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bronze d’une autre cuirajfe ( Ibid. xr. 487. ) .•
. , . Rutulum thoraca indutus , akenis
Horrebat fquamis.
L ’entortillement des^ anneaux, qui, les cachant
à moitié , les faifoit reflembler à des hameçons,
eft bien peint dans les vers fuivans de Silius. On
y voit aufli que les plaques d’or diftinguoient la
cuirajfe des généraux romains de celle des fimples
foldats } car il y eft qiieftion de l’armure du Con
fui Fiaminius ( /. v. ) :
Loricam induitur , tortos kuic nexilis hamos .
Ferro fquanta rudi , permijloque exafperat aura.
La cuirajfe des foldats, telle qu’on la voit dans
les bas-reliefs de la colonne Trajane, confiftoit
dans une tunique de cuir , courte & ferrée, au
tour de laquelle on ceignoit deux, trois ou quatre
lames de métal ( Stac. Tkebaid. v u ) :
. . . . Ter infuto fervant ingentia ferro
Veftora.
Et mieux encore Sidoine ( Carm. i l . 322. ) .*
. . . . '. • . Nec futilis illi
Circuiusdmpaciis loricam texuit hamïs.
Ces lames étoient quelquefois remplacées par
des chaînettes ( Theb. x i i . ) :
Multiplicem tenues itérant thoraca catene.
On leur fubftitua enfin la cotte-de-maille (Voye^
ce mot) & l’haubergeon.
C u ir a s s e fur les médailles (Une) : fymbole
de la Dalmatie.
CUIRS, peaux Sc parchemin. Voyeç C u ir .
CUISINIER \ ^ k*taSe y miel, les fruits
de la terre, les légumes affaifonnés de f e l , les
pains cuits fous la cendre , furent la nourriture
des premiers peuples du monde. Us ufoient, fans
autres rafinemens, de ces bienfaits de la nature ,
& ils n’en étoient que plus forts, plus robuftes,
& moins expofésaux maladies. Les viandes bouillies
, grillées, rôties, ou les poiflons cuits dans
l'eau fuccédèrent : on en prit avec modération j
la fanté n’en fouffrit point} la tempérance régnoit
encore , l’appétit feul régloit le temps & le nombre
des repas.
Mais cette tempérance ne fift pas de longue
durée : l ’habitude de manger toujours les mêmes
chofes , & à-peu-près apprêtées de la même manière
j enfanta le dégoût > le dégoût fit naître la
curiofité} la curiofité fit faire des expériences f
l’expérience amena la fenfualité : l’homme goûta ,
eflâya, diverfifia, choifit & parvint à fe faire
un art de l’a&ion la plus fimplc & la plus naturelle.
Les Alîatiques, plus voluptueux que les autres
peuples , employèrent les premiers, dans la préparation
de leurs mets, toutes les productions de
leurs climats : le commerce porta ces productions
chez leurs voifins. L’homme, courant après les
richefles, n’en aima la jouiflance que pour fournir
à fa volupté, & pour changer une fimple &:
bonne nourriture en d’autres plus abondantes ,
plus variées, plus fenfuellement apprêtées, &
par conféquent plus nuilîbles à la fanté : c’eft:
ainfi que la délicatefle des tables pafla de l’Afie
aux autres peuples de la terre. Les Perfes communiquèrent
aux Grecs cette branche de luxe ,
à laquelle les fages légiflateurs de Lacédémone
s’opposèrent toujours avec vigueur,
La frugalité des premiers Grecs fut long-temps
célébrée par leurs Écrivains. Elien ( lib. n i . cap.
39. ) , nous a même confervé le nom de chaque
efpèce de végétal qui fervit de nourriture à chaque
peuplade du monde connu. Les Argiens fe nourrirent
de poires, les Athéniens de figues, les
Tirinthiens de poires fauvages , les. Indiens , de
rofeaux ou de cannes, les Carmaniens, de régimes
de palmier, les Méotes & les Sauromates,
de millet, les premiers Perfes, d.es fruits du térébin-
the & de creflon-alénois , & les Arcadiens , de
glands. Entre tous les Grecs , les Lacédémoniens
confervèrent le plus long-temps leur frugalité primitive
& leur fuujfe noire. Cet apprêt étoit fi
infipide, qu’ un Sybarite difoit en le mangeant 3
qu’il n’y avoit rien d’étonnant de voir les Lacé-
moniens fi courageux, puifque lui aimeroit mieux
mourir que de n’avoir, pour foutenir fa vie ,
qu’un mets auffi mauvais ( Ath&ne. iv. cap. 6. ).
Les repas des Athéniens furent aufli célèbres par
leur fimplicité , & ils pafloient en proverbe ( Ibid,
iv. cap. 3.). Mais le commerce habituel des Grecs
Afiatiques avec les Perfes, fit difparoître cette
frugalité primitive , & les habitans du Pélopo-
nèfe ne furent par long-.temps fe défendre de
cette contagion. Les Siciliens ne mirent aucune
borne au luxe dés tables} & leurs cuifiniers s’aç-
quirent , dans tout le monde connu, une réputation
qui égala/X fi l*ôn peut faire fans honte
cette comparaifon ) celle des peintres & des
fculpteurs de la Grèce.
Les Romains, devenus riches & puiflans , fe-
couèrent le joug de leurs anciennes loix , quitté-?
rent leur vie frugale , & goûtèrent l’art de la
bonne chère ? Tune coquus ( dit Tite-Live , liv.
x x x ix ) vilijfimum antiquis mancipfum , ejlima-
tione & ufu , in pretio ejfe , & quod minifterium
fuerat, ars haberi coepta , vix tamen ilia quA
tune confpiciebantur , femina erant futura luxuriA.
Ce n’étoit là que de légers ccupmeiicemens de
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la fenfualité de la table , qu’ils poufsèrent bientôt
au plus haut période de dépenfe & de corruption.
Il faut lire dans Sénèque le portrait qu’il
en fait j je dis dans Sénèque , parce que fa féve-
rité ou fa bile, fi l’on veut, nous apprend fur
cette matière beaucoup de choies, que desefprits
plus indulgens pour les défauts de leur fiecle,
paflent ordinairement fous filence. On ne voyoit,
nous dit-il, que des fybarites couchés mollement
fur leurs li t s , contemplant la magnificence de
leurs tables, repaiflant leurs oreilles des concerts
les plus harmonieux, leur vue des fpe&acles les
plus charmans , leur odorat des parfums les plus
exquis, &: leur palais des viandes les plus délicates
: Mollibus , lenibufque fomentis totum lacef-
Jitur corpus , & ne nares intérim cejferit , odoribus
>variés inficitur locus ip fe , inquo luxuriA parèntatur*
En effet, c’éft des Romains que vient l’ufage
de la’ multiplicité des fervices, & l’établiflement
de ces domeftiques qu’on nomme échanfons, maîtres
d‘hôtel3 écuyers, iranckans , &c. 5 mais les
cuifiniers fur-tout étoient des gens importans ,
recherchés, confidérés, gagés à proportion de
leur mérite, c ’eft-à-dire, de leur prééminence
dans cet art flatteur & pernicieux, qui, bien loin :
de conferver la v ie , produit une fource intarif- ;
Cible de maux. Il y avoit à Rome tel artifte en
cuifineï qui fon payoit par année, félon M. Pau-
&on , ënviron 2400 liv. de notre monnoie. Antoine
fut fi content d’un de fes cuifiniers, dans
un repas donné à la Reine Cléopâtre , qu’il lui
lui accorda une ville pour réco.mpenfe.
Les Lacédémoniens étoient bien éloignés de
cette dépravation, lorfque les loix de Lycurgue
les gouvernoient encore. Ils. chafsèrent alors de
leur v ille, par un décret public , le Sicilien Mi-
thæus , cuifinier célèbre dans tonte la Grèce
( Maxim. Tyr. dijfert. v u . ). Ils apprêtoîent eux-
mêmes leurs repas , comme les héros d'Homere,
& comme Achille en particulier, que l’on voit
dans l’Iliade ( /. v. 209. ) ' couper les viandes &
les embrocher. Quand le luxe eut corrompu toutes
les villes grecques, l’art de la cuifine Si les cuifiy
niers furent très-confidérés , ainfi qu’on le voit
dans les Comédies de Plaute , où ce Poète , in-
troduifant fur la fcène Romaine des fujets & des
perfonnages grecs, a certainement confervé leurs
moeurs & leurs ufages. On y voit les cuifiniers
fe tenir fur les marchés publics, & fe louer à là
journée feulement, pour apprêter les grands repas
chez les particuliers {Aiàul. i l. 4. 1 ) :
Pofiquam obfonavit herus-, & conduxit cocos ,
Tibicinafque hafee apudforum. . . .
Il y en avoit qui ne prenoient pas moins d’un
nummus , ou pièce d’or, (de la valeur de 20 à 23
de nos livres j , pour une feule journée , tandis
que le prix ordinaire étoit d’une drachme , environ
20 fous ( Pfiiud. n i . 1 . 1 0 .) :
I li i drachmis iijfent miferi , me nemo potejb
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Minoris quifquam nummo , ut furgam , fubigere.
Nous avons vu plus haut Antoine renchérir fur
ce prix exorbitant, compté à des artiftes aufli vils
que des cuifiniers.
Ces efc&ves ( car les cuifiniers ne fortoient
pas de cette clafle d’hommes) aiguifoient l’appétit
de leurs maîtres, par le nombre , la force , la
diverfité des ragoûts, & ils avoient étendu cette
divetfité juCqu’à faire changer de figure à tous
les morceaux qu’ils vouloient apprêter. Ils imi-
toient les poiffo.ns qu’on defiroit, & qu’on ne
pouvoit pas avoir , & donnoient à d’autres poif-
fons le goût &: la forme de ceux que le climat
ou la faifon refufoient à la gourmandife. Le cuifinier
de Trimalcion Compofoit même de cette
manière , avec de la chair de poiflon, des animaux
différens, des pigeons ramiers , des tourterelles,
des poulardes , &c. Athénée parle d'un
cochon à demi rô t i, préparé par un cuifinier qui
avoit eu l’adrefte de le vuider & de le farcir fans
l’éventrer.
Du temps d’Augufte, les Siciliens i’emportoient
encore fur les autres peuples dans l’excellence de
cet art trompeur j c'eft pourquoi il n’y avoit point
à Rome de table délicate qui ne fût fervie par des
gens de cette nation.
. . . . • . Non ficuU dapes
Dulcem elaborabunt faporem3
dit Horace. Apicius, qui vivoit fous Trajan, avoit
trouvé le fécret de conferver les huîtres fraîches :
il en envoya d’Italie à ce Prince , pendant qu’il
étoit au pays des Parthes, & elles étoient encore
très-faines quand elles arrivèrent : aufli le
nom d’Apicius, long-temps affeété à divers ragoûts,
défigna une efpèce de feéle parmi les gour-
mans de Rome. Voye% A l im e n s , A p ic iu s ,
R a g o û t & R e p a s .
On a découvert dans Herculanum des cuifines
avec des potagers & des fourneaux en briques ,
à-peu-près femblables à ceux d’aujourd’hui. Il y
a apparence que les Romains employoient pour
leurs fourneaux plus de bois que de charbons.
Le plan de res fourneaux a été publié dans- l’ouvrage
intitulé Recherches fur les ruines de Herculanum
par M. Fougerou? de Bondaroy j à Paris,
chez Defain , i«-i2 , 1770.
Tous les uftenfiles des cuifines d’ IIerculanum
étoient de même à-peu-près femblables à ceux
d’aujourd’h u i, mais ils étoient de bronze, épais
& étamés en argent fin 5 i ° . parce que le bronze
fe rouille moins facilement que le cuivre ; i ° . parce
qu’ il fe jette en' moule J 30. parce qu’il s’étend
fous le marteau j 40. parce que le fer fe rouille
aifément, & ne peut pas facilement fe jeter en
moule.. . - ,
Ce font des grils, des paflbirs, des lèchefrites,
des tourtières /des coquilles pour modeler de 1a
;