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fi on excepte ceux qui habitent dans le voi-
finage de l’Inde , ont perdu leur ancienne
laideur, par leurs alliances avec les Géorgiens
& les Circaffes , qui leur ont communiqué
la beauté avec le fang.
On trouve encore dans les parties méridionales
de l’Afie & les ifles voifines quelques
peuples dont la figure diffère peu de
l ’Européenne, tels que les habitans de Bengale
, ceux des ifles Maldives & ceux de
l ’ifle Nicobar.
Enfin, les contrées leptentrionales de
l’A frique, foumiffent aufli des peuples qui
ont les traits du vifage réguliers, & dont
les principaux font les Abyflins & les habitans
d’une partie de la Barbarie.
S e c o n d e v a r i é t é .
Si l’influence d’un froid rigoureux altère
moins la couleur de l’Homme, que l’aâion
d’une chaleur exceflïve, elle a d’une autre
part des effets bien plus marqués par rapport
aux-traits du vifage , dont elle charge
la difformité de tous les contraftes les plus
oppofés à la belle Nature.
Une tête d’une groffeur démefurée, un
vifage p la t, élargi par le haut, rétréci &
allongé par le bas , de petits yeux , des
paupières retirées vers les tempes , des
joues extrêmement élevées, un nez écrafé,
une large bouche, tels font les principaux
traits qui caraâérifent la figure des peuples
du Nord. Les plus remarquables font
les Groenlandois, les Lappons, les habitans
de la province de Petzora, les Samogedes,
les Oftiaques, les Tungufes , & enfin les
Sauvages qui font au nord des Efquimaux
dans l’Amerique feptentrionale. Cette conformation
du vifage leur efl commune juf-
qu’à un certain point, avec d’autres peuples
; & il paroît que ce qui diftingue davantage
ceux dont nous parlons, efl: d’avoir
le vifage tiré & allongé comme la face de
l ’ours.
LesCalmouchs, quoique fitués plus bas,
vers la mer Cafpienne, femblent offrir les
traits les plus chargés de ce profil lugubre
& effrayant fous lequel fe préfente ici
l’efpèce humains. Ce font, au rapport de
Tavernier , les plus affreux de tous les
Hommes. Leur vifage efl fi large , que
l’intervalle d’im oeil à l’autre efl d’environ
fix doigts ; leurs yeux font extrêmement
petits, & le peu qu’ils ont de nez efl fi
pla t, qu’on n’y voit que deux trous au
lieu de narines.
Les autres Tartares , quoique moins hideux
, fe rapprochent , par la forme du
vifage, des peuples que nous avons cités
plus haut. Mais leurs traits fe civilifent
& fe radouciffent à mefure que l’on avance
vers la Chine, où nous allons trouver une
race d’Hommes moins difgraciés par la
Nature,
T r o i s i è m e v a r i é t é .
Nous choififfons la figure des Chinois
comme le terme de comparaTfon auquef
nous rapporterons les nuances qui appartiennent
à. cette troifieme variété de l’efpèce
humaine. Ces peuples ont le vifage
large &c rond, les yeux petits & ovales ,
les fourcils grands , les paupières élevées ,
le nez petit & écrafé. Il n’y a perfonne
qui n’ait été à portée de vérifier ce portrait
fur quelqu’une des figures grotefques
que cette Nation , plus capable d’inventer
que de perfeâionner , nous envoie de
temps en temps, & où le plus fouvent l’art
ne laiffe pas moins à defirer que la Nature
même qui lui a fervi de modèle.
On peut citer la rondeur du vifage
comme le point de partage entre les Chinois
& les peuples qui habitent le nord
de l’A fie , avec lefquels ils ont plufieurs
traits de reffemblance, mais d’une expref-
fion moins dure & moins forcée.
On retrouve à-peu-près la même figure
chez les Japonnois , les Tunquinois & les
Cochinchinois, avec cette différence que
les peuples de la Cochinchine , qui font
plus avancés vers le midi que les Chinois ,
font aufli plus laids.
Le vifage des Siamois , tient plus dulo-
zange que de l’ovale. Il efl large & élevé
vers la partie fupérieure des joues, & tout
d’un coup le front fe rétrécit & fe termine
autant en pointe que le menton, Ils ont
ia
la bouche grande, & cette faillie que leurs
joues forment par le haut les leur fait pa-
roître creufes.
Les habitans des royaumes de Pégu &
d’Aracan, ceux d’Achem & ceux des ifles
de Java & de Mindanao fe rapprochent
des Chinois par la figure.
La plupart des peuples dont nous venons
de parler, ajoutent aux traits que la Nature
leur a donnés, une difformité artificielle, ,
en s’alongeant les oreilles le plus qu’ils
peuvent. Chez quelques-uns, elles pendent
jufques fur les épaules. Par une autre ef-
pèce de préjugé, les jeunes Chinoifes fe
tirent continuellement les paupières, pour
fe faire paroître les yeux encore plus petits
qu’elles ne devroient les avoir. Cette
coutume d’enchérir fur les défauts naturels ,
efl prefque générale chez les peuples
étrangers, qui prennent pour la perfection
l ’un ou l’autre des extrêmes entre lefquels
elle fe trouve placée.-'
Q u a t r i è m e v a r i é t é .
Nous avons déjà remarqué, au fujet des
peuples feptentrionaux, que la diverfité
-des traits du vifage chez les différentes ;
races , n’étoit nullement proportionnelle '
aux dégradations de la couleur. Les nègres
nous fourniffent le fécond terme de com-
.paraifon néceffaire pour juftifier cette ob-
lervation. Plufieurs de ces peuples, & en
particulier de ceux qui font les plus noirs,
comme ceux du Sénégal, que l’on appelle
Jaloffes, ceux de l’ifle de Gorée & de la
côte du Cap-Vert, & ceux de Congo, font
d’une belle figure, qui peut-être ne paroî-
troit pas différer beaucoup' de celle des
Européens, fi la reffemblance des traits
. n’étoit offufquée en eux par la couleur
fombre dont la nature a peint le fond du
tableau.
Les autres nègres ont communément les
yeux grands, le nez épaté, les lèvresgroffes.
- Mais ce qui diftingue tous les nègres en
général, efl d’avoir les lèvres, ainfi que le
dedans de la bouche, d’un beau rouge de
cora il, & les cheveux femblables à de la
laine frifée. -
Hijloire Naturelle. Tom. I.
Parmi les habitans de l’Afrique , qui ne
font, pour ainfi dire, nègres qu’à demi,
les uns ont aufli le nez épaté & les lèvres
renflées ; les autres , comme ceux de la
terré de Natal & du Monomotapa, font
d’une figure affez régulière.
Les Hottentots font maigres & ont d’ailleurs
les traits des nègres , mais changés en
laideur, & affortis à leur extrême malpropreté.
Les nègres qui fe trouvent dans quelques
contrées méridionales de l’A fie, tels que
les Papous qui habitent la nouvelle Guinée y
reffemblent, en général, aux nègres de
l’Afrique. Mais ceux de- la nouvelle Hollande
fe rapprochent davantage des Hottentots.
Nous obferverons encore ici que les habitans
de quelques contrées de l’Afrique ,
ne naiffent pas avec un nez, à beaucoup
près , aufli applati, ni avec des lèvres aufli
groffes. Cette conformation leur vient de
ce que les pères & mères , qui regardent
comme un défaut tout ce qui s’écarte de
.la figure la plus ordinaire dans le climat,
façonnent, d’après ce modèle trompeur,
le vifage de leurs enfans nouveaux nés ,
leur écrafent le nez , leur preffent les
lèvres pour les renfler, & s’imaginent ainfi
embellir la nature en achevant de la défigurer.
C i n q u i è m e v a r i é t é .
Nous comprenons dans cette dernière variété
les différentes Nations de fauvages
qui fe trouvent difperfées dans l’Amérique,
-à l’exception de ceux qui en habitent la
partie la plus feptentrionale.
En réunifiant la delcription que donne
Ulloa de la figure des Américains , avec
celle qu’en ont tracée d’autres voyageurs,
& en particulier M. le Chevalier Pinto,
dans un manuferit cité par M. Robertfon
( Hijl. de l'Amérique , t. 2 , note XLII). On
trouve que ces peuples ont le vifage large
■ & peut-être plus éloigné de la forme ovale
que celui d’aucun autre peuple. Leur front
efl très-petit, & couvert de cheveux aux
extrémités , jufque vers le milieu des
e