
M* CUÏ forints de fon rang ne laiffaffent pas en blanc fin
des côtés de leurs lettres. Mais de tout temps les
gens du- commun ne balancèrent pas à metrte
a profit le' verfo comme le refto des pièces de
peu de conféquence , ce qui ne dévoient point
durer à perpétuité. - Comme les teftamens pre-,
noient foûvent là forme de livres, on faifoit
encore moins de difficulté d'y écrire fur le revers
de chaque feuille. Les Jurifconfultes ( Ibid. ) anciens
& modernes rendent non-feulement témoignage
à cette pratique, mais ils l’aucorifent en
termes formels. Depuis la chute de l'Empire Romain
jufqu'aux derniers temps il étoit fort rare
qu'on pôrrât une partie de l'écrirure fur le dos
des chartes en pàrchemin. Quand on le faifoit,
cela ne confiftoit guère que dans les fignatures &
autres formules finales; encore n'en'découvre t-on
•prefque point d'exemples antérieurs au dixième
üècle. Nous venons de le. dire : anciennement
on écrivoit les teftamens fur plufieurs feuilles-,
& on avoit la liberté de les remplir fans laiffef
aucun vuide ; mais , au moyen âge, on ne donna
point aux teftamens une forme différente de celle
des autres chartes : au contraire, depuis environ
trois fiècles, les teftamens , & bien des contrats,
traités & autres a êtes imitent l'ancienne forme
dont les teftamens furent revêtus ».
» Ce ne fut qu'aux x i v & x v e fiècles , qu'on
s aperçut combien il étoit dangereux de fe-fervrr
-du parchemin raclé dans les aéles publics ,- &
qu on prit des mefures efficaces pour arrêter ce
défordre. En conféquence, les provifîons par lesquelles
les Empereurs élevoient à la dignité de
Comte, avec pouvoir de créer des lunaires impériaux
, portoient communément ( Maffei, ifi.
dipiom. pag, 69) cette claufe-r a condition quils
n emploieront point de parchemin vieux & raclé ,
mais qui foit vierge & tout neuf ».
00 Si l'ufage du parchemin raclé dans les a&es
publics n’a jamais pafle en coutume, & s'il femble
même n'avoir eu quelque cours qu'en Allemagne,
il a eu des-fuites funeftes pour quelques bons
livres dont nous regrettons la perte. Lorfqu’elle
étoit^ une fois jurée , tantôt on les faifoit paffe-r
par 1 epreuve de l'eau bouillante, tantôt par celle
de 1 eau de chaux vive j on en enlevoit la fuper-
•hcie, en un mot on les racloit > quelquefois même
on leur faifoit fubir à-peu-près, les mêmes préparations
que fi l’on avoit voulu fabriquer le
parchemin vierge. C'eft ainfi qu'on faifoit dif-
paroître les anciennes écritures pour en fubfti-
tuer de nouvelles ».
Ce goût barbare s’étoit répandu de tous
cotes par rapport aux manufcrits. Il s’étoit tellement
accrédité chez les Grecs des x n , x iii &
.XïVe8 fiècles, qu'il a fait périr beaucoup d’ex-
cellens ouvrages. On en eft allez mal dédommagé
par une foule de livres de choeur qui les remplacent
».
» Quand ©n n'a pas pris ou qu’on a mal pris
c u 1
lés précautions marquées pour effacet les anciennes
écritures, & qu'on s’eft contenté de les
racler, on ne laifie pas d’en lire des portions plus
ou moins confidérables. On expofe le feuillet
qu'on veut déchiffrer à la lumière la plus vive}
on le couvre d’une ombre légère, qui empêche
que la vue ne foit offufquée par l’éclat des-rayons
du foleil ; & , pour plus grande commodité , le
leéleur fe place entre cet a lire- & le manufcritv
De quelque fecret dont on fe foit fervrà deffein
de ne laiffer fubfifter aucun trait de l'écriture
primitive, s’il en refte encore quelque veftigc ,
on vient à bout, aveç plus ou nVoins.de peine,
d'y découvrir des lettres , enfuîte des mots , &
même des phrafes entières ; mais ordinairement
ce travail demande de bons yeux, un beau jour „
beaucoup de tems , & fur-tout une patience qui
ne- fe la-iffè pas aifément rebuter par les difficultés
».
» Au refte, ce fut moins par goût de deflrue-
tion, que par une efpèce de néceffité, qu'on en
vint à l’extrémité fâcheufe de faire de nouveaux
livres aux dépens des anciens. Le papier & le
parchemin étoient rares, & coûtoient très-cher*
On ne pouvoit fe pafler de certains livres ; on
en voyoit d’anciens, dont on ne connoiffoit plus
le mérite, & dont les caractères paroifloient
quelquefois indéchiffrables , par le dépériffement
ou par la fingularité de leurs écritures furannées*
La pauvreté d'une part, & de l’autre le befoin
de livres d’ufage déterminoient affez naturellement
à faerifier des ouvrages fouvent très-précieux
à b république des lettres , mais inutiles à
leurs pofTefleurs ».
» Jufqu'ici L’on avoit cru pouvoir reftreinclre
L’abus de racler Les livres, prefque aux feuls fiècles
x i , x n , xiii , & le renfermer dans les bornes
de l’églife grecque ; mais tous Les jours de nouveaux
exemples conftatent que le mal avoit gagné
chez les Latins , & qu'il remonte bien plus haut
qu'au temps où l’on commence à connôître les
ravages qu'il fit dans l’empire des Grecs. Mura:*
tori ( Antiq: Ital. tom. 3. dijfert. 4^3. col. 834. )
dit avoir vu , dans la bibliothèque Ambro-fienne.»
un manufcrit des oeuvres, du*., vénérable- Bède ,
d’une écriture de huit à neuf cens ans-, fubfti-
tuée à une autre dé plus de mille. Malgré les
efforts qu'on a-faits pour la détruire-, on y fai fit
encore des phrafes qui annoncent un ancien
pontifical. Un manufcrit de S. Germain-des-Prés ,
contenant le Catalogue des Hommes illuftres de
S. Jérôme, continué par Gennade, n'a pas été
plus épargné. Don Mabillon , qui en a publié un
modèle au cinquième livre de fa Diplomatique y
le jugeoit du vu ? fièele. La forme des caractères
Mérovingiens dont il- eft écrit, ne permet pas de
le faire defcendre plus bas.. Cependant nous avons
remarqué qu’il avoit été récrit,. au moins en
partie. On y diftingue les caraétères de trois fortes
de manufcrits plus anciens. Sa nouvelle- écriture
Mérovingienne en couvre une autre beaucoup plus
antique, fi elle n’appartient pas à la romaine courante.
Sur !ç plus grand nombre de feuillets de
ce manufcrit-, on ne voit aucune trace d'écriture
primitive . foit qu’ils if eufTent point encore fervi -3
foit qu'ils eufTent été mieux raclés que les autres,
foit que. ces deux caufes eufTent concouru à la
fois ».
CUIRASSE, ec Quoique ce foit une opinion
reçue, dit M. Paw ( Rech.fur les Egypt. i l. 319),
que les foldats de l'Egypte ne portoient point
de cafque , ce n'en efï pas moins une erreur qui
provient uniquement de ce conte que fait Hérodote
: il prétend avoir obfervé du coté de Pélufe,
que lestetes des Perfans, répandues fur un ancien
champ de bataille, étoient très-molles vers le
haut du crâne , & les têtes des Egyptiens très-
dures, parce qu’ils étoient toujours rafés , & ne
portoient, fuivant lu i , aucune efpèce de coiffure
; mais ils avoient des cafques de cuivre &
des cuirajfes de lin , dont quelques-unes, telles
que celle du Pharaon Amafes , ont fait l'admiration
de tous ceux qui les virent à Samos & à ■
Lindus dans l'ifle de Rhodes, où la’ plus belle
avoit été confacrée à Minerve. Cette armure ,■
dont Hérodote a décrit la broderie , étoit remarquable
par fâ trame , dont chaque fil avoit été
tordu cfe autres , par une aflufion fingulière
a la durée de l’année vague , car les Egyptiens
ne pouvaient s'empêcher de revenir toujours aux
allégories, dans les chofes même où il n'en falloit
point. Quoique la milice d'Athènes ait pris de
ces cuirajfes ( Corn. Nep. 1. 4 .) égyptiennes, par
ordre d'Iphicrate, Paufanias a eu grande raifon
d obferver qu'elles ne valoient abfolument rien ,
puifqu'elles ne réfiftoient point aux armes pointues
, mais feulement à celles qui tranchent ou
qui brifent, comme les balles & les pierres lancées
avec des frondes ».
Les cuirajfes égyptiennes de lin étoient en
Mfage au liège de Troie. Ajax , fils d'Oilée , ên
portoit une femblable , & Homère le dit expref-
fément ( Iliad. b. 528. ) Ces cuirajfes de
toile ou de draps battus, quelquefois même feutrés
avec du fel & du vinaigre ,. étoient compofées
de plufieurs doubles , piqués enfemble. Plutarque
( Vit. Alex. ) , dit qu’Àlexandre portoit une cui-
rajfe de lin double, O&puKtt JWaSx..
Telle fut depuis celle de Galba dont il eft fait
mention dansSuétoqe, qui,.parlant de la fédition
qu’excita à Rome la révolte d'Othon , dit : Loricam
tamen induit linteam , quanquam haud dijftmulans
paritm adversùs tôt mucrones profuturam. Saumaife,
dans fes Obferv2tions fur Lampridlus, remarque
qu’on avoit autrefois inventé cette- armure pour
le foulàgement des foldats ; on peut ajouter qu'il
y a bien de l’apparence que ces cuirajfes de lin
& de toile a'empêchoient pas qu'on ne mit par-
deffus des cuirajfes de fer | on peut meme croire
que les anciens avoient donné aux premières le
nom de fubarmale ,* mais il n'étoit pas toujours
néceffaire d'avoir d'autres cuirajfes que celles de
lin & de to ile , puifqu’il y en avoit de fi bien
faites , qu'elles étoient à l’épreuve des traits. Nice
tas , dans là Vie de l’Empereur Ifaac I , rapporte
que l’Empereur Conrad combattit longtemps
fans bouclier, couvert feulement d’ une
cuirajfe de lin feutrée & formée de dix-huit
doubles. • ’
La fécondé efpèce de cuirajfe étoit de cuir ,
& c'eft celle que Varron appelle pectorale corium.
Tacite ( Hiß. lib. I. c. 79., ) , nous apprend que
les chefs des Sàrmates s’en fervoient quelquefois :
Id principibus ac nobilijjimo cuique tegmen ferreis
laminis aut pr&durio corio confertum.
Cependaht le fer ou le bronze étoient la matière
la plus ordinaire des cuirajfes. Les Perfes
. appeloient les foldats qui portoient ces fortes de
cuiraffes, clibanarios , du mot clibanum 3 qui
fignifioit une tuile de fer 5/apparemment parce
que ces cuirajfes étoient faites d’une plaque fort
épaiffe de ce métal.
Dans le fameux tableau de Polygnote, qui
repréfentoit le fac de Troie ( Paufan. Laconie. ) ,
oh voyoit fur un autel une cuirajfe d’airain , com-
pofée de deux pièces, l ’une .defquelles couvroit
le dos & les épaules, l’autre-, le ventre & la
poitrine. Elles fe joignoient enfeuible fur les cotés
par des agraffes, comme le ÿ c Siîïus ( lib. vu..
624. ).
. . . , . . Qua fibula morfus
Lorice, crebro laxata refolverat Iclu.
L’endroit de cette jonétion, qui n’étoit jamais
parfaite , laiffoit un paffage à l’épée de l'ennemi,
& on l'appelle encore aujourd’hui le défaut de la
cuirajfe.
Leur grande pefanteur fit qu’on les changea
depuis contre des cuirajfes compofées de lames
de métal, couchées les unes fur les autres,
attachées fur du cuir ou fur de la toile.
Ces cuirajfes 3 faites de chaînettes ou de plaques
de métal, placées en-recouvrement, comme les
écailles des poiffons , étoient connues des Grecs y
ils appeloient les premières »XuA^aroi êapsuu? , &
les fécondés éoXifoiTo) ou temà'aToc. C'eft d’elles--
qu’Hrdore a dit ( xvin,. 13, ) : Squama eft lorica ,
ex laminis &reis\ vel ferreis concatenata in modum
fquamarum pifeis. Virgile parle auffi d'une fem-
blable armure, compoféé d'anneaux & de trois*
rangs de fil d’or paffé de fuite ou d’épaiffeuir
( Æneid. lib. u l . v. 467. ).
Loricam confertam hamis , auroque trilicem.
Ailleurs le même Poète décrit les écailles cfe