
de tout temps. En creufant dans ce manufcrit,
nous avons découvert des lignes entières, cachées
fous une ou deux membranes , quoique
ordinairement aucune apparence de lettre ^indiquât
cette decouverte, pas même ' après avoir
levé la première couche. A-t-on donc collé, fur
ce papier déjà écrit, de nouvelles lames à! écorce ?
C ’eft ce qu’on pourroit conclure de la différence
des caractères qui relient à la fuperficie, & de
ceux qu'on ne fauroit appercevoir qu'en portant
le fer dans le fein de ce manufcrit. Mais communément
ces lignes, pour ainlî dire fouterraines,
du dehors du papier ont pénétré a fiez avant
dans fon intérieur, & s’y font confervées, tandis
que l’ air & le tems osnt totalement fait difparoître
l ’encre &*les lettres de la furface ».
«« Ce s découvertes nous ont enhardi.à détacher
les deux pages adhérentes à la couverture > mais
la première ne l'a pu être qu’en partie, parce
qu’ en quelques endroits elle eft percée à jour,
& qu’ en d’autres elle étoit réduite à une feule
membrane, bien qu’il y eût des portions de ce
feuillet compofées , à l ’ordinaire, de plufîeurs-.
Le dernier , prefque double des autres par l’ épaif-
feur, après avoir été détaché de la couverture,
nous a laiffé voir environ vingt-deux lignes d’écriture
mérovingienne , & par conféquent différente
de celle du refte du manufcrit. L’antiqüité
en eft au moins du VII. fiècle } mais elle pour-,
ïoit être plus grande, puifque nos lettres mérovingiennes
ne font autres que l’écriture courante
des romains. Nous avons commencé d’abord
par diftinguer quelques mots dans cette dernière
page. Bientôt nous y avons lu quelques
verfets des chapitres 21 & 23 de l’exode, St 6
& 18 du lévitique ».
« Depuis que nous avons pénétré dans les
entrailles de ce manufcrit, & qu’üne efpèce de
diffeétion nous a fait connoître plus parfaitement
la nature de la matière dont il eft eompofé,
nous y avons reconnu fouvent des couches d’écorce
tout à-fait femblables à celles des écorces
d’arbres. O n en peut même diltinguer de différentes
efpèces. Il eft vrai qu’on y remarque auflî
quelques membranes , en petit nombre, aflez ref-
femblantes aux lames du papyrus. Si elles n’en
font pas véritablement, il falloit que certaines
pellicules à'ééorce d’arbres euflent une grande
affinité avec elles. Mais fi elles font de papier
d’Egypte, il s’enfuivra qu’on faifoît quelquefois
une forte de papier du mélange des membranes
de papyrus & d‘écorce d’arbres ».
É C R A IN - Voye% D a c t y l io t h e c a .
É CREVISSE de mer.
C e cruftacée étoit le fymboîe de plufîeurs villes
grecques & fîciliennes. Il forme la coëffure
d’Amphitrite fur les médailles des brikiens dans
la grande Grèce. Peut-être étoit-il auflî le . fymbole
de Mars : au moins voit-on dans, la Chauffe ce
dieu fur une pierre gravée, ayant le pied droit
fur une écrevijfe de mer. L ’Océan porte fur les
monumens, ainfi qu’Amphitrite, des ferres d’ é-
crevijfe dans fa coëffure. Voyez A m ph it r it e ,
O c é a n , L erne.
L ’Écrevisse de mer, ou le Craie t fert de
type aux médailles d’Acragas en Sicile., de Cos»
d Hymère de Cume, de Télos & des Brutiens.
É CR ITUR E .
Des marques ayant d’abord été tracées fans
deflein, & comme par une efpèce |de badinage »
l’homme s’en fera fervi dans la-fuite, pour fe
rappeller le fouvenir de certains faits qu’il crai-
gnoit d’oublier, ou de certaines obligations qu’il
fe propofoit de remplir. Ces marques ne figni-
fîoient ni des fons, ni des mots > mais une totalité
de chofes, une aCtion, un événement avec
toutes fes circonftances. La multiplication de ces
Agnes donna naiflance à la première écriture. On
en fentit l’utilité 5-on fe la communiqua} on là.
perfectionna} on en fit un art. Et bientôt chaque
caraCtère, qui n’exprimoit que des chofes vagues
, fut deftiné à rendre des penfées; fpécifî-
ques , & les modifications même de ces peu fées-
La plus ancienne écriture ne tranfmit donc ni
aux abfens, ni à la poftérité, les fons de la voix
par des lettres femblables aux nôtres. Elle exprima
par dés images ou des lignes, foit naturels
foit arbitraires , les idées, les fentimens , lesju-
gemens:bien qu’à parler à la rigueur, ces derniers
fuflent d’ abord plutôt fous-entendus que
figurés." .
Parmi les caractères fymboliques, dont nous-
parlons, les uns étoient les portraits grofîiers des
aftres , des plantes , des animaux & de différentes
parties de la nature } les autres ne pouvoient
palier que pour des figures de pur caprice. Tels
furent les hiéroglyphes de l’Egypte , tels les caractères
de la Chine. « Le moyen d’exprimer les
» penfées par des peintures , 011 représentations
» des chofes dont on parle» eft celui qu’em-
» ploient encore aujourd’hui les fauvages du Ca-
» nada, & celui dont fe fervoient les mexicains
» avant que les efpagnols euflent détruit leur
» empire
Si tous les peuples de la terre étoient demeurés
attachés à leur écriture primitive, ils auraient
continué de s’entendre par écrit, malgré la di-
verfité de leurs langues. Les mêmes, chifres arabes
, les lignes du Zodiaque, des Planètes & de
l’Algèbre font également entendus , quoique
différemment prononcés par les divers peuples
de l’Europe. Il ne feroit donc pas impoffiblé,
d ’inventer une écriture qui pût être entendue
de toutes les nations du monde , & que chacune
prononcerait en fa propre langue.
Le projet d’une écriture univerfelle n’eft pas
demeuré dans la pure poflîbflité. Plufieurs favans
hommes ont tenté de le réduire en pratique.
Wilkins , évêque de Chefter, & Je fameux Leibnitz
ont entrepris des travaux confidérables pour
l’exécution de ce deflein. On peut même avancer
qu’il eft exécuté en partie , quoiqu’il pût l’être
d’une manière beaucoup plus parfaite.
Les favans de la Chine, du Tonquin, de la
Cochinchine , de la Corée St du Japon , ont
des caractères communs, qu’ils lifent chacun
dans leurs langues , quoique très - diflèmblables
entr’elles.
\Jécriture fut toujours ou perpendiculaire comme
ce1 le des chinois, ou finueufe comme les runes,
ou horizontale comme la nôtre-, & celle-ci yà
fixer principalement notre attention. On peut distinguer
quatre fortes Récritures horizontales ,
celle qui marche de gauche à droite, celle qui
va de droite à gauche , & une troifiéme, qui
les réunit en allant & revenant par des lignes
parallèles vis-à-vis du point d’où elle eft partie.
Celle-ci fe fubdivife en deux efpèces, fuivant
qu’elle commence par la droite, ou par la
gauche.
Les orientaux ont toujours écrit de droite à
gauche. Les occidentaux depuis long-temps écrivent
de gauche à droite. Les premiers en communiquant
leurs lettres aux féconds , leur apprirent
fans doute à régler, comme eux, la marche
de leur écriture.
. Les étrufques retinrent fi bien ^ette marche
, qu’ ils ne l’abandonnèrent que très - rarement,
pour fuivre celle des occidentaux , ou
pour réunir l’une St l’autre à la fois. Prefque
tous leurs monumens » dont on a formé des
recueils de plufieurs volumes , renferment des
caractères tournés conftamment dé droite à gauch
e , St des lignes gardant la même direction.
Les grecs ( au moins le préfume-t-on ) em-
brafsèrent auflî d’abord cette manière d’écrire ,
foit que 3 comme Pélafges venant de l’Orient,
ils l’euffent apportée avec eux , foit que, comme
déjà établis dans ces contrée^, que nous appelions
Turquie en Europe, ils l’euffent reçue de
Cécrops ou de Cadmus. On n’y a pourtant point
encore déterré d’infcription , qui conftate qu’ils
aient obfervé de former toutes leurs lignes à
l’orientale*'
C e n’ eft pas qu’on n'ait découvert des écritures
commençant de droite à gauche} mais auflî tôt
elles reviennent de gauche à droite, lorfqu’elles
font compofées de plufieurs lignes.
Les huns qui défolèrent l’empire romain, fous
la conduite d’Attila, écrivoient de droite à gauche.
Leur alphabet confiftant en trente - quatre
caraClères, a été publié par Hickes, à la page
8 de fa préface. Oh prétend que les reftes de
ces huns portent aujourd’hui le nom dezikules.
Ils occupent une partie delà Tranfilvanie. Mol-
n ar , dans la préface de fa grammaire hongroife ,
parle de leur écriture'covniwe d’une chofe actuellement
exiftante.
Éc r itu r e des égyptiens. Nous entendons
parler ici feulement d’une écriture courante, St
non hiéroglyphique , dont nous traiterons à leur
article. Les reftes de cette écriture courante font
fi rares, que nous avons de grandes obligations
au comte de Caylus, qui les a recueillis avec
foin. C ’eft lui qui va parler dans cet article.
Les cinq planches publiées par le comte de
Caylus , dans fon recueil ( tom. I .p . ) , re.
prefentent un morceau de toile , qui lui a appartenu
autrefois, St qui fe trouve aujourd’hui au
cabinet de Ste.-Geneviève. Sa longueur eft de
deux pieds quatre pouces fix lignes, St fa hauteur
de fix pouces fept lignes ou environ } car les bords
font effilés, St par conféquent inégaux. Il eft di-
vifé en plufieurs colonnes parallèles , formées par
des caraCfères égyptiens. Il n’eft écrit que d’un
c ô té } l‘écriture en eft noire, à la réferve des premiers
mots de chaque colonne, qui fur l’original
font tracés en lettres rouges, ( & qui dans la copie
fe trouvent foulignés ) } le caraCtère en eft
ferme , & n’a pas été fait au pinceau : les lignes
: de divifion & de réparation ont été tirées à vue &
! fans règle. Les figures Amplement deflînées au
trait ne font réhauflees par aucune couleur ; mais
on peut afifurer qu’elles font touchées avec un ef-
prit & une légéreté que ne défavoueroient pas
des nations plus vives que les égyptiens.
Cette bande de toile eft terminée par une ef-
; pèce de compartiment, q ui, outre plufîeurs mots,
contient des vafes St des quarrés peints en rouge,
couleur qui a été placée fans aucun foin , St qui
défignoit peut-être que ces corps étoient de terre
cuite.
Les figures deflînées au deflîis des colonnes vont
de gauche à droite, tandis que Yécriture va en
un fens contraire. Ceux qui defireront de plus
grands détails fur ce monument, pourront con-
fulter le II. tome ( planche L IV . ) du fupplément
de Yantiquité expliquée , où il eft gravé } mais on
ne doit pas fe fier entièrement à la copie que