
pieds & demi. Quelles énormes difpropor-
tions faudroit-il fuppofer , pour que cette
longueur fe fût trouvée dans ce prétendu
géant avec les autres dimenfions que je
viens d’indiquer ? Ces difproportions fuffi-
ient pour prouver que le fquelette trouvé
près de Longon n’étoit pas le fquelette
d’un homme.
Habicot prétendoit y avoir vu des clavicules
, & qu’elles avoient deux pieds de
long. Celles d’un homme de taille ordinaire
ont cinq pouces ; par conféquent le prétendu
géant devoit avoir environ vingt-
quatre pieds. Cette dimenfion n’eft pas éloignée
de celle du fquelette dont il s’agit ,
puifqu’il avoit vingt-cinq pieds & demi. Je
ne connois aucun animal auffi grand que
l ’homme , qui ait des clavicules , en fup-
pofant que le rhinocéros & la giraffe n’eh
ayent p o in t, comme il y a tout lieu de le
croire. L’article des clavicules eft celui qui
a le plus fixé mon attention dans la relation
d’Habicot. Il dit que ces offemens, & beaucoup
d’autres, tombèrent en pouffière
lorfque l’air les eut frappés. Les avoit-il bien
Teconnus avant leur prompte deftruclion ?
Riolan fait remarquer tant d’erreurs dans
les obfervations d’Habicot fur les autres
parties du fquelette, que l’on peut douter
de la réalité des clavicules. Puifque deux
célèbres anatomiftes ont difputé pendant
long - temps pour favoir fi des offemens
avoient appartenu à un Homme, quelle confiance
peut-on avoir aux dédiions de gens
moins inftruits qui ont prétendu avoir vu
des os de géans.
Haller prétend qu’il feroit difficile d’admettre
un peuple de géans , parce qu’il
faudroit que toute la nature fût gigantef-
que. Des chevaux de taille ordinaire ne
porteroient pas un Homme de huit pieds ;
ïbn poids feroit à celui d’un Homme de
cinq pieds comme <[ 11 à i n . Les végétaux
ne fuffiroient pas pour nourrir tme
nation de cette taille ; une pomme ne feroit
pour elle qu’une fraife ; & un cheval
ne rendroit que le fervice d’un chien.
Suivant le calcul de Muffchembroeck,
il faudroit que les <5s d’un géant enflent
une épailfeur en raifon double de la
longueur qu’ils auroient de plus, pour qu’ils
confervaffent le même degré de force. Ces
os devenus plus gros auroient des mufcles
auffi plus gros & plus robuftes. Haller a
o"bfervé que les géans qu’il avoit vus ,
étoient foibles, & que Macgrath étoit cagneux
, parce que fes os avoient cédé à la
force des mufcles , leur épailfeur n’ayant
pas été augmentée dans la même proportion
que leur longueur.
Les Hommes qui ont moins de cinq
pieds font de petite taille. Celle des Lapons
n’eft que de quatre pieds, & au plus
de quatre pieds & demi. Les Borandiens
font encore plus petits.
. On croit qu’il y a fur les hautes montagnes
de Màdagafcâr une nation de très-
petite taille qui porte le nom de Quimos.
M. de Commerçon a vu au fort Dauphin
une femme Quimofe, âgée d’environ trente
ans, qui n’avoit que trois pieds fept â huit
pouces de hauteur. Mais le peuple Quimos
eft très-peu connu ; peut-être fa taille ne
differe-t-elle guère de celle des Lapons.
J’ai déjà fait obferver que l’on ne favoit
pas â quel degré de la haute taille des
Hommes on devoit commencer à appliquer
la dénomination de géant : il en eft de meme
de celle de nain , on ne fait quel eft le
plus haut degré de la petite taille auquel
ce nom peut convenir.
On ne peut pas douter que Bébé ne fut
un nain ; il n’avoit que deux pieds neuf
pouces de hauteur, lorfqu’il mourut en
1764, à l’âge de près'de vingt-trois ans*
,à Lunéville , au palais du Roi de Pologne ,
Staniflas I , oh il avoit paffé la plus grande
partie de fa vie. M. le Comte de Treffan
a donné les obfervations fuivantes au fujet
de ce nain. Il naquit au village de Plaifne
dans les Vofges, de pere & de mere qui
étoient des Payfans bien conftitués & affez
forts pour travailler à la terre. Ils alfurerent
que Bébé en naiffant pefoit â peine une livre
un quart. Il fut préfenté fur une affiette
pour être baptifé ; il coucha dans un fabot
pendant long-temps. Sa bouche , quoique
bien proportionnée au relie du corps ,'
n’étoit pas affez grande pour recevoir le
manunelon de la mere j il fut nourri par
une chevre. Il ne commença à marcher qu’à
deux ans. ; on lui fit alors des fouliers qui
n’avoient qu’un pouce & demi de longueur.
A.l’âge de fix ans , fa hauteur n’étoitjque
d’environ quinze pouces ; il ne pefoitlcfWJi
treize livres. Il étoit d’une jolie figure, bien
proportionnée, il avoit une bonne fanté ;
mais fon intelligence ne palfoit pas les
bornes de l’inftinû. A l’âge de quinze ans ,
il n’avoit que deux pieds cinq pouces de
hauteur. Alors la puberté produifit fur les
organes de la génération un trop grand effet,
qui caufa probablement le déperiffement du
relie du corps. Les forces commencèrent à
s’épuifer, l’epine du dos fe courba, la tête
fe pencha, les jambes s’affoiblirent, une
omoplate fe dëjeta, & le nez groffit con-
fidérablement. Bébé perdit la gaieté, &c
devint valétudinaire. Cependant il grandit
encore pendant les quatre années fuivantes.
M. le Comte de Treffan avoit bien prévu
que ce nain mourroit de vieilleffe avant l’âge
de trente ans : dans fa vingtième année, il
étoit déjà caduc & décrépit ; il mourut dans
la vingt-troifième.
M. Haller cite un nain de trois pieds.
Il y avoit àBriftol en 17 5 1 , un nain âgé
de quinze ans ; fa hauteur étoit de deux
pieds & demi ; il avoit toutes les apparences
de la vieilleffe ; il ne pefoit que treize livres,
quoique fon poids eût été de. dix-neuf livres
dans fa feptième année.
Gn vo yo it en 1751 à Londres , un nain
de Norfolk, âgé de vingt-deux ans ; il ne
pefoit que vingt-fept livres & demie, & n’a-
voitque deux pieds cinq pouces de hauteur.
Un Payfan de même taille étoit à Amf-
terdam auffi en 1751 ; il avoit vingt-fix
ans , il étoit né dans la Frife.
Il y avoit à Paris, en 1760, un Gentilhomme
Polonois âgé dè vingt-deux ans ,
qui n’avoit que deux pieds quatre pouces
de hauteur ; il étoit bien proportionné, il
avoit i’efprif v i f , il fayoit plufieurs Langues.
Il avoit un frère aîné dont la taille
n’étoit que de deux pieds dix pouces.
Cardan & Murait font mention d’un nain
de deux pieds de hauteur. Il s’en eft trouvé
d’autres qui n’avoient que vingt-un, dix-
huit, ou même feize pouçes,
Tous ces nains fi petits ne forment aucune
race d’Hommes ; ils font épars dan*
différentes Nations: on ne peut les regarder
que comme des avortons dégénérés de l’efi-
pèce humaine, par défaut de développement
& d’accroiffement, au contraire des géants
qui s’élèvent de beaucoup au - deflus du
commun des Hommes par une croiffance
extraordinaire, & qui ne font auffi que des
individus difperfés parmi les Nations. Le
peuple de .la taille la plus petite , qui foit
bien avérée , eft celui des Lapons ; il n’eft
pas douteux qu’elle ne foit de quatre pieds
à quatre pieds & demi. On croit que la Nation
de la plus haute taille , eft celle des
Patagons ; mais à quelle hauteur parviennent
ils ? Différentes relations de voya geurs
leur donnent depuis fix jufqu’à treize
pieds. On eft auffi dans la même incertitude
par rapport aux Nations de la plus petite
taille. On- a eu quelques indices de l’exif-
tence des Quimos , dont j’ai déjà fait
mention, & qui n’ont peut-être que trois
pieds & demi de hauteur.
Différentes couleurs de la peau dans différentes
Nations.
Le teint des différens peuples de la terre
varie du blanc au noir. Il y a une infinité
de nuances entre ces deux couleurs extrêmes
, & il s’y mêle des teintes de livide
, de jaune & de rouge. Je réduis toutes
ces variétés de couleurs à quatre principales
, qui font le blanc, le jaunâtre, le
bafané & le noir.
Peuples qïti ont le peint blanc.
* Parmi les Européens qui ont le teint
blanc , on doit ranger d’abord les Suédois,
les Danois & les autres peuples du Nord ,
en exceptant les Lapons, les Samogedes
d’Europe & les peuples de la province de
Petzora, qui eft traverfée du Sud au Nord
par la rivière de ce nom. La même couleur
domine avec des différences trop légères
pour être appréciées, chez les An-
glois , les François , les Allemands , les
Polonois , .& , en général, tous ceux qui
ne font pas au deffous du 41e, degré de
latitude fieptentrionale,