chambres de parlement & des comptes, 6c
garder pour original au thréfor des chartes.
On lit aufli au bas des lettres du même prince, du
10 Juillet 1336, concernant l’évêque d’Amiens, lecla
per cameram , règiflrata in curia parlamend in lïbro or-
dinadonum regiarum , fol. So, anno nono. Ce mot lecla
fait connoître qu’il étoit dès-lors d’ufage de faire la
leûure & publication des lettres avant de les enre-
giftrer: celles-ci à la vérité furent données en parlement.
Et les autres mots regijlrata. . . . in libro or-
dinadonum. ,'juftifient qu’il y avoit déjà des regiftres
particuliers deftinés à tranferire les ordonnances.
L’ufage de la le&ure & publication qui précédé
Y enregijlrement 9 continua de s’affermir fous les régnés
fuivans. Il paroît par une ordonnance du roi
Jean, du mois de Mai 1355, Par laquelle il confirme
pour la fécondé fois celle de Philippe-le-Bel, du
23 Mars 1302, pour la réformation du royaume. Il
eft fait mention au bas de ces lettres, qu’elles ont été
lûes & publiées folennellement en parlement, -en
préfence de l’archevêque de Rouen chancelier, de
plufieurs autres prélats, barons., préfidens, & confeillers
du roi au parlement, & en préfence de tous
ceux qui voulurent s’y trouver ; ce qui juftifie que
cette letture fe faifoit publiquement.
Charles V. dans une ordonnance du 14 Août 1374,'
mande aux gens de fon parlement, afin que perfonne
ne prétende caufe d’ignorance de ladite ordonnance,
de la faire publier & regijlrer tant à ladite cour,'
que dans les liéux principaux & accoutumés des fé-
néchauflees dont cette ordonnance fait mention.
Dans le même/nois fut enregiftrée la fameufeordonnance
qui fixe la majorité des rois de France à
l’âge de quatorze ans. Il eft dit qu’elle fut lûe & publiée
en la chambre du parlement, en préfence du
roi tenant fon lit de juftice, & en préfence de plufieurs
notables perfonnages , dont les principaux
font dénommés ; qu’elle fut écrite & mife dans les
regiftres du parlement, & que l’original fut mis au
thréfor des chartes.
On trouve encore beaucoup d’autres exemples
tfenregifiremens du même régné : mais nous nous contenterons
d’en rapporter encore un du tems de Charles
VI. dont il eft parlé dans fon ordonnance du 5
Février 1388, touchant le parlement ; le roi lui-même
ordonne aux gens de fon parlement que cette
préfente ordonnance ils faflent lire & publier,
icelle enregifirer afin de perpétuelle mémoire.
Il feroit inutile de rapporter d’autres exemples