
Tous les oifeaux dont les voyageurs parlent, j tolre' eft la plus intéreffante. Forcé de me renfer-
d’une groffeur difproportionnée avec celle dès plus mer dans les limites qui me font prefcrites, je ne
grands oifeaux de proie connus, & qui, à cet égard, . traiterai que' les points les plus importans, tels
n’ont-de rapport qu’avec le condor, doivent ils être i que la delcription de fes moeurs , Ion origine , les
regardés comme étant de fon efpèce ? Dans ce cas j variétés de fes races les foins néceffaires pour
on auroit trouvé le condor dans différentes partie.s j entretenir , conferver & multiplier fon efpèce.
de l’ancien continent; il habiteroit , ainfi qu’au I Tout le monde connoît le coq par habitude;
Pérou , en Afrique , à Madagafcar , aux Indes
orientales ; il auroit même été vu en 1779 aux
environs d’Orléans, fuivant la relation de M. de
Salerne, hifl. des oif p. 10 ; il auroit été aulïi plus
anciennement vu en Allèmagne, fuivant le fait cité
par Gefner , mais qu’il avoit emprunté d’un autre
auteur. Il eft bien difficile de décider fi ces oifeaux
fi mal décrits, qui peuvent n’être que des aigles
ou des vautours , dont la préfence a étonné dans
des lieux où on n’a pas coutume d’en voir, dont
il eft fi probable que la groffeur eft exagérée &
l’hiftoire chargée de faits fabuleux , font en effet
de véritables condors. M. le comte de Buffon ,
MM. Valmont de Bomare & Salerne penfent tous
trois que le laemmer-geier des Alpes eft le même
oifeau que le condor. La réciprocité entre les lieux
que ces oifeaux habitent, autorife cette opinion :
le peu de connoiffance que les Péruviens &. les
babitans des Alpes ont de ce grand oifeau de
leurs montagnes , dont ils ne connoiffent guère
que le nom s & qu’on parvient fi rarement à fur-
prendre & à tuer établit encore de la parité
entre le laemmer-geier & le, condor.
CONDURou CONTUR. Voye^ C o n d o r .
COQ . .
Le coq & la poule. Briss.: tom. 1, pag. 166.
Genre III.
. Coq. PL enl. 1.
Coq huppé. PI. enl. 49.
Poule du Japon. PI. enl. 98.
Côc. B e l l . hifl. nat. des oif.pag. 242.
Coq 3 gau, geau 3 gai, gog. B e LL. port, d’oif. p. $8.
Poule. Bell. hifl. nat. des oif.pag. 24f.
Geline , poule. Bell. port, d’oif. pag. 58.'
On nomme en françois le mâle adulte de cette
efpèce coq ; fa femelle -, poule ; le petit très-jeune ,
poujjin ; l e petit déjà d’une certaine grandeur,
poulet ; le mâle qui a été privé des'organes de fon
fiexe , chapon ; la femelle qui a aufli fubi une opération
qui la prive de la faculté de pondre, poularde.
Le coq eft nommé en Latin gallus ; fa femelle
gallina. En Efpagnol,. gallo le mâle, gallina la femelle.
En Italien, gallo le coq , cappon 3 eappone lé
coq oui a été privé des parties l'exuelles ; gallina,
la poule ; pulcino, pullo ,pollaflrot ,1e poulet.
En Allemand , hari 3: kau^s - han, gui f ie coq;
guggel3 le chapon, &c.
En Polonois , kur le 'coq ; kura , la poule.
En Suédois, hczns, tupp, le coq ; hcena, la poule.
En Anglois, cok 3 dunghill-cock, le mâle ; hen 3
dunghilt-hen, la femelle 3<ckïjk 3 le poulet.
Le coq eft, de tous les 'oifeaux, celui dont l’hiftrès
peu de perfonnes le connoiffent d’après,un.
examen attentif & réfléchi qu’il mérite cependant
par fa beauté en général, par la forme de plufieurs
de fes parties , & par la nobleffe de fon cara&ère.
Le coq a le corps plein , la démarche lente &
pofée ; il porte le cou relevé, la tête haute ; fon
regard eft vif & animé ; il a l’air fier & indépendant
fans avoir rien de menaçant ni de farouche ;, c’eft
un être confiant dans fon courage & fes forces ,
qui connoît fon prix, fans dédain pour les autres.
Certain de fa fupériorité & des droits qu’elle lui
donne, il fçait les maintenir dans tout ce qui eft important
, & s’en relâcher fur ce qui n’y fçauroit porter
de préjudice ; defpote & amant au milieu d’un
ferrail nombreux, il eft mari attentif & père tendre :
les poules & les petits qu’elles cônduifent , font
devant lui un peuple qui doit obéir , mais qui doit
être gouverné avec douceur, auquel fa propre
foibleffe & les forces de fon fouverain confacrent
de fa part les égards & lés attentions de la fociété ,
en le chargeant en même-temps de tout ce qui
concerne fa fûreté : ne voulant que des alimens
propres à entretenir fes forces , fi le coq trouve un
mets délicat, fans en rien prendre pour lui, fon
cri en avertit les poules & leurs petits, qui accourent
à la voix d’un maître qui appelle , d’un
mari & d’un père qui invite : il partage entre les
mères & les enfans, en répondant, par des aceens
doux & bas , à ceux que fa famille fait entendre
autour de lui. On ditque,fenfible à certains charmes
& peut-être à une docilité plus grande a ion égard ,
ou à des foins plus tendres pour, les couvées , il a
quelquefois des préférences pour des poules chéries
, foibleffe , art, ou juftice, fuivant fes vues,
que nous ignorons. Des aâes ‘ de tendreffe le coq
fçait, félon lë befoin, paffer à ceux que l’ordre
exige & aux aâes de valeur. 11 conduit les poules ;
il. veut qu’elles fe tiennent à fa vue ; il ne permet
pas qu’elles s’éloignent; il appelle: il va chercher,
celles qui fe font écartées ; il les ramène, les menace
fuivant les occafions, fans jamais les maltraiter.
On prétend qu’oubliant quelquefois la
nobleffe de fon caraftère , il s’irrite contre la couv
é e ,.& qu’il porte la fureur jufqu’à donner la
mort aux pouffins à coups de bec ; on attribue cet
afte de barbarie à la violence d’un tempérament
trop ardent, troppreffé de jouir : mais il s’agiroit
donc d’une jouiffance de prédileéfion, puifque
le coq au milieu' des poules qui l’entourent, eft
■ fans ceffe à portée de fe fatisfaire. Cet aéte de
cruauté, trèsîare , puifqu’on ne prend pas de
' précaution pour s’en garantir dans les baffe-
cours où l’on élève une grande quantité de poulets
& où les coqs jouiffent d’uné pleine liberté, n’eft
qu’un vice individuel "qu’on auroit tort d’imputer
à l’efpèce.
Souverain à l’égard de fa famille, le coq fia
défend des animaux qui pourroient lui nuire , foit
en l’attaquant, foit en partageant fa nourriture.
Il combat, il repouffe les‘animaux étrangers, il
agit en maître avec les oifeaux de la baffe-
cour., & il les éloigne des poules ; mais il s’irrite
fur-tout à l’approche d’un de fes femblables , à
l’afpeéî: duquel une longue habitude ne l’a pas
accoutumé; aufli-tôt qu’il l’apperçoit, l’oeil en
feu , les plumes hériffées, il court à lui, & lui
livre un combat qui ne ceffe ou que par l’abandon
de fes forces ou la retraite du nouveau venu. Vainqueur
, il fe redreffe, frappe fes flancs de fes
ailes & chante à deux ou trois reprifes. C’eft cet
aâe que M. l’abbé de Lifte a fi bien peint par ce
vers expreffif & concis :
« Aime , combat, triomphe & chante fa viftoire >*.
Le tempérament ardent & jaloux du coq ne
permet pas que plufieurs vivent en paix dans la
même baffe - cour. Leur vie eft un état de guerre
continuel, qui devient cependant moins acharné à
la longue ; les fréquens combats qu’ils fe livrent
ne font fufpendus que pour jouir ou fe repofer & 1
fe renouvellent à la vue de leur jouiffance réci- i
proque. -
Senfible, entouré d’êtres fournis qu’il chérit,
' acfif 8c plein de vigueur , le coq nous peint fou-
vent fon état heureux par fort chant , qu’il fait
indifféremment entendre le jour & la nuit, fans
que ce foit à des heures marquées, comme on
le croit communément.'
Si des moeurs du coq, nous paffons à l’examen
de fes parties, & des externes feulement, fans
nous occuper des organes intérieurs, dont la def-
cription appartient à l’anatomie comparée , nous
trouverons plufieurs traits à remarquer. Le premier
eft la crête qui furmonte le front, & les
deux membranes charnues qui font attachées au-
deffous du bec. Ces ornemens font communs au
coq & à la poule ; mais ils ont plus de volume &
■ des couleurs plus vives dans le coq. Il y a , de
.chaque côté , au-deffous de l’ouverture de l’oreille, -
une peau nue qui forme une tache blanche ,
©blongue , légèrement rougeâtre fur fon bord
antérieur. Les plumes font inclinées deux à deux
à l’extrémité de. leurs tuyaux qui font rap-
• procfiés & qui fe touchent par leurs bouts en7
dedans de la peau , mais elles font divergentes
dans leur trajet. Celles qui couvrent le cou font
longues , étroites , flottantes , d’autant plus longues
qu’elles font placées plus bas ; les plumes du croupion
ont la même forme & fe féparent en fe rabattant
de chaque côté fur l’extrémité des ailes
qui font fort courtes 8c qui fe terminent à l’origine
de la queue ; elle eft compofée de quatorze
plumes partagées en deux plans inclinés de droite
Hifloire Naturelle. Tome L
& de gauche , difpofés de manière qu’ils forment
entre eux un angle aigu, 8c que les plumes font
tournées vis-à-vis les unes des autres du côté de
leur-faee fupérieure ; ces mêmes plumes font
longues,, applaties, arrondies à leur extrémité,
fort larges dans toute leur longueur , brillantes ,
luftrées & ’ douces au toucher ; leurs barbes, qui
font étroitement unies , font d’égale longueur des
deux côtés du tuyau ; les deux plans qu’elles forment,
8c qui compofent la queue, écartés & inclinés,
comme je l’ai dit, à droite & à gauche,
font en même-temps relevés 8c à-peu-près perpendiculaires
à l’horifon ; ils forment avec le corps un
angle très-ouvert & qui approche d’être droit ; il
faut encore remarquer que les plumes de la queue
font courbées en arc, & qué leur convexité eft
tournée du côté du corps. Je me fuis étendu fur
cette conformation, parce qu’elle eft particulière
au coq &c à la poule , & que jufqii’à préfent on n’a
rien remarqué dans les autres oifeaux qui y ait
quelque rapport.
Le coq a à chaque pied un ergot qui croît à
proportion de l’âge ; la poule n’a qu’une protubérance
ou un bouton qui ne fait ordinairement qué
peu de faillie. L’un & l’autre ont quatre doigts ;
cependant il y a.une race qui en a cinq , & une
autre qui n’a point de queue. Ce n’en font pas
moins des coqs & des poules , puifquè les oifeaux
de ces deux races ont d’aillèurs tous les mêmes
cara&ères que les coqs & les poules ordinaires, &
que,.comme ce n’eft pas un leul trait, ou un feul
caraélère qui conftitue le genre d’un animal, mais
renfemble de tons les traits & de tous les caractères
, de même la fouftraâion d’un caraélère ou
l’addition accidentelle d’un de plus ne change
rien au genre.
Quoique les .objets d’anatomie ne faffent pas
partie du plan que je dois traiter, je ne peux me
.dilpenfer de remarquer que le coq a une double
verge cachée à l’intérieur, & cependant placée à
Ja partie inférieure de fon corps, de manière
qu’au moment de l’accouplement, l’extrémité s’en
prolonge au bord externe de l’anus ; c’eft en l’appliquant
fur la partie correfpondante de la poule 9
où eft également fitué l’orifice des parties de la
génération , que le coq la féconde : on s’apperçoit
qu’il fie difpofe à remplir cet aâe & quelle eft la
poule dont la vue excite fon defir, par un coup-
d’oeil qu’il lui lance ; auffi-tôt baiffant les ailes 8c
les roidiffant, étalant à demi fia queue, tandis que
la poule s’accroupit pour le recevoir, il va à elle ,
d’un pas oblique, en pouffant un fon grave , bas,
précipité, ilia faifit par la crête avec fon bec,
s’élance fur elle , il courbe en même temps la
partie poftérieure de fon corps vers la même partie
de celui de la femelle qu’elle relève en fens oppofé.
Après cet a&e, qui ne dure qu’un inftant, le coq
fie redreffe de même que quand il triomphe d’un
rival ; il frappe fes flancs de fes ailes , & il chante
fies plaifirs comme fes victoires. La poule en fe
H hhh