
i 74 C Y C deviennent fuperflues ) je vais citer un paffage de
Nonnus , qui décide évidemment la queftion.
« Les phalanges des Cydopes accoururent : leurs
» mains déformées lançoient des montagnes > les
» pierres & les rocs leur fervoient d'armes & de
» lances 5 un roc étoit leur hache , & les lam -
» mes de la Sicile étoient leurs flèches. Les fol-
dats portoient du feu dans leurs mains, Brome ,
» Stéropé, Euryale , Fhtreus, Ægès, Trachius,
» & le fuperbe Alvmèdes. Mais Polyphême , fils
» de Neptune, dont la tête s'élevôit jufqu’aux
» nues, les furpaffoit tous. « ( Nonni Dionys.
I. xiu. }. Peut-on mieux défigner des volcans?
&r ne voit-on pas ici le plus grand rapport entre
les combats des Titans , d’Aloüs, Tvphée &
Mimas, & ceux des Cyclopes dont les armes font
des rochers ? Que fera donc l'aventure d'Ülyffe
avec Polvphême , qui, pour fe venger, ameute .
les Cyclopes, & jette des pierres à Ulylïe, afin de
fubmerger for. vaifieau ? .Vobierve en pa fiant que
ce*: preuves diverfes vérifient ce qu'a découvert la
phvfique moderne , que la Sicile eut autrefois un
grand nombre de volcans , dont l'Etna reftefëul.
Les Cyclopes font en effet en grand nombre, & ■
l’on difoit qu fis dévoroient leS étrangers, dans
ces temps reculés où la Sicile étoit inhabitable.
La mémoire de cette époque avoir donc pafie par
tradition allégorique jufqu’à Homère & par con-
féquent on avoir celle du temps où la Sicîlê'fut
habitée , & commënça à devenir le grenier de
l'Italie. Ce temps eft évidemment défigné dans
cette tradition par les viéloires d’Ülyffe fur Poly- j
phème , par la punition qu’Apollon avoit-inflrgée
aux Cyclopes , pour avoir fourni les foudres dont
futtuéfon fils Efculape, & par les foudres dont
Jupiter les écrâfa quand il les précipita dans le
Tartare.»
« Le même fort avoit été réfervé à ces géans
audacieux, qui avoient formé l'infenfé projet d’ef-
calader le ciel , qui lançoient des rochers enflammés
contre les Dieux, & qui portèrent jadis
l'épouvante dans l’Olympe- Phaëton, lé Serpentaire,
l’intrépide Orion en furent épouvantés, &
chafies de leurs places éternelles ; l’ourfe elle-
même frémit fous le pôle glacé. Le règne hit long
de ces hommes féroces, ,8c leurs attaques furent
fouvent renouvelées ; mais tous les Dieux réunirent
leurs forces, & ils furent écrafés fous -les
foudres de Jupiter ; les montagnes mêmes qu'ils
avoient lancées leur fervirent de tombeau ; quelquefois
encore ils s’agitent fous ce lourd fardeau,
& fis font trembler la Sicile 5 mais Jupiter les
tient en refpecl, & les campagnes qu'ils avoient
dévaftées font couvertes de riches moiffôns. Voici
donc encore cette grande époque hiftorique vifi-
blement défignée ; ce qui dans des recherches ultérieures
pourra fervir à trouver le temps où la
Sicile fut réellement habitable. Qu’on life dans
cet efprit Homère, Nonnus, Virgile, Ovide, la
-Gigantomachie de Claudien j & Ton fe confîrc
y c
niera dans cette vérité , que ces géans, ces-Titans,
ces fiers enfans de là Terre , ennemis des
Dieux & des Agriculteurs , ne font autre chofe
que des volcans. »
« Mais là Sicile n'avoit pas été le feul théâtre
de leur fureur. Il paroît qu'à la même époque,
tous les pays que baigne la Méditerranée^ depuis
la Sicile jufqu’au détroit de Maimora , avoient
été ravagés par des volcans. A la vérité , tout cela
ëft conté en langage allégorique 5 mais nous le
connoiffons , & déformais il fera impoffible de
s’y méprendre. Ser-oit-ce :, comme l'ont dit les
anciens, que l'Océan , brifant les barrières du
détroit de Gibrabar, eût inondé un pays habité,
&: formé un déluge partiel ? Toujours eft-il évident
que toutes les ifies qui feroient les fommités
échappées à cette inondation, ont été volcaniques
5 Rhodes, Mycone , Déîos, Anaphé , Té-
nédos, Calydna , îcaria , & une multitude d’autre.
\V0ye7 la belle Jîiftoîre des Voyages de M. le
•Comte de Ch oîfeuil- Goujfier, dont je ne puis citer
tous les paflàges ). Lemnos , Tille de Vulcain „
fut un des plus célèbres volcans de cette mer;
car par- tout où Vulcain étoit folemnellement
ad oré, on doit être afiiiré qu'il y avoit eü des
volcans.
Lemnos cara Deo ,. nec fama notlor Ætna s
Jkut Lipares domus. . . . . . ; . .
( Val. Fl. I. i l . v. 5 f. )
Ventum erat ad rupem , cujus pendentia nigris -
Fumant fax a jugis , co qui turque yaporibus aër.
i ïd, v ,$ $I , )
La Reine parlant aux Argaunautes, leur dit :
. . . . . . . . . H&c antra videtis ,
Vulcanique , ait, eccedomos ; datevina precefque :
Forlîtan hoc factum taceat jamfulmen m ahtro ,
Non dabit ipfa fidem , cldufit cummurmurafammas
Hofpes , 6? incujfe fonitum mirabcre majfet
( Id V. 35jv)
C’èft à Jafon qu’Hypfipyle faifoit air.fi voir les
volcans de Lemnos, que le Poète appelle le palais
de Vuléain. >» : • -- . -i '
«La Thrace éprouva les mêmes ravages 5 fi paroît
que le golfe de Tbeffalonique , appelé autrefois
le golfe de Thermes, ou des eaux chaude', pro-
duifitcet effet en entrant dans les terres, & fepara
J’ifle d’Eubée du continent. Les -champs voifins
furent embrâfés précifément comme les campagnes
d'Italie , & portèrent également le nom de
•champs Phlégréens. Cette terre fut appelée Hyf-
tiée , ou la brûlée , & il y avoir , en Tubée urre
ville de ce nom. Il y eut plufieurs villes iVHephef-
tiu.m ou de Vulcain; une à Lemnos, dont la coL
liiie vojfine fournifioit la fâmeufe terre de Lemnoss
une autre dans là tribu Acamantidè en Attiqüe ,
avec un temple dédié à Vulcain. Les monts volcaniques
de Lycie s’appeloient les monts Hephef-
tiens, & Ton y voyoit aufii une ville d Hepheitte .
tout cela tient à des temps très-recules, & fem-
ble appartenir à, la même époque* ?? ■
« Cependant les côtes de TAfiè ont long-temps
fumé de ce même incendie. La Troade fitt fub-
mergée, & il refta plufieurs volcans furTes bords,
comme Tille de Typhon & celle de Ténédos.
La Myfie fut long-temps éxpofée à ces ravages
; & il faut les lire dans le langage .figure
qui en a confervé la mémoire. Nonnus nous a
tranfhiis cette peinture allégorique fous le nom
de Typhéè, rqui fut! auffjmn-cfesl noms de l'Etna ;
tant il .ëft vrai que oes perfo'nhageS' orit.defigne
des volcans :
Alta jacet vajîi J uper or a fyph&os Ætna,
Cujus anhelatis)ïignibus ardctjhumus.
■' ( Ovid. Fafi. L ir* ) ' , r
Dans lés Métamorphofes, c'.eft la Sicile:entierô
qui couvre Typhée :
Viifia gigant ai s injecta eft infula^membris
Trinacris j & magnis. fubjdlum 'molibus urget
Ætkereas aufum fptrare Typhoeïda fedes.
Voici un paffage de Pindare qui confond le?
Typhée -ou les volcans d’Afie avec ceux^ d’Italie ;
ce qui prouve que c’étott un nom générique:
« L'ennemi des Dieux, Typhée aux cent têtes s
»»’ qui fut jadis élevé dans un antre fameux de Ci-
>5 licie, Typhée efi couché dans le fond du Tar-
•*> tare. Maintenant les rivages efcarpés de Cumes
» & ceux de la Sicile , prefient fa poitrine velue.
» L'Etna, dont le front eft couvert de neige dii-
» rant toute' Tannée , cette colonne qui fondent
*> le c iel, l’accable de fon poids. Du fond de cette
« montagne Portent des fources d’un feu pur &
m inabordable..........Ce reptile vomit des fleuves'
00 de feu , Sic. ( Pîndar. Pyth. Od. 1. ).
• 33 Maintenant je vais citer un paffage qui prouve;
que ce nom de Typhée fut donné à un autre vol-
tan , à celui d Tfchia , près de Naples, autrefois
Inarmé , Æitaria, Arirria
Tum fonituFro chy ta a lia tremit pdirümquecubilè
■ înarime, Jovis imperiis. ; impofia Typhaè. j ■
, ( Æneid. x . j
Et Claudien (dé raptu Proferp. I. n i . j : ;
Rupitne Tÿpfcseïa c'ervix
Inarime ?
Et Lucain ( P h a r fa le /. r. ) : ’ 1
. . . . Ceu Siculus flammis urgentibui Ættiam
U niât apex : campant fremens ceufaxa vapornt*
Conditus lnantnes ttternâ mole Typhms.
» La Cilicie-At appelée auffi Inarime , Arime,
comme on le verra dans le" récit de Nonnus. « Les
î? guerriers1 alloient & venoient dans le camp3 avec
» un bruit pareil à celui d'un grand incendie, qui
t= en.ib:â!eroit le monde. La terre-retentiiToir.
» comme lorfque Jupiter irrité la foudroie dans
m lés champs Ariméens, ou 1 on dit qu e!! la vafte
» couche de Typhée. » Homère, d’où ce paffage
eft "tiré {Jliai. i l , é iS . ), fait allufion à la Cilicie»
Les ArimeSi.dit Strabon J habitent la Syrie; c'eft
le, pays d;Aram. L’Qtonte, fleuve de Syrie , s’ap.
peloit autrefois Tvpliop.. Efcbyle & Pindare font
T y p h é e .natif.de la Cilicie. Toutes ces différences
viennent .de ce que Typhee etoit un nom de
volcan’.
' « Oadmus allant chercher Europe, que le taureau
avoirenleyéeparcourut.Ja-te.rre; « i l alla dans
33 da grotte meurtrière des Arimes , où les mont-
.3 très infenfés brisèrent jadis les portes de l’Olym-
"j pe 33. Jupiter, qui vouloit donner le jour à
Tantale ,■ ( Tantale étoit un mont de Myfte, auprès
duquel étoit- la ville Tantales, la fille de
Tantale. Dans une éruption volcanique, il fut entouré
d'eaux & de marais, en forte que ce Roi
ne pouvoir ni boire ni manger. Jfqyejj Nio b ï .
ff/otit croit une ifle volcanique de ces parages , &
fille d’Ëole ,. comme, les volcans ou les ifies
Eoliennes „dltalie ) , rechercha les' faveurs de
P lo ta , fille d’Éole. Le. Dieu cacha fes foudres
fous une roche. « La roche en fut notreie ; les
33 fontainès'bouillonnoient par le feu cache, fetn-
3= blabïè'â' une 'flèche acérée! L e gouffre écumant
- 33 de Mygdonié retentiffoit du brait de la vapeur ;
i, '& lè Ciiicién Typhée étendant" fes mains, au
» lignai que lui en donna la Terre, déroba les ar-
; 33 mes couvertes de neige , mais brûlantes, de Ju-
33; pitër. >3 La Mygdonié étoit une contrée de Myfie
, qui devint très-fertile depuis , comme tous
| les pays volcaniqu<ts-, (A u t pinguis PhrygU Myg-
1 donias opes. Horat..). Ce fut la patrie de Niobé ,
roche volcaniaue : là régna le Roi imaginaire
Mygdonnsfrère d’Hécube , & père de ce jeune
Chorèbe , amoureux de Caffandre , dont Virgile %
célébré la valeur 5t.la fin déplorable. ?’
« Nonnus, qui fait quelques écarts poétiques,
trace enfuite une peinture de Typhee, dont la
voix horrible reffemble au- rugifiement des bêtes
féroces, & qui réunit les fureurs des tigres, des
1 lions & des taureaux. Il attaque les deux, il épouvante
les conftellations, il ofe combattre la lune
elle-même. « Cependant les faifons intrépides ar-
H rrierieles phalanges céleftes ; les révolutions des
s, .cienx font entendre leurs cris, la flamme brille ,
33 l’air frémit du bruit de cette armée variée,
.3' eompoféé de ceux qui habitent le Nord, le
.. Sud, le Levant., le Couchant.. . . . Orion dér
i> gaine fon glaive pour combattre le géant 33 ; le
M na îj