
pas d’apparence qu’on la laifle tomber! au fond, il
eft bien juile que les princes ayent la même prérogative
8c la même liberté que fe donnent les particuliers
, de recevoir différentes perfonnes chez eux
à différentes heures, les unes plûtôt, les autres plû-
tard, félon qu’elles leur font ou agréables , ou né-
ceffaires. Cependant aujourd’hui ce qu’on appelle
entrées dans les cours de l’Europe, eft un privilège
fpécialement attaché à certains emplois 8c à certaines
charges, d’entrer à certaines heures dans la chambre
des rois, quand les autres n’y entrent pas. C ’eft
donc un droit que donne la charge , 8c non la per-
fonne ; c’eft une pure étiquette qui ne prouve point
de confiance particulière du prince dans ceux qui
joiiiffent de ce droit. Voyei l'article Etiquette.
Article de M. le Chevalier DE JAU COURT. Entrée, (’Hifl. mod.) réception folennelle qu’on
fait aux rois 8c aux reines lorfqu’ils entrent la première
fois dans les villes, ou qu’ils viennent triom-
phans de quelque grande expédition.
Ces fortes de cérémonies varient fuivant le tems,
les lieux, & les nations ; mais elles font toujours un
monument des ufages des différens peuples , 8c de la
diverfité de ces ufages dans une même nation , lesquels
font communément un excellent tableau de
caraftere: c’étoit, par exemple, un fpe&acle fingu-
lier que l’appareil de décorations profanes 8c de maf-
carades de dévotion qui le voyoit en France aux entrées
des rois & des reines , dans le xv. fiecle. L’auteur
des effais fur Paris qui parurent l’année paffée
(17 54, in-1 2.), en donne une efquiffe tirée d’après
l’hiftoire, qu’il fuffira de rapporter pour exemple :
il feroit trop long de tranferire ic i, même par extrait,
ce que j’ai recueilli fur cette matière avant 8c depuis
Charles VII.
Comme les rois 8c les reines (dit l’auteur dont je
viens de parler) faifoient leurs entrées par la porte
Saint-Denis, on tapifloit toutes les rues fur leur paf-
fage, 8c on les couvroit en-haut avec des étoffes de
foie 8c des draps camelotés ; des jets - d’eaux de fen-
teurs parfumoient l’air, le lait & le vin coüloient
de plufieurs fontaines. Les députés des fix corps de
marchands portaient le dais. Les corps de métiers
fuivoient à cheval, repréfentant en habits de caractère
les fept péchés mortels, les fept vertus, fo i,
efpérance , charité , juftice , prudence, force, 8c
tempérance, la mort, le purgatoire, l’enfer, & le
paradis.
Il y avoit de diftance en diftance des théâtres oïi
des aêteurs pantomimes, mêlés avec des choeurs de
mufique, repréfentoient des hiftoires de l’ancien 8c
du nouveau Teftament, le facrifice d’Abraham, le
combat de David contre Goliath, l’âneffe de Ba-
laam prenant la parole pour la porter à ce prophète,
des bergers avec leurs troupeaux dans un bocage,
à qui l’ange annonçoit la naiffance de Notre-Sei-
gneur, 8c qui chantoient le Gloria, in excelfis D eo,
&c. & pour lors le cri de joie étoit Noël, Noël. Voy. Comédie sainte.
A Ventrée de Louis X I , en 1461, on imagina un
nouveau fpeétacle : Devant la fontaine du Ponceau,
dit Malingre, Page 208 de fes antiquités 8c annales de
Paris (ouvrage plus paffable que ceux qu’il a publiés
depuis) étoient plufieurs belles filles en fyrenes toutes
nues y lefquelles en faifant voir leur beau fein, chantoient
des petits motets de bergerettes y fort doux & charmans.
Il paroît qu’à Ventrée de la reine Anne de Bretagne
, on pouffa l’attention jufqu’à placer de diftance
en diftance, de petites troupes de dix ou douze perfonnes
, avec des pots-de-chambre pour les dames &
demoifelles du cortege qui en auroient befoin.
Ajoûtez fur-tout à ces détails, la description cu-
rieufe que le P. Daniel a donnée dans fon hiftoire de
France, de l’entrée de Charles VII. 8c vous çonyiendrez
en raffemblant tous les-faits, que quoique ces
fortes de réjoüiffances ne foient plus du goût, de la
politeflë, 8c des moeurs de notre fiecle, cependant
elles nous prouvent en général deux chofes qui fufc-
fiftent toujours les mêmes ; je veux dire i° . la paillon
du peuple françois pour les fpe&acles quels qu’ils
foient, 20. fon amour & fon attachement inviolable
pour nos rois 8c pour nos reines.
Je ne parle pas ici des cérémonies dé entrées de
princes étrangers, légats, ambaffadeurs, miniftres,
&c. ce n’eft qu’une vaine étiquette de cérémonial
dont toutes les cours paroiflent laffes, 8c qui finira
quand la principale de l’Europe jugera de lbn intérêt
de montrer l’exemple. Article de M. le'Chevalier DE J AV COU RT.
E n t r é e , (Jurifprud.) fignifie dans cette matière
acquifition , prife de poffefjîon. On appelle deniers dé entrée
y ceux qui font payés par le nouveau propriétaire
au précédent, pour entrer en joüiffance. Voye^ D e n
i e r s . Entrage eft ce qui fe paye a u feigneur pour
le droit Centrée, c’eft-à-dire pour là mutation. (A')
E n t r é e , (Comm.) droit ou impôt qu’on leve au
nom du fouverain fur les marchandifes qui entrent
dans un état, foit par terre, foit par mer, fuivant le
tarif qui en eft dreffé, 8c qui doit être affiché en lieu
apparent dans les bureaux où l’on exige ces droits.
Les droits d'entrée fe payent aufli en France fur les
marchandifes qui entrent dans les provinces qui font
réputées étrangères ; & il y en a d’autres encore qui
fe lèvent à l’entrée de quelques villes.
Lorfque le droit d'entrée de quelque marchandife
n’eft pas réglé par le tarif, on le paye par eftima-
tion, c’eft-à-dire à proportion de ce qu’une autre
marchandife, à-peu-près de même qualité, a.coutume
de payer.
Les droits Centrée fe payent y compris les caiffes ,
tonneaux, ferpillieres, cartons, pailles, toiles, 8c
autres emballages, à la referve des drogueries &
épiceries, fur lefquelles les emballages font déduits.
Toutes fortes de marchandifes ne peuvent entrer
en France par toutes fortes de villes 8c de ports ,
même en payant les droits, mais feulement pour
certaines marchandifes par les lieux qui leur font
marqués, ou par les ordonnances, ou par les arrêts
du confeil, comme les drogueries & épiceries par
la Rochelle, Roiien, & Calais, Bordeaux, Lyon ,
& Marfeille ; les chevaux par Dourlens, Peronne,
Amiens, &c. les manufaftures étrangères par Saint-
Valéry , Calais, &c. 8c ainfi de quelques autres.
Les peines contre ceux qui veulent faire entrer
des marchandifes en fraude, font la confifcation de
ces marchandifes & des équipages 8c harnois, 8c une
amende ftatuée par les arrêts & ordonnances. Voy.
C o n t r e b a n d e , D r o i t «S*Ta r i f . Dicl. de Comm.
de Trév. 8c Chamb. (G)
Entr é e , (Commé) terme de teneur de livres en
parties doubles. L’entrée du grand livre, c’eft l’état
des débiteurs & créditeurs portés par la balance ou
le bilan du livre précédent. Voye^ Livres'. ( G)
E n t r é e , ( Danfe. ) air de violon fur lequel les
divertiffemens d’un afte d’opéra entrent fur le théâtre.
On donne aufli ce nom à la danfe même qu’on
exécute. Ce font ordinairement les choeurs de danfe
qui paroiflent fur cet air ; c’eft pour cette raifon qu’on
les nomme corps dé entrée. Ils en danfent un commencement
; un danfeur ou une danfeufe danfe un commencement
8c une fin, & les choeurs reprennent la
derniere fin. Chaque danfe qu’un danfeur ou une danfeufe
exécute , s’appelle aufli entrée. On lui donne
encore le nom de pas. Voyeç Pas. Un maître fort
fupérieur avec qui j’ai conféré fouvent fur cette matière,
m’a confié un réfultat de fes obfervations, qui
peut être fort utile à l’art. Le voici.
Dans toute entrée de danfe, le danfeur, à qui on
Fuppofe de la vigueur 8c de l’habileté, a trois objets
principaux 8c indi'fpenfables à remplir. Le premier*
les contraftes perpétuels de la force 8c de la grâce,
en obfervant que la grâce fuive toujours les coüps
de vigueur. Le fécond, l’efprir de l’air que fes pas
doivent rendre ; car il n’eft point d’air de danfe,
quelque plat que le muficien puiffe le faire , qui ne
préfente une forte d’efprit particulier au danfeur qui
a de l’oreille & du goût. Le troifieme, de former toujours
fa danfe de pas, & de ne les facrifier jamais aux
fauts : ceux-ci font plus aifés à faire que les autres..
Le mélange fage de tous les deux , forme la danfe
agréable 8c brillante.
Chaque partie féparée des ballets anciens étoit
nommee entrée. Dans les modernes, on a confervé
ce nom à chacune des a&ions féparées de ces poë*
mes. Ainfi on dit : Ventrée de Tibulle dans les fêtes .
greques & romaines eft fort ingénieufe, c’eft une des
meilleures entrées de ballet que nous ayons à l’opéra
. y<>ye{ B a l l e t .
Ce nom qu’on donne encore aux diverfes parties
de ces fortes d’ouvrages, doit faire connoître aux
commençans 8c quelle eft l’origine de ce genre difficile
, & quelle doit être leur coupe pour qu’ils foient
agréables au public ; c’eft fur-tout cette méchanique
très-peu connue qui paroît fort aifée, & qui fourmille
de difficultés qu’il faut qu’ils étudient. Voye^
C o u p e . '
Il feroit ridicule que l’on y fît commencer 1 ac*
•tion dans un lieu, 8c qu’on la dénoiiât dans un autre.
Le tems d’une entrée de ballet doit être celui de Faction
même. On ne fuppofe point des intervalles ; il
faut que l’a&ion qu’on veut repréfenter fe paffe aux
yeux du fpeftateur, comme fi elle étoit véritable.
Quant à fa durée, on juge bien que puifque le ballet
exige ces deux unités, il exige à plus forte raifon
l’unité d’aûion: c’eft la feule qu’on regarde comme
indifpenfable dans le grand opéra ; on le difpenfe des
deux autres. \Jentrée de ballet, au contraire, eft af-
trainte à toutes les trois. Voyeç Ba l l e t , O p é r a ,
P o e m e l y r iq u e . ( B )
E n t r é e , (Serrurerie.) c’eft 1 o u v e rtu re p a r la m
e lle la clé e n tre dans la ferru re.
M E N T R E -F E R S ou E N T R E D E U X FERS,
(Comm.) il fe dit dans le poids des marchandifes, de
l ’arrêt ou du repos de la lance ou du fléau exactement
au milieu de la chape ; fi la lance ou le fléau
incline un peu de l’un ou de l’autre cote des deux
plats de la balance, on dit alors que le traitj-Jl force.
Il faut que le trait fort ou forcé foit du côte de la
marchandife, c’eft-à-dire que la marchandife 1 emporte
un peu en pefanteur fur fon poids.
ENTRE-FESSON, vqyrçPÉRiNÉ. —
ENTREJOU, f. m. ( J u r i fp r u d .) terme ufite dans
quelques coûtumes 8c anciens titres, pour exprimer
un certain efpace néceffaire pour donner cours à
l’eau. Suivant la coûtume de Berri,/. xvj, art. 2. chacun
peut en fon héritage par lequel paffe aucun fleuve
ou riviere non navigable ni publique, faire édifier
moulin, pourvû que le lieu foit difpofé pour ce faire
: à favoir qu’il y ait faut 8c entre;ou H c eft-à-dire
qu’il y ait de l’efpace pour faire une abée ou lancie-
re par où l’eau puiffe avoir cours quand le moulin
ne va pas. Cujas , otftrv *4 , chap,XXjv . &
le gbff. de Lauriere , au mot Enttyou. Voye^ a u f l i
L a n c ie r e . { A )
E N T R E L A S f. m .en Architecture , ornement
compofé de lifteaux & de fleurons lies 8c croifes les
uns avec les autres, qui fe taille fur les moulures &
dans les frifes. (P)
E n t r e l a s d’a p p u i , (Sculp.) ornemens a jour,
de pierre ou de marbre, qui fervent quelquefois ail
lieu de baluftres pour remplir les appuis évidés des
tribunes, balcons, 8c rampes d’efçalier, (P)
J'orne K
ENTRELACÉ, adj. en termes de Bïafon y fe dit de
trois croiffans, de trois anneaux, 8c autres chofes
femblables, paffées les unes dans les autres.
Bourgeois en Bourgogne , d’azur à trois annelets
■ entrelacés l’un dans l’autre en triangle d’or.,
ENTRE-LIGNE, f. f. ou, comme on dit ordinairement
, INTERLIGNE , c ’eft l’efpace qui eft entre
deux lignes d’écriture. On ne doit rien ajoûter dans
les a êtes entre-lignesil eft plus convenable de faire
des renvois 8c apoftilles en marge : en tout cas, les
entre-lignes ou interlignes ne font valables qu’aütant
qu’ils font approuvés par les parties, notaires, &
témoins. (A)
ENTRE-METS, f. m. (Hifi. mod.) Le mot entremets
s’eft dit pendant long-tems au lieu de celui 8éintermède
, dans nos pièces de théâtre ; entre-mets de la'
tragédie de Sophonisbe dans les oeuvres de Baïf ; il
fignifioit une efpéce de fpedacle muet, accompagné
de machines ; une repréfentation comme théâtrale où
l’on voyoit des hommes 8c des bêtes exprimer une
aêtion ; quelquefois des bateleurs 8c autres gens de
cette efpece y faifoient leurs tours.
Ces divertiffemens avoient été imaginés pour oc-
cuperles convives dans l’intervalle des fervices d’un
grand feftin, dans l’entre-deux d’un mets ou fervice
à un autre mets ; d’où le mot entre-mets a paffé dans
nos tables pour défigner Amplement le fervice particulier
qui eft entre le rôt 8c le fruit, & les divertiffemens
fe font évanouis.
Ces divertiffemens anciens, qui méritaient biea
mieux le nom dé entre-mets que le fervice de nos tables
honoré aujourd’hui de cette qualification, étoient
des fpeftacles fort finguliers qu’on donnoit du tems
de l’ancienne chevalerie, lé jour d’un banquet, pour
rendre la fête plus magnifique 8c plus folennelle. Il
faut lire tout ce qui concerne ces fêtes dans Vhiftoire-
de la chevalerie de M. de Sainte-Palaye ; il en parle
avec autant de connoiffance que s’il eût vécu dans
ces teihs-là, & qu’il eût écrit fon ouvrage en aflîftant
aux banquets dés preùx-chevaliersi
On voyoit paroître dans la fallerdiverfes décorations
, des machines, des figures d’hommes & d’animaux
extraordinaires, des arbres, des montagnes,
des rivières, une mer, des vaifleaux ; tous ces objets
entre-mêlés de perfonnages, d’oifeaux, 8c d’autres
animaux vivans, étoient en mouvement dans la
falie ou für la table, 8c repréfentoient des a&ions relatives
à des entreprifes de guerre ôt de chevalerie ,
für-tout à celles des croifades.
Il eft vraiffemblable que l’ufage des entre-mets dans
les banquèts s’étoit introduit avant le régné de faint
Louis : àuflî furént-ils employés aux noces de fort
frere Robert à Cômpiegne en 1237. Unè chtoniquë
manuferite de S. Germain fait une ample deferip-
tion des entre- mets qui fe virent au feftin que Charles
V. donna en 1378 au roi des Romains, fils de
l’empereur Charles de Luxembourg, que fes indif*
pofitions empêchèrent de s’y trouver. Mais rien n’eft
plus curieux que le détail que Matthieu de Couci 8c
Olivier de la Marche nous Ont laifle de la fête donnée
à Lille en 1453 * par Philippe-le-Bon duc de Bourgogne,
à toute fa cour 8c à toute la nobleffe de fes états,
pour la ctoifade contre les Turcs qui venoient d’achever
la conquête de l’empire d’Orient par la prife
de Conftantinople. Je pourrois citer un grand nombre
d’autres repréfentations femblables, qui furent
long-tenis à la mode dans nos cours ; mais ces citations
feroient inutiles après les exemples que nous
Venons de rapporter.
On vit encore les reftes de cette ancienne magnificence
au mariage du prince de Navarre en 1572,
avec la foeur du roi ; de même qu’à la fuite d’un autrft
feftin, que la reine donna l’année fuivante au d*a&
d’Anjou roi de Pologne, Le goût de ces plaifirs s’eA
Z Z z x ij