la muraille a 8 kilomètres de circonvallation, fut plus puissante
autrefois. Elle avait rang de capitale, quand l’empereur Yu la
mit à la tète d’une des neuf provinces entre lesquelles il divisa la
Chine, voici bien quatre mille ans passés : une inscription placée
sur la porte occidentale de la ville rappelle son ancienne gloire.
On se trouve ici dans l ’une des régions classiques de la
Chine; les noms des villes, des montagnes, des rivières de la
contrée se lisent à chaque page des annales les plus anciennes,
et l’on est tout près de la patrie de Confucius, pas très loin de
la ville sainte, Taïngan fou.
Il n’y a même pas vingt kilomètres, d’ouest en est, entre
Yentcheou et la célèbre Kioufao, bâtie à 216 mètres d’altitude,
au pied occidental du massif du Chantoung, sur un affluent de
la i Rivière des Transports ».
Kioufao, la « Jérusalem des Chinois », en tant que patrie de
Confucius, leur plus grand sage, honoré comme un Dieu, est
peuplée en partie par la descendance de ce Koungfoutse, la
famille des Koung: aux quatre cinquièmes de ses 25 000 habitants,
d’après Richthofen, pour la moitié seulement, dit Hesse
Wartegg. Ces Koung sont pour la plupart des hommes robustes
et bien faits; mais il ne paraît pas qu’un seul membre.de cette
famille si nombreuse et si respectée se soit distingué d’une
manière exceptionnelle pendant les soixante-seize générations
qui se sont succédé depuis que l’ancêtre commun a donné des
lois morales à l’Empire, On cite pourtant quelques Koung
devenus d’importants personnages et un grand savant d’il y
a 2100 années, Koung ngan Kouo. Contrairement à Tordre chinois,
la famille de Confucius reste noble à toujours, au lieu
des douze générations qui mettent fin à un nom de noblesse,
et son chef a le titre de duc, il est puissant, riche, et le « noble
des nobles » de par ses 2 700 ans bien prouvés de généalogie
héraldique. Qui oserait en cela se mesurer avec lui? Qui peut
montrer un pareil nombre de * quartiers » authentiques en
Europe?
Le temple principal, élevé à la mémoire de Confucius, l’un
des plus splendides et des plus vastes qu’il y ait en Chine,
renferme une série d’inscriptions datant de toutes les dynasties
depuis deux mille ans ; des vases, des ornements en bronze,
des boiseries sculptées ornent les galeries, les parois et forment
un musée complet de l’a rt chinois; des arbres antiques,
quelques-uns plus que millénaires, cyprès, cèdres,. ! pins
d’énorme taille, croissent, toujours respectés, dans le parc
environnant. L’un d’eux, cyprès au tronc noueux, fut planté
par Confucius lui-même; il est mort, mais de sa souche,
entourée d’une balustrade en pierre, devant « la Porte du front
d’or » monte un rejeton qui a déjà quatre ou cinq pieds de
tour. Ce parc, ce temple, ou plutôt cet ensemble de temples, de
pavillons, de portes triomphales, de colonnes sculptées de bois,
et de ce qui est rare en Chine, de pierres, ces inscriptions
1 pompeuses », tous «eux qui ont visité le « Temple de Confucius
» s’accordent à dire que c’est là une des merveilles de
l’Empire des Fleurs.
Dans les appartements particuliers du duc, prince de la
famille, se voient des objets précieux ayant appartenu au grand
moraliste, urnes, trépieds, manuscrits ; le domaine de ce personnage,
fief direct de l’Empire, n’a pas moins de 66 000 hec-
Quand les rebelles Taïping pénétrèrent dans Kioufao, ils
respectèrent le temple, le palais et leurs trésors; ayant appris
que le mandarin du lieu était de la famille du philosophe, ils
s’abstinrent même de le tuer, par exception spéciale à leur règle
constante.
Non loin du temple s’élève la haute butte funéraire qui a
probablement valu à la ville son nom de Kioufao ou « Tertre
contourné » et qui recouvre les ossements de Confucius; tout
autour et sur une vaste étendue de pays, s’étend la nécropole
familiale. D’autres tombes d’empereurs et de grands personnages,
dont quelques-uns vécurent avant Confucius, se
voient aussi dans les environs.
Enfin, à une vingtaine de kilomètres au sud-sud-ouest,
près de la petite ville de Tsiou hien, un autre cimetière, dont
les chênes et les cyprès ont fait une forêt sacrée, reçoit depuis
plus de vingt-deux siècles les corps de tous les descendants
de Mengtze ou Mencius, le plus célèbre disciple de Confucius .
disciple non immédiat, puisqu’il naquit un siècle et demi
environ après son maître. .
Vingt-deux siècles de durée familiale à Tsiou hien ! Et vingt-
sept à Kioufao! C’est donc en Chine que les physiologistes
pourront étudier à fond ce qu’ils cherchent vainement en
Europe, des familles qui se soient maintenues depuis plus de
deux mille années : il est vrai que, lors de chaque mariage,
elles se mêlent au sang étranger, puisque l’union entre époux
d’un même nom de famille est absolument interdite dans le
Royaume Central. En 1865, lorsque Williamson visita Tsiou
hien, le chef de la famille, descendant de Mengtze de mâle en
mâle, appartenait à la soixante-dixième génération.
La « Jérusalem de la Chine », incroyable contradiction,