ner du pain, ou quelques poignées d’avoine. On
pratique enfuite la même choie, relativement à l’ef-
froi’ qu’occafionne en eux la rapidité des eaux qui
roulent ; :après quoi on tente de les conduire dans
la rivieremême, en obfervant d’y faire entrer un autre
cheval avant eux-, 6c de le leur faire fuivre en les
careffant. On doit avoir attention de ne les y point
d’abord mener trop avant ; il n’eft queftion dans le
commencement que de les déterminer à obéir : on
ies y maintient plus ou moins de tems, & on les ramené
à l’écurie. On gagne par cette voie peu-à-peu
l’animal ; & non-feulement, fi les coups n’ont pas
précédé cette méthode 6c ne l’ont pas rebuté , il
n’aura pas befoin de l’exemple d’un autre cheval
pour fe foûmettre, mais il paffera enfin fans peine
la riviere entière, dès que le cavalier qui le monte
l ’en follicitera.
il en eft qui par Une forte exception au terme générique
d'animalphilolutronje gendarment au moindre
attouchement 6c à l’imprelfion la plus legere de
Veau, ou de quelqu’autre liquide fur leur peau. Cette
répugnance quelquefois naturelle, mais provenant
le plus fouvent de la brutalité des palefreniers qui
les épongent, ceffera de fubfifter, fi on les mouille
legerement & avec douceur, & fi les careffes accompagnent
cette aâion , qu’il faut répéter dans
l’écurie prefque toutes les heures, & qui doit né-
ceffairement précéder celle de les mener à Veau.
Au furplus, fi cette crainte a fa fource dans la nature
de l’animal , il redoutera la riviere. Quand
elle n’a pour caufe que la rigueur des traitemens
qu’il a effuyés, il y entre 6c y nage franchement fans
aucun effroi : c’eft ce dont j’ai été témoin plufieurs
fois j 6c fpécialement eu égard à un cheval qu’un
écuyer fexagénaire s’occupoit à châtier 6c affommer
de coups de foiiet à l’écurie, fous prétexte de le
mettre fur les hanches, 6c le tout tandis qu’on lui
lavoit les crins. Cet animal qu’il faifoit baigner trois
fois par jour pendant une heure au moins, dans l’ef-
pérance, difoit-il, de l’apprivoifer, fembloit fe plaire
dans Veau : mais dès qu’on l’abordoit en tenant
une éponge, & qu’on vouloit fur-tout entreprendre
d’en peigner & d’en mouiller la crinière, il fe
défendoit avec fureur. Ce même écuyer m’ayant
confulté, 6c m’ayant ingénument avoué qu’il étoit
l ’auteur des defordres de fon cheval, j’imaginai de
l’en corriger, en l’expofant plufieurs jours fous une
gouttière, de maniéré que l’eau qui en tomboit frap-
poit directement fur fon encolure. Dans ce même
tems, un palefrenier le flattoit, lui préfentoit du
pain, lui manioit les crins ; il y paffa bien - tôt l’éponge
6c le peigne, 6c l’animal fut enfin réduit.
Quelquefois l’appréhenfion du cheval que l’on
veut embarquer , naît de l’afpeû. feul du bateau :
alors on doit le familiarifer avec l’objet ; quelquefois
aufli elle eft fufcitée par le bruit que font les
piés fur les planches : en ce cas il faut recourir à une
partie de l’expédient que j’ai propofé dans mon nouveau
Newkajlle, pour dilïîper la frayeur dont font fai-
fis quelques chevaux, qui refufent 6c fe défendent,
lorfqu’ils ont à peine fait deux pas fur un pont de
bois : fubftituez des plateaux de chêne au pavé qui
garnit la place qu’ils occupent dans l’écurie,le cheval
étant fur ces plateaux, fes piés feront le même bruit
que lorfqu’il entrera ou remuera dans le bateau , oc il fera conféquemment forcé de s’y accoutumer.
On rifque fouvent fa vie avec ceux qui fe couchent
dans Veau. Il en eft qui fe dérobent à cet effet
fi fubtilement , & d’une maniéré fi imperceptible
, que le cavalier n’a pas même le tems de fe îer-
vir de fa main & de fes jambes pour ies foûtenir &
pour les en empêcher. On ne fauroit leur faire perdre
ce vice fans une grande attention à leur mouvement
, qu’il eft néceffaire de prévenir-. Je dois
néanmoins avertir qu’il eft rare que les éperons 6t
les autres châtimens’ fuffifent pour les en guérir ;
mais j’ai éprouvé fur un des plus beaux chevaux li-
moufins, dont cette dangereufe habitude diminuoit
confidérablement le prix, un moyen qui le rendit
très-docile, 6c qui lui ôta jufqu’au defir de fe coucher.
Je le montai, après m’être pourvu de deux ou
trois flacons de verre recouverts d’ofier, & remplis
d’eau ; je le menai à un ruiffeau, 6c je faifis exactement
le tems où il commençoit à fléchir les jambes ,
pour lui cafter fur la nuque un de ces mêmes flacons
: le bruit du v erre, Veau qui pafloit au-travers
de l’ofier, 6c qui couloit dans fes oreilles, fit fur lui
une telle impreflïon, qu’il fe hâta de traverfer ce
ruiffeau ; je le lui fis repaffer, 6c j’ufai du même
châtiment : au bout de cinq ou fix jours, l’animal
gagnoit avec rapidité, 6c fans aucun deffein de s’arrêter,
l’autre côté du torrent : 6c depuis cette leçon
il n’a jamais donné le moindre ligne de la plus legere
envie de fe plonger dans Veau. On peut encore prendre
, au lieu des flacons, deux balles de plomb, percées
& filfpendues à une petite ficelle ; on les lui
laiffe, tomber dans les oreilles, lorfqu’il eft prêt à fe
coucher ; & s’il continue fon chemin, on les retire.
M
Eaux , [Manège & Marèchall.) maladie cutanée
qui tire fa dénomination du premier de fes fymp-
tomes, 6c à laquelle font très - fujets les jeunes che«
v au x, qui n’ont pas jetté ou qui n’ont jetté qu’im-
parfaitement, ainli que tous les chevaux de tout
âge qui font épais, dont les jarrets font pleins 6c
gras, dont les jambes font chargées de poils, 6c qui
ont été nourris dans des terreins gras 6c marécageux,
&c.
Elle fe décele par une humeur foetide, 6c par une
forte de fanie, qui fans ulcérer les parties, fuintent
d’abord à-travers les pores de la peau qui revêt les
extrémités inférieures de l’animal, fpécialement les
poftérieures. Dans le commencement, on les ap~
perçoit aux paturons : à mefure que le mal fait des
progrès, il s’étend,il monte jufqu’au boulet,& même
jufqu’au milieu du canon ; la peau s’amortit, devient
blanchâtre, fe détache aifément 6c par morceaux;
& le mal caufe l’enflure totale de l’extrémité qu’il
attaque. Selon les degrés d’acrimonie 6c de purulence
de la matière qui flue, 6c félon le plus ou le moins
de corrofion des tégumens, la partie affeétee eft plus
ou moins dégarnie de poil : l’animal qui ne boitoit
point d’abord, fouffre 6c boite plus ou moins: 6c il
arrive enfin que la liaifon du fabot 6c delà couronne
à l’endroit du talon, eft en quelque façon détruite.
Lorfque je remonte aux caufes de la maladie dont
il s’agit, je ne peux m’empêcher d’y voir 6c d’y re-
connoître le principe d’une multitude d’autres maux
que nous ne diftinguons de celui-ci qu’attendu leur
fituation, 6c dont les noms 6c les divifions ne fervent
qu’à multiplier inutilement les difficultés, & qu’à
eloigner le maréchal du feul chemin qui le condui-
roit au but qu’il fe propofe.Tels font les arrêtes ou
les queues de rat, les grappes, les mules traverfines ,
la crapaudine humorale, les crevaffes, le peigne, le
mal d’âne, &c. qui ne font, ainfi que les eaux, que
des maladies cutanées , produites par une même
caufe générale interne, ou par une même caufe générale
externe : quelquefois par l’une 6c l’autre en-
femble.
Suppofons, quant à la première, une lymphe plus
ou moins âcre, & plus ou moins épaiffe; fa vifeofi-
té l’empêchant de s’évaporer par la tranfpiration '
elle gonflera les tuyaux excrétoires de la peau, 6c
elle ne pourra que féjourner dans le tiffu de ce tégument
, fur lequel elle fera diverfes impreflions, félon
la différence de fon caraftere. Si elle n’eft pas infiniment
grofliere & infiniment vifqueufe, les embar-:
ftis 6c les engorgemens qu’elle formerarie feront
pas fort confidérables : il en réfultera une craffe fa-
rineufe, comme dans ce que nous nommons peignes
fecs. Eft-elle chargée de beaucoup de parties ful-
phureufes, qui par l’évaporation de ce qu’il y avoit
de plus tenu 6c de plus aqueux, s’uniffent & fe def-
fechent-, &fes fels font-ils fortement embarraffés 6c
cmo'uffés par ces parties ? elle produira des croûtes :
c ’eft ce que nous voyons dans les arrêtes ou queues
de rat cruftacées. Enfin eft - elle imprégnée de beaucoup
de fels dont l’adion fe développe, attendu le
peu de parties fulphureufes qu’elle contient, 6c qui
feules pourraient y former obftacle ? elle déchirera,
elle rongera le tiffu de la partie où elle fera arrêtée
, les houpes nerveufes & les petits vaiffeaux cutanés
, corrodés ; l’animal reffentira ou des douleurs
ou des picotemens incommodes : il en découlera une
fanie plus ou moins épaiffe, & plus ou moins foeti-
de : 6c telle eft celle qui fuinte dans la maladie qui fait
l ’objet de cet article, dans les arrêtes humides, dans
les peignes avec écoulement, 6c dans toutes les autres
affections qui ne partent que d’une feule 6c même
fource. Que fi d’un autre côté ces maladies auxquelles'non
feulement le vice de la lymphe, mais encore
l ’obftruftion des tuyaux excrétoires donnent lieu,
ont été Amplement occafionnées par des caufes externes
, capables de favorifer cette obftruCtion, elles
feront plus aifément vaincues ; 6c ces caufes externes
n’étant que la craffe, la boue, 6c d’autres matières
irritantes, il s’enfuit que nous pouvons placer, fans
crainte de nous égarer, les porreaux & les javarts
dans la.même cathégorie, foit que nous les envifa-
gions comme ayant leur principe dans l’intérieur,
foit que nous les confidérions comme provenant de
l ’extérieur. Du refte, s’il y a caufe externe & caufe
interne touLenfemble, le mal fera plus rebelle : mais
le. fuccès ne fauroit en être douteux. J’avoue cependant
que les eaux ont été quelquefois fui vies de maux
extrêmement dangereux, comme de fies, ou crapauds
j de javarts encornés, &c. Mais cet événement
n’a rien d’étonnant, lorfque l’on confidere que
toutesdes maladies qui ont jufqû’ici extérieurement
attaqué l’animal, n’ont été combattues qu’avec des
remedes externes, comme fi la caufe ne réfidoit pas
dans l’intérieur : ôr s’attacher Amplement à deffécher
des eaux, des folandres, des crevaffes, &c. c’eft pallier
le mal, c’eft négliger d’aller à fon principe, c’eft
détourner feulement, & jetter fur d’autres parties
l’humeur, qui ne peut acquérir.que des degrés dé
perverfion, capables de fufeiter des maladies véritablement
funeftes. .
On doit débuter dans le traitement de celle-ci,
par les remedes généraux, 6c non par l’application
des defîiccatifs, plutôt nuifiblesdaris les commence-
mens, que falutaires ; il faut conféquemment pratiquer
une legere faignée à la jugulaire ; le même foir
du. jour de. cette faignée , donner à l’animal.ùn là-?
vement émollient, afin deMedifpofer au breuvage
purgatif qu’on lui adminiftrera le lendemain matin ,
6c dans lequel ;on n’oubliera point de faire entrer
Vaquila 'altia, ôu.le mercure doux.; Selon les progrès
du mal, on réitérera le breuvage, qüe l’on fera tou*
jours précéder par le lavement émollient. Le cheval
fuflifainment évacué , on le mettra à l’ufage du crocus
metallorum, donné chaque matin dans dü fort (car
:bn lui retranchera l’avoine) àlà dofe de demi-once,
dans laquelle on, mêlera d’abord trente grains d’oé-
thiops minéral fait fans feu-,, que l’on augmentera
chaque jour de cinq-grains jufqu’à la dofe defoixan^
te ; on continuera le crocus 6c Voethiops à cette même
dofe de loixante grains, enc.ôre fept ou huit-jours,
plus ou moins y félon les effets de/çes médicamens :
effets dont on jugera par l’infpeClipjQ des parties, fur
Jelcmelles. le mal avoit établifon fiége, La tifane des
Tome r .
bois eft encore, dans ces fortes de cas, d’un très-
grand fecours ; on fait bouillir de falfepareille, fqui-
ne, faffafras, g ayac, égalequantité, c’eft-à-dire trois f.
onces de chacun, dans environ quatre pintes d’eau ,
jufqu’à réduûion de moitié ; on paffe cette décoc-
txonjon y ajoûte deux onces de crocus metallorum ; on
remue, 6c l’on agite bien le tout ; on humeCte le fon
que l’on prel'ente le matin à l’animal, avec une cho-
pine de cette^ tifane que l’on charge plus ou moins
proportionnément au befoin 6c à l’état du malade ;
& fi le cheval refufoit cet aliment ainfi détrempé, on
lui donneroit la boiffon avec la corne. La poudre de
vipere n’eft pas d’une moins grande reffource : on
prend des viperes defféchées, on.les pulvérife, 6c l’on
jette la poudre d’une vipere entière, chaque jour ,
dans le fon. Souvent elle répugne au cheval : alors
on la mêle avec du miel, & l’on en fait plufieurs pilules
, que l’on fait avaler à l’animal.
Quant aux remedes qu’il convient d’employer extérieurement
, on ne doit jamais en tenter l’ufage,
que lorfque l’animal a été fuffifamment évacué, &
qu’on l’a tenu quelques jours à celui du crocus 6c
de Voethiops, ou de la tifane, ou des vipères. Jufque-
là il fuffit de couper le poil, dégraiffer la partie malade,
6c il eft important de laiffer fluer la matière
morbifique ; mais une partie de cette même matière
s’étant échappée au moyen des purgatifs, 6c par
les autres médicamens qui ont provoqué une plus
abondante fecrétion de l’humeur perlpirable , il eft
tems alors d’en venir aux remedes externes : ceux-
ci ne peuvent être fuggérés que par le plus ou le
moins de malignité des fymptomes qui fe mani-
feftent au-dehors. Il eft rare qu’après l’adminiftra-
tion des médicamens que j’ai preferits, ils fe montrent
tels qu’on les a vûs ; fouvent l ’enflûre eft difli-
pée, la partie fe deffeche d’elle-même, 6c il ne s’agit
alors que de la laver avec du vin chaud, 6c de la
maintenir nette 6c propre : quelquefois aufli on ap-
perçoit,encore un leger écoulement : dans cette cir-
conftance il s’agit de ftibftituer au vin dont on fe fer-'
voit, de l’eau-de-vie 6c du favon; & fi le flux eft
plus cônfidérable, on baflinera l’extrémité affeêlée
avec de l’eau, dans laquelle on aura fait bouillir de
la couperofe blanche 6c de l’alun, ou avec de l’eau
fécondé; 6c l’on ne craindra pas de repürger l’animal
, qui parviendra à une entière guérifon fans le
fecours de cette foule de recettes d’eaux, d’emmiel-
lurés, 6c d’onguens, vainement preferits par M. de
Soleyfel, & par Gafpard Saunier.
J’ai obfervé qu’il peut arriver que là liaifon du fabot
& de la couronne commence à fe détruire : alors
on defféchera les eaux à cet endroit feul, en y mettant
de l’onguent pompholix, & on les laiffêra fluer
par-tout ailleurs, jufqu’au moment où on pourra recourir
aux remedes externes que j’ai recommandés.
Il peut fe faire aufli qu’enfuite des érôfions & des
plaies faites conféquemment à la grande acrimonie
de l’humeur, les chairs furmontent .* alors on fe fer-
vira de légers caüftiques, que l ’on mêlera avec de
l’ægyptiac pour les confumer, & on fiiivra dans- le
traitement la même méthode que dans celui des plaies
ordinaires.
. Les eaux qui endommagent quelquefois la queue ,
qui occafionnent la chute des crins dont le tronçon
eft garni, 6c qui en changent la GoUleur, doivent
être regardées comme une humeur dartreufe , contre
laquelle on procédera en employant les remedes
avec lefqüels on a combattu les autres eaux. Cette
forte de dartre qui reconnoît les mêmes caufes , eft
quelquefois tellement opiniâtre, que je n’ai pû la
difliper qu’en frottant tout le tronçon dont j’avois
fait couper les crins avec l’onguent napolitain, après
néanmoins avoir adminiftré intérieurement les re-
me4e$ généraux 6c fpéçi,fiques, p d ü