
Odyjf. A p. 1484. /. 16 . ) Il eft de fait que les
vifages peints fur les caifles des momies ont tous
la même couleur ; c’eft donc à tort qu’Alexandre
Gordon avance qu’ ils ont été différens> félon les
provinces.
Quand Martial parle dJun beau garçon d’£-
gypte ( Martial. I. 4. ep. 42. ),, il entend paria
un jeune homme né en Égypte de parens
grecs : les écrivains latins ont fouvent parle de
l'extrême licence de la jeunefle de ce pays, fur-
tout de celle d’Alexandrie ( Juvenal.fat. 15 v. 45.
Quint. Juft. lib. 1. c . i . p. 19. ). C ’étoit un grec,
cet Apolauftus de Memphis en Egypte, ce cé-
èbre pantomime que LuciusVérus amena à Rome,
& dont la mémoire s’ell confervéc fur plufieurs
infcriptions.
On s’autorife d’une remarque d’Ariftote ( pro-
bltm. feSl. 14. p. 113. ed. Sylbourgii.') pour dire
que les égyptiens avoient l’os de la jambe tourne
en dehors. ( Pignon tab. I f . p. 53. ) Elle ne regarde
peut-être que ceux qui étoient voifins des
éthiopiens, & qui avoient, comme ces derniers ,
( conf. Bochart. hiero3% P . I. p. 9^9*)
écrafé, les figures de femmes égyptiennes, avec
une taille allez déliée, ont le foin d’uneextreme
grofleur. Comme les artiftes égyptiens, félon le
témoignage d’un père de l’églife , imitoient la
nature telle qu’ils la trouvoient ( Tkeodoret. fer-
mones 3, ) nous pouvons juger de la conformation
du fexe, par leur manière de traiter les
ftatues. Cette forme particulière n’avoit rien qui
empêchât les égyptiens de jouir d’une parfaite
fanté a fur-tout ceux de la Haute-Égypte, à qui
Hérodote ( *. 3. />. 74- l - 27- ) attribue cet avantage
par-deflus tous les autres peuples. Cette
afiertion eft encore appuyée fur l’obfcrvation fui-
yante : c’eft que parmi la grande quantité de têtes
de momies égyptiennes , examinées par le prince
de Radzivil, il ne s’en n’eft pas trouvée une
feule à laquelle il manquât une dent, ou même
qui en eût de gâtées. ( Radzivil peregrin. p. 190.)
La momie, confervée à l’inftitut de Bologne,
fert encore de preuve à une remarque de rau-
fanias , qui dit qu’on voyoit en Egypte des hommes
d’une taille extraordinaire ( Pauf. I. 1 . ) :
car le corps de cette momie a onze palmes de
longueur ( fept pieds quatre pouces, s’il s'agit
ici de palmes romains ).
Les égyptiens furent de tous temps de rigides
obfervateurs des anciens réglemens qui concer-
noient leurs coutumes & leur culte. Ils y furent
encore très-attachés lous les empereurs romains
( Walton ad Polyglot. Proleg. 2. §. 18 ., & non-
feulement dans la Hautt-Eg ypte, mais aufli à
Alexandrie : car, fous le régné d’Hadrien, il
s’éleva une émeute dans cette ville , parce qu’on
n’y trouva pas de boeuf qui eût les qualités
requifes pour repréfenter le dieu Apis. ( Spartim.
Hadri• p. 6. ) L’inimitié d'une ville contre une
autre, relative au culte d’ un de leurs dieux «
fubfiftoit encore alors. ( Plutarch de I f. & Ofir. )
Quelques écrivains modernes ont affiné, fur les
témoignages prétendus d’Hérodote & de Diodore,
que Cambyfe avoit totalement aboli le culte des
égyptiens, & leur ufage d’embaumer les morts.
Rien de plus faux que cette affertion , puifqu’a-
près cette époque, les grecs eux-mêmes firent
embaumer leurs morts à la manière des égyptiens y
comme Winckelmann l’a prouvé dans fes penféesfur
limitation des ouvrages grecs ( gedanken über die
nackahmung der griechifchen werke, p. 90. ) , en
parlant d’une momie qui portoit fur fa poitrine
cette infeription grecque, s v -h v XI. (Par rapport
aux lettres de cette infeription, il, faut
lavoir que le tau avoit chez les grecs à3Égypte
la figure d’une croix, comme on peut le voir
dans un ancien & précieux manuferit du nouveau
teftament fyriaque , écrit fur du vélin , &
confervé dans- la bibliothèque des Augurtins de
Rome. C e manuferit in-folio eft de l’an 616 , &
a des apoftilles grecques : ®n y lit entre autres
mots , celui-ci 1 -H <\ 1 q r pour h t a i p E. A
l’égard de la momie qui a donné lieu à cette
digreflion , on la voyoit autrefois, à Rome, dans
la maifon délia Valle, & elle fe trouve maintenant
parmi les antiquités électorales de Drefde. )
Les égyptiens fe révoltèrent plus d’une fois fous
les fuccefleurs de Cambyfe., & ils eurent depuis
lui des rois de leur nation, qui fe foutinrent.
pendant quelque temps avec le fecours des grecs ;
il y a grande apparence qu’ils reprirent alors
leurs anciens ufages. ( Herodot. I. 6. )
Les égyptiens confervoient certainement encore
leur culte antique fous les empereurs, comme
on le voit par les ftatues d’Antinoüs, les deux
de Tivoli & celle du Capitole. ( Mu/. .Capitol*
t. I I I . t. 7$. ) Ces ftatues font exécutées fur le
modèle de celles des égyptiens, & conformes à
la figure de l ’Antinous ÜÉgypte y tel qu’il étoit
révéré dans ce pays, particulièrement dans la ville
qui confervoit fon tombeau , ( Eufeb. pr&p. ev.
/ . £ . ) & qui prit de lui le nom d’Antinoée.
( Paufan. I. 8. Pocock's defer. o f the eaft. t . i .
p. 7 3 .) Dans les jardins du palais Barberini,on
voit encore une ftatue de marbre, femblable à
celle du Capitole, & même un peu plus grande
que le naturel, mais fans la tête originale. Dans
la villa Borghèfe, on en trouve une troifième de
la grandeur d’environ trois palmes ( deux pieds.)
Toutes ces ftatues ont unè pofition roide , les
bras pendans perpendiculairement, dans le goût
des anciennes égyptiennes. On voit donc que
l’empereur Hadrien, pour engager les égyptiens à
rendre un culte à la ftatue de fon favori, fut
obligé de lui donner une forme adoptée encore
par ce peuple exclufivement à tout autre.
C e fait nous prouve encore que les égyptiens
ne laifsèrent pas d’ innover- dans leurs
anciennes coutumes religieufes, & de prendre
quelque chofe des grecs relativement a la forme
des ftatues , objets de leur vénération. ( Herodot. 7. 2. c. 78. 91. ) Rien n’égaloit au refte l’averfion
de ce peuple pour tous les ufages étrangers , &
principalement pour ceux des grecs, avant qu’ils
en eullent fubi le joug. Cette averfion a dû infpi-
rer à leurs artiftes une grande indifférence pour
les fuccès des autres nations dans l’art, & par
conféquent arrêter ehaz les égyptiens les progrès des
fciences & des arts. Comme il étoit preferit à
leurs médecins de ne pas'employer d’autres recettes
que celles qui fe trouvoient confignées dans
les livres facrés 5 de même il n’étoit pas permis
à leurs artiftes de s’écarter de l’ ancien ftyle. C ’eft
ainfi que Les loix bornoient l’efprit de chaque
génération à imiter fervilement la manière des
générations précédentes, & proferivoient toute
innovation. Platon nous dit ( leg. L 2. ) que les
ftatues exécutées de fon temps en Égypte, ne
différoient ni par la forme, ni par aucun autre
point de celles q u i'y avoient été faites mille ans'
auparavant : ce qu'il faut entendre feulement des
ouvrages exécutés par des artiftes originaires de,
Y Égypte, avant que ce pays pafsât fous la domination
des grecs. L’obfervation de cette loi fut
inviolable, parce qu’elle avoit fon principe dans
la religion, ainfi que toute la cohftitution du
gouvernement de YÉgypte.
A l’exception des fculptures exécutées fur les
édifices, il paroît que les égyptiens ne firent de
ltatues , avec des formes humaines, que pour leurs
dieux, leurs rois, leurs princes, leurs prêtres.
De là vint qu’ils ne connurent ,point de variété
de formes. Car les dieux de YEgypte étoient des
rois qui avoient jadis gouverné ce royaume, ou
du moins ces dieux étoient regardés comme
les anciens monarques ( Viod . Sic. I. 1. /. 46.
/. & /. 21. ) & les anciens rois étoient prêtres.
( Plat. P o lit.) C ’eft du moins ce qu’on peut
Croire de plus raifonnable, puifqu’aucun écrivain
ne nous apprend fi l’on a érigé en Egypte des
ftatues à d’autres perfonnes.
Winkelmann a prouvé que les anciens ouvrages
égyptiens décèlent deux manières ou ftyles , aux-;
quels il faut afligner deux différentes époques. La
première aura duré vraifemblablement jufqu’à la
conquête de YEgypte par Cambyfe ; la fécondé aura
continué tout le temps que les naturels du pays
cultivèrent l’art de la Sculpture, fous la dénomination
des perfes , & enfuite fous celle des
grecs. Il a prouvé aufli que les imitations des
ouvrages égyptiens ont été faites en grande partie
fous l’empereur Hadrien. Ses preuves ont deux
objets principaux pour bafe j le deflin du nud &
le defiàn des figures drapées.
Dans l'ancien ftyle des égyptiens , le ddfin du
nud a des qualités fenfibles & caraétériftiques qui
le diftinguent , non-feulement de celui des autres
nations , mais encore du ftyle poftérieur du meme
peuple. Les cara&ères de leur deflfin font pris de
l’enfemble de la figure , & de chaque partie
confidérée féparément.
Le caractère général & principal de ce ftyle
dans le deflin du nud , eft le contour de la figure
formé par des lignes droites & peu faillantes : caractère
qui eft aufli propre à l’Architecture & aux
ornemens de ce peuple. De là vient que Stra-
bon ( geog. I. 17. ] , en portant fon jugement fur
un'temple de Memphis, reproche deux défauts
confidérables aux figures égyptiennes : en premier
lieu, de manquer de grâces, ( divinités auxquelles
les égyptiens ne facrifièrent jamais ( Herodot. 1. 1 ).
En fécond lieu , d’être dénuées de ces formes
pittorefques qui charment : la pofition des figures
eft roide & gênée. Quelques auteurs anciens ont
de plus affuré qu’un des caractères généraux dt-s^
figures égyptiennes étoit d’avoir les pieds ferrés
parallèlement, comme on les voit aux anciennes
ftatues de bronze étrufques j mais c’ eft à tort, &
cette pofition des pieds ne fe trouve qu’aux figures
aflifes. Dans les figures debout, les pieds ne font
pas placés fur une ligne parallèle , & l’un avance
toujours plus que l’autre. On voit à la villa Albar.i
une figure d’homme de quatorze palmes de hauteur
( environ huit pieds & demi ) , dont un pied
eft à trois palmes (environ vingt-un pouces ) de
diltance de l’autre. Aux figures d'hommes en
général les bras font pendans le long des côtés ,
auxquels ils font adherens j par conféquent, et s
fortes de figures ne dénotent aucune aCUon qui
doive être exprimée par le mouvement des bras
& des mains. Cette immobilité confiante prouve
non l’ignorance des artiftes , mais une règle
invariable , adoptée pour fervir de modèle à
.l’exécution de toutes les ftatues. D ’ailleurs, l’ aClion
que les égyptiens donnoient à leurs figures fe montrent
fur les obélifques & fur d’autres ouvrages ;
& peut-être même ont-ils fait des ftatues avec
les mains libres , comme le feroit croire celle
qui-repréfentoit un roi, tenant une fouris dans une
de fes mains ( Hérodot. I. i . ) , fi cette ftatue ,
au lieu d’être une figure aflife, avoit été debout.
Aux figures de femmes , il n’y a que le bras
droit d’adhérent au côté s le bras gauche eft plié
fous le fein. Pour les figures placées debout fur
le devant du fiège de la ftatue deMemnon, elles
ont les deux bras pendans. On en voit aufli plu-*
fleurs qui font accroupies ou aflifes fur leurs jambes
pliées; d’autres font agenouillées. Telle étoit l’attitude
des trois divinités, appellées du nixi ,
( feft. dii nixi ) , & placées à Rome devant le
temple de Jupiter olympien. Outre cette unité
de deflin, les os & les mufcles ne font que foi-
blemeot indiqués : les nerfs de les veines ne le