i’Hiftoire que comme un recueil d expériences mo*
.raies faites fur le genre humain.,, recueil qui feroit
.fans doute beaucoup plus complet s il n eut ete fait
-que par des philofophes , mais qui, tout informe
'qu’il eft, renferme encore les plus grandes leçons
!de conduite, comme le recueil des obfervations
^médicinales de-tous les âges, malgré tout ce qui lui
manque & qui lui manquera peut 7 être -toujours,
-forme néanmoins la ,partie la plus importante & la
.plus réelle de l’art de guérir. L’Hiftoire appartient
donc à la claffe des Sciences, quant à la maniéré de
l’étudier & de fe la rendre utile, c’eft-à-dire quant
à la partie philofophique.
2°. 11 en eft de même des Arts tant méchaniques
que libéraux : dans les uns & les autres ce qui concerne
les détails eft uniquement l’objet de l’artifte ;
-mais d’un côté les principes fondamentaux des Arts
méchaniques font fondés fur les connoiffances mathématiques
& phyfiques des hommes, c eft-a-dire
fur les deux branches les plus confidérablesde la Philofophie
; de l’autre, les Arts libéraux ont pour bafe
l’étude fine & délicate de nos fenfations. Cette mé-
taphyfique fubtile & profonde qui a pour objet les
matières de goût, fait y diftinguer les-principes ab-
folument généraux & communs à tous les hommes,
d’avec ceux qui font modifiés par le carattere, le
génie, le degré de fenfibilité des nations ou des individus;
elle démêle par ce moyen le beau effentiel
& univerfel, s’il en eft un, d’avec le beau plus ou
moins arbitraire & plus ou moins convenu : également
éloignée & d’une décifion trop vague & d’une
difcuflion trop fcrupuleufe, elle ne pouffe l’analyfe
du fentiment que jufqu’oîi elle doit aller, & ne la
refferre point non plus trop en-deçà du champ qu’elle
peut fe permettre ; en comparant les impreflions &
les affe&ions de notre ame, comme le métaphyfi-
■ cien ordinaire compare les idées purement fpécula-
tives, elle tire de cet examen des réglés pour rap-
peller ces impreflions à une four ce commime, &
pour les juger par l’analogie qu’elles ont entr’elles ;
mais elle s’abftient ou de les juger en elles-mêmes,
ou de vouloir apprétier les impreflions originaires &
primitives, par les principes d’une philofophie aufli
obfcure pour nous que la ftrufture de nos organes,
ou de vouloir enfin faire adopter fes réglés par ceux
qui ont reçu foit de la nature foit de l’habitude une
autre façon de fentir. Ce que nous difons ici du goût
dans les Arts libéraux, s’applique de foi-même à
cette partie des Sciences qu’on appelle B elles-Lettres.
(yeft ^'mfi que les élémens de toutes nos connoiffances
font renfermés dans ceux d’une philofophie bien
entendue. P h i l o s o p h i e .
Nous n’ajoûterons plus qu’un mot fur la maniéré
d’étudier quelques fortes $ élémens que ce puiffe être,
en fuppofant ces élémens bien faits. Ce n’eft point
avec le fecours d’un maître qu’on peut remplir cet
objet, mais avec beaucoup de méditation & de travail.
Savoir des élémens, ce n’eft pas feulement con-
noître ce qu’ils contiennent, c’eft en connoître l’u-
fage , les applications , & les conféquences ; c’eft
pénétrer dans le génie de l’inventeur, c’eft fe mettre
en état d’aller plus loin que lui, & voilà ce qu’on
ne fait bien qu’à force d’étude & d’exercice : voilà
pourquoi on ne faura jamais parfaitement que ce
qu’on a appris foi-même. Peut-être feroit-on bien
par cette raifon, d’indiquer en deux mots dans des
élémens l’ufage & les conféquences des propofitions
démontrées. Ce feroit pour les commençans un fu-
jet d’exercer leur elprit en cherchant la démonftra-
tion de ces conféquences , & en faifant difparoître
les vuides qu’on leur auroit laiffés à remplir. Le prore
d’un bon livre à!élémens eft de laiffer beaucoup
penfer.
On doit être en état de juger maintenant fi des
élèmefis complets des Sciences, peuvent être l’ouvrage
d’un homme feul : & comment pourroientrils
l’être., puifqu’-ils fuppofent une connoiffance univer-
felle & approfondie de tous les objets qui occupent
les hommes? je dis une connoiffance approfondie■; car
il ne faut pas s’imaginer que pour avoir effleuré les
principes d’une fcience > on foit en état de les en:
feignes C ’eft à ce préjugé, fruit de la vanité & de
l’ignorance , qu’on doit attribuer l’extrême difetté
où nous fommes de bons livres élémentaires, & là
foule de mauvais dont nous fommes chaque jour
inondés. L ’éleve à peine forti des premiers {entiers,
encore frappé des difficultés qu’il a éprouvées, &
que fou vent même il n’a furmontées qu’en partie ;
entreprend de les faire connoître & furmonter aux
autres ; cenfeur & plagiaire tout enfemble de ceux
qui l’ont précédé, il copie, transforme, étend, ren-
verfe, refferre, obfcurcit, prend fes idées informes
& confufes pour des idées claires , & l’envie qu’il
a eu d’être auteur pour le defir d’être utile. On pour-
roit le comparer à un homme qui ayant parcouru
un labyrinthe à tâtons & les yeux bandés, croiroit
pouvoir en donner le plan & en développer les détours.
D ’un autre côte les maîtres de l ’art, qui par
une étude longue & aftidue en ont vaincu les difficultés
& connu les fineffes, dédaignent de revenir
fur leurs pas pour faciliter aux autres le chemin qu’ils
ont eu tant de peine à fuivre : peut-être encore
frappes de la multitude & de la nature des obftacles
qu’ils ont furmontés, redoutent-ils le travail qui feroit
néceffaire pour les applanir, & qui feroit trop
peu fenti pour qu’on pût leur en tenir compte. Uniquement
occupes de faire de nouveaux progrès dans
l’art, pour s’élever, s’il leur eft poflible, au-deffus
de leurs prédéceffeurs ou de leurs contemporains ,
& plus jaloux de l’admiration que de la reconnoif-
fance publique, ils ne penfent qu’à découvrir & à
jouir, & préfèrent la gloire d’augmenter l’édifice au
foin d’en éclairer l’entrée. Ils penfent que celui qui
apportera comme eux dans l’étude des Sciences, un
génie vraiment propre à les approfondir, n’aura pas
befoin d’autres élémens que de ceux qui les ont guidés
eux-mêmes, que la nature & les réflexions fupplée-
ront infailliblement pour lui à ce qui manque aux
livres, & qu’il eft inutile de faciliter aux autres des
connoiffances qu’ils ne pourront jamais fe rendre
vraiment propres, parce qu’ils font tout-au-plus en
état de les recevoir fans y rien mettre du leur. Un
peu plus de réflexion eût fait fentir combien cette
maniéré de penfer eft nuifible au progrès & à la
gloire des Sciences ; à leur progrès , parce qu’en
Facilitant aux génies heureux l’etude de ce qui eft
connu, on les met en état d’y ajoûter davantage &
plus promptement ; à leur gloire, parce qu’en les
mettant à la portée d’un plus grand nombre de per-
fonnes, on fe procure un plus grand nombre de ju-
ges éclairés. Tel eft l’avantage que produiroient de
bons élémens des Sciences, élémens qui ne peuvent être
l’ouvrage que d’une main fort habile & fort exercée.
En effet, fi on n’eft pas parfaitement inftruit des vérités
de détail qu’une Science renferme, fi par un
fréquent ufage on n’a pas apperçu la dépendance
mutuelle de ces vérités, comment diftinguera-t-on
parmi elles les propofitions fondamentales dont elles
dérivent, l’analogie ou la différence de ces propofi**
tions fondamentales, l’ordre qu’elles doivent obfer-
ver entr’elles, & fur-tout les principes au-delà def-
quels on ne doit pas remonter? c’eft ainfi qu’un chi-
mifte ne parvient à connoître les mixtes qu’après des
analyfes & des combinaifons fréquentes & variées.
La comparaifon eft d’autant plus jufte, que ces ana-
lyfes apprennent au chimifte non-feulement quels
font les principes dans lefquels un corps fe réfout ;
mais encore , ce qui n’eft pas moins important, les
borner
*bornes au-délà delqueltes il ne peut fè refoiuïrè, &
qu’une expérience longue •& réitérée .peut feule faire
connoître}. . ..
Des élémens bien faits, fuivant le plan que nous
•avons expofé, & par des-écrivains capables d’exécuter
ce plan , auroient une double utilité-: ils mèt-
troient les bons efprits fur la voie des découvertes
-à faire , en leur préfentant les découvertes déjà faite
s ; de plus ils mettroient chacun plus à portée -de
diftinguer les vraies découvertes d’avec.-les fauffes;
car tout ce qui ne pourroit point être ajoûté aux élé-
mens d’uneScience comme par forme de fupplément,
ne feroit point digne du nom de découverte. Voyez
ce mot. (Ô)
Après avoirexpofé cè qui concerne -les élémens des
Sciences en général, nous allons maintenant dire un
mot des élémens de Mathématique & de Phyfique, en
indiquant, pour répondre à l’objet de cet ouvrage,
les principaux livres oii ils font traités.
Les élémens des Mathématiques ont été expliqués
dans des cours & des fyftèmes qu?ont donnés diffe-
irens auteurs. Kaye^ Cours*
. Le premier ouvrage de eettè efpece eft celui de
Hérigone, publié en latin & en françois l’an 1664,
en dix volumes. Cet auteur y a renfermé les élé-
tnens d’Ë'ii-clide, les données du même, &c. avec
les élémens d’Arithmétique, d’Algebre, de Trigonométrie
, d’Archite&ure, de Géographie, de Navigation,
d’Qptique, des Sphériques, d’Aftronomie, de
-Mufique, de Perfpe&ive-, &c. Cet ouvrage a cela de
remarquable , que l’auteur y employé par-tout une
çfpece de caractère univerfel, de maniéré que fans 4e fervir ablolument d’aucun langage, on peut en
entendre toutes les démonftrations, pourvû que l’on
fe fouvienne feulement des caraéteres qui y font employés.
Vbye^ CARACTERE.
Depuis Hérigone, d’autres auteurs ont expliqué
les élémens de-différentes parties de Mathématiques,
particulièrement 'le jéfuite Schott dans fon curfus
■ mathematicus , publié en i674;donas Moore, dans
ion nouveau .fyfïèrhe de Mathématiques , imprimé en
anglois en 1681 ; Dechales dans fon curfus matke-
'■maticus, qui parut en 1674; 0zanam dans fon cours
des Mathématiques > -publié en 1699 : mais perfonne
n’a donné de cours de Mathématiques plus étendu
ni plus approfondi que M. Wolf ; fon ouvrage a été
publié fous le titre de elementa mathefeos -univerfoe, en
deux volumes 1/2-.40, dont le premier parut en 1713 ,
& le fécond en 1715 : .dep.tys il y a eu une édition de
Geneve en 1733 , en cinq volumes in-40 : en général
cet ouvrage'fait honneur à fon auteur, quoiqu’il
ne foit pas exempt de fautes ; mais c’eft le meilleur
ou le moins mauvais que nous ayons jufqu’ici.
Les élémens d’Euclide font le premier, & félon plu-
fieurs perlonnes lé meilleur livre $ élémens de Géométrie.
On a fait un grand nombre d’éditions 8f de
commentaires fur les quinze livres des élémens dé cet
auteur. Oronce Finé eft.le premier qui a publié, en
15 30, les fix;premiers livres de ces élémens avec dès
notes pour expliquer le fens d’Euclidei. Pelètier fit la
même chofe en 1557. Nie. Tartaglia fit un commentaire
vers ce même tem$ fur les quinze livres entiers;
il y ajoûta même quelque chofe de lui.
Dçchales, Hérigone, & d’autres, ont pareillement
travaillé beaucoup fur les élémens d’Euclide.,
ainfi que Barrow, recommandable fur-tout par la
préciûôn & la rigueur de fes démonftrations. Mais
comme les quinze livres entiers ne paroiffent pas
néceffaires, principalement aux jeunes Mathématiciens
, quelques auteurs fe font .appliqués feulement
à bien éclaircir les. fix premiers livres :, avec 'l’ôn-
zieme & le douzième tout au plus. On ne finiroit
pas , fi Ton voutoit rapporter les différentes éditions
qu’on en a faites : celles qui paffent pour les meil-
Tome V»
leur es, font iifte édition ïraïïçôife de)DechaleSÔC\mè
latine d’André Tacquet : celle de Dechales , qu’oA
eftime le plus, a été fairè à Paris èn ïÿ ô 9 p a r Otà-
narfi ; & la meilleure dé Tàcqiiët èft une édiriort de
Cambridge faite en 1703 par ‘W-hifton.
Quelques auteurs ont réduit en fyllogifihè's toutes
les dérirohftrati'ohs d’Euclide, pour faire voir comment
l’on s’élève, par une chaîne de ‘raifohnemen’s,
t\ une démonftratiôn complété. Piètre lia mus n’ap^
prouva pas l’ordre d’Euclide, comme il le paioît
par fon difeours fur les cjViinze livres de cét àutéür;
c’eft ce qui le détermina à compiler vingt-trois nouveaux
livres Ùélémens, fuivant la méthode fcholaf-
tique, mais fans fuccès. Arnaud, en 1-667 * Gaftori
Pardiés, Jéfuite, en 1680 ; le P. Lamy, en 1685 ; Ë°l
liniere, ert 1704 ; & depuis 20 ans M. Rivard, ont
publié le fond de la doftrine d’EuclMe, fiiivantime
nouvelle méthode particulière à chacun d’eux.
Il y a quelques années que M .CIairaut, de Paca*
démie des Sciences de Paris, publia une Géométrie
oûles propofitions ne paroiffent qu’à meftire qu’el*
les font occafionnées par lés befoins des hommes
qui lés Ont découvertes : cette méthode eft très-lu-
mineufe, & n*a point la féchereffe des précédentes ;
mais, outre que l’âuteur y fuppofé quelquefois fens
démonftration ce qui à la rigueur pourroit en avoir
befoin, lès propofitions, ainfi que dans toutes les autres
méthodes, n’y font point déduites immédiatement
les unes des autres, & forment plutôt un afleni-
blage qu’un édifice dé propofitions ; cependant uiïe
chaîné non interrompue de vérités, feroit le fyfteme
le plus naturel & le plus cômmodê, én même tenis
qu’elle-offriroit à l’élprit l’agréable fpèftacle de générations
en ligne direéle : or c’eft ce que l’on a
exécuté dans les inftitutions de Géométrie, impri*
niées à Paris en 1746, chez de feure l’aîné. Toutes
les propofitions de cet ouvrage font déduites imme1
diatement les imés dès autres, & donnent occafion
à la réfolution d’un fort grand nombre de problèmes
curieux & utiles, ainfi qu’à des réflexions fur les
développemens de l ’efprit humain ; ce qui répand
quèlque agrément fur une matière qui ne comporté
par elle-même que trop de fécherèffé. Moyennant
cèt àpas ôu cét artifice, la Géométrie élémentaire
a été mife à la portée de la plus tendre enfance,
ainfi que l’expérience Ta démontré, & le démontré
tous les jours. On defireroit que M. Clairaut, dans
les excellens élémens d’Algebrc qu’il a publié^, eût
mis les opérations du calcul plus à portée des com-
mènçans. Voye^ ALGEBRE.
Sur les élémens des différentes parties des Mathématiques,
voy. ALGEBRE, DIFFÉRENTIEL, INTÉGRAL*
Méchanique, Optique, Astronomie , &c.
Les meilleurs élémens de Phyfique font Téflai dé
Phyfique de Muflehenbroeck, les élémens dé sX?ra+
veiànde, les leçons dé Phyfique de M. l ’abbé Nollet,
& plufieurs autres, t'oyei Physique. (£ )
Elemens , (Géomèt. iranfé) On appelle ainfi dans
la géométrie fublime, lès parties infiniment petites oïl
différentielles d’une ligne droite, d’une courbe, d’une
furface, d’un folide. Ainfi (P/. <Panal. fig, ï8.') le
petit efpace P Mm p , formé par lesdéux ordonnées
infiriihrent proches PM, mp, & par l’arc M m de la
courbe, eft Vêlement de l’efpac e A P M ; Pp èft Vêlé*
mtnt de l’abfcifle ; Mm, celui de la courbe, &c. f*oy.
Différentiel, Fluxions , Indivisibles, Intégrai.
»Infini, &c. (<?)
Elémens , en Agronomie. Les Aftronomes entent
dent communément par ce mot les principaux réful-
tats des obfervations aftronomiques,&généralement
tous les nombres éflentiels qu’ils employent à la con-
ftruftion des tables du mouvement des planètes. Ainfi
les élémens de. la théorie du foleil, ou plûtôt de la terre,
font f<?n mouvement moyen û fon excentricité, &
R r r