
des fruits qu’il aime de préférence, fur-
tout ceux auxquels on donne le nom de
fruits-rouges, arrive en nos climats, dans
la faifon qui précède la maturité de ces
fruits ; il travaille prefqu’aufli-tôt à la
propogation de fon efpèce ; fes petits acquièrent
de la force en peu de temps &
partent, ainfi que leur père, aufli-tôt que
la faifon des fruits qu’ils aiment 'eft paffée.
On ignore en quels lieux les loriots fe
retirent, de même qu’on ne fçait pas de
quels pays ils étoient arrivés. J’ai reçu &
je conferve une femelle de cette efpèce
apportée de Canton , Sc fi parfaitement
femblable â la femelle du lo r io t, que
nous voyons l’été dans nos campagnes, que
je n’y trouve aucune différence. Cependant
il y a à la Chine une efpèce de loriot qui
diffère de celui qui paroît tous les ans en
Europe, par un ton de couleur plus foncé
& la diftribution de quelques taches de
celle-ci; le loriot qui habite quelque temps
notre climat, n’eft donc pas le feul de ce
genre qui fe trouve à la Chine, fuppofé que
l’exemple de la femelle que je conferve, foit
line preuve que ce loriot fe trouve auflidans
cette partie de l’Afie ; & fi il s’y trouve, en
effet eft-il croyable qu’il y pâlie de nos climats,
pour revenir Sç exécuter tous les ans
deux fois ce long voyage,
M, Sonnerat Se d’autres voyageurs ,
ont apporté du cap de Bonne - Éfpérançe
une huppe, qui paroît y être abondante &
qui ne diffère pas de celle que nous voyons
çn été dans nos campagnes.
Un grand nombre de cigognes, au rapport
de Belon , paffe l’hiver en Egypte ;
beaucoup de voyageurs ont fait depuis la
même obfervation, & plufieurs difent en
avoir vu dans la même faifon à Smyrne Se
aux environs. Parmi des oifeaux apportés de
la Guiane, j’en ai vu trois qui m’ont paru des
cigognes, abfolument femblables à çelleque
nous voyons en Europe, mais j’ignore en
quel temps ces cigognes ayoient été tuées.
On fçait que les cailles arrivent tous lçs
ans en grand nombre des çptes d’Afrique
fur les îfles, les promontoires de l’Ar-
chipel, de la Sicile & de l’Italie; qu’il n’y
çn demeure qu’une petite quantité en proportion
de celles qui ne font que sV re-
pofer à leur paffage , & qui de-là le répandent
dans les contrées de l’Europe : on
fçait également qu’au mois de feptembre les
cailles fe raffemblent aux mêmes endroits ô£
qu’elles repaffent fur les côtes d’Afrique.
M. Adamfon a obfervé au Sénégal l’hirondelle
la plus commune dans nos contrées.
Il s’ eftalfiiré qu’elle n’y habite qu’en hiver,
& qu’elle né s’y trouve pas en été.
En réfléchiffant fur les efpèces d’oifeaux
de paffage que je viens de citer pour exemple,
dont les unes vivent de fruits , les
autres d’infeûes, de reptiles, de grains,
nous trouverons qu’il n’y a que parmi les
derniers qu’il demeure quelques individus
lorfque l’efpèee entière s’ éloigne, parce
qu’il n’y a que ceux-là qui peuvent, durant
l’h ive r, ne fe pas trouver dans une
difette abfolue ; au lieu qu’elle feroit totale
pour les autres. Cette preuve réunie à
celles que j’ai déjà citées, confirme que
ç’eft en effet le befoin, le foin de chercher
les alimens convenables , qui détermine
les oifeaux à leur départ en automne. Mais
tandis que ceux-ci s’éloignent de nos climats,
ils y font remplaces par d’autres qui
arrivent de contrées plus feptentrionales ,
êc qui font également déterminés à changer
d’habitation par la néceflité de pourvoir
â la nourriture, par la difficulté de la
trouver dans les contrées froides qu’ils
quittent, & la facilité de la rencontrer
fous un ciel moins rigoureux, Ces oifeaux
vivent en effet d’alimens qu’ils cherchent
ou fur les bords des eaux, ou dans les
eaux mêmes : ainfi, lorfque le froid en
arrête le cours, qu’il les g è le , qu’il endurcit
les terres qui les bordent &c qu’elles
traverfent, que la neige couvre en même-
temps les campagnes pour long-temps, &
qu’il n’y a plus de moyen ni de tirer d’alimens
des eaux, ni de découvrir ceux qui
font dans les champs cachés fous la n eige,
la néceflité contraint les oifeaux à chercher
des climats moins rigoureux, oîi les
eaux çonfervent un cours libre, oii les
terres demeurent découvertes ; enfin ofi
les excès permanens dans les pays fepten-
■ trionaux , ne font que paffagers .& de
courte
courte durée. C ’ell donc encore la même
lo i , celle de pourvoir aux befoins alimen-
tairés, qui fa it , à l’approche de l’hiver,
paffer les oifeaux du Nord vers les régions
tempérées. Mais au retour du printemps,
quand le foleil a fondu les neiges qui cou-
vroient les campagnes , que les eaux dé-
barraffées des glaces, ont repris leur cours,
les oifeaux, quiavoient quitté les pays du
Nord, en reprennent le chemin, parce
que ces pays conviennent mieux à leur
maniéré de v iv r e , & fur-tout parce qu’ils
y feront en état de fubvenir & plus abondamment
& plus complettement aux befoins
des petits qui doivent naître bientôt.
En effet, les eaux font plus abondantes
dans les pays du Nord; les lacs, les étangs,
les marécages y font plus fréquens, les
fleuves plus larges; la terre y eft par-tout
plus arrofée, plus humide ; les bois y font
plus épais, plus étendus; ils y entretiennent
plus de fraîcheur & d’humidité ; les
folitudes y font plus fréquentes , plus
vaftes , & l ’homme en trouble le calme
plus rarement. Les oifeaux qui cherchent
leur nourriture ou fur les terres vafeufes
ou humides qui bordent les eaux, ou dans
les eaux mêmes, trouvent donc des alimens
plus abondans, & leur famille dont
l’éducation exige de la fraîcheur, de l ’ef-
pace, de la folitude, y naît ' & s’élève
avec plus de sûreté & de commodités.
Puifque c’eft dans la faifon de la ponte,
& durant la jeuneffe des petits, qu’on
trouve, comme les voyageurs nous l’apprennent
, les oifeaux d’eau & ceux qui
vivent fur les rivages , raffemblés, & ,
pour ainfi dire, preffés fur les bords des
grands fleuves du Nord, à leur embouchure
, dans les terres marécageufes, couvertes
de jonc & défertes qui les bornent
, n’eft-il pas évident que ce font les
befoins des petits qui y ont conduit ces
oifeaux, qui les y retiennent, eux q u i,
dans le refle de l’année, fe répandent également
fur toutes les terres humides, qui
fuivent le cours de toutes les eaux indifféremment,
& qui ne s’éloignent qu’ autant
que le froid les y contraint,? Mais û le
motif qui engage les oifeaux dont je viens
Hijloire Naturelle. Tome I.
de parler, à fe retirer au printemps de
nos pays tempérés vers le Nord, eft fen-
fible, ne peut-il pas nous éclairer fur le
retour des oifeaux qui, ayant, à l’automne,
paffé de nos climats dans des climats plus
doux, reviennent, au printemps,-habiter
nos campagnes? Ils s’y occupent , en y
arrivant, des foins néceffaires pour élever
la famille dont ils feront bientôt peres ;
comme les oifeaux' qui, dans le même
temps, fe font avances vers les pays du
Nord, s’y livrent aux mêmes occupatiohs ;
nous avons vu quels avantages ces pays
offrent aux premiers, au-demis de ceux!
qu’ils ont quittés; ne pouvons-nous pas
penfer que ce font des avantages de même
nature, fans être précifément les mêmes
qui rappellent au printemps, dans nos climats
, les oifeaux que la difette en a éloignés
dans l’automne ? Pour apprécier cette opinion
, il faut connoître les befoins des
petits qui doivent bientôt naître , compà-
rer l’état des campagnes dans les pays
chauds, à celui des nôtres dans la même
faifon ; & fi d’un côté les befoins de la
famille naiffante font mieux remplis, né-
ceffairement d’après l’état des chofes, que
de l’autre, il eft très-probable que c’eft
l’avantage & les commodités de leurs petits,
que les oifeaux qui avoient quitté
nos champs en automne, cherchent en y
repaffant au printemps. Dans les pays
chauds, les bois font plus rares, moins
touffus, les arbres en général à. feuilles
plus étroites, procurent moins d’ ombrage ;
les campagnes font moins verdoyantes ,
les prairies y font plus rares, & les champs
plutôt récoltés , ou defféchés par les ardeurs
du foleil, y font plutôt découverts.
Les commodités pour y placer un n id ,
pour le cacher, ce qui eft le premier & le
plus important des foins, pour dérober
la famille, dans fes premières courfes, aux
regards des ennemis qui pourroient la
troubler, fur - tout à ceux de l ’homme ,
font moins grandes, elles manqueroient
tout-à-fait avant la faifon oîi l’amour ceffe
de fe faire fentir, ôc oîi il eft fuivi des
befoins auxquels il faut pourvoir. Ces commodités
fe rencontrent au contraire com-
G gg