
N otions 6c P r in c ip e s univerfels relatifs à la Diplomatique : règles
générales de vérité, de fauffeté 6c de fufpicion : règles' fauffes ou
infuffifantes : règles fur l’autorité des diplômes, fur les archives, les
originaux, les copies, fur la matière des diplômes, fur leur ftyle ÔC
leurs formules , fur les dates , les fignatures 6c les fceaux ; règles générales
du P. Mabillon : règles particulières fur les diplômes 6c les autres
actes des laïques ôc des eccléfiaftiquesv
JsJ. ]3. Tout ce grand & précieux article efi copie mot pour mot de la n o u v e l l e D i p l o m a t i q u e i
afin qu'il puijfe faire autorité dans les différends qui s’élèveront fur Vauthenticité des chartes, :
C H A P I T R E P R E M I E R .
Définitions , axiomes, principes fuppofitions qui fervent de fondement aux règles de Diplomatique.
§. I. JL L en eft de la Diplomatique comme
des autres fciences , qui ne font pas fufceptibles
de la certitude identique des démonftrations de
Géométrie. La certitude qui lui eft propre , elt
fufceptible de degrés qui l'augmentent ou la diminuent
, à proportion des motifs de fufpicion
ou de créance & de probabilité.
1. La certitude phylique eft un ferme acquief-
cement de l'efprit à une vérité confiante , par
l'expérience ou par le rapport des fens.
2. La certitude morale eft une forte adhéfîon
de l'efprit à une vérité fondée fur la réunion des
témoignages ou des' caractères intrinsèques , ou
même fur un feul ,' qui équivaut à leur réunion
par l'impoflîbilité manîfefte que la chofe foit autrement.
Ainfi la certitude Phyfico - morale eft
fondée s partie fur l’expérience & les fens , partie
fur l'impoflîbilité morale qu'une chofe foit vraie
ou fauffe en telles circonfiances.
3. La conjecture eft un jugement probable ,
ou une opinion fondée fur des apparences,
touchant une chofe incertaine. Un raifonnement
appuyé fur des indices, & qui lailfe toujours
quelque lieu au doute.
4. En général, le foupçon en matière de D iplomatique
, eft un jugement défavantageux ,
accompagné de quelque doute au fujet de la
vérité d'un fait ou d'une pièce.
5. Le fimple foupçon eft une opinion défa-
vantageufe, fondée fur de pures pof&bilités méta-
phyfiques.
6. Par foupçon légitime, nous entendons celui,
qui, fans mettre tout-à fait l'efprit en fufpens,
& fans le porter à pencher davantage pour la
fauffeté que pour la vérité d’un fait ou d'un titre,
ne laiffe pas de faire naître quelque fcrupule rai-
fonnable, plus ou moins fort l'un & l'autre. Il
eft ordinairement fondé fur l'inobfervation d'ufages
conftans au fiècle dont il s'agit i mais ufag.es., qui
ayant varié dans les liècles voilîns, font préfumes
n'avoir pas été fans exception dans celui c i, quoique
de fait les preuves en foient inconnues j ou
bien il s'enfuit de ce' que la poflîbilité morale de
la vérité d'un original n’eft pas démonftrative-
ment prouvée.
7. Le violent foupçon eft celui qui fait pem*
cher l'efprit, autant ou plus pour la fauffeté
d’un fait ou d'un titre, que pour fa vérité. H
réfulte, i° . de l'inobfervation d'un ou de plu-
fîeurs ufages préfumés invariables dans tel temps 5
parce que les fiècles voifins ne^ fournîffent à cet
égard nulle exception, quoiqu'elle ne foit pas
moralement impoffible ; 2°. de la contrariété;
du moins apparente, avec des hiftoires contemporaines,
dont l'autorité feroit fi grande , qu'elle
ne pourr-oit être balancée par un titre de même
âge: 30. de la réunion d’un grand nombre de
'foupçons légitimes, qu'on ne détrùiroit point:
40. vis-avis des pièces revêtues de marques ordinaires
d’authenticité,-' ce foupçon naît de ce
qu'étant attaquées par des moyens de faux, qui
paroiffent convaincans, ceux-ci ne font repouffes
que par des réponfes, qui les infirment plutôt.
quelles ne le détruifent. Ainfi le foupçon violent,&
& à plus forte raifon le foupçon légitime contre
Jes-originaux authentiques en apparence, & les
faits fuffifamment prouvés, demeurent fans effet,
à moins que les réponfes aux accufations de
faux, appuyées fur des faits , aient peu ou point
de vraifemblance.
8. Le motif de fufpicion eft la preuve fur laquelle
le foupçon eft appuyé. Le foupçon demeurant
unique, fes motifs peuvent fe multiplier. Au
contraire, les foupçons peuvent augmenter, quoique
chaque foupçon ne foit fondé que fur un
feul motif.
9. Le moyen fuffifant de faux eft une preuve
de faux convaincante, fondée fur l’impoflibilité
morale, qu’une pièce fût ce qu'elle eft, fi elle
étoît vraie. Ce moyen eft applicable aux originaux
comme aux copies.
ip. La fimple préfomption n'eft appuyée que
fur des principes incertains , ou déduite par dès
conféquences peu sûres de principes inconteftables.
11. La forte préfomption fe tire par une
conféquence néceffaire d'un principe sûr.
12. « On appelle preuves en juftice les ma-
» nières réglées par les lôix, pour découvrir
» & poür établir avec certitude la vérité d'un
*> fait contefté”.
13. La pièce fauffe eft celle qu'on a fuppofée
ou contrefaite, ou bien dans laquelleon a inféré,
altéré, ou fupprimé frauduleufement quelque
chofe d'effentiel.
14. L ’aéle fufpeét ou fufpeéle légitimement,
eft celui contre lequel s'élève quelque foupçon
légitime qu'on ne fauroit détruire.
iy . La pièce très - fufpeéle eft celle qui eft
attaquée par un ou par plufieurs violens foupçons
non détruits, mais qui n'eft pas toutefois convaincue
de faux ; quoique fa vérité foit au moins
incertaine & douteufe.
16. Les cara&ères extrinsèques des anciens
adles confiftent dans la matière, l'encre, l'écriture,
les fceaux & autres qualités, dont quel-,
ques-unes ne peuvent fe communiquer aux copies.
17. Les caractères intrinsèques fe réduifent au
ftyle, aux formules, aux dates & aux faits historiques
, qui conviennent également aux originaux
comme aux copies.
18. Lés caractères de vérité d’un titre ne font
autres que les rapports hypothétiquement né-
ceffaires qu'il a avec le fiècle auquel fa date
ou fes circonftances hiftoriques le fixent. Ces
principaux rapports fe tirent de la qualité du
parchemin, de l'encre, de l'écriture, des fceaux,
des foufcriptions , des dates» du ftyle ôc
Antiquités , Tome II,
généralement de toutes les formules, des ufages,
des traits hiltoriques.
19. Les caraétcres de fauffeté font ceux qui
contredirent les rapports hypothétiquement né-
ceffaires, que doit avoir un diplôme avec le fiècle
auquel il a été fait, & les perfonnes qui en font
les auteurs & le fujet.
20. Le titre authentique doit être muni de
l’autorité publique, & renfermer toute la folem-
nité convenable à fa nature, conformément aux
ufages du temps auquel il a été dreffé.
21. Nous entendons par les formules'hiftoriques
, celles qui renferment les dates du pontificat,
du règne, de l’incarnation, ou quelque
événement ou point dhiftoire.
2». Nous appelions moralement pofïible ou
impoffible , ce qui eft tel dans telles circonftances,
quoique le contraire foit non-feulement pof-
fîb le, mais réel dans d’autres conjonctures. Par
exemple, il eft moralement impoffible qu’on ait
daté les bulles des papes du poft-confulat des
empereurs au XIII. fiècle ; mais c'étoit un ufage
ordinaire au IX.
25. Par dates générales, nous entendons celles
qui n’annoncent que la vie de quelque perfonne
connue, comme le règne de tel prince, le pontificat
de. tel pape, l’épifeopat de tel évêque, fans
en Spécifier l’année.
24. Par dates fpécifiques, nous avons en vue
celles qui marquent précifément le lieu, le jour ,
le mois, l’indiCtion , l’année de J. C . du pontificat,
du règne; foit que ces dates foient unies
enfemble en tout ou en partie, foit qu’elles foient
féparées les unes des autres.
z f . Les dates uniques ne font accompagnées
d’aucune autre dans la même charte.
26. La foufeription, le feing ou la fignature,
font des formalités qui certifient, confirment ou
valident -un a fte , par l ’appofition du nom ou de
la marque de la main de celui qui confent à
l’exécution de l’aCte, ou de la perfonne prépofée
pour le dreffer, ou pour y rendre témoignage.
27. Une bulle eft une lettre du pape expédiée
en parchemin, & fcellée en plomb. Cette définition
tirée du dictionnaire de l’ académie, comprend
généralement toutes les bulles ; celles qui font
confiftoriales, figne'es, fevêtues de monogrammes,
datées de l’incarnation, de l’ indiCtion, du pontificat,&
celles qui font dépourvues de tous,
ou de la plupart de ces caractères, telles que
font les petites bulles d’Alexandre III.
28. Les diplômes généralement pris, font les
lettres - patentes; des empereurs, des rois, des
princes,- des républiques , des grands feigneurs
Si des prélats. Le titre fe prend pour l’aCte ou D d d