conséquent parallèle aux rangées du système sinique; quant à
ses plus hauts sommets, ils s’alignent aussi dans le même sens
que ceux du continent voisin.
Son massif central, le Limou, ce qui signifie la « Mère des
Indigènes », s’épanouit en contreforts, desquels l’un a nom
Wouchich chan, autrement dit le « mont aux Cinq Sommets »,
ou le mont aux Cinq Doigts : donc un Pentédactyle, comme le
Taygète du Péloponèse; les poésies chinoises comparent l’île
à une main dont les doigts * jouent avec les nuages pendant
le jour, et vont cueillir, la nuit, des étoiles jusque dans la voie
lactée ».
Elles parlent aussi de neiges qui couronneraient ces montagnes.
Toutefois, sous ce climat tropical, des neiges ne pourraient
séjourner pendant toute l’année que sur des cimes ayant
au moins 5 000 mètres d’élévation : or un pareil massif se dressant
à moins de 80 kilomètres de la côte en des parages où
passent incessamment les bateaux à vapeur, serait le principal
point de repère pour les marins et l’un des spectacles les plus-
admirés des voyageurs.
Il fallait donc s’attendre à ne trouver dans Haïnan, toutes
explorations faites, que des monts visités seulement, sous ce
ciel tropical, par des neiges exceptionnelles, telles qu’elles
tombent et demeurent fugitivement sur des cimes de 1 500 à
1 600 mètres.
C’est ce que Ton constate par à peu près dans les t Cinq
Monts », les c Cinq Doigts », les « Sept Sommets », le Limou,
qui est le Ta chan ou t Grande Montagne » dès Chinois : on
attribue tantôt 1 000 mètres, tantôt 1 200, tantôt 1 500, et 1 660
au sommet le plus haut ou supposé tel jusqu’à ce jour.
De ces * Alpes » granitiques et schisteuses descendent des
torrents en foule, dont le plus long, le plus abondant, dans la
région du nord-est, s’appelle tout simplement le Ta kiang, le
Grand Fleuve; on l’appelle aussi le Tou ho; son cours doit
dépasser 200 kilomètres.
Haïnan se range au nombre des terres chinoises les moins
connues à l’aurore du xx® siècle. Si ce n ’est aux abords du
détroit, les côtes, elles, n’ont été que sommairement relevées par
les marins, les rivières ne sont pas débrouillées, ni les monts
gravis.
Ovale irrégulier de 200 kilomètres de pourtour, 1’ « Ile au
sud de la mer » a 300 kilomètres de grand axe, 200 kilomètres
de petit axe, et quelque peu plus de 3 millions d’hectares : à
peu près Taire de notre Bretagne, ou l’étendue de la Belgique,
et plus que la Sardaigne ou la Sicile; et quatre fois la Corse,
avec une population de peut-être 1 800 000 habitants, ou 60 personnes
par 100 hectares.
Haïnan est d’une très grande richesse en ressources naturelles
: ses montagnes ont des gisements d’or, d’argent, de
cuivre, de fer et d’autres métaux; des sources thermales jaillissent
dans ses vallées et dans ses plaines, principalement
sur le versant oriental; de vastes forêts fournissant du bois
de construction, si rare dans le reste de la Chine, croissent sur
les pentes des monts. Des animaux sauvages vivent encore
dans la sylve et la sierra, sangliers, grands cerfs, daims, antilopes,
singes de plus d’une espèce; le rhinocéros et le tigre,
autrefois présents, sont considérés comme absents, mais les
serpents n ’ont pas disparu, quelques-uns très venimeux, d’autres
très forts, capables même, dit-on, d’engloutir un cerf.
Le porc est le compagnon de toutes les chaumières, porc spécial,
noir d’échine, blanc de ventre, la panse traînant par
terre : peuple insoucieux, quoique grognon, de deux millions
de têtes, paraît-il.
Sur le penchant des collines et dans les plaines, s’étendent
des bois de cocotiers, d’aréquiers et de palmiers à noix de
bétel; des haies d’ananas séparent les champs, où Ton cultive
la canne à sucre, le papayer, le bananier, le manguier, le litchi,
l’indigotier, le cotonnier, le ricin, le tabac, le riz, la patate, le
sésame, les arachides, les arbres fruitiers de la zone tropicale
et mainte plante appréciée pour le parfum de ses fleurs ou ses
vertus médicinales. Comme le Setchouen et le Yunnan, Haïnan
possède aussi le précieux insecte coccus ■pela., qui produit la
cire blanche.
Les mers environnantes sont très, poissonneuses, et l’on y
pêche des huîtres perlières, ainsi que des tortues dont l’écaille
est très estimée dans le commerce.
Située sur le passage des moussons pluvieuses, Haïnan est
abondamment arrosée ; les arêtes des montagnes, étant orientées
dans le même sens que les courants atmosphériques, ne forment
point barrière entre les climats du nord et du sud ; sauf
quelques contrastes locaux entre les rives des versants opposés,
elles ont une température élevée que modèrent des brises
marines, et les deux saisons de la mousson pluvieuse du sud-
ouest et de la mousson sèche du nord-est s’y succèdent régulièrement.
D’abondantes rosées rafraîchissent les plantes pendant
la période des sécheresses, et la campagne garde toujours
son éclatante verdure. Par la fraîcheur de la végétation, les
paysages du littoral, surtout au nord et à l’ouest, ressemblent
à ceux de l’Europe occidentale, mais les espèces montrent que