
les ifles françoifes d’Amérique ; mais je crois I efpece un peu differente. Il ne fe rencontre pas
en haute mer ; il eft même rare près des embouchures
des rivières ; mais on le trouve à plus
de mille lieues de la mer dans la plupart des
grandes rivières qui defcendent dans celle des
Amazones, comme dans le Guallaga^le Paftaca, ôte.
II n eft arrête , en remontant l’Amazone', que par
le Pongo ( catara&e )' de Borja, au-deffus duquel
on n’en trouve plus ».
« Ces animaux , dit Gumîlla , pèfent chacun
depuis cinq cents jufqu’à fept cents cinquante
livres ; ils fe nourriffent d’herbes ; ils ont les yeux
fort petits, & les oreilles encore plus petites.;
.x v^ lnent paître, fur le rivage -lorfque la rivière
èft baffe.. . . Au - deffousr de la peau , qui
eft bien plus épaiffe que celle d’un boeuf, on
trouve quatre enveloppes ou couches, dont deux'
font de graiffe, & les deux, autres d’une chair
fort délicate & fort favoureufe, qui, étant rôtie , a 1 odeur du cochon & le goût du veau. Ces ani-
inaux , lorfqu il doit pleuvoir, bondiffent hors de
l’eau à une ^hauteur affez confidçrable ».
5 • Le P e t i t L a m a n t i n du Sénégal,
C ’eft encore une petite efpèce de lamantin
qui fe trouve dans plusieurs fleuves de l’Afrique,
comme le précédent dans ceux dé l’Amérique. .
Celui du Sénégal différé de celui d’Amérique ,
en ce qu’il a des dents molaires Ôc quelques poils
fur le corps, ôt les trous auditifs encore moins
marqués.
« J’ai vu beaucoup de ces animaux ( dit
M. Adanfon ) , les plus grands n’avoient que huit
pieds de longueur, Ôt pefoient environ huit' cents, j
livres ; une femelle de cinq pieds-trois, pouces de j
long ne pefoit que cent quatre-vingt-quatorze
livres; leur couleur eft cendrée-noire; les poils
font très-rares fur tout le corps ; ils font en forme
de foies longues de neuf lignes ; la tête eft conique
& d’une groffeur médiocre , relativement au volume
du corps ; les yeux font ronds &, très-petits ;
l’iris eft d’un bleu foncé & la prunelle noire ;
le mufeau eft prefque cylindrique ; les deux mâchoires
font à-peu-près également larges; les
lèvres font charnues Ôt fort épaiffes ; il n’y a que
des dents molaires, tant à la mâchoire d’en-haut
qu’à celle d’en - bas ».
« La langue eft de forme ovale , ôt attachée
prefque jufqu’à fon extrémité'à la mâchoire inferieure....
Il a deux bras ou nageoires placés à
l ’origine de la tête, qui n’eft diffinguée du tronc
par aucune efpèce de cou, ni par des épaules
l'enfibles ; ces bras font à-peu-près, cylindriques ,
çompofés de trois articulations principales , dont 1 anterieure forme une efpèce de main applatie,
dans laquelle les doigts ne fe diftinguént qüe par
quatre ongles d’un rouge - blanc & luifant ; la
queue eft horizontale comme celle des baleines ,
& elle a la forme d’une pelle à four. Les femelles
ont deux mamelles plus ellyptiques que
rondes , placées près de l’aiffelle des bras : là
peau eft un cuir épais -de fix lignes fous le
ventre, de neuf lignes fur le dos, & d’un pouce
& demi fur la tête. La graiffe eft blanche ôt épaiffe
de deux ou trois pouces ; la chair eft d’un rouge
pâle ôt plus délicate que celle du veau. Les
nègres Oualofes ou Jalofes appellent cet animal
Lereou. Il vit d’herbes ôt fe trouve à l’embouchure
du fleuve Niger ».
On voit par cette defcription que le lamantin
du Sénégal ne diffère , pour - ainfi- dire, en rien
de celui de Cayenne.
Divers voyageurs parlent de lamantins qui
paroiffent devoir fe rapporter à quelqu’une des ef-
pèces précédentes.« La tête du lamantin de Tille
Rodrigue reffemble beaucoup , dit le Guat, à
celle du cochon, excepté qu’elle n’a pas le groin
u pointu. Les plus grands lamantins ont environ
vingt pieds de long... Cet animal a le fang. chaud ,
la peau noirâtre, fort rude Ôt fort dure, avec
quelques poils fi clairs femés, qu’on ne lés ap-
perçoit qu’à peine ; les- yeux petits & deux
trous qu’il ferre & qu’il ouvre , que J.’on peut avec
raifon àppeller fes oreilles ,* comme il retire affez
fouvent la langue . qui n’eft pas fort grande, plusieurs
ont dit qu’il n’en avoit point ; il a. des dents
mâchelières;..'. mais il n’a point dé dents de devant,
& fes gencives font affez dures pour arracher ôt
brouter l’herbe..... Je n’ai jamais vu qu’un petit
avec la femelle ».
« Nous trouvions quelquefois, continue-t-il, trois
ou quatre cents de ces animaux enfèmble qui paifi*
foient Therbeau fond de Teau ; ils étoientfi peu effarouchés
, que fouvent nous les tâtions pourchoifir
le plus gras ; nous leur pallions une corde à la
queue pour les tirer hors de l’eau ; nous ne
prenions pas les plus gros , parce qu’ils nous âu-
•roient donné trop de peine, .&_que d’ailleurs
leur ehair n’eft pas fi délicate que celle des petits...
jN o u s n’avons pas remarqué que cet animal vienne
jamais à terre ; je doute qu’il pût s’y traîner, ôc
je ne crois pas qu’il foit amphibie ».
« Ce n’eft pas feulement, dit Dampier f dans
la rivière de Blewfield, qui prend fon origine
entre les rivières de Nicarague ôt de Verague.
que j’ai vu des manates• ( lamantins ) : /j’en ai aufli
vu dans la baye de Campèche , fur les côtes de
Bocea del Drago, ôt de Bocca dçl oro , dans la
rivière de Darien, ôt dans vles petites ifles méridionales
de Cuba ; j’ai entendu dire qu’il s’en eft
trouvé quelques-uns au nord de la Jamaïque & en
grande .quantité dans la rivière de Surinam, qui
eft un pays fort bas; j’en ai vu aufli à Mindanao
& fur la côte de la Nouvelle Hollànde ».
., « Cet animal aime Teau qui a umgoût de fel
aufli fe tient-il communément dans les rivières-
voifines de la mer ; c’eft peut-être pour cette
raifon qu’on n’en voit, pas, dans les mers du fud
«îi la côte eft généralement haute , l’eau profonde
tout proche de terre , les vagues ' groffes, fi -ce
n’eft dans la baie de Panama^ ou cependant il
n’y en a point ; mais les Indes occidentales étant ,
pour ainfi - dire, une grande baie compofée de
plufieurs petites , ont ordinairement des terres
baffes , où les eaux , font peu profondes & four-
niffent une nourriture convenable au lamantin ;
on le troüve quelquefois dans Teau falée , quelquefois
aufli dans l’eau douce, mais jamais fort
avant en mer ».
« Ceux qui font à la mer ôt dans des lieux
ou il n’y a ni rivières.ni bras de mer ou ils puiffent
entrer, viennent néanmoins en vingt-quatre heures,
une fois ou deux , à l’embouchure de la rivière
d’eau-douce la plus voifine : ils ne viennent jamais
à terre ni dans une eau fi baffe qu’ils ne puiffent
y nager,* leur chair eft faine & de très-bon goût ;
leur peau eft aufli d’une grande utilité. Les lamantins
Ôt les tortues fe trouvent ordinairement dans
les mêmes endroits , ôt fe nourriffent des mêmes
herbes qui croiffent fur les hauts fonds de la mer f
à quelques pieds de profondeur fous Te.au & fur
les.rivages bas que couvre la marée ». '
• Le lamantin eft le manati de Fernandez ; manati
phocoe genus de Clüfius ;. manatus de Briffon ;
manati ou manatte pàr les François des îles ; pefce
mouller ou poiffon femme des Portugais; la -vache
marine de plufieurs voyageurs; la fyr'ene de
quelques autres.
LAMPT -, en Afrique , èft le zébu, race de
petits boeufs. Voye£ Boeuf ôc Zébu.
• Lancer , v. a. en terme de chaffè attaquer,
faire bondir la bête ôt la mettre fur pied ; on dit
aufli , au fubftantif, le lancé -, être au lancé ; c’eft
entendre ou voir lancer la bête. •
■ LA NT , dans les parties feptentrionales de
l’Afrique, eft le petit boeuf zébu. Voye^ Zébu.
LAPIN ( le ) eft d’une efpèce - différente de
celle du lièvre , malgré les reffemblances tant intérieures
qu’extérieures qui fe trouvent entre ces
deux animaux , puisqu’ils ne fe mêlent pas en-
femble ou que du moins il ne refulte rien de leur
accouplement. La fécondité du lapin eft encore
plus gtaride que celle du lièvre, oé ces animaux
deviendroient bientôt les, plus terribles 1 fléaux des
•Campagnes, fi Ton n’avoit foin d’en prévenir la
multiplication exceflive.
Non-feulement le lapin s’accouple plus fouvent.
ôt produit .plué fréquemment ôt en § plus grand
nombre que le. lièvre , mais il a aufli plus de
fagacité ôt de réffources pour échapper'à fes ennemis.
Il fe creufe un terrier où il habite en fûreté
avec fa famille , où il élève fes petits, ôt d’où
il ne les fait fortir que lorfqu’ils l’ont tôu-t-àr-fait
élevés , tandis que les lièvres périffent en grand
nombre dans le bas âge , ôt ont plus à fouffrir
alors que dans tout le refte de la vie.
- Cet inftinâ qui porté les lapins à fe creufer
un terrieç.3 eft propre à l’individu fauvage , & ce
qui prouve que c’eft par fentiment qu’il travaille ,
c’eft que le lapin clapier, ou domeftique ne fe
creufe point de terrier , parce qu’il n’a pas les
mêmes inconvéniens àcraindre, les mêmes dangers
à courir que le lapin fauvage. .
Ces animaux font eh état d’engendrer à cinq
ou fix mois. On affure qu’ils font conftans dan»
leurs amours ; qu’ils s’attachent ordinairement à
une feule femelle & ne la quittent pas. Elle eft
prefque toujours en chaleur , ou du moins en?
état de recevoir le mâle. Elle porte trente ou
trente-un jours ,. ôt' produit quatre, cinq, fix &
quelquefois fept & huit petits. Elle a , comme
la femelle du lièvre , une double matrice , &
peut', par conféquent, mettre bas en deux temps ;
cependant , il paroît que les fuperfétations iont
moins fréquentes dans cette efpèce que dans celle
du lièvre.
Quelqués jours aVant de mettre bas , 1 es lapines
fe creufentun nduveau terrier, non pas en ligne
droite , mais en zigzag ; ce terrier fe nomme
rabouillere ; au fond de ce terrier elles pratiquent
une excavation , après quoi elles s’arrachent fous
le ventre une affez grande quantité de poil dont
elles font une efpèce de lit poyr recevoir leurs
petits. Pendant les deux premiers jours , elles ne les
quittent pas ; elles ne fortent que lorfque lé befoin
les preffe , & elles reviennent dès qu’elles ont pris
de la nourriture. Dans ces premiers temps , elles
mangent beaucoup ôt fort vite ; elles foignent ainfi
ôt allaitent leurs petits pendant plus de fix femaines.'
Jufqu’alors , le père ne les connoît point ; il
n’entre pas dans ce terrier qu’a creufé la mère ;
fouvent même , quand elle en fort, elle en bouche
l’entrée avec 4s la terre détrempée de fon urine ;
mais'quand ils commencent à venir au bord du
trou & à manger du féneçon &* d’autres herbes
que la mère leur préfente , le père femble alors
lès reconnoître , il les prend dans fes pattes ;
il leur luftre le poil; il leur lèche les yeux, ôc
tous, les uns après les autres, ont également
part à fes foins. Dans ce même temps, la mère
lui, fait beaucoup de careffes, ôc fouvént devient
pleine peu de jours après. La paternité paroît être
fort relpeétée parmi ces animaux ; ôc Ton remarque
beaucoup de déférence ôc de fubordination del^
part .de toute la famille pour fon chef.
Les lapins vivent huit ou neuf ans, ôc fe nourriffent
d’herbes, de racines, de grains, de légumes
, de fruits, de bayes , de feuilles ôc d’écorces
des arbriffeaux ôc des arbres. Ils ont plus
d’embonpoint que les lièvres; leur chair eft aufli
fort différente par fa couleur ôc par le goût :
celle des jeunes lapereaux eft très-délicate, mais
celle des vieux lapins eft fèche ôc dure. Celle des
lapins clapiers ou domeftiques nourris,à la maifon ,
n’a pas le fumet aufli agréable que celle des lapins.
de garenne ou de campagne, à mpins qu’on ne
leur donne de bonne nourriture , ôc fur-tout,
beaucoup de genièvre».