
fur les quadrupèdes, on peut bien le croire fabuleux
, vu fur-tout les traits de fable dont les
Anciens avoient tilfu fon hiftoire.
Les cornes de licorne qu’on montre en différens
endroits , font des cornes d’animaux connus, 8c
fpécialement la grande défenfe du narwhal, ou
même des ivoires tournés.
L animal d’Arabie , nommé camphur dans l’an-
' cienne Encyclopédie % qui , dit-on , fous cet IB
ticle , efl une efpèce à*âne fauvage portant une corne
au milieu du front ; & le brehis de Madagafcar,
du même ouvrage, grand comme une chèvre,
avec une corne fur le front, feroient chacun une
forte de licorne, mais qui paroît tout auiïi fabu-
leufe que la licorne des anciens.
Entre ces derniers, Ariftote , en parlant de
Vorix, lui place une corne au milieu du front;
mais Ariftote n’avoit point vu l’orix, & il paroît
que le véritable animal défigné parles Grecs fous
ce nom, eft une gazelle, laquelle, comme toutes
les autres, porte deux cornes.
Et quant à VE ale de Pline , grand animal auffi
fort que l’hippopotame , dit-ce Naturalifte , & qui
combat l’eïephant a l’aide de deux cornes mobiles
dont il eft armé ; quoique cette mobilité des cornes
ne foit exactement vraie d’aucun animal , il femble
cependant qu’on peut reconnoître à ces traits le
rhinocéros d’Afrique qui porte deux cornes ,
moins immobiles en effets que celles de tous
les autres animaux, puifqu’elles ne prennent point
«aiffance dans- l’Os du front , mais réfultent d’un
paquet de fibres de la même nature que les poils
feulement implantées profondément dans la
peau. Voyeç l’article du R h in o c é r o s .
• L ic o r n e d e m e r . Voye^ N a r w h a l .
LIDMÉE. On a défigné fous ce nom une race
de grande taille dans l’efpèce de la gazelle antilope.
Voyeç A n t i l o p e .
LIÈVRE ( le ) eft le gibier le plus commun
dans nos campagnes, & la proie la plus ordinaire
des chaffeurs. Auffi femble-t-il favoir combien il
â d’ennemis : toujours en crainte , à tout moment
en tranfes, ce tremblant animal ne fait que fuir ,
prend , la plupart du temps , fa peur pour le
danger , & n’ofe prefque , en plein jour, fe montrer
dans les champs. Il paffe la plus grande partie du
jour au gîte , où il dort , mais d’un fommeil
léger- & tenant les yeux ouverts ; il ne paroit
vivre & refpirër que la nuit. C’eft alors que ces
animaux prennent leur nourriture, qu’ils jouent
entr’eux-, qu’ils ■ s’accouplent ; mais au moindre
mouvement, au bruit d’une feuille qui tombe ,
tous fuient, & chacun fuit d’un côté différent.
Us fe nourriffent d’herbes , de racines', de
feuilles , de fruits , de grains , 8c préfèrent les
plantes dont la fève eft laiteufe ; ils rongent
l ’ecorce des arbres pendant l’hiver , excepté l’aune
& le tilleul auxquels ils ne touchent pas. Leur
v o ix , qu’ils ne font entendre que lorfqu’on les
laifit ou qu’on les bielle, n’eft point un cri aigre,
mais une voix allez forte dont le fon eft prefque
femblable à celui de la voix humaine. Dans le
premier âge , on les apprivoife aifément ; ils
font doux , deviennent même careffans 8c font
fufceptibles d’une forte d’éducation ; mais ils ne
s’attachent jamais allez pour devenir animaux
domeftiques.
Les lièvres n’ont pas de cils aux paupières, &
parodient avoir la vue mauvaife , mais ils ont,
comme par dédommagement, fouie très-fine &
l’oreille d’une grandeur démefurée , relativement à
celle de leur corps. Ils remuent ces longues oreilles
avec une extrême facilité , 8c s’en fervent comme
de gouvernail pour fe diriger dans leur courfe. Ils ont
lés jambes de devant beaucoup plus courtes que
celles de derrière ; auffi courent-ils plus facilement
en montant qu’en defeendant ÿ & lorfqu’ils
font pourfuivis , commencent - ils toujours par
gagner la montagne. Leur mouvement dans la
courfe eft une efpèce de galop i une fuite dé
fauts très-preftes & trës-preffés ; ' ils marchent
fans faire aucun bruit, parce qu’ils ont les pieds
couverts & garnis de poils , même par-deffous ;
ils font peut-être auffi les feuls animaux qui aient
des poils dans la bouche.
Les lièvres multiplient beaucoup ; ils font
en état d’engendrer en tout temps , 8c dès la
première année de leur vie. Les femelles ne
portent que trente ou trente-un jours , 8c dès
qu’elles ont mis bas , elles reçoivent le mâle j
elles le reçoivent auffi lorfqu’elles font pleines y
& par la conformation particulière de leurs parties
génitales, il y a fouvent fuperfétation , carie
vagin & le corps de la matrice font -continus ,
& il n’y a point d’orifice ni de col de matrice
comme dans les autres animaux ; mais les cornes
de la matrice ont chacun un orifice qui déborde
dans le vagin & qui fe dilate dans l’accouchement ;
ainfi ces deux cornes font deux matrices diftin&es ,
féparées , & qui peuvent agir indépendamment
l’une de l’autre _, enforte que les femelles dans
cette efpèce peuvent concevoir & accoucher en
diffé rens temps par chacune de ces matrices. Ces
femelles peuvent donc être en chaleur & pleines
en tout temps. Auffi font-elles également lafeives
8c fécondes , & par une autre fingularité de leur
conformation , il eft fouvent difficile de diftinguer
extérieurement & au premier coup d’oeil le mâle
de la femelle , ce qui a fait dire que dans les
lièvres il y avoit beaucoup d’hermaphrodites , &
que les mâles produifoient quelquefois des petits
comme les femelles , ce qui eft une fable 8c une
abfurdité.
Les petits levrauts ont les yeux ouverts en
naiffant; la mère les allaite pendant vingt jours,
après quoi ils s’èn féparent & trouvent eux-
mêmes leur nourriture ; ils ne s’écartent pas
beaucoup les uns des autres ni du lieu où ils
font nés ; cependant ils vivent folitairement & fe
forment chacun un gîte à une petite diftaa.ee ?
comme de foixante ou quatre - vingt pas. La
plupart ont, au fommet de la tête , une petite
marque blanche que l’on appelle Yétoile , qui
ordinairement difparoît à la première mue, mais
quelquefois refte jufques dans .l’âge avancé. Ils
prennent prefque tout leur accroiffement en un
an, Ainfi , la durée de leur vie n’eft que de fept
ou huit ans au plus. On prétend feulement que
les mâles vivent plus long - temps que les femelles.
En général, le lièvre ne manque pas d’inftinft
pour la propre confervation , ni de fagacité pour
échapper à fes ennemis. 11 fe forme un gîte ,
& pour cela il choifit en hiver les lieux expofés
au midi, & en été , il fe loge au Nord. En
plein champ , il fe cache entre des mottes qui
font de da couleur de fon poil. On en a vu
qui , étant chaffés , paffoient les étangs à la nage
& alloient fe cacher au milieu des joncs ; d’autres
qui fatigués , en fuppofbient ;.un: autre , 8c fe
mettoient en fon gîte ; d’autres enfin ,. traverfer
à plufieurs reprifes les étangs ou des rivières ,
fe réfugier dans les bergeries , fe mêler parmi le
bétail dans les .champs, fe cacher en terre ou
dans des trous de vieilles murailles en ruines.
Mais ce font-là fans doute les plus grands efforts
de leur inftinét , car leurs rufes ordinaires font
moins fines 8c moins recherchées. Ils fe contentent
, lorfqu’ils font lancés & pourfuivis , de
courir rapidement, 8c enfuite de tourner 8c retourner
fur leurs pas ; ils.ne dirigent pas leur
courfe contre le vent, mais du côte oppofé ; les
femelles ne s’éloignent pas tant que les mâles 8c
tournoient davantage. En général, tous les lièvres
qui font nés dans le lieu même où on les chaffe,
ne s’en écartent guère ; ils reviennent au gîte,
8c fi on les chaffe deux jours de fuite , ils font
le lendemain les mêmes tours 8c détours qu’ils
ont fait la veille. Lorfqu’un lièvre va droit 8c
s’éloigne beaucoup du lieu où il a été lancé,
c’eft une preuve qu’il eft étranger & qu’il n’étoit
en *ce lieu qu’en paffant.
Il vient en effet dans le temps le plus marqué
du rut, qui eft aux mois de janvier, février 8c
mars des lièvres mâles, qui, manquant de femelles
dans leur pays, font plufieurs lieues pour en trouver
; mais dès que ces lièvres voyageurs font
lancés par les'-chiens, ils regagnent leur contrée &.
ne reviennent plus. Les femelles ne font point de
ces excurfions ; elles font plus groffes que les mâles,
8c cependant elles ont moins de force 8c d’agilité 8c
plus de timidité; car elles n’attendent pas gu gîte
les chiens de fi près que les mâles , & elles multiplient
davantage leurs rufes 8c leurs détours :
elles font auffi plus délicates & plus fufceptibles
des împreffions de l’air ; elles craignent l’eau &
la rofee; au lieu que parmi les mâles, ibs’en trouve
plufieurs qu’on appelle lièvres ladres i, qui cherchent
les eaux ,. 8c le font chaffer dans les étangs,
fes marais 8c .autres liçux fangeux..
Ces lièvres ladres ont la chair de fort mauvais
goût, & en général tous les lievres qui habitent
les plaines baffes ou les vallées , ont la chair in-
fipide 8c blanchâtre , au lieu que dans les pays
de plaines élevées ou de plaines en montagnes,
oùle ferpolet &les autres herbes fines abondent,
les levrauts & même les vieux lièvres font excellons
au goût. On remarque encore que ceux qui
habitent les fonds des bois, dans ces mêmes pays,
ne font pas, à beaucoup près, auffi bons que
ceux qui en habitent les filières,, ou qui fe tiennent
dans les champs 8c dans les vignes. , &.
que les femelles ont généralement la chair plus délicate
que les mâles. La chair de ceux qu on nourrit
à la maifon, eft toujours de mauvais goût.
Les Orientaux font peu d’eftime du lievre ,
mais les Grecs 8c les Romains en faifoient autant
& plus de cas que nous, 8c le-regardoient comme le
plus délicat des quadrupèdes. En effet, fa chair
eft excellente, fon fang même eft bon a manger^,
8c c’eft le plus doux de tous les fangs. La graille
n’a aucune part à la délicateffe de la chair , car
le lièvre ne devient jamais gras tant qu il eft a
la campagne en liberté , & cependant il meurt
fouvent de trop de graiffe lorfquon les nourrit
à la maifon.
La nature du terroir influe fur ces animaux plus
fenfiblement que fur aucun autre. Les lievres de
montagne font plus grands , plus gros,plus bruns
fur le corps 8c plus blancs fous le cou que les lievres
de plaine , qui font petits & prefque rouges. Dans
les hautes montagnes & dans les .pays du Nord ,■
ils deviennent blancs pendant l’hiver, 8c reprennent
en été leur couleur ordinaire. Il y en a
même qui reftent toujours blancs 8c ce font peut-
être les plus vieux. Les lièvres des pays chauds
font auffi plus petits que ceux des. pays tempérés.
8c feptentrionaux. L’efpèce en eft généralement
répandue, à l’exception de V Amérique méridionale
8c des pays fitués fous la zone torride. Ils
font cependant moins communs en Orient qu en
Europe , & ceux de l’Amérique feptentrionale
paroiffent être d’une efpèce differente. On affure
que les lièvres des Pyrénées fe creufent fouvent
des terriers comme les lapins.
La chaffe du lièvre eft amufante , & fe fait fans
appareil 8c fans dépenfe. On va le matin 8c le foir
au coin du bois 1 attendre le lièvre à fa rentrée où'
à fa fortie , ce qui s’appelle chaffer a l affût ; on'
le cherche pendant le jour dans^les endroits ou
il fe gîte. Lorfqu’il y a de la fraîcheur dans 1 air
par un foleil brillant, 8c que le lievre vient de
fe gîter après avoir couru , la vapeur de font
corps forme une petite fumée que les chaffeurs»
apperçoivent de fort loin, fur-tout fi leuis yeux
font exercés à cette efpèce d’.obfervation. Le
lièvre fe laiffe ordinairement approcher de très-
près , fur-tout fi l’on ne fait pas femblant de le
regarder, & f i , au lieu d’aller direftement à lui *
on tourne obliquement pour l’approcher. 11 craint