
ger ôc de fe raccourcir, formée de deux
pièces, jointes l’une à l’autre, ôc concave
du côté par lequel elles fe tiennent, eft,
en quelque forte, moins une langue que
ce n’eft une trompe.
La langue du toucau sèche, décharnée,
applatie, étroite, longue, feftonée Si découpée
profondément fur fes bords, ref-
1 rieure, près de fa bafe, qu’il faut, dans
les oifeaux, chercher, comme dans l’homme,
l’organe de l’odorat, mais à la portion
fuperieure du bec en revenant en devant :
cette portion eft creufe, féparée en deux
par une lame offeufe, longitudinale, ôc
partagée par des clôifons fort minces en
un grand nombre de cavités qui communiquent
femble à une plume garnie dans toute fa
longueur de faifceaux de barbes défunis
ôc égaux en longueur des deux côtés.
Celle du perroquet, charnue , épaiffe ,
volumineufe à proportion de la groffeur
de l’oifeau , coupée à fon extrémité à
angle prefque droit, ou très-peu arrondi,
eft relevée fur fes bords, & diminuée dans
fon milieu vers fon extrémité. En vain
attribueroit-ori à la conformation de la
langue de cet oifeau la faculté d’articuler
quelques mots qu’il retient par habitude,
puifque d’autres oifeaux, dont la langue
n’a aucun rapport de conformation avec
la fienne , ont cependant la même facilite
d’imiter la voix humaine.
Telles font les principales différences que
nous préfente la conformation de la langue
des oifeaux, elles doivent , fans doute, influer
beaucoup fur l’organe du goût qu’elles
rendent plus ou moins délicat ; mais il
fiiffit que j’aie rapporté les faits qui prouvent
que ce fens a plus d’énergie dans les
oifeaux en général qu’on ne le penfe communément
en le bornant à ce que fa conformation
femble indiquer, mais qui eft
contredit par les habitudes, moyen d’établir
un jugement plus sûr.
Il eft fort difficile d’apprécier les im-
preffions de l’odorat dans les oifeaux ,
d’après les habitudes qui, à cet egard,
"nous font inconnues; mais fi l’on juge
d’après la conformation de l’organe , on
fera porté à penfer que les oifeaux ont
l’odorat plus délicat que le goût. En effet,
quoique leurs narines ne confiftent qu’en
deux ouvertures placées à la bafe du bec,
il y a entre leur organe intérieur pour
l’odorat, & celui de l’homme ôc des quadrupèdes
, plus de conformité qu’il ne s’en
■ trouve du côte de la langue:ce n’eft pas
vers le milieu du crâne, à fa partie ante- 1
les unes avec les autres ; elles font
tapiffées par une membrane déliée, abreuvée
d’humidité , analogue à la membrane
pituitaire ; ôc les nerfs qui s’y diftri-
buent, qui s’épanouiffent fur cette membrane
, repondent à ceux qui, dans l’homme
ôc dans les quadrupèdes, fervent à percevoir
l’impreffion des odeurs ; ces nerfs
envoient de même des rameaux qui pénètrent
vers le palais, fe diftribuent à fa
furface, .ôc établiffent également cette communication
qui ,. dans . l’homme ÔC dans
les quadrupèdes, a lieu d’après la conformation
entre l’odorat ôc le goût : on peut,
fur ces articles, fi l’on en defire les détails
, confulter les anatomiftes, ôc en particulier
"Willis. Mais l’organe de l’odorat a,
dans les oifeaux, plus de rapport avec celui
de l’homme ôc des quadrupèdes , que n’en
préfente la langue ; c’eft par cette raifon
que j’ai dit qu’en jugeant, d’après la conformation
de l’organe, on feroit porté à
croire que les oifeaux font plus fufeep-
tibles des odeurs que des faveurs. La plupart
d’entr’eux fe nourriffent d’alimens
prefqu’inodores pour nous , tels que font
les grains en général , ou de lubftances
qui ont communément peu d’odeur ; tels
que les fruits fauvages, les baies, ôte :
e’eft peut-être par cette raifon. même qu’il
étoit néceflairë que les oifeaux fufl’ent
plus affeûés par les odeurs que par les
faveurs ; l’odorat pour la fûreté de l’individu
devant décider du choix des alimens
avant le goût ; ôc il eft d’ailleurs probable
que l’organe de l’odorat étant plus
travaillé dans les oifeaux que ne l’eft celui
du goût , la'fenfîbilité. de ce dernier fens
prouvée- par les habitudes, eft due à fa
communication avec celui dei’odorat.
La première différence entre l’organe de
l’ouie des oifeaux ôc celui de l’homme ôc
des
ides quadrupèdes , eft le défaut de pavillon
ou de conque externe, deftinée à réunir
les rayons fonores. Les différences qu’on
rencontre à l’intérieur font auffi très-remarquables.
Le méat auditif eft ouvert dans
la plupart des oifeaux' ; il n’eft fermé à
fon orifice par une membrane, que dans
les oifeaux de nuit ôc quelques efpèces
d’oifeaux diurnes ; mais ce canal eft extérieurement
recouvert par des plumes qui
peuvent fuppléer à la membrane qui manque
: au lieu de trois offelets, comme on
les trouve dans l’oreille de l’homme, les
oifeaux n’en ont qu’un qui forme, avec
un cartilage auquel il fe joint, une articulation
mobile : les canaux fémi-circulaires
font traverfés par un. grand nombre
de cloifons , ôc le limaçon eft fort petit ôc
très-peu reconnoiffable. Pour mettre le
leûeur, qui n’eft pas anatomifte,, au fait
de ces objets, comme il pourroit le de-
firer, il auroit fallu faire d’abord la def-
cription de l’organe de l’ouïe , confidérée
dans l’homme ôc dans les .quadrupèdes,
enfuite dans les oifeaux : cette double description
auroit exigé des détails qui, étant
par la nature de la chofe très-difficiles à
bien expofer, feroient devenus néceffaire-
ment trop longs : on pourra y fuppléer en
lifant ce qui eft relatif à l’organe de l’ouïe
dans le dictionnaire d’anatomie, dans celui
d’anatomie comparée, ôc en ayant recours,
en particulier, pour l’organe de l’ouïe des
oifeaux, à la defeription qu’en a donnée i
M. Vicq-Dazyr, inférée dans les Mémoires
de l’académie royale des fciences.
Les différences dont je viens de rendre
compte n’empêchent pas que les oifeaux
n’aient l’ouïe fine , ôc qu’ils ne prennent
plaifir aux fenfations qu’elle leur communique.
En effet, lorfque par leur pofition
ils ne peuvent juger des objets par la vue,
on les voit devenir attentifs à un bruit très-
léger qu’on fait de loin, ôc prendre la fuite
fi ce bruit augmente. On recommande lé .
filence dans les chaffes qu’on fait de nuit,
ôc pour lefquelles les nuits les plus fombres,
ou la vue n’eft d’aucun fecours, font les
plus favorables : ces faits prouvent la fi-
peffe de l’ouïe, dans les oifeaux. On fçait
Wjloire Naturelle, Tome J,
de même qu’on les attire par désfions doux;
que deux mâles d’une même efpèce, oubliant
pour quelques inftans leur légéreté ,
placés fur des branches à une diftance d’oii
ils s’entendent réciproquement, s’efforcent
à l’envi d’élever leurs voix au-deflus l’un
de l’autre ; que cette lutte , qu’on pren-
droit pour un défi, dure quelquefois affez
long-temps; ôc qu’en imitantartificiellemcnt
leur ramage, on peut les attirer ôc les provoquerace
même genre de combat; enfin il n’y
a perfonne à qui leur chant ne paroiffe
l’expreflion du plaifir : ôc tous ces faits
font autant de preuves de la fenfibilité de
l’organe de l’ouïe dans les oifeaux ; mais
c’eft la; vue qui leur procure les impref-
fions les plus multipliées, les plus vives,
ôc qui décide, en plus grande partie, leurs
inclinations ôc leur caractère. Tout concourt
à l’aâion que ce fens exerce fur les
oifeaux ;: la pofition élevée dans laquelle
ils font fouvent, le méchanifme de l’organe,
fa fituation. L’homme ne voit que
les objets qui font devant lui, ôc perd de
vue la terre, en levant fes regards vers le
ciel: ceux.des quadrupèdes, inclinés ' vers
le fol qui les foutient Ôc qui les nourrit, ne
fe dirigent qu’en avant, ôc l’homme ôc les
quadrupèdes, par la pofition de leurs yeux,
-entoures de l’orbite , dans lequel ils font
placés, ne découvrent qu’une foible portion
j d’un horifon borné. Les oifeaux ,
dont'les yeux occupent les côtés de la
tête ôc excèdent le niveau de l’orbite dans
lequel ils font contenus, élevés dans les
airs , découvrent autour d’eux la circon-
Térence entière d’un vafte horifon ; ils dominent
fur tous fes points , ôc leurs regards
defeendeht fur tous les objets qu’il
contient. Ces avantages de la fituation oit
fie trouvent les oifeaux, de la pofition de
leurs yeux, font fécondés par le méchanifme
de l’organe.
- Les fourcils ÔC les cils qui brifent les
rayons de lumière, qui, en projettant leur
ombre fur le'globe de l’oeil, adouciflënt
un éclat trop vif, manquent dans les oifeaux
; cette précaution, en faveur d’un
organe foible, n’étoit pas néeeflaire pour
les yeux des oifeaux, ils abforbent tous