
font point du tout. Les genoux , les chevilles des
pieds & le tour du coude paroiflfent avec les faillies
du naturel. Le dos n’eft pas vifible, la ftatue
étant ordinairement appuyée contre une xolonrie ,
faite du même bloc. Cependant l'Antinous dont
nous avons parlé plus .haut a le- dos libre. Les
contours peu ondoyans de'ces figuresjorit càufes ;
que la forme en eft étroite & ramailée : forme •
par laquelle Pétrone cherche ' à caraélérifer Je
llyle de-cette nation. C fatyr. c. i . p. 15. édit.
Burmann. ). Les figures égyptiennes fe diftinguent
auffi par le reflerrement du tronc au-deflus des
hanches.-
Ces cara&ères diftin&ifs du ftyle égyptien 3 \
foit les contours & la forme en lignes' prefqiie
droites, foit la foible indication des os & des
.mufcles , • fouffrent une ; exception par _ rapport
à la manière dont les animaux font traités. Entre
les ouvrages d'une exécution remarquable en ce
genre, Winckelmann cite un grand fphinx de
bafalte , confervé dans la villa Borghèfe ( Kircheri
(Edip. Æg. tom. i,.p. 469. ) , un autre de granit ,
qu'on voyoit jadis au palais de Chili à Rome^,
& qu’on trouve aujourd’hui parmi les antiquités
de Drefde , deux lions de la montée du capitole ,
& deux autres de la fontaine , dite fo titane felice ■
( Kircher. I. cit. p. 463 ). Ces animaux font traités
avec beaucoup d’intelligence , avec des travaux
très-variés & des contours coulans & amenés de
loin. Les grands attachemens, des épaules & des-
flancs, qui ne font point indiqués dans les figures
humaines , font très > apparens dans celles
des animaux : ces parties ; conjointement avec
les veines des cuifles & des autres membres,
font d’une exécution vigoureufe &■ élégante. On
ne peut douîer que ce ne foient des ouvrages
égyptiens, piiifque les lions de la fontaine font
caradlérifés par des hiéroglyphes qui ne fe trouvent
pas aux animaux égyptiens de fabrique pofte-
rieure. Il en eft de même du fphinx de Dréfde,
dont la bafe porte aufli des caradères .hiéroglyphiques.
Les fphinx. de robélifque - du foleil au
champ de Mars font du mêmeftyle, & les têtes
font d’une favante exécution. Cette diverfité de
lly le , qui fe trouve entre les figures humaines
& celles des animaux, fert de. preuve à ce qui
a été dit plus baut. Les premières devant re-
préfenter des. divinités ou. des perfonnagës con-
facrés aux dieux-, parmi lefquels on range aufli
les rois, avoient' leur pofinon- & leurs .attitudes
déterminées. L’artifte., aflervi i des règles générales
, fixées par la religion même-, n’ofôit jamais
s’ en écarter dans la repréTentation- des figures
humaines ; mais en fculptant des animaux il avoit
plus de liberté de montrer fon adrefle. Repré&n-
tons-nous le fyftême de l’ ancienne ' manière- des
égyptiens, par rapport aux figurés humaines feules ,
comme le fyftême du $ gouvernement de Crète
& de .Sparte, oû jl o’étoit pis permis, de s’écarter
le moins du monde des anciennes maximes' dtf
leurs légiflateurs. Les animaux feuls n’étdient pas
compris dans ce cercle religieux.
Nous ajouterons que pour bien faifir le .caractère
du ftyle dans le deflin du nud, il fabt surtout
examiner les e x t r ém ité s la tê te , lés mains
& les pieds. Les têtes égyptiennes..ont les yeux
plats & tirés obliquement: ils ne. font point enfoncés
comme on les voit aux , ftatues grecques >
mais prefqu’ à fleur de tê te , de fojte. que 1 o$
de l’oe i l , fur lequel les fourcils fqnt indiqués par .
une faillie' tranchante , parent tout aplati. Dans
les figures égyptiennes, 3 dont les. formées, ont quelque
chofe d’idéal, fans avoir cependant une beauté
idéale entièrement .’ déterminée , on ne . voit, pas
que les artiftes foient parvenus, à donner de .la
grandeur à cette partie du vifage, tandis que
les grecs ont fu imprimer, cette qualité à leurs
airs de tête-, en cherchant & en parvenant à
donner au globe de l’oeil une fituation plus enfoncée
> artifice, par lequel, ils cherchoiént a produire
des effets de lumière,& de couleur. (
• Les fourcils, les paupières & le.bord des lèvres
font ordinairement indiqués par des lignes gravées
en creux. Une tête de femme très-ancienne , plus
grande que le naturel > de bafalte verdâtre, &
confervée à la villa Albani , a les yeux creux, &
les fourcils marqués par une.raie convexe, aplatie;,
de la largeur du petit doigt : cette raie monte
jufqu’aux tempes, où elle finit par un angle-Taillant
; dé l’os inférieur de l’oeil part une raie fem-
blable, qui va fe terminer aux- tempes par unè
femblâble feélion. Les égyptiens n’ avoieht pasmê-me
l’idée de ces doux profils des têtes- grecques : le
contour du nez de leurs figures eft tracé comme
dans la nature commune. L’os de la joue eft Taillant
& fortement indiqué 5 le menton toujours ra-
petiffé-& tiré : tout cela donne ù Loyale du vifage
un air d’ imperfe&ion & de mauvaife grâce. La
fe&ion de la bouche, ou la clôture des- lèvres
q u i, dans la nature ( du moins celle des grecs &
des européens, ) defeend un peu vers les angles
de la bouche, fe t-rouveUirée-en-haut.chez’ié s
égyptiens. La bouche de leurs figures eft toujours
fermée , de manière que les lèvres ne font’féparées
• que par une fimple incifion i tandis que la* plupart
edes divinités fur les;marbrés grecs ont les lèvres
. ouvertes. C e qu’il y auroit de plus extraordinaire
; dans' la configuration : des égyptiens.;, fa o itm les
. ;• oreilles, fi elles avoient été, placées effedivement
aufli haut dans le naturel qn on les voit afta
• plupart ■ de leurs figures. Lpsïoreilies-y fonr.platées
fingüliérement haut , .'&- de maniéré que. le .bout
de l ’oreille fe trouve êfreprefique parallèle aux
yeiî-x- : on- .peut s*eri affuner 1 :par 1 examen des
- çaifles de momie;^ d'une tête avec des yeux .rapportés,
confervée dans - la» vigne,' Altier! ^ d'une
figure aflife 3 placée ^'1 a pointe de l’obelifque
Barberini.
| La forme .des mains.chez les égyptiens eft celle
que l’on obferveroit dans les mains d un homme
qui ne les a pas mal faites, naturellementmais
qui n’en a -pa;s pris foin, ou qui les à négligées^
Les pieds de.leurs ftatues fe diftinguent de ceux
des figures grecques , en ce qu’ils font plus plats
& plus larges; de plus, les orteils, qui font
tout aplatis & qui n’offrent pas plus d'articulation
que les autres doigts, ont une foible, diminution
dans leur longueur, le petit doigt du
pied n’ eft pas non plus,. courbé ni ramaffe en
dedans , comme aux pieds grecs. Il eft vrai que
les enffans én Egypte avoient les pieds nuds (
Sic . 1. 1. ) , & que leurs doigts n’ étoient pas gênes
par des chaiiflures ; mais ce n’ eft pas à cette caufe
feule que l’ on doit rapporter la forme particulière
de leurs pieds, c’ eft aufli à la forme reçue dès
l’âge dès premières -figures. Les ongles ne, font
indiqués que par des incifions angulaires, fans
aucun arrondiflement. f j
Les ftatues égyptiennes du capitole, dont les
extrémités fe font confervées , ont les pieds d’une
longueur inégale, & ont cela de commun avec
la plupart des ftatues grecques, mêmé celles de
l ’Apollon du belvédère, & du Laocoon. L une
de ces figures a le pied droit, qui porte le corps ,
de trois pouces d’un palme romain ( deux pouces
François ) , plus long que l’autre.-Cette inégalité
eft fondée fur la perfpeétive. On a voulu donner
au pied, placé en arrière , ce que la vue pour-
roit lui faire perdre par les fuyans. Le nombril
des figures égyptiennes d’hommes & de femmes
"eft . finguliérement creux & profond.
Winckelmann. recommande foigneufement à
fes le&eurs de ne pas juger les ouvrages égyptiens
d’après .les planches gravées qu’on a données
avant lu i , &: de prendre garde aux parties ref-
taurëes. Parmi les figures qui fe trouvent dans Boif-
fard, Kircher & Montfaucon, il n’y en a pas
une qui .ait les caractères du ftyle égyptien^ tels
qu’on vient de les décrire. La partie inférieure
du vifage de la.prétendue Ifis du capitole ( Mont-
faucon y -.ant, expi. fnppl. i . pl> 3 muf. Cap. t. 3 ,
tav. j 6. ) , la feulé des quatre grandes ftatues
de jeette collection qui foit de granit noir,
n’ eft. pas antique , elle eft reftaurée. Les bras &
les jambes de cette même ftatue, ainfi que des
deux autres de granit rouge, font aufli réparés,
mais ces réparations ne frappent pas aifément les
yeux. Nous paflons fous filence tant d’autres
reftaurations de figures égyptiennes très-faciles
à remarquer : dè ce nombre eft la tête moderne
d’ une figure de femme du palais Barberini, portant
devant elle , dans une caflette , un petit
'anubis, ainfi que ce lle 1 d’une figure d’homme
femblable, que l’on voit dans Kircher. Il en eft
de même des jambes d’ tirie petite .figure debout
de la villa Borghèfe.
Après avoir difeuté' le deflin du nud du premier
ftyle , il -feroit à propos de parler de la
configuration particulière des divinités égyptiennes
& de leurs caraClères : on les trouvera aux articles
particuliers de ces divinités répandus dans
ce dictionnaire. Quant au deflin des draperies
de ce même ftyle , il a été expofé plus haut
dans les habillemens des égyptiens. Nous allons
donc palier au ftyle poftérieur, ou au fécond
ftyle . des artiftes égyptiens. Nous examinerons
comme, dans l’ article précédent le deflin du, nud
feulement, parce que nous avons allez décrit l’ a-
juftement des figures.
, Le cabinet du capitole nous offre deux ftatues
de bafalte ,, & la villa Albani une, figure faite de
; la .même pierre , qui peuvent nous, fervir de point
de comparaifon, & nous dqnne,r une idée des
’ deux manières. Il faut obferver qiie la tête de
cette dernière figure eft reftaurée. , ,
Le vifage de l’une des deux premières ftatues
I ( muf, Capit. L c. tav. .79-, ), ftmble s’écarter un
! peu de la forme égyptienne ordinaire, quoique la
bouche foit encore tirée en haut, & que le
menton foit trop court , deux caractères qui
diftinguent les anciennes■ têtes .égyptiennes. Les
yeux font creux, & il y a apparence que dans
l’origine ils ont été remplis d'une autre manière.
Le vifage de la fécondé ftatue ( muf. Cap. I. c.
tav.^80.) approche encore plus de la forme grecque ,
mais l’enfemble de la figure eft mal defliné, &
elle eft trop courte de proportion : les mains font
d’un deflin plus élégant que dans les figures, de
l’ancien fty le ,’& les pieds font fculptés de la
manière ordinaire , excepté que l’artifte les a tenus
un peu plus écartés. La pofition & l’attitude
delà première & de la troifième figures reflemblent
parfaitement à celles des anciennes figures égyptiennes
: elles ont les bras pendans perpendiculairement
, & à l’exception d’une ouverture faite
avec l’outil à la première figure, elles les ont
entièrement adhérens aux côtés. D ’ailleurs, elles
font toutes deux adoflees contre une colonne
quadrangulaire , félon la manière égyptienne. La
fécondé, figure a les bras plus libres fans être
féparès du corps : elle tient d’une main une corne
d’abondance, remplie'de fruits. Contre l’ ufage
ordinaire, le dos de cette ftatue eft dégagé Sc
n’a point de colonne pour appui.
Ces figures ont .été faites, félon la conjeâure
de Winckelmann , par des maîtres égyptiens3^mais
fous,la domination des grecs, qui introduifirent
en Égypte leurs!dieux, ainfi que leur manière de
I travailler j Sc' qiîi de leur côté adoptèrent une