places fortes des mahométans pendant la révolte des Doun-
ganes; leurs ancêtres l’occupaient depuis plus d’un millier
d’années, sans que le gouvernement chinois eût tenté de les en
déloger. Ninghia, le chef-lieu de cette partie du Kansou, est
bâtie à 7 kilomètres environ du Hoang ho, dans le pays où la
Grande Muraille, cessant de longer la rive gauche du fleuve,
passe sur la rive droite pour limiter au sud le territoire des
Ordos. Comme entrepôt entre la Chine et la Mongolie, cette
cité eut jadis quelque puissance; elle fut même le chef-lieu
d’un royaume au Xe et au xie siècle. Ruinée par Djenghiz khan,
elle se rebâtit, et ses pagodes, ses hautes murailles en briques,
entourées de marais, lui donnent un aspect très imposant;
mais à l’intérieur les rues sont étroites, tortueuses, et les
maisons partiellement abandonnées.
Au nord-est de Ninghia, dans la presqu’île sablonneuse
des Ordos, point de villes, mais quelques restes de villes. Ainsi,
à 30 kilomètres au sud du fleuve, on voit encore parmi les sables
les vestiges d’une cité de plus de 8 kilomètres de côté dont les
remparts n’avaient pas moins de 15 mètres d’épaisseur : entre
ces murs il n’y a plus que la dune, la solitude, et les anciens
puits y sont comblés.
Actuellement, en dehors de la vallée du fleuve, la contrée
des Ordos est en grande partie abandonnée; ici aussi les
insurgés dounganes ont fait « merveille » ; ils ont même détruit
les campements des Ordos mongols, et les bestiaux abandonnés
sont redevenus sauvages ; boeufs et vaches ont perdu
l’air stupide que leur avait donné la longue servitude et reconquis
les moeurs de la vie libre. En l’espace de deux ou trois
années, la transformation était devenue complète : à l’approche
de l’homme, ces animaux prenaient la fuite à toute
vitesse, et les chasseurs avaient à les atteindre presque autant
de peine qu’à chasser l’antilope. Des chameaux, des chevaux
vivent aussi en bandes sauvages dans la steppe; mais les
brebis ont été dévorées par les loups. Lors du voyage de Prje-
valskiy, en 1871, les seuls visiteurs du pays des Ordos étaient
des marchands qui venaient y prendre des chargements de
réglisse, l’une des plantes caractéristiques de cette région de
la Mongolie.
En somme, il n’y a peut-être pas plus de 60 000 habitants
dans la boucle des Ordos, et rien à voir, sinon les ruines de
Bora balgassoun et de Tsagan balgassoun, dans le sud-ouest de
la péninsule, près de la Grande Muraille, et celles de Tokhoto-
khoto (en chinois : Tontchen), dans le nord-est; plus les trois
campements sacrés qui se font gloire de conserver des reliques
du grand héros mongol, Djenghiz khan; « saints des saints »
dont le principal, qui a nom Ika Edjen Khoro, est confié à la
vigilance de six cents familles mongoles. Comme de juste,
toutes les ruines des Ordos, villes antérieures au conquérant,
passent pour avoir été des cités fondées par lui.
Mais si les Mongols sont en décadence sur le plateau des
Ordos, les Chinois se répandent de plus en plus le long du
Hoang ho, qui est le gigantesque fossé de cette redoute. Les
villes riveraines n’ont guère d’autres habitants qu’eux. La
plus considérable se trouve dans la partie de la vallée qui
boucle la presqu’île au nord-est : c’est la Bitchoukhaï des
Mongols, la Baotou des Chinois, à 7 kilomètres de la rive
gauche, dans une riche campagne, au milieu d’un cercle de
villages également chinois, peuplés d’agriculteurs. Baotou,
dont l’enceinte carrée a plus de 3 kilomètres de côté, fait un
très grand commerce avec la population des plateaux et possède
des fonderies. A 50 kilomètres à l’est, une autre ville, de
construction récente, s’élève près de la rive septentrionale :
c’est Tchagan kouren ou « l’Enceinte Blanche ». Bâtie par les
Chinois depuis le peuplement de la Mongolie inférieure, elle
n’a pas d’égale dans l’Empire pour la propreté, la largeur des
rues, la régularité des maisons : quelques-unes de ses places
sont ombragées d’arbres. Tchagan kouren, située près du coude
nord-oriental que forme le Fleuve Jaune autour de la péninsule
des Ordos, est un des lieux le plus fréquemment choisis par
les caravanes pour la traversée du Hoang ho. Au sud de la
Grande Muraille, dans la partie de son cours où le fleuve,
rentré dans la Chine proprement dite, sépare les deux provinces
du Chensi et du Chansi, —■ Chensi, la « Frontière Occidentale
» ou les « Défilés Occidentaux » ; Chânsi, « l’Occident
Montagneux », — le principal endroit de passage est au défilé
que domine du haut d’un rocher la ville forte de Paoté (dépendante
du Chansi) : en cet endroit, le courant a seulement
400 mètres de large.
Les villes qui se sont élevées en territoire des Chinois de
Chine, tout au long de la voie historique suivie de tout temps
entre les deux coudes du Hoang ho à Lantcheou fou et à Toung
kouan, ces villes, disons-nous, ont pris une importance beaucoup
plus grande que les cités du nord, situées sur les confins
du désert. Les principales étapes de cette route du sud, dans
la vallée du King ho, grand tributaire gauche et comme seconde
branche mère du Weï ho, sont Pingliang fou, qu on dote de
60 000 âmes, Kingtcheou et Pintcheou, celle-ci entourée d’arbres