la rive droite du grand fleuve et appartient presque entièrement
au bassin du Toungting ho, qui est le court déversoir
du Toungting hou : ho, comme on ne l’ignore pas, c’est fleuve,
rivière ; et hou, c’est lac.
Vaste de 216 000 kilomètres carrés (approximativement), il
passe pour contenir 21 millions d’hommes, soit 97 au kilomètre
carré, peuple vivant presque exclusivement de l’agriculture
— ainsi que dans toute la « Fleur du Milieu » — sur un sol
fécond dans les vallées, infécond sur les pentes déboisées. Mais
il est à supposer que dès l’établissement du réseau des chemins
de fer, l’industrie s’emparera<de cette province très heureusement
pourvue en trésors miniers : comme houille d’abord, en
un bassin évalué à 56 000 kilomètres carrés qui déborde au sud
dans le Kouang oriental (Kouangtoung); le fer, le cuivre, l’étain,
et les métaux de moindre usage abondent.
Les « Hounanais », réduits en nombre par la rébellion des
Taïping, qu’on trouve à l’origine de tant de ruines, ne sont
pas tous de race et de civilisation chinoises ; il y a parmi eux
beaucoup de Yao jen, de la nation des Miaotze, principalement
autour des cols des Nan ling.
Tous les voyageurs s’accordent à dire que les gens du
Hounan sont les plus Européanophobes de tous les * Enfants
de Han ». Gela vient de ce que, ainsi que la plupart des habitants
du midi de la Chine, ceux bien entendu qui n’appartiennent
pas aux aborigènes non chinois, ils se regardent comme
de meilleure souche que leurs frères du nord, en tant que
n’étant croisés ni de Mandchoux, ni de Mongols. En conséquence,
ils estiment qu’ils ont pour devoir de conserver dans
toute leur intégrité, les idées, moeurs et traditions de l’Empire;
de cette persuasion à la haine des étrangers, le pas est facile à
franchir.
L’existence dans le Hounan d’une puissante aristocratie
terrienne, enrichie par le commerce, explique la proportion
exceptionnelle des mandarins natifs de cette contrée, que l’on
rencontre dans toutes les parties de l’Empire, et pour le plus
grand mal de l’Empire.
La capitale du Hounan, Tchangeha, borde le Siang, qui
est avec le Yuen le principal tributaire du grand lac Toungting.
Le Siang n’est pas une rivière médiocre : parti de la province
de Kouangsi, il parcourt 700 kilomètres et finit par avoir
au delà de 500 mètres d’ampleur moyenne. Trois cent mille
habitants, suppose-t-on, vivent dans la cité murée, de près de
9 kilomètres de tour, et dans les faubourgs qui la débordent.
En face, sur les pentes d’une colline, s’élève le collège de Yolo,
un des plus célèbres de la Chine, où plus de mille jeunes gens
de vingt-deux à vingt-cinq ans étudient en particulier, se bornant
à questionner leur professeur, quand ils se heurtent à
quelque difficulté dans leurs études.
En aval de Tchangeha, un chaînon de granit, que traverse
le Siang, a donné une certaine importance industrielle à la
contrée : la pierre est utilisée pour la fabrication de dalles et
de mortiers que l’on expédie au loin, et les argiles du granit
décomposé sont employées dans les nombreuses poteries de
Toungkouan, où l’on fabrique des tuiles vernissées de toutes
couleurs et couvertes de dessins bizarres, qui servent pour les
toitures des temples et des maisons particulières dans le
Hounan et les provinces voisines.
Plus bas, un peu en amont de l’embouchure du Siang,
Siangyin est le port supérieur du lac. Yotcheou, où le lac se
déverse dans le fleuve, a pris de l’importance comme escale
et entrepôt, mais n’est pas aussi considérable que pourrait le
faire présumer son heureuse position au point de rencontre de
deux voies commerciales telles que le Yangtze et le Siang.
Dans cette région, le marché de Hankoou attire tout le mouvement
des échanges. Toutefois l’ouverture du port de Yo-
teheou au commerce direct avec l’étranger ne peut manquer
d’accroître l’importance de cette ville si bien située.
L’activité commerciale, aux parages du lac Toungting, est
tout à fait extraordinaire. Comme l’explique un des rapports
de la Mission Lyonnaise, on est effrayé en songeant au nombre
de jonques qui circulent sur les canaux du grand delta formé
par les rivières qui se jettent dans le lac. C’est par milliers que
l’on chiffre les jonques, par centaines de milliers la gent batelière,
par millions de kilogrammes le tonnage effectif de marchandise,
circulant dans tous les sens. On dirait que c’est
pour mieux noyer les éléments de calcul que les grandes artères
de la province convergent dans l’étroit chenal de Lingtse keou,
en y amenant leur énorme contingent de navires, et le riz, le
bois de construction ou d’ébénisterie, le charbon, le sel, le
sucre, le coton brut ou filé, les cotonnades indigènes, les
huiles fluides ou concrètes, les graines oléagineuses, le thé,
l’opium, les * médecines », les fibres de palmier, les cordages,
les métaux, la matière tinctoriale, tous les objets si variés de
l’industrie chinoise.
Si au lieu de le descendre on remonte le Siang à partir
de Tchangeha, l’on arrive à l’une des métropoles de la Chine,
à l’une de ces villes auxquelles on attribue, presque toujours
à tort, au moins un million d’âmes.
Siangt’an est située, ainsi que son nom l’indique, sur un
rapide de la rivière Siang, que peuvent néanmoins remonter