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pièce authentique, qui fert à établir un droit ou
une qualité*
§. I I. Après ces définitions, il faut faire fuivre
les axiomes qui font la bafe des principes généraux
de ta fcience des diplômes.
i . Une chofe ne peut être & n'être pas tout
a la fois.
_ 2. L'eflence des ehofes eft immuable.
3. Du feul vrai Ton ne conclut pas au faux ,
ni du faux au vrai'.
4. Du fait on conclut au poffible j mais du
poffible on ne conclut pas au tait, ou bien, on
prouve Qu’une chofe à pu fe faire, parce qu'elle
s’eil faite. On ne prouve pas qu'elle s'eft faite,
parce qu'elle a pu fe faire, c'ell-à-dire, que la
pojjibilité d’une chofe ne fujju pas pour-en établir
l'exiftence,
f. De f ’impoffible , on conclut à la non-
exiftence du fait : de la non-exiftence du fait,
on ne conclut pas à l'impoffible, ou bien , on
prouve qu’une chofe ne s'eft pas faite, parce
qu’ elle n’ a pu fe faire j on ne prouve pas qu'elle
n'a pu fe faire, parce qu'elle n'eft pas faite.
6 . De l’impoffibilité de la non-exiftence du fait,
©n conclut à fon exiftence; mais de la pofîibi-
Jité de la non-exiftence du fait on ne conclut
pas à fon exiftence j ou bien , parce qu'une chofe
n'a pu ne fe pas faire, on prouve qu'elle s'eft
faite j mais on ne prouve pas qu’elle ne s’eft pas
faite, parce qu'elle a pu ne fe pas faire : de
même de ce qu'une chofe ne peut'n'être pas,
on conclut qu’elle eft ; mais on ne conclut pas
qu’elle eft-de ce qu'elle peut n'être pas.
7. Du non-impoffible, on conclut au pofiible,
& du poflible au -non-impoffible.
8. De l'incertain, on ne conclut pas au certain
, ni qui plus e ft, au néceflaire.
9. Du particulier , on ne doit pas conclure au
général. # ^
10. On ne prefcrit jamais contre la vérité j
ou bien, fi l'on s’eft écarté du vrai, il eft toujours
temps d’y revenir.
Corollaire. On peut découvrir avec le temps
des fautes, des erreurs, des faulfetés qu’on n'ayoit
pas d'abord apperçues.
n . On ne démontre point la vérité des principes.
12. Le probable eft fufceptible de plus & de
moins.
13. Le plus probable doit l’ emporter fur le
moins probable.
14. On ne préfume point la faufleté.
§. I I I . Voici maintenant les principes généraux
pour le difcernement des titres.
1. Une charte doit pafler pour vraie, lorfqu’il
eft moralement impoffible qu'elle fôit faufie.
• 2. Une pièce doit palier pour faufle, lorfqu'il
eft moralement impoffible qu’efie foit vraie.
3. Un feul défaut effentiel,'ouqui moralement
parlant n'a pu fe glifler dans un aCte vrai, prouve
la faufleté de la pièce dans laquelle il fe.trouve.
Corollaire 7. Un ou plufieurs caractères évidemment
incompatibles avec les temps, les lieux,
les perfonnes auxquels une charte originale : fe
rapporte, la convainquent de faux.
Corollaire II. Toute faute groffière qui n’a pu
venir dans l'efprit, ni échapper par inattention à
celui qui a drefie un original, quelque ignorant,
ou quelque abftrait qu'on le fuppofe, démontre
la faufleté de la pièce.
Corollaire I I I , Des erreurs capitales contre
THiftoire & la Chronologie confiante & indubitable
, fi elles ne peuvent être rejettées, ni
fur quelque événement, ou fur quelque ufage
particulier, ni fur une manière de compter plus
ou moins fuivie, ni fur l'inadvertance , la flatterie,
ou l'ignorance, elles opèrent une conviction ma-
nifefte de faux.
Corollaire I V , Une feule' formule , un feul fait
qui ne peut certainement s’allier avec un tel
fiècle, telles circonftances, telles perfonnes auxquelles,
fe rapporte un aCte, fuffit pour le convaincre
de faux.
4. Une charte ne fauroit être démontrée
faufle, quand il eft moralement poffible qu’elle
foit vraie.
Corollaire. On ne doit point réprouver, ni
même fufpeCter un titre, parce, qu'il a des caractères
communs à des pièces vraies & faufîes..
5. Une pièce ne fauroit être démontrée vraiè,
quand il eft moralement poffible qu’elle foit faufle.
Corollaire. On ne doit point fuppofer vraies
des chartes qui portent, certainement quelque
caraCtère qui n'appartient qu’à une pièce faufle.
6. Conféquemment au troifième axiome,.on
ne doit point fufpeCter, ou fuppofer faufle une
charte, parce qu'elle renferme des caractères
propres d’une pièce véritable. C 'eft ce qui eft
arrivé à certains écrivains au fujet d'une charte
de Guillaume le Conquérant, & d’une bulle du
pape Alexandre III.
7. Les titres & les aCtes font faits pour prouver,
& non pas pour être prouvés, c'eft-à-dire, qu'ils
prouvent par eux mêmes & de leur propre fond«
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Corollaire 7. On doit préfumer en faveur de
la vérité d’un diplôme, même non-authentique
& original, tant que fa faufleté n'eft point mani-
feftée par des moyens convaincans, ou du moins
fort probables, & fans réplique. Prsfumitur pro
injlrumento 3 mfi con.trariurn probetur.
Corollaire 1 7. On ne doit pas Amplement
préfumer de la vérité d'un titre authentique &
original, il doit pafter pour confiant, jufqu’à
ce que fa faufleté foit démontrée , ou qu’on
prouve au . moins qu'il doit paflfer pour fufpeCt*
8. Qn ne commet point de crime qui expofe 1
à des peines rigoureufes, ou à une grande infamie,
fans prétendre en tirer quelque utilité.
9. On doit regarder un fait comme moralement
poffible, lorfque l’ufage, dont il eft une fuite,
fubfifte actuellement, quoique dans- des circonftances
différentes , ou lorfqu'on en voit des
exemples dans des temps & des pays voifins.
10. Il ne faut jamais établir des faits fur de
Amples Conjectures.
1 1 . Des caraCtères, qui du premier coup-d’oeil
préfentent quelque chofe de choquant, non par
un excès d'ignorance crafie, mais par un excès
de fingularité, ne font point, des lignes de faux,
mais de vérité,
12. « Les.aCtes fuppofés font prefque toujours
accompagnés de quelque caraCtère vifible de
faufleté ».
13. Toutes ehofes d'ailleurs é g a l e s i l eft
abfurde d’admettre pour vrais & authentiques les
diplômes moins folemnels, au préjudice de ceux
qui le font davantage.
14. On ne doit prononcer contre la fincérité
des aCtes , qu'après y avoir reconnu des vices
intolérables , qu'on ne peut mettre fur le compte
des copiftes.
iy . Un critique qui a la fagefie & la politefle
en partage, . ne doit pas imputer aux chartes,
ni a ceux qui les pofsedent, le crime de faux,
lorfqu'il peut les en garantir par quelque interprétation
favorable.
16. Une charte fabriquée ne doit être dé*-,
clarée telle, que fur des preuves d'une évidence
à laquelle il foit impoffible de fe refufer.
17. Une pièce conteftée en juftice , doit pafler
pour vraie, jufqu'à ce qu'elle ait été inferite,
& juridiquement convaincue de faux.
§• IV . Ajoutons à ces principes les fîx fup-
pofîtions ou demandes faivantes.
]• Quand on parle de poffibilité , d'impoffibi-
li te , de néceffité en fait de titres, on entend,
toujours néceffité, poffibilité, impoffibilité morale
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ou hypothétique, c ’eft-à-dire, qui fuppofe les
rapports & les circonftances dans lefquels fc
trouve le diplôme dont il s'agit.
2. On fuppofe qu’on puiflfe juger de la vérité
ou de la faufleté des titres.
3. Que ce jugement foit appuyé fur leurs
caraCtères, tant intrinsèques qu’extrinsèques^
4. Que les fens puiflent faire connoître, &
l'expérience diftinguer l'écriture, l'encre , la
matière, les fceaux qui conviennent à chaque
fiècle.
ƒ. Qu’on puiflfe fixer l'âge des diplômes, &
fur-tout des véritables, par leurs caraCtères non-
feulement intrinsèques, mais encore extrinsèques.
6. -Qu'eu égard à la totalité des aCtes dreflfés
par les latins, on puifle fuppofer que chaque
fiècle en a produit un nombre à peu près égal
en admettant néanmoins toutes les déductions
raifonnables qu’on jugera nécefiaires.
C H A P I T R E I I .
Réglés générales fur la vérité & la faujfeté des
D i p l ô m e s &* des autres allés.
A r t i c l e p r e m i e r .
Règles générales de vérité,
1. Il n’eft point de chartes dont on puifle
démontrer la vérité avec une certitude métaphysique.
2. Il eft moralement impoffible qu’une charte
foit faufle, lorfqu'elle eft revêtue de tous les
caraCtères de vérité qui lui font propres.
3 • Pour qu”une charte foit revêtue de tous les
caraCtères de vérité, il faut qu'elle n’en renferme
aucun qui ne puifle fe rapporter au fiècle auquel
elle doit appartenir, & aux perfonnes qui doivent
l'avoir dreflêe.
Corollaire I. Une pièce à laquelle il ne manque
aucun .des caraCtères du fiècle auquel elle eft
attribuée, doit pafter pour véritable.
Corollaire I I . Les titres revêtus de tous les
caraCtères les plus ufîtés au-fiècle dont ils s'annoncent,
tirent d e là de nouveaux moyens pour
écarter les foupçons qu'on pourroit former contre
leur vérité.
Corollaire I I I . Les. chartes qui ne renferment
que les caraCtères les moins ufités du fiècle auquel
elles fe rapportent, offrent par cet endroit
la preuve la plus évidente de leur vérité.
4. Des caraCtères compatibles ènfemble & avec
la charte où ils fe rencontrent, prouvent fa vérité.
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