
n’eft retardé que de 36 jours & cinq douzièmes
, lorfqu’il n’arrive qu’au 304e jour
& un fixièmê , qui eft le cinquième du
onzième mois ; & il n’eft avancé que de 29
jours & un quart, lorfqu’il arrive au 181e
jo u r , qui eft le premier du feptième mois.
Suivant ce calcul, le foetus accéléreroit fa
fortie de la matrice .beaucoup plus qu’il
ne la retarderoit ; cette différence feroit
à peu près de 90 à 30 ; en effet, il y a
beaucoup plus de circonftances propres à
avancer l’accouchement qu’à le retarder.
On regarde comme avortons les foetus
qui fortent de la matrice avant le feptième
mois ; cependant, on cite plufieurs de ces
avortons qui ont vécu ; il n’eft pas poflible
de fixer un terme précis pour diftinguer
l ’avortement de l’accouchement ; de même,
tomment détermineroit - on le temps oh
l ’accouchement peut être retardé? Plufieurs
caufes peuvent contribuer à ce retard; elles
dépendent de tant de circonftances , que la
durée de leurs effets fera toujours inconnue.
On n’en peut juger que par les obfervations
qui ont été faites fur des naiffances tardives.
Je n’en rapporterai qu’un exemple des
plus extraordinaires , tiré de l’extrait d’une
lettre de Panthot , Médecin du R o i , &c
Doyen du College de Lyon. Journ. des
Sçavans, ann. I0b3.
« Le fait dont il s’agit, & qui eft arrivé
à une femme de L y o n , nommée Catherine
Crefpieu, doit être mis au nombre des plus
curieux & des plus rares que l’on ait encore
obfervés parmi les femmes, groffes , quand
elles ont paffé les termes ordinaires de la
groffeffe & de l’accouchement.
« Pour éclaircir la propofition , il faut
fçavoir que cette Catherine Crefpieu eft
femme de bonne conftitution, de tempérament
robufte & fanguin , âgée de 37
ans, qui a eu fix enfans , venus heureufe-
ment au monde à neuf mois ; & le feptième,
dont il eft queftion , eft une fille qu’elle a
portée 12, mois & quinze jours.
« Pendant tout ce temps , elle n’a ceffé
de perdre du fang en grande quantité par
la matrice, & a fouffert les douleurs d.e
l ’enfantement au neuvième mois , à l’onzième
, au treizième, au quinzième , au
dix-huitième, au vingtième, & enfin, elle
eft accouchée au milieu du vingt-troifième,
avec de cruelles douleurs.
Cet enfant ne fut pas plutôt né , qu’il
pouffa des cris extraordinaires, avec un
ton de voix beaucoup plus élevé & plus
grave que les nouveaux nés de neuf mois
n’ont accoutumé de faire : ces c ris, qui
durèrent environ une demi-heure , furent
fuivis d’une voix plaintive, mêlée de fou-
pirs & de gémiffemens , qu’il ne ceffa de
pouffer jufqu’à la fin de fa vie.
» Ce changement • inopiné obligea' les
afliftans de lui donner quelques cordiaux ,
& de le faire porter à l’Eglife , - oh il fut
baptifé. On le rapporta enfuite au logis avec
beaucoup de précaution, afin de le garantir
des injures de l’a ir , & quelques momens
après, il expira , ayant vécu deux heures
feulement. -
On fit plufieurs obfervations fur l’état
de cet enfant. La première , eft que fes
cheveux étoient de- la longueur de deux
travers de doigts ; les ongles de même
étoient crûs à proportion, ce qui a donné
dieu de croire que ces parties,, qui fe nour-
riffent comme les autres, étoient excef-
fivement augmentées pendant vingt - deux
mois & quinze jours, ce qui n’arrive point
à ceux de neuf mois : la fécondé, font les
gencives blanches & les dents prêtes à
fortir : la troilième , eft la dureté du crâne,
prefquetoujours-foible & ouvert aux autres
enfans : la quatrième , eft le ton de voix
grave & pénétrant qui furpaffoit celui des
nouveaux nés : la cinquième, eft que tout
le corps étoit formé & folide comme aux
enfans de trois ans : la dixième, eft la dureté
de la peau-d’une couleur olivâtre : la feptième
, eft que l’arrière-faix étoit fort defle-
ché & femblable à une vieille bafane ».
Les accouchemens de deux jumeaux font
affez fréquens ; mais il eft rare qu’il y en
ait plus de deux. On prétend que parmi les
femmes groffes , il n’y en a qu’une fur
2500 qui porte trois jumeaux ; une fur
20000 qui en porte quatre, & une fur
1,000000 qui en porte cinq. Lorfque les
jumeaux font à ce nombre , ou même lorfqu’il
n’y en a que trois ou quatre, ils ne
font pas d’une bonne conftitution;la plupart
meurent avant de naître , ou peu de temps
après leur naiffance. On a cité des exemples
de jumeaux, au nombre de 6 , 7 , 8 , 9 , &
même 1 s d’une même, groffeffe ; mais ces
faits font fort incertains, & peut-être auffi
fabuleux que les 36.3 enfans jumeaux que
l’on a attribués à une Comteffe de Hollande.
Dès que l’enfant eft né , on fait deux
ligatures au cordon ombilical avec un fil
ciré en plufieurs doubles. La première doit
être placée à quatre travers de doigt de
diftance du nombril de l’enfant , &. la fët
conde ligature à la même diftance de la
première : enfuite on coupe le cordon
entre les deux ligatures qui empêchent
l’hémorrhagie. Cependant les.animaux déchirent
avec leurs dents le cordon ombilical
de leurs petits , fans qu’il y ait de
ligatures , & fans qu’il en arrive1 aucun
mal. Je ne fais pourquoi il eft néceffaire
de lier le cordon ombilical de l’Homme.
Eft-il plus fanguin que les animaux ? Quoi
qu’il en foit , ces ligatures doivent être
faites: foigneufement : il eft arrivé deS
accidens à l’enfant & à la mere, & même
l’enfant a p é r i, parce que le cordon ombilical
n’avoit pas. été l ié , ou parce que la
ligature avoit été mal faite. Des nations
barbares qui rompent le cordon ombilical
ne manquent pas de le lier auparavant.
Les femelles des. animaux lèchent leurs
petits auffi - tôt qu’ils font nés., pour enlever
l’humeur vifquéufe qui eû reliée fur
leur corps, au fortir de l’amnios. Il faut
donc effuyer l’enfant nouveau-né pour le
lécher & le laver , pour le nettoyer auffi
bien que s’il étoit léché. On doit le pré-
ferver du froid , parce qu’il eft nu : il a
befoin de vêtemens & d’abri dans les.
climats froids, & même dans les climats
tempérés , parce qu’il n’a point de laine
ni de poil qui le defende contre les injures
de l’air. Quoique les. agneaux foient déjà
revêtus, de laine en naiffànt, il s’en trouve
quelques-uns qui ne peuvent fupporter le
ftoid jufqu’à un certain point, oh il faut
les. réchauffer pour les empêcher de périr.
Cependant il y a.des nations entières dans
Hijioire Naturelle, Tom. I,
des pays très-froids & dans des pays très-
chauds , qui plongent leurs enfans dans
l’eau froide au fortir du fein de la mere,
ou qui les mettent dans la neige, & les
y laiffent jufqu’à ce que le froid femble
arrêter la refpiration : enfuite on les tranf-
porte dans un bain d’eau chaude. Les mères
elles-mêmes fe baignent dans l’eau froide
avec leur enfant, dès qu’elles font accouchées.
Des Indiens del’ifthme de l’Amérique
fè jettent dans de l’eau froide lorfqu’ik
font en fueur , pour fe rafraîchir ; leurs
femmes les y baignent lorfqu’ils font
ivres, &c. On prétend que ces alternatives
extrêmes dans la température ne caufent
aucun mal, & qu’au contraire elles rendent
le corps plus robufte.
Tous ces faits paroiffent avérés ; mais
on peut leur en oppofer d’autres qui prouvent
qu’un changement fubit de température
peut être très-dangereux.
Les animaux nouveaux nés peuvent
trouver par eux-mêmes le mamelon de leur
mère ; il faut que les: femmes prennent
leurs' enfans & les portent à leurs, mamelles
pour les allaiter. Dès que l’ânon &
le poulain font nés , ils font des tentatives
pour fe mettre fur leurs jambes ; ils y
parviennent bientôt, & lèvent la tête pour
faifir le mamelon de la mere. Le veau ,
l’agneau , le chevreau , &c. tettent auffi
facilement. Les. femelles de la plupart des
animaux fiflipèdes fe couchent près de-
leurs petits, qui commencent à fe traîner
fur leurs pattes en naiffant pour arriver
au mamelon de la mere. Les. petits linges
ont tant de facilité à grimper , qu’ils
trouvent bientôt le moyen de s’accrocher
à leur mere pour s’approcher du mamelon.
L’enfant n’a d’autre reffource que fes
cris ; il faut que la mere le prenne entre
fes bras & lui1 donne le mamelon. L’enfant
eft donc plus foible ; & plus dénué que
les animaux, puifqu’il ne peut trouver fon
aliment, & qu’il a befoin de vêtemens.
Il eft dans l’ordre naturel que les femmes
allaitent leurs enfans , puifque toutes les
femelles des animaux nourriffent leurs
petits, ; mais parmi les animaux domef-
tiques., il y en a fouvent à qui on eft’