monies p ar lesquelles la Terre se met en rapport avec le Ciel
Fils des conquérants, ils reconnaissent l’ascendant des Chinois,
des fils dés vaincus, et la supériorité des arts de la paix sur
ceux de la guerre. « A l’Empire qui est sous le Ciel, paix
suprême! » telle est la devise que l’on voit répétée partout,
dans les temples, sur les murs et jusque dans l’intérieur des
maisons.
L’éducation primaire est compliquée en Chine par la difficulté
de l’écriture, beaucoup plus qu’elle ne l’est chez nous par
ce que, irrespectueux du « Milieu », nous avons nommé les
» chinoiseries » de l’orthographe. En général l’enfant n’entre à
l’école qu’à dix ans, quand « il sait compter, qu’il connaît les
quatre points cardinaux », qu’il s’est imprégné, si c est un
garçon, des préceptes et des exemples contenus dans le oia-
hohio; et si c’est une fille, de ceux qui se lisent dans le Ninhio :
ce sont deux petits livres donnant de courts passages des
vieux classiques, proportionnés à l’entendement du jeune âge.
A l’école on lui met en mains trois livres : le livre des Trois
caractères ; le livre des Cent familles ; le livre des Mille mots .
il apprend ainsi à lire les caractères indispensables. En outre,
on lui enseigne, au moyen du Siahio, par les dits et faits
mémorables duquel il a débuté, « la source du devoir » et la
i rivière qui en est le produit ». C’est là le » Manuel de
l’homme et du citoyen ».
De là il passe, s’il suit la voie des concours, a 1 « enseignement
secondaire », pour finir par les * hautes études ».
Dans toutes les grandes villes, un des principaux édifices
est celui qui renferme les lieux d’examen : il consiste en une
multitude de salles et de cours entourées de cellules pour les
candidats, qu’on y introduit, munis seulement de papier blanc,
d’une écritoire et de pinceaux; des sentinelles empêchent toute
communication entre les étudiants. . . •.
Quelquefois dix ou douze mille individus, même dix-huit,
voire vingt mille (à Tchingtou fou), se présentent à la fois, et,
pendant plusieurs jours, toute cette population reste prisonnière,
occupée à rédiger des essais moraux et politiques, à
commenter des textes choisis dans les livres sacrés, à gloser
sur des propos attribués à Confucius, à composer des sentences
et des maximes en prose et en vers, à résoudre des
questions comme celles-ci :
Pourquoi le caractère d’écriture qui représente la lune est-
il fermé par le bas, tandis que celui qui représente le soleil est
ouvert?
Ou bien à creuser à fond cette phrase de Confucius :
« De quelle manière majestueuse Choun et You n’ont-ils pas
régné sur 1 Empire, comme si cet Empire n’était rien pour eux! »
Ou cette autre phrase du même Confucius :
« En vérité Yao était un grand souverain! Comme il était
majestueux! Le Ciel seul est grand, et seul Yao était digne de
lui! Combien haute était sa vertu! Le peuple ne savait trouver
de mot suffisant pour la louer. »
l i n est pas bien sûr que des « développements » de ce genre
n aient pas été parfois imposés aux futurs bacheliers ou licenciés
de France sur un thème grec ou latin, au lieu d’être « con-
fucien » ; mais la salle de composition comprenait au plus vingt
ou trente concurrents, rarement plus de 50, tandis qu’à la session
de 1897, à Changhaï, les cellules du palais des examens
reçurent 14 000 candidats qui se disputèrent 150 places : d’où
un vainqueur sur 94 combattants !
Il arrive parfois que des candidats meurent d’épuisement
dans leur cellule; dans ce cas, on perce la muraille extérieure
pour y faire passer les cadavres, sans que les autres étudiants
s’en aperçoivent.
A 1 exception des individus appartenant aux castes méprisées,
aux agents de police, aux comédiens, aux barbiers, aux
porteurs de chaise, aux bateliers tankia, aux mendiants, à la
progéniture des rebelles voués à l’infamie, aux descendants
(jusqu à la troisième génération) des histrions, des bourreaux,
des geôliers, des prostituées, tous les Chinois sont admis au
concours ; et même les examinateurs des épreuves ferment volontiers
les yeux sur la première condition des candidats, pourvu
qu’ils aient un domicile fixe.
Il n y a point de limite d’âge : les « enfants prodiges » et
les vieillards, de la vieillesse toute blanche peuvent également
se présenter ; mais les examens sont très sévères, et
moins d un dixième des candidats réussissent à passer du rang
de toungchang ou « étudiant » à celui de sioutsaï ou c talent
orné », qui correspond au grade de bachelier.
Dès lors élevés au-dessus de la tourbe du commun des
mortels, les « talents ornés » ont le droit de revêtir la robe
longue, de chausser des brodequins et de se coiffer d’un
bonnet d’une forme particulière. Sans avoir encore de fonctions
officielles, ils sont devenus presque indépendants de
l’autorité communale et ils constituent une classe spéciale dans
l’État.M
alheureusement pour eux et pour la Chine, il y a beaucoup
trop de titulaires de ce premier degré facile à conquérir.