
comprendra fans peine comment les oi-
feaux, maîtres de modifier leur refpira'tion,
de fe pénétrer pour ainlr dire d’a ir , ou
d’en abforber une moins grande quantité,
de le rendre ou de le retenir, & de le ménager
à leur gré, refpirent avec la meme
facilité un air plus denfe ou plus rare ;
comment la rapidité du vo l n’interrompt
ni ne gêne leur refpiration, toujours libre;
on fentira de même comment, à proportion
de leur force apparente, leur voix
eft fi haute, Aperçante, Avariée Sc d’une
tenue A longue, ê i la puiffance de rendre
des fons, de les varier, de les modifier,
de les foutenir, fera évidemment en eux
une de leurs principales facultés : l’hif-
toire des organes de la digeftion expliquera
comment, félon que ces organes^ font modifiés,
les oifeaux font bornés à un feul
genre de nourriture ou peuvent varier
leurs alimens ; & fi l’on excepte les oifeaux
de proie, les oifeaux en général, paraîtront
à cet égard, traités plus favorablement
que les autres animaux, qui n’ont
pas au mêm® degre la faculté de digereî.
& d’affimiler à leurs humeurs un auffi grand
nombre d’alimens de nature différente. |
Les tefticules renfermées dans les mâles
à l’intérieur du corps, dans un état d inaction
Sc de repos pendant l’automne &
l’hiver, tuméfiés au printemps, Sc ftimules
par les Aies qui s’y font amaffes, font, par
la variation de leur état| par leur Atuation,
une ca\ife fenfible du renouvellement de
l ’ardeur amoureufe tous les ans dans la
faifon marquée,de l’ariivite de cette ardeur,
de la faculté prolifique qui en eft la fuite.
De même dans les femelles le repos de
l ’ovaire dans iesmêmes faifons, le gonflement
au printemps, de plufieurs des germes
qu’il contient, rendent raifon des mêmes
effets dans l’un Sc l’autre fexe. L’ardeur
Çc la fécondité dévoient être d’autant plus
grandes, qu’elles avoient été plus long’
temps réprimées Sc préparées pour un
temps fixe. Qu’on parcoure en effet l’hifn
toire des animaux , Sc l’on trouvera, ce
me femble, que ceux qui ) oui île ut plus
rarement des plaifirs de 1 amour, qui ne
les goûtent que dans une faifon marquée,
lorfqu’elle eft venue, éprouvent une ardeur
plus a â iv e , plus impérieufe, &C qu ils
ont' une puiffance prolifique plus grande ;
c’eft par cette raifon qu’infenfibles aux attraits
des fexes pendant l’automne, & l ’hiver
les oifeaux font, parmi les animaux, du
nombre de ceux fur qui ils agiffent en un
temps marqué, avec plus de force, Si en
qui ils produifent de plus grands effets.
Les facultés dont je viens de parler dépendent
moins de la volonté que du me-
chanifine; elles font, en quelque forte,
les effets d’inftrumens que l’animal porte
en lui-même, Se qui néceffitent fes aûions.
fans fon choix ; mais celles qui émanent
des fens, Sc dont il me refte à traiter ,
ont une relation immédiate Si intime avec
la volonté; elles appartiennent en propre
à l’animal libre de fe déterminer, Si fon
choix pour l’action à laquelle il fe décide ,
forme fon caractère.
Les yeux plus grands à proportion que
ceux des autres animaux, places plus favorablement
, l’addition de deux membranes,
une externe qui modifie .les rayons lumi-
neux, une interne qui tranfmet immédiatement
leur impreflion au nerf optique dont
elle eft une expanfion, la force des autres '
membranes, la groffeur des nerfs optiques 8i
le volume de leurs couches, affuroiènt aux
oifeauxla fupériorité du côte de la vue furies
autres animaux dont l’organe eft moins travaillé
: la facilité de s’elever, de dominer fur
un vafte horifon, d’y découvrir tous les objets
fans que leur ombre réciproque nuife a
les découvrir, la prérogative d embraffer
par la pofition des y eu x , la circonférence de
l’horifonSe de porter les regards fur tous les
points rendent la vue des oifeaux, etendue,
perçante, exquife, & les foins pris par la
nature pour en perferiionner l’organe ,
tandis qu’elle a moins travaille ceux des,
autres, fens , font une preuve non équivoque
que celui de la vue dans les oifeaux
eft le fens dominant,celui qui leur communique
les impreflions les plus multipliées j
les plus variées Se les plus àriives ; celui,
par confisquent qui ale plus d ariion Air eux,
qui détermine plus puiffamment leur volonté
Se qui décide davantage de leur cararière,
Les cavités creufées à l’intérieur de la
partie fupérieure du bec, l’ouverture des
narines dans ces cavités, les nerfs qui fe
dirigent vers ces Anus , leurs rameaux qui
en tapiffent les parois , ceux qui de ces
cavités qu’ils percent, pénètrent vers le
palais, qui s’y epanouiffent Sc qui affocient
le goût à l’odorat, ne permettent guères
de douter que ces deux fens ne foient
beaucoup moins imparfaits dans les oifeaux
qu’on ne le croit communément ,
Sc le choix des oifeaux entre les alimens
qui leur font offerts , paroît moins dé- '
pendre de l’organe du goût en lui-même
que de fa connexion avec celui de l’odorat.
Le fens de l’ouïe dénué de conque qui
rafl’emble les rayons fonores, Sc plus Ample
en plufieurs objets que dans les autres
animaux-, n’en paroît pas moins parfait
dans les oifeaux qui prennent l’épouvante
Sc la fuite au bruit le plus léger , lors
même qu’on ne fça’uroit foupçonner qu’ils
foient avertis du danger par le fecours de
la vue , Sc qui, par le plaifir qu’ils pa-
roiffent prendre à s’entendre Sc fe répondre
dans leurs chants, prouvent que, fenfibles
aux modulations Se à l’harmonie , ils ont
le fens de l’ouïe aufii délicat que fin. Mais,
couverts de plumes dont la moleffe Se
l’épaiffeur amortiffent l ’effet du contaft,
n’ayant dénués que des parties dures ou
couvertes d’écailles, ou d’une peau naturellement
épaiffe, endurcie par le frotement,
quoique leurs pieds foient divifés en doigts
articulés , compofés de phalanges, il eft
probable que le toucher eft le fens par
lequel ils reçoivent moins d’impreffions Se
des impreflions moins diftinries.
Des animaux en qui la vue eft le fens
dominant, q u i, par leur pofition la plus
ordinaire, découvrent une vafte étendue,
qui font invités tour-à-tour Sc appellés par
les objets variés qu’ils découvrent , qui
changent de place enfe jouant plutôt qu’avec
peine, de tels animaux dévoient, comme
le font les -oifeaux, fe porter fouvent d’un
lieu à un autre , s’arrêter à chaque endroit
peu de temps, être beaucoup plus en mouvement
qu’en repos , aller Sc revenir Sc
parcourir tous les points de l’efpaçe ; leur
Hijloirc Naturelle. Tome. I.
cararière & leur extérieur dévoient être
ceux de l’inconftance & de la légèreté Sc
auffi de la gaieté , parce que les objets
nouveaux qu’ils découvrent les tiennent
toujours occupés , les diftraient 8e renouvellent
à chaque inftant leurs defirs Sc
leurs jouiffances : tels font en effet les
oifeaux ; images d’un être- libre , indépendant
, léger, fatisfait, qui jouit fans ceffe
Sc qui vole d’ un plaifir à un autre. L’inconftance
&lalégèreté, le plaifir de prendre
du mouvement font tout pour eux ; ce
plaifir où ce befom eft fi grand en eux
qu’il leur fait oublier jufqu’à la perte de
leur liberté, qui fembloit devoir leur être
plus chère qu’à aucun des autres animaux ;
bornés à la cage étroite dans laquelle ils
font enfermés , la plupart, fur - tout les
plus petits, qui, dans l’état naturel, font les
plus ariifs, fe font en peu de jours à la
captivité, Sc parcourant fans celle tous les
points d’un efpace é tro it, s’exercent auffi
librement Sc d’un air auffi fatisfait, expriment
auffi fouvent leurs plaifirs par leur
chant, que quand ils fe jouoient dans les
airs fans limites pour eux. Il n’y a que
quelques efpèces qui, naturellement plus
pofées ,confervent toujours le fouvenir de
leur liberté , dont cependant elles faifoient
moins d’ufage, Sc qui ne peuvent fe faire à
la captivité.
Mais des images qui fe renouvellent &
fe fuccèdent, fe nuilent les unes aux autres
Sc fe détruifent réciproquement ; des objets
qu’on ne connoît que par un coup d’oeil
paffager fur leur furface , ne font que des
impreflions très - peu profondes. Auffi les
oifeaux ne paroiffent - ils avoir que des
perceptions légères Sc fuperficielles Sc fort
peu de mémoire. En liberté , ils ne foup-
çonnent ni ne reconnoiffent les pièges
qu’on leur tend ; échappés par quelque
hafard, ils s’expofent au même danger fort
peu de temps après ; en captivité, ils ne
paroiffent s’attacher ni aux chofes, ni aux
perfonnes , Sc ne contrarier aucun lien
d’habitude. Pétulans dans leurs defirs ,
comme ils font vifs dans leurs mouvemens,
leurs rixes en liberté ou en captivité, font
fréquentes , violentes, momentanées St