c ’ eft ce qu’on appelloit eé/iortf/>Ae. La marche fe
faifoit avec une pompe grave & religieufe > !
un grand nombre d’habitans., citoyens & étran-.
gers affifloient avec les parens à cette lugubre
cérémonie. On portoit ces offe'mens dans un,mo- i
nument public, au plus beau fauxbourg de la
ville , appelle le céramique , où bon renfermait de
tout temps ceux qui étoient morts i la guerre,
excepté ceux de Marathon, qui, pour leur rare
valeur j fuient enterrés fur le champ de bataille.
Enfuite on les couvroit de. terre , & l’un ..des
citoyens des plus confidérables de la ville, faifoit
l ’oraifon funèbre.
Après qu’on avoit ainfi payé- folemnellement
ce double tribut de pleurs & de louanges ,uà la
mémoire des braves gens qui avoient faerifiéleurj
vie pour la défenfe de la liberté commune, le
public qui ne bornoit pas fa reconnoiflance - à ;
des cérémonies , ni à des larmes-llérileS y prenoitj
foin de la fubfiflance de leurs veuves'8c des o r - '
phelins qui étoient reliés en bas âge r pùiflanti
aiguillon, dit Thucydide, pour-exciter lal vertu!
parmi les hommes ; car elle fe trouve toujours j
.où le mérite elt le mieux récompenfé. • ~
Les grecs ne connurent la magnificence dés j
funérailles que par celles d’Alexandre - le - Grande ;
dont Diodore de Sicile nous a lai^Té 'la dëfcrïp- i
tion 5 & comme de toutes les pompés. ' funèbres i
mentionnées dans l’hiftoire, aucune; ii’eft compa-i
rable à celles de ce prince, nous en joindrons ici le \
précis , on verra jùfqu’ou -la1 vanité .porta Je luxe !
de cet appareil lugubre. • *
Aridée, frère naturel d’Àlexândrè 'ayant été;
chargé du foin de ce convoi, employa, deux ans
pour difpofer tout cé qui pouyoit ï è ‘rendre le
plus riche & le plus éclatant qù’oh eût'encore
vu. La marche fut précédée par tih grand nombre
de pionniers, afin de rendre praticables les
chemins pair où Ton devoir pafler'. Après qu’ ils
eurent été. appîanis'■> on vit partir de Babylône le
magnifique chariot fur leqüeTéroit le corps, d’A lexandre.
L ’ invention & le defiin de ce chariot
fe faifoient autant admirer , que les richefles im-
menfes dont il étoit décoré. Le -corps de la
machine portoit fur deiix effieux qui entroient
dans quatre roues, dont 1er moyeux & les rayons
étoient dorés, & les jantes:: revêtues .de fer.
Les extrémités des effieux étoient d’o r , repré?-
fentant des mufles de lions qui : mordoient un
dard. Le chariot avoit quatre timons, à chaque
timon étoient attelés feize mulets , qui formoient
quatre rangs : c’ étoiten tout feize rangs & foixante-
quatre mulets. On avoit chpilf des.plus forts*&
de la plus haute taille j ils avoient des couronnes
d ’o r , & des colliers enrichis de pierres précieufeSi,
avec des fonnettes d ’or. Sur.ce chariot s’élevoit
1 un pavillon d’or maflif, qui avoit douze pieds
de large, fur dix-huit de long, fouteau par des
colonnes d’orionique, embellies de feuilles d’acanthe.
Il étoit orné au dedans de pierres prè-
cieufes-, drfpofées en forme, d’édiilles. Tout autour
régnait une frange-d’o r à réfeau , dont, les
'filets avoient uni doigt d’épaifieurq; où étoient
^attachées de groflës fonnettes y. qui.Te faifoient
entendre de fort loin.
Dans la décoration du dehors on voyoit qyatr;e
bàs-relipfs. Le premier ; répréïentoit Alexandre
affis ’ dans un char j tenant un fceptre, environné
d’up côté d’une .troùpe^'dé'-macédoniens, &' de
l’a litre, d’une pareille t'rpupe' de'pèrlans , tpiis aimes
a .'leur; manière. DéVant-eux marchoient- IgS'
écuyers.^du jq i . Dans: le «fécond tjàs-feîief op
vôyqît jdès élephani enharnachés' de toutes pièces \9
portant' fur lé ^devant des indiens , 8c fur le derrière
des macédoniens armés comme dans pn.)our
d’aéfion. Dans le troifième étoient repréfentés
dés; ;èfcadrpns de cavalerie e n ‘.ordre de bataille.
L e q.uamèVnemnntroit’ dès vaine a ûx tout prêts a
combattre. A rentrée dû pavillon croient dés lions
d ’o f’, qui Yért)blÔlént
^étoient ° poïees' 1 dés ftatriés d’Ôt^mâfB^ repré-
‘ fentant délt‘yfâpires poftàntdes trophées d’armés.
Sous cé dérûièr/paviilon on avoir placé un trope
d'ôr'd’uriè jfigCfrë q u a k fé ë o rn é d e ‘têtes d’ animaux
, qui ayoiènt.'fçus leur coq des cercles d’or
d ’uh pied, & idèmj deflafgëur, d^ôù pènàojent des
couronnés brillanté^dè's ^luSviyés çoùleurs' » telles
'qu’on !en ’’portoft àarè lés pompés fapféèst
Ait pied de : ce trône étoit pofé lef ! cercueil
d’Alexandre i , tout d’or 8c; travaillé au marteau«
On.: f’avoip,rempli à demi, d’iromates;8c de.pari-
fums, tant afin qu’H- exhalât une bonne odeur ,
que pour la. eonfervation .du cadavre. Il y avoir
fur ce. cercueil une1 étoffe de - pourpre brochée
d ’or : entre le trône & le .cefcUed étoient les
armes du prince , telles qu-’jl les portoit pendant
fa vie. Le pavillon en dehors étoit auflh couVerr
d’ une étoffe d e . pourpre--à' fleurs d’or ;le ..haut
étoit terminé, par une trèsigrande couronne, d'or ,
formée de.branchés-, d’oliviers..
On conçoit àifément que dans uhe longue
marche, le mouvement d’un chariot aüffi lourd que
celui-ci , devoir1 être1 fîjjet à de grands ihconVe-
niepsi Afift donc què lé pavillon & fous Tes accompagnement
, fait que lé châriot deféendît ou
montât, démèüraffent ' toujours dans Ii même
fitüatron ,‘ malgré Tihégaliié'des Iieux,&lés/viq-
> lentes fecouffes qui en étoient irréparables, du
milieu de chacun des deux effieux .s’élevoit
Un axe qui foutenoit le milieu dü pavillon, &
tenoit toute la machine en état.' ' ;
Le corps d’Alexandre, fuivapç les dernières
; difpofitions ’de 'Qé prince » clévpit :ê,tre porté au
temple de J,upitérTAmmorçi mais Pt@lérné&,rgOU-
verneur.dtÉgyptérj te-fit conduire à Alexandrie ,
où. il fut.inhumé. : Ce. princeTui érigea un temple
magnifique , & lui rendit tous les honneurs que
l’on avoit coutume de rendre aux demi-dieux.
On ne voit plus aiijourd-hui.que les ruines de ce
temple.
F u n é r a il l e s des germains. Les germains brû-
loient les corps ( Tacit. German. ) desperfonnes
d’un rang élevé j il y-avoit une efpèce de bois
confacré fpécialement à cet ufage. On n’ offroit
dans ces funérailles ni parfums, ni vidtimes j mais
on jettoic dans le bûcher les armes du mort,
& quelquefois fon cheval.
Funérailles des gaulois. Les gaulois bru-
loientdu temps de Célar (de bello gallico lib. K L )
les morts avec leurs effets les plus précieux. Ils
célébroient les funérailles de leurs chefs avec une
grande pompe.
. Funérailles des hébreux. Voye^Hébreux.
Funérailles des romains. Les romains ont
é té , fans cpntredit, un des peuples les plus religieux
& les plus exaéts à rendre les derniers
devoirs à leurs parens & à leurs amis. On fait
qu’ils n’oublioient rien de ce qui pouvoit marquer
combien la mémoire leur en étoit chère,
& de ce qui "pouvoit en même-temps contribuer
a la . rendre précieufe. C ’étoit auffi un hommage
qu’on accordoi.t .à la vertu, pour exciter dans
les citoyens la, noble paflîon de mériter un jour de
pareils honneurs. En un mot, Pline dit que les
funérailles chez les romains étoient une cérémonie
facrée : les détails en font fort étendus. .
Elle commençoit’ cette cérémonie facrée dès
le moment que la mort approchoit. Il falloir^ dans
cet infiant que le plus proche parent, & pour des
gens mariés, que le furvivant du mari ou de la
femme donnât'au mourant le dernier baifër
comme pont en recevoir l’ame, & qu’il lui fer-|;
mât lés yeux. On lés lui oUvrpit lorfqu’ il étoit?
fur lë bûcher, afin qu’il parût regarder le ciel.
On'obfervoit en lui fermant les yeux de fermer
fa bouche, pour le rendre moins effrayant, 8c
le faire paroître comme une perfonne d'ôrmante.
On ôtoit l'anneau du doigt du défunt, qu’ on lui
rerriettoît loffqü’ oh portoit lé corps-fur le bûcher.
On l’appelloit plufieurs fois par fon nom à haute:
voix , rpour, connoître s’il étoit véritablement
mo r t o u feuiemeqt tombé en léthargie. On norp-
moit çet ufage conclamatio , conclamation j & fui-
vant }’éxp|ication.qü’n:i célèbre antiquaire a donnée;
d’un b as- relier ( il croit y reconnoîrre un mou-,
rant; mais d’autres y reconnoiffent un mort &c
les joueurs de-flûte des convois) qui eû au Louvre^
- daias la fai lé dos antiques; on ne fé contentait;
pas de la fîmple voix pour les perfonnês de .qualité
, on y employoit le fon des buccines & des
trompettes, ainfi qu’on peut juger par ce basrelief.
L’on y voit des gens qui.fonnent: -de la
trompette près du corps d’une perfonne qui pa-
poît venir de rendre les derniers foupirs, & que
félon qu’on peut conjedfurer par les apprêts qui
y font repréfentés , on va mettre entre les mains
des libitinaires 5 lésTons bruyans de ces inttrumens
frappant les organes d4une manière beaucoup plus
éclatante que la voix, donnoient des preuves plus
certaines que la perfonne étoit véritablement
morte.
Enfuite on s’adreffoit aux libitinaires pour procéder
aux funérailles fuivant la volonté du défunt,
s’il en avoit ordonné, ou celle des parens & des
héritiers, avec le plus ou le moins de dépenfe
qu ony vouloit faire. Ces libitinaires étoient des
gens qui vendaient 8cfournifioient tout ce qui étoit
néceflaire pour la cérémonie des convois ; on les
appelloit ainfi, parce qu’ils avoient leur magafin
au temp’e te Vénus-Libirine. On gardoit dans
ce temple les regiftres qu’ on tenoit à Rome de ceux
qui mouroient ; 8c c’eft de ce s regittres qu’ on avoit
tire le nombre des perfonues que la pefte y enleva
pendant un automne du temps de Néron. •
Les libitinaires avoient fous eux des gens qu’on
nommoit jpollinttores, poïlincleurs : c’étoit entre
leurs mains qu’on niettoit d’abord le cadavre 5,
ils le lavoient dans l’eau chaude, 8c l’embau-
moient avec des parfums. Il paroît qu’ ils poffé-
doient la, manière d’embaumer les corps à un plus
haut degré, de perfection que ne faifoient les égyptiens",
fi l’on en croit les relations de quelques
découvertes ( faites à Rome depuis deux cens ans)
de tombeaux , où Ton a trouvé des corps fi bien
’ confervés, qu’on les auroit pris pour des perfon-
nes plutôt dormantes que mortes ; l’odeur qui for- ‘
'toit de cès tombeaux, étoit encore fi forrequ’elle
. étourdiffoit.
Après’ que le corps étoit ainfi embaumé, on
le ' iè;vêt?o!t d’un habit blanc ordinaire, c'eit-à--
; dire -, de la-toge. Si cétoit une perfonne qui eut.
’ palfé par lés charges? de Ma république, on lui •
rnettort l’habit diftmCtif 'de la plus haute dignité
qu’if eût poffe'dée, 8c On lega-rdoit ainfi fept jours,
: pendant lefquels jon préparoit tout ce qui étoit
néceflaire pour la pompe des funérailles. On l’expo-,
fiiit Tous le v.efiibule, ou à l'entrée de fa maifon,»
• céuché fur u;nMit -de parade,’ les pieds tournés-
! vers la porte , ôâ'l’on mettoit un rameau de cyprès^
bur les riches-'-, pour les autres feulement des
rànches de pinq qui marquoient également qu’il
. y àvroit là ün mort- dans la maifon. Il refloit
rbujours un honime auprès du corps, pour empêcher
qu’on ne vo'ât quelque chofe de ce qui
étoit autour de- l'üi : mais lorfque c’étoit une ptrr
i fénne du premier rang, il y avoit à l’entour de
! jeunes garçons occupés à chafler les mouches.
- Les fept jours étant expirés , un héraut public
| annonçoit le convoi, en criant : exequias L . ( te l)
V v v v ij